Comment expliquer à un auditeur potentiel qu’on vient d’écouter un grand album d’AOR ? Ce style, si prisé, et extrême d’une certaine façon, répondant à des codes très précis, il est relativement ardu d’en défendre des qualités qui sont de toute façon déjà connues des fans. Alors, que faire ? Mettre en avant la beauté des mélodies ? L’excellence de l’interprétation ? La finesse des arrangements et la luxuriance de la production ? Arguer du fait qu’il tient éventuellement la comparaison avec les plus grandes œuvres du genre ? Autant faire la promotion d’une boisson rafraîchissante à quelqu’un qui a soif et qui souhaite se désaltérer…En étant sérieux, le public sait toujours à quoi s’attendre en écoutant un disque qui se réclame de JOURNEY, de REO SPEEDWAGON, et autres légendes du cru, ce qui rend la finalité de notre tâche encore plus dérisoire. Tout au plus pouvons-nous pointer du doigt telle ou telle sortie de manière informative, sans espérer que notre laïus enflammé convaincra quelques brebis Metal égarées…Car non, le second effort d’IMPERIUM ne s’adressera pas au plus grand dénominateur commun du lectorat de Metalnews, ses harmonies étant un peu trop prononcées, son penchant pour la sauvagerie s’articulant surtout autour de riffs de guitare coincés dans le mix, et ses textes étant un peu trop portés sur la romance et un certain manichéisme de surface. Mais comme tout travail mérite salaire, et que Beyond the Stars est sans doute appelé à devenir un modèle du genre, je m’obstinerai donc à fouiller ses arcanes afin de trouver des points forts à distinguer des autres réalisations, ce qui au vu de la qualité du produit en question ne sera pas trop difficile.
Pour l’histoire, signalons qu’IMPERIUM est un projet né en 2016, émanant de la créativité bouillonnante de Mika Brushane, batteur finlandais en poste depuis l’orée des années 80. Composant à l’époque pour son groupe STRIKE, le musicien s’aperçut vite qu’il avait mis au point un matériel trop conséquent, et décida donc de reverser une partie de cette obole musicale à un projet différent. Il faut dire que l’homme ayant un bagage artistique relativement dense, couvrant un spectre allant du Jazz au Metal, l’expérience n’avait rien d’inédit pour lui, et c’est ainsi que Dreamhunter vit le jour il y a deux ans. On y découvrait alors un multi-instrumentiste discipliné, capable de prendre en charge l’écriture, la composition, mais aussi une partie de l’interprétation, rôles qu’il endosse encore aujourd’hui en se chargeant outre des parties de batterie, de claviers, mais aussi des chœurs, et de la basse. Pour transcrire le reste des partitions, l’homme s’est encore entouré d’une fine équipe, qui comprend pas moins de trois guitaristes (Erkka Korhonen, Samuli Federley, et Toni Huovinen), ainsi que quatre chanteurs de gros calibre, Dennis Ward (Gus G, KHYMERA, UNISONIC, PINK CREAM 69, PLACE VENDOME, SUNSTROM), Markku Kuikka (CROW’S FLIGHT, AGONIZER, KENZINER, THE RAGGED SAINTS, STATUS MINOR), Antti Railio (gagnant du télé-crochet The Voice of Finland, Ex-CELESTY, RASKASTA JOULUA), et Rob Lundgren (THE MIDGARD PROJECT, BARQUE OF DANTE), ce qui donne donc à ce projet des allures de all-star cast, bien que chaque intervenant connaisse sa partie et la joue à la perfection, sans avoir besoin de mettre un quelconque CV en avant. Et le tout prend des allures de festival d’AOR de première classe, un peu comme une croisière nous laissant voguer sur une mer de mélodies…
Mélodies appuyées certes, harmonies assénées, mais puissance affirmée, puisque IMPERIUM n’a pas changé de recette en deux ans, et prône toujours un équilibre parfait entre hargne et douceur, ce qui confère donc à toutes les compositions une aura très particulière. La mièvrerie inhérente à tout débordement de romantisme est très intelligemment évitée, en laissant les guitares s’exprimer au même plan que les claviers, et autant dire que le travail vocal accompli est en tout point époustouflant, et surtout, cohérent, malgré la pléthore d’artistes se succédant au micro. Nous aurions pu craindre une trop grande disparité, les vocalistes ayant tous un timbre différent, mais il n’en est rien, et saluons de fait l’excellent boulot accompli par l’équipe de production qui est parvenue à donner à Beyond The Stars une logique et une continuité assez époustouflantes. On retrouve d’ailleurs aux postes-clé de la post-production les noms fameux d’Erkka Korhonen (DARK SARAH, URBAN TALE, NORTHERN KINGS, ARI KOIVUNEN, RASKASTA JOULUA) au mixage, et celui de Mika Jussila (NIGHTWISH, CHILDREN OF BODOM, STRATOVARIUS, HIM) au mastering, et autant dire que les deux ont bien compris quel était leur rôle, faisant briller les chromes et donnant à l’ensemble une patine évoquant à merveille la brillance d’étoiles dans le ciel d’un AOR concret, mais délicatement onirique sur les bords.
Une fois ces données en tête, dites-vous que le schéma qui vous attend est classique, mais une fois encore appliqué avec soin et passion. Si les plus honnêtes reconnaitront que certains morceaux distillent les mêmes idées en modulant simplement de quelques tons les mélodies, si le spectre de la redite menace donc en plusieurs occurrences la bonne avancée du projet, il faut admettre que les chansons en tant que telles sont d’une perfection troublante, même si parfois, les claviers ont tendance à empiéter sur le reste de l’instrumentation. Nous évoluons donc en terrain très connu, mais toujours apprécié, d’autant plus que Mika a donné consigne à ses solistes de ne pas se brider, et de nous délivrer quelques soli enflammés. Nous pouvons donc parfois déguster le versant le plus Hard de la montagne AOR, qui de temps à autres nous exhibe ses sommets les plus élevés (« Beyond The Stars », « World On Fire »), ou ses zones les plus érodées et accessibles (« Spread You Wings », « All Alone »). L’IMPERIUM ne cache toujours pas sa fascination pour les années 80, qui ont plus ou moins défini avec acuité les figures imposées, et les célèbre donc avec force effets de radio et autres motifs harmoniques et chauds (« Back In ‘85 », son « Summer of 69 » à lui…), et de fil en aiguille, l’homme derrière le projet se découvre comme tout auteur qui désire montrer un autre aspect de sa personnalité, et de ses capacités. Mika Brushane confirme donc avec Beyond the Stars qu’il a une place tout à fait légitime dans le monde de l’AOR, même s’il a parfois tendance à tomber dans la facilité de compositions légèrement calquées les unes sur les autres. Mais comme le moule ayant servi à leur élaboration est d’une forme parfaite, on ne saurait se plaindre de ces quelques similitudes…
Titres de l’album:
1. Beyond the Stars
2. Crash and Burn
3. Learning How to fly
4. Spread you Wings
5. Back in '85
6. King of the World
7. All Alone
8. World on Fire
9. Just a Dream
10. Higher
Voyage au centre de la scène : interview de Jasper Ruijtenbeek (The Ritual Productions)
Jus de cadavre 07/05/2023
Élue pochette de l'année. Et musicalement c'est pas dégueu. Faut que j'écoute ça attentivement.
29/05/2023, 16:54
Ça sentirait pas un peu la pochette faite par IA ça ?. Midjourney sera bientôt le "cover artist" le plus productif sur Metal archives...
26/05/2023, 20:56
Le premier album a énormément tourné chez moi, gros Hardcore à bagarre avec riffs à la Slayer mais toujours avec une ambiance... jouasse ! Genre, du HxC en chemise Hawaïenne.Mais là je dois dire que le titre Good Good Things m'a fait dr&o(...)
25/05/2023, 18:25
RIPC'est quand même le second du line originel qui passe l'arme à gauche....
25/05/2023, 15:17
Grosse perte, voilà un Monsieur dont la contribution à la scène Rock en général est largement inconnue.Un grand merci pour avoir permi tant de chose et montrer non pas une mais plusieurs voies possibles pour s'exprimer dans la musique.
25/05/2023, 08:37
MARDUK a communiqué depuis en disant que ce n'était là que l'une des nombreuses fois où il est apparu totalement ivre sur scène (il aurait par exemple fait un streap tease sur scène...) et que c'était une condition de départ p(...)
25/05/2023, 08:35
Du calme les excités antitout, vous disiez pareil de slayer, jouer avec l'interdit c'est tout à fait l'esprit adolescent du metal
24/05/2023, 21:49
Le clip - aussi moche soit il - est déjà bien plus intéressant que 99% des clips métal réalisé en usine désaffecté avec ces sicos mode playback.
24/05/2023, 16:39
L'intelligence artificielle n'est pas - par définition - l'intelligence. Un bon monde d'assistés qui se prépare.Le clip n'est pas si mal malgré tout.
24/05/2023, 15:10
Juste au moment où je me mets à apprécier de nouveau pleinement Type-O après une parenthèse de presque vingt-cinq ans... Comme quoi il reste toujours un public pour les grands groupes même après leur disparition active.
24/05/2023, 13:44