A Compendium of Desperation, Morality and Dick Jokes

The Fat Dukes Of Fuck

25/08/2017

Autoproduction

Pardonnez-moi, j’ai toujours aimé ce qui est en marge. Ce qui sent mauvais, qui pue même, et qui se joue de l’étiquette pour pouvoir imposer son mal-être ou son manque d’éducation. Les laissés pour compte, les borgnes, les éclopés, les sales monstres de foire qu’on exhibe dans des spectacles aussi tristes qu’affranchis de toute morale. Et donc, par extension artistique, le Rock un peu foireux, qui ne joue surtout pas franc jeu, et qui détourne les codes pour loucher vers la bonne et nous l’enlever en douze mesures mal tassées.

Malsain bien sûr, mais ludique, et tout va encore bien. Les JESUS LIZARD, les SONIC YOUTH, les SEX SNOBS, les GIRLS AGAINST BOYS et tous les autres, athlètes d’une troisième ligue qui ne célèbre jamais ses héros de piste, qui en sortent un peu trop souvent devant l’arbitre. Alors, pensez bien que le nouvel album des barges de THE FAT DUKES OF FUCK n’allait pas passer au-dessus de mon radar. J’ai trop aimé suivre les pérégrinations de ces olibrius toutes ces années pour ne pas manquer leur nouveau vol plané en rase-mottes, qui s’annonce tout aussi misanthrope et pourtant généreux que les précédents.

Ils l’ont voulu plus sombre, eux-mêmes l’ont dit, et pourtant, on retrouve cette patte salement rigolarde dans le lardage de riffs abrasifs et dans le fourrage de rythmiques corrosives qui ont fait leur démarque de fabrique. Il faut dire que de leur Las Vegas lubrique, ils voient tout venir, et surtout les tendances qu’ils prennent un malin plaisir à déformer pour mieux les éviter.

Alors, sous quel costume se présentent-ils cette fois-ci ? Des sauveurs du Rock dérangé pétomanes et affolés ? Des pères Noël accros au Meth de l’esprit, qui confondent distorsion et déjection ? Un peu de tout ça, mais ces caméléons étant des adeptes de la transformation incognito, ne comptez pas sur eux pour en dire trop. Pour en savoir plus, mais pas forcément, il faudra écouter.

Et avec plus de cinquante minutes à se poudrer dans le nez, vous avez largement le temps de vous défoncer.

A Compendium of Desperation, Morality and Dick Jokes a été produit par un duo d’experts en blagues salaces et noisy, les DEAF NEPHEWS, qui ne sont autres que Dale Crover, batteur des vilains MELVINS, et le guitar-tech Toshi Kasai. Autrement, dit, c’est une affaire de spécialistes qui ont le canular sérieux dans le sang, et qui connaissent la non-musique sur le bout des dents. Pour autant, ne vous attendez pas à une longue litanie de lourdeur suffocante, mais si vous connaissez les DUKES, vous n’en craindrez rien. Pour leur second longue durée, les végasiens n’ont pas fait les choses à moitié, et ont mélangé dans le shaker de leur folie tous les ingrédients passant à leur portée. Du Rock bien sûr, du Hardcore, pour sûr, du déviant, du dissonant, mais aussi du Thrash, à peine violent, du Metal, du lo-fi gonflé en 32 millimètres, un peu d’Indie, mais surtout, beaucoup d’envie pour signer l’un des LP les plus stimulants de cette rentrée. On y retrouve tous les ingrédients faisandés qui ont contribué à la recette de leur légende, des guitares mutines qui butinent, un chant gouailleur, mais roublard à tout heure, une rythmique élastique qui s’y frotte s’y pique, et évidemment, des thèmes atypiques, comme les inconvénients de pouvoir baiser lorsqu’on conduit un mini-van. Car ces mecs sont drôles, c’est un fait, mais ce sont aussi des instrumentistes à l’aise dans leur rôle. Celui de pourfendeurs de la normalité, qui osent combiner la BO d’un Nintendo Thriller Movie à une ambiance à la FANTOMAS pour quelques mesures bien salaces (« Tasteful Ray », celle-là Mike P. tu ne l’as pas vue venir, même avec Lombardo). Celui de fantômes d’harmonies décharnées, capables de transcender un Blues crépusculaire pour l’habiller d’oripeaux Post Metal transparents révélant une poitrine trouée de balles pas forcément à blanc (« No Single Men », variations sur un même thème de haine pour solo hésitant et divagations cycliques BEATLESiennes de 1969 bien tapées psychédéliques et empêtrées).

Alors, on change de peau comme de monture, et on continue d’expérimenter aux confins des limites entre Rock abrasif et Metal maladif, comme en témoigne un pamphlet aussi acide que définitif tel « The Monotonous Adventures of a Hopeaholic », qu’un HAWKWIND complètement défoncé au LSD aurait pu composer pour des MELVINS juvénilement amusés. C’est tendu comme un anus avant un lavement dans un cirque Gruss, mais bizarrement, ça séduit de ses harmonies un peu étranges, comme un spectacle d’outrance qui irait coucher les gosses après minuit.

Adepte des longues digressions planantes ou aplatissantes, les THE FAT DUKES OF FUCK aiment le gras, et tailler dedans, et baiser bien sûr. Mais surtout nos oreilles qu’ils violent de chœurs Doo-Wop que Zappa n’aurait pas reniés durant ses jeunes années, mais qu’il aurait plaqués sur une guitare bien plus mordante que celle dont il abusait (« Promise Keepers », et sa fausse promesse d’allégresse, qui se termine en impasse feignasse de Post Sub-Pop en parodie cartoon maudit). Mais pas méchants dans le fond, ces marlous nous préviennent quand même lorsque l’effort risque de nous faire du tort, et ruiner nos tympans en martelant de faux accords (« I’ll Tell You When It Hurts », sa basse qui oscille-o-scope, son chant qui se veut plus rancunier qu’un crachat des LIZARD d’un balcon haut perché, et sa guitare qui dissone, résonne et se morfond dans ses notes sans boussole).

Avec tout ça, vous en avez déjà presque pour vingt-cinq minutes de votre vie, mais les gus sont aussi enthousiastes en version plus condensée. La preuve ?

« Whiskey and Bath Water », qui tonitrue d’une intro qui tue, le feedback et les morues, mais qui se rapproche d’une version PINK FLOYDisée des GIRLS AGAINST BOYS alcoolisés. « Mother of Rhea Pearlman » et son synthé aigrelet et maigrelet qui perturbe des licks presque Reggae. On s’amuse ?

Pour de vrai.

Entre boutades pour initiés légèrement perturbés par Freud et son inceste auto-proclamé, version ado Thrash mutilé (« Full Metal Jack Off », ou comment se foutre de la gueule des metalleux en avouant évoluer parmi eux), et déclarations d’intention accélérées (« Where Assholes Come To Die », Speed Metal pas banal, genre Lemmy qui se tâte la prostate sur fond de New Wave Of British Punk Heavy Metal), le compte est bon, le nôtre en tout cas, et on assiste hilare au défilé des majorettes de Las Vegas, nous incitant à remettre une pièce dans leur fente pour tenter le drop jackpot.

Et on se fait avoir comme des bleus, parce qu’on rigole en ne pouvant rêver mieux. Alors, je les aime moi ces FAT DUKES OF FUCK, parce que finalement, et ils en sont fort marris, mais ils ne baisent personne avec leur faux bruit/vraie musique. Non, A Compendium of Desperation, Morality and Dick Jokes n’a rien de désespéré ni de moral, se veut plutôt biaisé, mais d’une richesse admirablement agencée. Le genre de disque qu’on écoute entre…

Dans les milieux autorisés ?

Aucune n’est indispensable pour s’en sevrer.


Titres de l'album:

  1. A Compendium of Desperation, Morality and Dick Jokes
  2. Whiskey and Bath Water
  3. Mother of Rhea Pearlman
  4. Full Metal Jack Off
  5. Side by Side
  6. Where Assholes Come to Die
  7. Tasteful Ray
  8. No Single Men
  9. Laughlin Longhorn Suicide Fuck
  10. Kodiak Arrest
  11. The Monotonous Adventures of a Hopeaholic
  12. Promise Keepers
  13.  I'll Tell You When It Hurts

Site officiel


par mortne2001 le 16/09/2017 à 14:54
90 %    1123
Derniers articles

Anthems Of-Steel VII

Simony 30/05/2025

Live Report

Clinic LI-SA X et Paul GILBERT

mortne2001 29/05/2025

Live Report

The Sisters of Mercy + Divine Shade

RBD 21/05/2025

Live Report

Great Falls + Kollapse

RBD 04/05/2025

Live Report

Chaulnes MÉTAL-FEST 2025

Simony 27/04/2025

Live Report

Star Rider/Blaze Bayley

mortne2001 24/04/2025

Live Report

LOUDBLAST : 40 ans de carrière !

Jus de cadavre 20/04/2025

Vidéos

Big Brave + MJ Guider

RBD 12/04/2025

Live Report

Becoming Led Zeppelin

mortne2001 09/04/2025

Live Report

Klone

RBD 08/04/2025

Live Report
Concerts à 7 jours
Tags
Photos stream
Derniers commentaires
Humungus

Miam miam !!!

06/06/2025, 11:44

Arioch91

Cet album me procure le même effet que le précédent album sorti en 2020 : une pure tuerie !

04/06/2025, 21:00

Moshimosher

Pas mal, pas mal...

04/06/2025, 20:31

Jus de cadavre

Bon dieu c'était pas encore assez gros ??   

04/06/2025, 14:38

JP

Merci pour cette belle chronique.Voici notre site.https://burningdead-official.com/fr/categories/

04/06/2025, 14:18

Humungus

Ah pis j'avais même pas vu (encore entendu) qu'il y avait une reprise de GOATLORD !!!Ceci confirmant donc cela.

04/06/2025, 07:35

Humungus

Tout ce que j'aime !!! !!! !!!En même temps, venant d'un groupe dont le batteur porte un t-shirt TRISTITIA, ce ne peut-être que bonnard...

04/06/2025, 07:34

Humungus

... ... ...

03/06/2025, 16:23

Nervald

Je n’ai jamais entendu parler de ce split vous savez ou l’écouter ou ce le procurer 

03/06/2025, 13:35

Gargan

Effectivement difficile de rester insensible à ce type de festival, à taille humaine, avec une ambiance conviviale sans tomber dans la cour des miracles et surtout avec une bell prog’. Très content d’avoir découvert Gravekvlt et pris la mandale attendue de (...)

02/06/2025, 23:00

Simony

Cool !J'adore l'ambiance de ce genre de festival.

01/06/2025, 21:07

NecroKosmos

Excellent report ! J'y étais. C'était purement génial. Dans le même style, tout aussi excellent, le Courts Of Chaos fut aussi un fantastique moment.

01/06/2025, 19:36

Benstard

Incroyable un groupe qui s'attaque à faire une reprise de Dead Congrégation !!! Je me languis d'écouter ça . Faut pas se louper la ahah.

31/05/2025, 21:53

Simony

Ah ah ce message d'au revoir est magnifique"Je dois y aller maintenant… chercher un boulot et jouer à Roblox avec mon fils…"

31/05/2025, 09:12

mortne2001

@Gargan exact, oubli impardonnable...Mais que veux-tu, je suis une vieille baderne qui pense que DEEP PURPLE est de la musique de jeunes et que tout est pourri depuis la mort de Roy Orbison. Mais totalement d'accord pour "Whiter Shade of Pale", quel feeling....

30/05/2025, 09:39

Salmigondis

C'est toi qui deicide, mec.   

30/05/2025, 06:15

Gargan

Tu presses lecture, retour immédiat 35 ans en arrière ! 

29/05/2025, 22:47

Gargan

Bah tu as oublié la reprise finale de dragon ball par Lisa, question de génération hehe. Je ne connaissais pas tant que ça Paul Gilbert (un peu Mr Big et Racer X, mais pas plus), super bonhomme et musicien incroyable. Enorme panard sur la reprise de Procol Harum.

29/05/2025, 22:28

Rodimus

Excellent !!

27/05/2025, 13:11

Ivan Grozny

Cool qu'ils aient signé chez Osmose !

27/05/2025, 12:19