Beaucoup d’entre vous se demanderont sans doute où ce groupe est allé pêcher son nom. Après tout, qui aurait l’idée un peu grotesque de se baptiser ESPRIT D’ESCALIER, à moins de faire partie de la mouvance psychédélique francophone des années 70 ? Tout simplement des musiciens qui de leur vision, adoptent une attitude qui justement, va à l’encontre même de leur nom. Car avoir « l’esprit d’escalier », c’est manquer de répartie, et ainsi, trouver la réplique adéquate à une pique lancée…une fois arrivé en bas de l’escalier, lorsqu’il est trop tard.
ESPRIT D’ESCALIER me manque justement pas de répartie, d’où l’ironie de ce nom. Après un EP et un full-lenght, ce quatuor orléanais nous offre donc une nouvelle tranche de vie, quelque part entre l’hédonisme progressif et la précision Djent. D’ailleurs, le laïus promotionnel n’hésite pas à les réserver aux fans de HAKEN ou PAIN OF SALVATION, ce qui peut sembler pertinent, mais qui reste assez loin de la vérité artistique révélée ici.
ESPRIT D’ESCALIER est beaucoup plus qu’un groupe que l’on vend au plus offrant. Pour être honnête, sa musique est si riche et complexe qu’on ne peut pas vraiment le restreindre à un public particulier, tant son approche plurielle nous aiguille sur toutes les pistes du Progressif classique et moderne. Et pour utiliser une formule consacrée, je dirais qu’ESPRIT D’ESCALIER c’est le « Progressive Metal in a nutshell ».
Evidemment, en à peine plus de vingt minutes, il est toujours difficile de convaincre, surtout lorsqu’on évolue dans des eaux troubles. Quatre morceaux pour que les fans de Progressif s’accrochent à la barre est une tâche complexe, mais les quatre musiciens s’en acquittent avec une facilité déconcertante.
Comment ?
En conférant à chaque piste une âme, une personnalité, et plus particulièrement, un son.
Ainsi, le premier single, « The Shroud » aux cocottes de guitare mutines en intro symbolise tout ce que le Metal Progressif de premier choix est devenu ces dix dernières années. Agressif, souple, fluide, mais accrocheur, strié de mélodies prononcées, d’arrangements fouillés, ce Progressif-là est une mine de plans incroyables, quelque part entre CYNIC, PORCUPINE TREE, WASTEFALL et HAKEN.
Matthieu Couffrant (batterie), Vincent Lechner (basse/chœurs), Baptiste Bois (guitare/claviers/chœurs) et Renaud Rabusseau (guitare/chant) nous proposent donc un court voyage au cœur de la cité, avec des étapes fabuleuses entre les étoiles et le sol, entre lumière aveuglante et pénombre troublante, évitant avec un panache incroyable toutes les figures imposées du genre tout en ciselant des postures individuelles bluffantes. « The Shroud », porte d’entrée grande ouverte, vous informe immédiatement sur la faune que vous allez croiser une fois dans le château. Ses parties de guitare lumineuses, ses contretemps efficaces, et sa production immaculée en font l’un des morceaux les plus fascinants de ce mois d’octobre qui connait enfin la douceur de la pluie. Synthétisant des décennies de Metal évolutif, le single se pose en accueil en grandes pompes, avec ses accès de colère, ses allusions à MESHUGGAH, mais surtout, ses dérivations incessantes, et ses changements d’humeur en version bipolarité contrôlée.
Le reste du tracklisting se pose au même niveau. On soulignera l’émotion dégagée par le chant apaisé de Renaud Rabusseau, qui lorsque les arabesques orientales se frayent un chemin sonne comme du MYRATH européen, et évidemment, l’incroyable boulot abattu par une section rythmique en parfaite osmose, qui tisse un canevas basse/batterie aux mailles fines, et aux détails ouvragés.
Loin de l’emphase la plus élitiste du créneau, Thresholds sans vulgariser le propos, le rend plus abordable aux néophytes et autres amateurs occasionnels. Toujours puissant, toujours modulé, entre quiétude et colère larvée (« The Burden »), entre pureté harmonique et dissonances perturbantes, ce nouvel EP fait son chemin, et finit par être adopté à la majorité.
D’autant que le groupe nous offre un diptyque de fin totalement irrésistible. Un diptyque qui profite d’un extraordinaire travail sur le son (mixage par Yann Ménage, batteur d’ALTESIA, et mastering par Lucas de la Rosa) pour que chaque note respire, que chaque frappe de caisse claire ait un écho naturel, et que chaque mouvement de basse sinue comme un serpent dans les hautes herbes.
Superbe EP qui donne envie d’en écouter plus, et qui annonce un album complet à venir. Mais ne vous réjouissez pas trop tôt, puisque ce second chapitre ne verra le jour qu’en 2025. D’ici là, vous aurez toujours ces quatre morceaux pour ne pas oublier ESPRIT D’ESCALIER, qui est finalement la réplique la plus percutante lancée à la face de ceux qui pensent encore que le Metal Progressif est le style le plus pédant de la galaxie Rock.
Titres de l’album:
01. The Shroud
02. The Burden
03. The Struggle Pt. I (The Source of our Elation)
04. The Struggle Pt. II (Fiending for New Worlds)
Merci pour cette superbe chronique. Cela nous fait extrêmement plaisir de voir que notre intention artistique a été saisie avec autant de finesse <3
Pardon pour les fautes, mais quitte à écouter ce genre de trucs, Anna von Hausswolff le faisait beaucoup mieux il y a 10 ans. C'est ce qu'on appelle l'avant-garde je suppose.
05/07/2025, 06:51
Le problème de de Kayo Dot c'est qu'il dépend de l'envie du moment de Toby Driver et de qui l'entoure, tu peux avoir un album de drone/post-rock suivit d'un album de death metal, il n'y a pas de groupe et aucune identité. C'est dommage parce(...)
05/07/2025, 06:47
Merci à Clawfinger pour ce grand moment de transgression validée par l’ordre moral dominant. C’est rassurant de voir que la “rébellion” moderne consiste à tirer sur une cible usée jusqu’à la corde, avec des punchlines dignes (...)
04/07/2025, 07:16
Il tourne pas mal chez moi ce disque, et c'était un vrai plaisir de revoir le groupe live récemment après les avoir un peu mis de côté. Un autre concert en tête d'affiche ne serait pas de refus !
03/07/2025, 16:57
Morceau décevant et sans surprise. La présence de Chris Kontos dans le groupe y fait pour beaucoup dans mon intérêt pour ce retour, mais pour le moment bof.
03/07/2025, 16:47
Je n'ai jamais aimé ce groupe, mais j'étais passé devant durant un Hellfest et en effet c'était juste insupportable toutes ces harangues (littéralement toutes les 10 secondes). Moi je m'en beurre la raie, mais pour les fans ça doit &ec(...)
03/07/2025, 12:55
Vu à Toulouse et je n'ai pas du tout accroché, pourtant vu 2 ou 3 fois depuis 2005. Et j'avais bien aimé. Rien ne surnage, ça bastonne mais pour moi aucuns titres ne sort du lot.Par contre j'ai adoré Slapshot
02/07/2025, 16:01
Votre article sur le kintsugi est un véritable hommage à l’art de reconnaître la beauté dans la fragilité et les cicatrices : mentionner son origine au XVe siècle et sa philosophie wabi‑sabi renforce(...)
02/07/2025, 15:38
@Abrioche91 : la canicule t'a trop tapé sur la tête, mon pauvre vieux. Parce que se faire à répondre aux trolls, je n'avais plus vu ça depuis VS.
02/07/2025, 12:25
@Ultra Pute, t'es bien limité comme garçon. Et tu dois sacrément bien te faire chier pour venir commenter connement ce que les autres écrivent.Moi aussi, j'aime bien les commentaires gratuits (la preuve) mais je suis surtout là pour commenter l&(...)
02/07/2025, 08:50
Pas trop mal dans l'idée.Vocalement on s'y tromperait aussi.A voir sur tout l'album, le précédent, mis à part l'opener, m'avait bien déçu
01/07/2025, 15:38
ça tartine ! bien cool cool cette grosse basse @niquetoncul oui ça doit te changer de Jinjer
01/07/2025, 14:19