Amiens, sa cathédrale gothique, son beffroi médiéval, ses boutiques et ses cafés qui bordent les ruelles du quartier Saint-Leu, le musée de Picardie. Une ville riche d’histoire et belle comme un rêve romantique au bord de l’eau. Mais dans les faits, Amiens est éloigné de mon port d’attache de plus de six heures et trente minutes de route, un périple que je ne suis pas prêt à faire pour aller déambuler dans ses rues colorées et ses places chamarrées.
Pourtant, un voyage sur ces terres serait comme un pèlerinage Noisy pieux, à a rencontre d’un des groupes locaux les plus expressifs et puissants. Ce groupe, SYCOMORE puisqu’il faut le nommer, est en quelque sorte l’opposé de cette cité magnifique, une expression plus sombre d’un présent aussi ténébreux qu’un certain passé, et une fin de non-recevoir quant aux éventuelles illusions développées par des touristes en mal de cartes postales et autres images d’Epinal.
Depuis des années, ce trio (Tim Drelon - guitare et chant, Guillaume « Desta » Destalminil - basse et chant et Guillaume Maillard - batterie) s’évertue à repousser les frontières entre Sludge, Hardcore, Post-Grunge, Noisy Rock pour mieux développer son identité un peu trouble, à l’image de cet arbre dont ils utilisent le nom et la symbolique. Quelle symbolique ? Une porte vers un au-delà, une autre réalité, ce qui est exactement ce que le power-trio propose sur ses quatre albums, portés à chaque fois par un label différent. Et après Argonauta Records, c’est sur l’hyperactif Source Atone que le groupe a trouvé refuge, pour emballer dans de bonnes conditions cet Antisweet, sa sucette et ses fourmis.
Se battant contre le sucre, et plus probablement le sucré, SYCOMORE continue son exploration des sons les plus abrasifs, se rapprochant parfois de la scène Hardcore New-Yorkaise de l’orée des nineties, UNSANE en tête de liste. Inutile donc de sortir vos bonbons de l’emballage, les musiciens vous les renverront dans la tronche pour cause de diabète musical aggravé. Ici, on se contente de l’essentiel, des rythmiques cassées, des lignes de chant effacées, et une tendance à gratter des riffs plus hargneux qu’un contrôleur des impôts dérangé dans son boulot.
En utilisant de nombreuses astuces caractéristiques de styles différents, SYCOMORE fascine. « Masquerader » par exemple, n’hésite pas à placer quelques blasts sur son chemin histoire de se détacher de cette étiquette Sludge qui colle à la peau. Sourd, concentrique, hypnotique, Antisweet ouvre une porte sur une nouvelle dimension faite de gravité, d’espoirs déçus, d’illusions perdues, mais aussi d’un esprit de revanche affuté.
Evitant tous les poncifs du Metal et du Hardcore les plus prévisibles, les résidents d’Amiens nous offrent un regard sur leur passé, et une prospection de leur avenir. En constat, Antisweet est crédible de dix ans de carrière, mais aussi de dix ans de possibles disques torchés comme ce petit dernier, entre bruit blanc et hurlements étouffés par l’ennui et le désespoir.
On écoute ces titres, on se sent morose, et on regarde par la fenêtre la pluie tomber sur une ville amorphe. Pourtant, SYCOMORE n’incarne pas forcément cette impasse créative empruntée par les acteurs Doom les plus démoralisés. Leur oppression est souvent nuancée de mélodies dignes d’un ALICE IN CHAINS historique, sur « Slurs », petit bijou amer de moins de quatre minutes qui casse la belle mécanique sans en enrayer le processus. Paradoxe étrange mais réalité tangible, tant ces trois musiciens se montrent capables de changer d’humeur comme une adolescente gauche et cyclothymique.
Mais ne vous y trompez pas. Antisweet n’en est pas pour autant un album facile à écouter ou à digérer. D’abord de sa longueur, cinquante minutes, de sa densité, avec plusieurs idées qui se heurtent à une vitesse incroyable, et de sa méchanceté larvée, qui pousse à imbriquer des éléments contraires pour obtenir un puzzle déformé et assez vilain (« Parallel Lines », entre Thrash, Core et mélancolie bittersweet).
Je suis relativement admiratif de cette facilité à constamment trouver la bonne idée pour appuyer l’autre bonne idée. Alors que nombre de groupes du cru se contentent souvent d’une attaque en tir de barrage, les SYCOMORE varient et modulent et nous offrent un décor bucolique plutôt inquiétant sous la lumière blafarde de la lune. « Hear the Wind » écoute justement le vent pour traduire sa colère, et les guitares, assassines et fourbes de nous poignarder dans le dos dès que notre attention se relâche.
Sorte de NOMEANSNO de l’étrange et un cirque itinérant de freaks qui terrorisent les enfants, Antisweet est salé, donne soif, et a ce goût fané des sucreries tombées à terre durant une foire quelconque dans le nord de la France. Des sucreries perdues par des grands enfants, qui aiment leur barbe-à-papa noire et poisseuse, comme du tabac à chiquer craché à terre, et qui se satisfont très bien d’un pessimisme à la mode.
Si le THERAPY ? des débuts avait ouvert ses portes au Metal le plus létal, le résultat eut pu être similaire. Mais les Amiénois affirment leur singularité via des idées complexes, et un résultat écrasant et suffocant. Ne parler que de Sludge serait une insulte à cette créativité désespérée, et un final aussi cathartique que l’interminable « Captain Vitamin » prouve que le trio a encore pas mal de possibilités en réserve pour que le Rock Noisy et métallique vive encore de très vilains jours.
Il pleut, encore. Et Amiens est toujours à plus de six heures et trente minutes de route. Cette cathédrale est-elle aussi gothique qu’on veut bien nous le faire croire ?
De toute façon, je n’ai plus d’essence, et plus d’argent pour en acheter. Cet album fera très bien l’affaire.
Titres de l’album:
01. Eternal Watts
02. Like Sulphur
03. Drink Water
04. Masquerader
05. Slurs
06. Parallel Lines
07. Hear the Wind
08. Captain Vitamin
@Ivan : la scène metal est un ehpad géant, aucun intérêt de suivre de vieux grigous qui sucrent les fraises.
09/07/2025, 13:52
Bonjour, moi je serais dans les premiers à réclamer plus de femmes sur scène, et éventuellement plus de diversité ethnique, mais je préfère largement un festival du type Fall of Summer, au Hellfest, et ce depuis 2015....
09/07/2025, 13:52
News à mettre en regard de celle sur le dernier concert de Black Sabbath, nous assistons à l'agonie d'une certaine idée de la scène metal, celle qui arrivait à faire consensus autour d'une musique de qualité et qui avait du succès. F(...)
09/07/2025, 13:16
"Avec qui en tête d'affiche? Radiohead ou Oasis?" bah ça n'a plus rien de choquant aujourd'hui. Barbaud parle de Placebo en tête d'affiche donc bon... Va falloir s'y faire, les fans de Metal ne sont plus du tout le public vis&eacut(...)
09/07/2025, 12:20
Si je voulais être méchant, je dirai : "Y a-t-il encore des fans de Metal au HELLFEST ?"
09/07/2025, 10:30
Avec qui en tête d'affiche? Radiohead ou Oasis? Plus sérieusement, je me de mande encore comment le festival peut afficher complet avec l'affiche qu'ils ont réalisée pour 2025. Comment les fans de metal peuvent encore leur faire confiance ?
09/07/2025, 10:13
@DPD : on te vois beaucoup t'attaquer aux groupes de croulants mais on ne te vois jamais la ramener sur tes groupes du moment, ce que tu aimes ou les groupes qu'il faut désormais en lieu et place de ces formations vieillissantes que tu dénonces tant...
09/07/2025, 06:45
@Jus de cadavreGenre ils on payés les frais de déplacement et l'hôtel, me fait pas rire, les enfoirés part 2. Au moins le juif Patrick Bruel tiens debout.
09/07/2025, 01:12
Très bon album avec 3/4 titres vraiment excellent et un bon niveau global.Quelques Slayeries comme sur Trigger Discipline mais rien de méchant. D'autant que le titre Gun Without Groom est vraiment terrible, en effet. Un très bon cru
08/07/2025, 23:59
Pour moi je vois c'est l'équivalent que de voir 2pac en hologramme (qui était homosexuel), peut-être même pire parce que l'illusion tiens mieux le coup, je reste sur cette position.
08/07/2025, 22:44
Les bénéfices du concert était entièrement reversés à une œuvre caritative. Aucun des groupes présents n'a palpé pour leur concert (en même temps c'était 20 minutes de live par groupe...). Après ça (...)
08/07/2025, 22:42
@SalmigondisJe sais pas si tu veux quelque chose qui fait plus l'unanimité j'ai vu Morbid Angel au bout et c'était de la merde, une prestation robotique au possible, j'ai pris plus de plaisirs sur des trucs plus locaux à la con. Il faut savoir tourn(...)
08/07/2025, 22:28
Mais quelle bande de clodos...tout le monde se branle du batteur sans déconner. Se faire du fric de cette manière c'est franchement pathétique. Massacra est mort et enterré...qu'il le reste pour conserver son statut CULTE. Honte &agrav(...)
08/07/2025, 21:54
Avant d'aller me faire voir ailleurs, je partagerai avec vous cet hommage Fernandelien :"Aux adieux de Black Sabbath, il tremblait pas mal d'la patte.Fais l'Ozzy, assis."
08/07/2025, 21:31
Ben tu m'étonnes, DPD, d'être passé à autre chose. En même temps, quand on a eu ces groupes là comme entités fétiches, on ne peut qu'aller de l'avant. C'est comme partir de zéro (je plaisante
08/07/2025, 21:26
Je comprends juste pas cette envie adolescente permanente de revoir ses groupes de jeunesse. Je veux dire je suis de la génération qui est passé par Korn Slipknot et compagnie mais je suis passé à autre chose.
08/07/2025, 19:55
Lors du dernier concert de Motorhead auquel j'ai assisté, Lemmy était... pathétique (mais pas loin). Et pourtant il était planté sur ses quilles. Alors jouer assis avec Parkinson en bandoulière ? Business is business, la machine à biftons DEVA(...)
08/07/2025, 19:23