On fait souvent des rêves à la con. Les miens ressassent le passé en changeant la donne, et en le situant dans un présent traumatique hypothétique régit par les seules règles du nonsense. De la paranoïa, une louchée de sexe improbable, une impossibilité de s’extraire d’une dimension connue mais pas tant que ça, des fuites en avant qui résument bien la crainte d’un lendemain foireux, et une chute finale en mode downward spiral vers le suicide mental, perdurant parfois bien après le réveil. Sensation désagréable s’il en est, mais qui prouve que l’imagination ne connaît aucune limite, et que la réalité trouve parfois ses réponses dans le rêve, comme si les deux dimensions cohabitaient en permanence.
Les cauchemars éveillés sont aussi fameux. On peut les ressentir lorsqu’on est confronté à un évènement choquant, ou lorsqu’on laisse son âme divaguer dans un pays imaginaire. Et lorsqu’on écoute de la musique, quelle qu’elle soit, ce pays imaginaire prend parfois corps autour de nous, pour le meilleur ou pour le pire. Et en écoutant le deuxième album des anglais d’HELPLESS, ce paysage de l’esprit a pris la forme d’une gigantesque marée humaine perdue dans les limbes de l’administration, avec d’un côté, les hurlements du public et de l’autre, les invectives agressives des préposés.
Entre CONVERGE, TRAP THEM, FULL OF HELL, CANDIRIA, DILLINGER ESCAPE PLAN, PORTAL et CULT LEADER se situe HELPLESS, certainement le combo le plus réactif et haineux du marché actuel. Un premier album, Debt, nous avait mis au parfum il y a quelques années. Aujourd’hui, fort de son avertissement, HELPLESS vient justement collecter les fruits de cette dette que nous avons contractée auprès de lui. Et croyez-moi, les intérêts se sentent passer.
Difficile de cerner le côté artistique de cette prise de position, sinon en évoquant une cruauté incroyable, et une puissance intolérable. Entre dissonances, feedback, riffs sombres, cris sourds, écorchement de la glotte et accélérations à fumer un bœuf, Caged in Gold nous enferme dans une cage qui n’a rien de dorée, et dont les barreaux sont méchamment rouillés. Un genre de prison de l’âme planquée quelque part dans une Angleterre des années 80, lorsque miss Maggie faisait encore des siennes. Et si cette petite fantaisie que j’ai en tête, d’accoler une étiquette Anarcho-Mathcore semble totalement ridicule sur le papier, elle n’en prend pas moins sens lorsque les nôtres sont mis à mal par ces dix morceaux.
Caged in Gold est un rouleau de papier de verre gros grain, passé sur les tympans, qui vous oblige à accepter la douleur. Un manifeste Hardcore teigneux comme un avenir en morpion qui s’accroche à vos poils, et une façon de revisiter CONVERGE à la mode anglaise pour lui apporter un peu plus de méchanceté tout sauf gratuite. « Wraiths Of Memory » à ce titre, est le meilleur avertissement que les anglais pouvaient choisir pour prévenir du caractère outrancier de leur retour. Intro Noisy, cassures de rythme incessantes, riffs démultipliés, pour une ambiance surchauffée qu’on imagine sans peine étouffante en live. En quelques minutes, HELPLESS passe en revue tout ce que le Hardcore chaotique moderne compte de plus dangereux, et soigne son entrée, avec des boucles mélodiques malmenées par une rythmique en mouvement, et un chant en sous-couches qui provoque le glissement des plaques tectoniques.
Tout l’album est de cet acabit, et les silences sont rares, mais pesés, calibrés. Ceux entre les titres, classiques, permettent à peine de reprendre son souffle alors que la cadence monte d’un cran (« The Empty Gesture »), et ceux insérés dans les titres eux-mêmes laissent présager d’une reprise encore plus féroce. On se méfie donc de ce mélange explosif, qui détonne au moment où on choisit d’allumer la mèche. Notons une performance hallucinante d’un cogneur en roue libre, et d’un guitariste qui explore toutes les possibilités de ses accords. Et si le mélange entre Grind et Noise est si effectif, c’est qu’il est traité à travers le prisme d’un Hardcore cohérent, qui n’abuse ni du feedback ni du chaos.
Entre fulgurances gigantesques, et propos plus étalé, Caged in Gold est une sale prison sans chiottes, et sans barreaux. Des murs plaqués or, mais pas de vue sur l’extérieur, un acte terroriste musical de première importance, qui se termine dans la noirceur d’un regard clos, résigné à son isolement mental et physique. « The Great Silence » est certes une abomination, mais l’épilogue logique de cette descente aux enfers qui est notre vie de tous les jours.
Un rêve nocturne qui prend corps le jour levé, et qui oblige à voir la réalité blafarde en face. Et le ciel est gris, en Angleterre comme ailleurs. N’attendez plus le soleil, il est déjà mort. Et HELPLESS lui porte le coup fatal.
Titres de l’album:
01. Wraiths Of Memory
02. The Empty Gesture
03. Suppression
04. Another Sunlight
05. Single File
06. Time Worship
07. Focus Group Extraction
08. Unseen Servant
09. Simulacrum
10. The Great Silence
Merci à Clawfinger pour ce grand moment de transgression validée par l’ordre moral dominant. C’est rassurant de voir que la “rébellion” moderne consiste à tirer sur une cible usée jusqu’à la corde, avec des punchlines dignes (...)
04/07/2025, 07:16
Il tourne pas mal chez moi ce disque, et c'était un vrai plaisir de revoir le groupe live récemment après les avoir un peu mis de côté. Un autre concert en tête d'affiche ne serait pas de refus !
03/07/2025, 16:57
Morceau décevant et sans surprise. La présence de Chris Kontos dans le groupe y fait pour beaucoup dans mon intérêt pour ce retour, mais pour le moment bof.
03/07/2025, 16:47
Je n'ai jamais aimé ce groupe, mais j'étais passé devant durant un Hellfest et en effet c'était juste insupportable toutes ces harangues (littéralement toutes les 10 secondes). Moi je m'en beurre la raie, mais pour les fans ça doit &ec(...)
03/07/2025, 12:55
Vu à Toulouse et je n'ai pas du tout accroché, pourtant vu 2 ou 3 fois depuis 2005. Et j'avais bien aimé. Rien ne surnage, ça bastonne mais pour moi aucuns titres ne sort du lot.Par contre j'ai adoré Slapshot
02/07/2025, 16:01
Votre article sur le kintsugi est un véritable hommage à l’art de reconnaître la beauté dans la fragilité et les cicatrices : mentionner son origine au XVe siècle et sa philosophie wabi‑sabi renforce(...)
02/07/2025, 15:38
@Abrioche91 : la canicule t'a trop tapé sur la tête, mon pauvre vieux. Parce que se faire à répondre aux trolls, je n'avais plus vu ça depuis VS.
02/07/2025, 12:25
@Ultra Pute, t'es bien limité comme garçon. Et tu dois sacrément bien te faire chier pour venir commenter connement ce que les autres écrivent.Moi aussi, j'aime bien les commentaires gratuits (la preuve) mais je suis surtout là pour commenter l&(...)
02/07/2025, 08:50
Pas trop mal dans l'idée.Vocalement on s'y tromperait aussi.A voir sur tout l'album, le précédent, mis à part l'opener, m'avait bien déçu
01/07/2025, 15:38
ça tartine ! bien cool cool cette grosse basse @niquetoncul oui ça doit te changer de Jinjer
01/07/2025, 14:19
Tiens, le retour du papy boomer! Normal, quand du thrash de croulant, il sort de l'ehpad. Et si c'est pas signé, c'est que c'est nul à chier, pépé!
30/06/2025, 19:47
Si seulement Spiros pouvait arrêter d'haranguer le public toutes les 30 secondes avec ses "come on my friends", les lives de Septicflesh y gagneraient beaucoup.
30/06/2025, 11:36