Bombscare

T-minus

19/05/2017

Autoproduction

On aurait tendance à croire (un peu à raison d’ailleurs), qu’à part KORN, et dans une moindre mesure ORGY et L.A.P.D. (la première fausse mouture de KORN, un plutôt bon et unique album, Who’s Laughing Now en 1991), nul groupe d’envergure n’est jamais sorti de Bakersfield, Californie.

C’est un peu vrai comme je le soulignais, et cette pauvre cité californienne n’est ni L.A, ni San Francisco, et niveau notoriété Metal, le baromètre frise la dépression, évitée de peu par le succès gigantesque des enfants du pays menés par Jon Davis.

Il est possible que cette situation change, pour peu que certains fans ouvrent leurs oreilles à la scène locale, qui après consultation de sites spécialisés, regorge de groupes valant le coup de tympan.

Un exemple ?

J’en ai un sous le clavier, d’où ma prose tardive du jour, en l’incarnation d’un trio venu nous livrer sa vision très personnelle d’un Thrash pas si vintage qu’il n’en a l’air.

T-MINUS (pas le producteur californien de Hip-hop, non) est donc un trio, constitué de Patrick Murphy (chant/basse), Tom Murphy (guitare) et Fernando Villagran (batterie), ayant vu le jour en 2013, et responsable depuis sa création d’un unique LP, celui dont je m’apprête à vous parler.

Pas de démo donc, encore moins de EP, c’est un plongeon direct dans le grand bain que les trois partenaires s’offrent en ce mois de mai, en totale autogestion, sans l’aide d’un label ou d’un support quelconque.

Les californiens tirent leur nom d’une expression consacrée qui selon le contexte, évoque un compte à rebours de nouvel an avant le bisou d’usage, l’impact d’une bombe (moins drôle), ou l’évacuation immédiate d’un surplus fécal coincé dans les intestins.

Gageons au jugé du titre de leur LP que la seconde interprétation est celle qui sied le mieux à la musique du trio, les deux autres étant légèrement hors contexte…

Certes, le choc provoqué par Bombscare est indéniable, mais ne vous attendez pas pour autant à une énième sortie de Thrash barbare et saccadé du mois. Le Thrash proposé par T-MINUS est indéniablement puissant, mais beaucoup plus nuancé que celui de leurs homologues plus portés sur la nostalgie que sur l’avancée d’un genre qui a su en permanence évoluer pour ne pas trop stagner.

Et finalement, leur crossover emprunte beaucoup d’éléments au Néo Thrash US des années 90 ainsi qu’au Hardcore, tout en gardant le lien ténu qui le relie à la mouvance de la Bay Area des 80’s. Pas mal pour un premier jet, et résolument original dans les faits.

La première référence à avoir effleuré ma mémoire fut celle des défunts et énigmatiques ACID BATH, pour cette façon étrange de traiter la rythmique, mais aussi à cause du chant très diffus et sous mixé de Patrick Murphy, qui présente bien des similarités avec les intonations de Dax Riggs. Bien évidemment, les T-MINUS jouent quand même un jeu beaucoup plus franc sur Bombscare que les ex-chantres d’un Sludgecore à tendance Nola de Louisiane, mais leur approche de biais possède des morceaux d’ADN communs, ne serait-ce que dans la pluralité des rythmiques, mais aussi dans le traitement des mid tempi, qui s’accompagnent souvent de motifs de guitare malsains et de poussées vocales bizarres.

Cette analogie n’est pas forcément palpable dès « Washout », le premier vrai morceau, qui joue le jeu d’un Thrash volontiers plus direct, au son toutefois terriblement particulier, très sec et nerveux, et dotant la basse d’une énorme dynamique Core à la BRUTAL TRUTH ou MUNICIPAL WASTE.

Mais les riffs annoncent assez tôt la couleur, et ne se contentent pas de suivre bêtement le fil rouge, en jouant la pesanteur et la dissonance, tandis que la voix traitée de Patrick se veut rauque et assez grinçante.

Le groupe joue donc l’ambivalence en gardant tout de même son Thrash au chaud, ce que confirment des breaks lapidaires qui cavalent à bonne vitesse.

Mais cette vitesse en globalité est plutôt médium, voire faible, puisque la majorité des titres sont plus Heavy que speed.

Mais c’est justement ce qui permet aux californiens de se démarquer de la masse des combos de revival Thrash qui turbinent tous à la chaîne comme à l’usine de la nostalgie.

« Sacrilege » confirme cette tendance, même si le volume sonore gagne en ampleur, et joue le jeu d’un tempo médium souvent brisé, qui sait rester accrocheur. On retrouve cette basse qui occupe les avant-postes aux côtés d’une guitare acide, le tout secondé et épaulé par une batterie solide qui refuse le statisme habituel. L’ambiance est sèche, et on pense même à une adaptation rachitique des TYPE O au sein d’un contexte Thrash du début des années 90, lorsque le mouvement cédait largement le pas et lâchait ses dernières cartouches intéressantes.

De fait, les T-MINUS refusent très intelligemment le passéisme d’un Metal agressif trop réchauffé, et « détemporalisent » leur Thrash pour le rendre unique. Option bien plus gratifiante ma foi qu’une sempiternelle resucée des grands classiques.

Les morceaux prennent le temps d’instaurer des tonalités, et laissent courir le compteur, atteignant parfois les six minutes comme sur ce « Dormancy », terriblement lourd et oppressant, qui est sans doute le titre qui valide le plus justement l’analogie avec les regrettés ACID BATH.

Mouvements d’humeur, ralentissements soudains, changements de son, d’orientation, racolage Core, oppression Post Hardcore, et toujours cette voix qui joue le rôle de troisième ligne rythmique, comme un ultime avertissement émanant de haut-parleurs saturés d’instructions.

 

Même le segment le plus bref est truffé de bonnes idées, et « The China Syndrome » joue encore une fois la roublardise de ses harmonies décalées et de son accélération centrale à la CARNIVORE.

Le final « Host » achève de nous laisser sur une excellente impression, en résumant le parcours accompli par une jeune formation à l’identité déjà très affirmée. En six minutes pile, le trio abat toutes ses cartes, et se permet même un break très intense à mi-parcours, qui se frotte à l’art dérangé des UNSANE et autres FETISH 69, tout en gardant le cap vers un Metal franchement fédérateur aux riffs accrocheurs.

Un sacré truc pour un trip intégral, qui risque de surprendre les plus conventionnels d’entre vous…

Mais quelle jolie surprise que ce Bombscare qui évite tous les pièges du Thrash old-school qui lui aussi commence à faiblir sous les coups de la redite. En ne choisissant d’autre camp que le leur, les T-MINUS ont relevé le pari très risqué de la différence, brillamment remporté d’un point de vue artistique, mais qui risque de les laisser sur le carreau en termes de popularité.

Un combo audacieux, que je n’hésiterai pas à comparer aux divinités intouchables de CORONER, sans toutefois leur accorder le même statut. Mais attention, une fois la sirène déclenchée, vous n’aurez que peu de temps pour vous protéger de la déflagration annoncée.


Titres de l'album:

  1. T-minus
  2. Washout
  3. Sacrilege
  4. Dormancy
  5. Icon Of Sin
  6. Psykillogy
  7. The China Syndrome
  8. Host

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par mortne2001 le 29/06/2017 à 14:54
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