Les trolls, sur le net, font partie de cette catégorie de nuisibles qui n’ont absolument rien à offrir, mais qui le donnent quand même, au détriment des créatifs qui peuvent compter sur leur soutien non demandé pour argumenter sottement de façon unilatérale. Autant dire que dans le meilleur des cas, ils peuvent être drôles, mais que le plus souvent, ils polluent le système, s’agrippant à leurs victimes comme des vampires au cou des leurs, suçant la substantifique moelle dont ils sont entièrement dépourvus pour continuer à vivre…A l’inverse, le TROLL musical est une entité plutôt discrète, qui se montre très créative dans son domaine, mais qui avait préféré jusqu’à présent le confort douillet de l’underground pour s’exprimer, jusqu’à ce qu’un label un peu plus finaud que la moyenne ne les en extirpe. Grand bien leur en prit, puisque l’entité en question s’avère relativement douée dans un domaine plutôt confiné, et réservé aux amateurs de lourdeur et d’oppression, qu’il est assez difficile de satisfaire par de l’inédit. Et cet inédit en question, c’est ce premier album, éponyme, paru il y a déjà deux ans, que les américains de Shadow Kingdom ont eu la pertinence de sortir à nouveau en format tape, histoire de contenter les amateurs trop occupés pour fouiller. Troll, le LP, a donc déjà connu une première jeunesse en octobre 2016, à titre d’auteur, avant de se voir offrir dès le mois de mars une seconde, ce qui vous permettra donc d’apprécier les idées de ce combo de Portland qui n’en manque pas. Des idées qui s’expriment latéralement, mais aussi verticalement, puisque les musiciens pratiquent une sorte de Crossover savoureux entre Doom appuyé et Stoner dégagé, obtenant de fait de nouvelles fragrances, que le BLACK SABBATH originel avait déjà testées sur ses essais les plus ouverts. Convaincant ? Pour le moins, mais surtout envoutant et entraînant, ce qui n’est pas les moindre des qualités pour un groupe qui occupe une case aussi fermée.
De fait, John (chant), Lou (guitare), Ryan (batterie) et Wayne (basse), ne se veulent pas simple clones d’une génération à l’influence énorme, mais plutôt grands digresseurs devant l’éternel, naviguant au gré de leur humeur d’un chaloupé rythmique à une mélodie épique, empruntant au vocable du progressif de quoi alimenter des compositions alambiquées, mais pas complexes pour autant. Riche, leur musique l’est, mais surtout étonnamment harmonieuse, brisant ainsi le carcan perpétuel d’un Doom qui a du mal à se renouveler, et qui continue de puiser dans le legs des grands maîtres de quoi péniblement avancer. Ici, l’évolution est manifeste, et le son plutôt léger, quoique compact et Heavy, mais aéré par des structures mouvantes qui nous éloignent d’un statisme pénible. On sent que même si les caractéristiques de composition classiques ne sont pas l’obsession du quatuor, ils n’en perdent pas moins le fil pour se perdre dans celui de leur pensée. Mais ils savent surtout travailler leur copie pour dessiner des ambiances au parfum occulte, mais subtilement bucolique (« An Eternal Haunting », à la splendide intro débouchant sur l’un des riffs les plus plombés de la jetée), sans pour autant tomber dans les travers d’un Folk Doom aux embruns fanés. La mélodie est certes une composante importante de leur travail, mais elle est ciselée, et non pas jetée comme simple argument, ce qui rapproche considérablement le gang d’une version southern des plus lourds des doomsters, un peu comme si le CORROSION OF CONFORMITY le plus avenant taillait le bout de gras avec les BARONESS. La synthèse vous sied ? J’en suis fort aise, parce que la demi-heure impartie passe très vite en la compagnie des TROLL, qui ne parlent jamais pour ne rien dire, et qui ne se contentent pas de rabâcher le même discours prémâché que tout le monde connaît.
La composition citée en amont peut aisément passer pour le parangon de leur démarche, tant elle résume à elle-seule toutes les qualités d’un groupe décidé, et sous cette pochette au poil touffu se cache l’un des albums les plus fascinants de ces dernières années, tant il se plaît à faire la jonction entre Birmingham et la Nouvelle-Orléans, sans vraiment choisir son camp. On sent les vapeurs de fumées toxiques des zones industrielles anglaises se purifier au grand air du sud des Etats-Unis, et ce déhanché groove aux éclairs bluesy nous ramène directement à l’orée des années 70, quand les batailles de style n’étaient pas encore devenues des querelles de clocher, et que tout le monde se moquait bien des étiquettes déjà labellisées. Ici, c’est la musique qui importe, et le niveau technique des musiciens, très honorable, leur permet de nous glisser entre les oreilles des plans qui caressent le Blues par son versant le plus abrasif. Les tonalités très Ozzy du chanteur aident à se remémorer le meilleur d’une décennie qui n’a pas fini d’inspirer, et nous permet de respirer sans suffoquer, en modulant ses lignes sans jamais verser dans le pathos ou l’exagéré. Et dès les premières secondes de « The Summoning », le décor est planté, subtilement occulte de par cette guitare aux notes embrumées, et méchamment déviant, au point de nous replonger dans les ténèbres de l’éponyme Black Sabbath, qui avait traumatisé toute une génération de hippies ennuyés. « The Witch » aurait pu servir en suite comme la bande son idéale du film du même nom, tant sa noirceur immaculée nous évoque une forêt damnée, alors que le plus bref et concis « Eternal Death » prend ses distances avec le Doom, pour plus volontiers peindre un tableau de Rock sudiste, à peine perturbé par une assise Heavy bien dosée. Soli propres, rythmique souple mais carrée, breaks bien amenés et motifs fleuris, pour quelques accélérations bien tassés et des surprises intelligemment distillées, le tout enrobé dans une production parfaite pour le créneau (concoctée aux Haywire Recording Studios de Portland par Fester), ce Troll est décidément bien séduisant, et ne nous assomme pas les neurones par une absence de stimulation.
On termine même l’histoire par un dernier chapitre bien écrit, sous la forme d’un conclusif « Savage Thunder », qui provoque l’orage pour calmer la tempête, d’une incantation très anglaise et formelle, lâchant encore une poignée de salves boogie pour un final en crescendo assez bien senti. Comme je le disais donc en préambule, le TROLL musical est l’antithèse parfaite de son homologue virtuel. Il réfléchit avant d’agir, il pense avant de parler, et il compose avant de jouer. Loin d’une simple jam captée pour se soulager, ce premier LP fait preuve de maturité, et laisse augurer d’un avenir pas forcément tracé pour une formation qui a de quoi étonner. Mais nous suivrons son fil de discussion avec passion, pour peu qu’aucun argument sans fondement ne vienne le troubler.
Titres de l'album:
Très cool de découvrir ce groupe ! La présentation est plus fluide mais il faudrait laisser la place à un extrait à mon avis et ça permettrait de mieux rythmer la vidéo.
19/03/2024, 08:17
Perplexe également.Dehydrated et Out of the Body (Out, pas Ovt sans déconner ! C'est quoi leur manie de remplacer les U par des V ?) sans Martin Van Drunen, j'ai même pas assez de curiosité pour écouter ce que ça peut donner.
19/03/2024, 07:52
J'avais aimé le premier Vltimas. Il fait partie de cette tonne d'albums que l'on oublie mais qu'on ressort de temps à autre pour se les repasser et se dire "ah ouais, c'est pas mal" avant de les remettre en place.J'ai écout&eacut(...)
19/03/2024, 07:43
Tant mieux pour ceux qui aiment moi ils me font chier avec cette fétichisation du metal old school.
18/03/2024, 17:37
J'aime bien le principe de réenregistrer des classiques pour voir ce que ca donne avec un son actuel. Le problème est double ici : réenregistrer des morceaux récents n'a que peu d'intérêt, et surtout en me basant sur le titre mis en é(...)
18/03/2024, 13:13
Oui, et non. Dans le sens que s'ils veulent vendre leur compile qui sent très fort le réchauffé, il vaut mieux qu'ils écoutent un minimum la base de fans qui seraient potentiellement intéressés par l'objet (et ils ne sont pas Maiden qui peu(...)
18/03/2024, 08:05
J ai adoré ce film qui m'a fait connaître ce groupe. Depuis je me repasse leurs tubes.
17/03/2024, 14:07
J’ai pris la version cd version digipack plutôt que le vinyle car il y avait 3 titres bonus .trop tôt pour donner un avis mais je ne m’ennuie pas, sans être transcendant mais on peut pas exigeant avec ce groupe et une telle carrière. Cela dit il fai(...)
16/03/2024, 11:55
Bon...Pour l'instant, je ne l'ai écouté qu'une seule fois...Mais dans l'ensemble, j'ai été quelque peu déçu.La faute à un côté Power bien trop présent tout au long de l'album.
13/03/2024, 07:24
groupe de petites gauchiasses qui crisent si on n'emploie pas le bon pronom. FOUR
13/03/2024, 06:17
Commande faite direct au label.Hâte d'écouter les nouvelles versions de The Song of Red Sonja ou The Thing in the Crypt.Meilleure nouvelle de la semaine,Merci pour la chronique en plus hyper favorable
11/03/2024, 15:32
Terrible.Déjà que le EP envoyait sévère dans la veine Wotan, early Blind Guardian ou Manowar, voici l'album !Achat obligatoire
11/03/2024, 14:55
toujours pas de Phobia à l'affiche.... j'y ai cru pour les 25 ans et tout ...
11/03/2024, 07:39