Exta Malorvm

Nebrus

04/11/2016

Razed Soul Productions

Si d’aventure vous trouviez les éclaircies matinales un peu trop joyeuses et annonciatrices d’une journée à la gaieté fort peu à propos, j’ai une solution toute faite pour vous.

Pour chasser les bonnes ondes et les pensées positives de votre cerveau embrumé par les mauvaises nouvelles, il vous suffit de vous coller entre les oreilles le dernier LP des Italiens de NEBRUS. Vous retrouverez en quelques secondes votre misanthropie naturelle et les rais du soleil ne seront plus qu’un mauvais souvenir…Car après tout, personne n’a forcément envie de voir la vie du bon côté, et loucher vers les ténèbres est parfois la mise en abime dont notre psyché abimée a besoin.

Je dissertais récemment sur l’ouverture dont le Black Metal fait preuve depuis quelques années, me réjouissant du caractère novateur de certains ensembles bien décidés à repousser les limites du mal. Mais je constate aussi avec délectation que certains n’ont cure de ce désir d’expansion, et continuent de s’abreuver à la fontaine diabolique de l’esprit d’origine.

On le sait, le Black Italien peut se montrer aussi aventureux que conservateur. Des artistes sombres comme NEFARIUM, KULT, NOX ILLUNIS et ARCANUM INFERI sont là pour prouver qu’après tout, les règles telles qu’elles ont été établies aux origines sont toujours d’actualité, et que le chemin traversant les forêts les plus inextricables peut être suivi sans craindre l’opprobre d’un jugement dit « moderniste ».

A cette liste de noms bien évidemment tout sauf exhaustive (la scène Black étant une des plus fertiles de l’extrême, et particulièrement chez nos amis transalpins), vient s’ajouter celui déjà connu de NEBRUS, qui avec le terrifiant Exta Malorvm nous rappelle à quel point les sons les plus élémentaires et les arrangements les plus caverneux sont à même de satisfaire notre appétit de violence sourde et luciférienne.

Si Noctuaria et Mortifero avaient débuté leur carrière sous l’égide d’un Doom funèbre délicatement teinté de Black basique, leur marge de progression a évolué de façon exponentielle pour aujourd’hui atteindre une sorte d’apogée dans l’horreur, sans qu’ils n’aient renié aucun de leurs préceptes antérieurs.

On retrouve sur ce deuxième LP (quatre ans après l’initial From The Black Ashes) tous les ingrédients d’un Black caverneux et ultime, qui n’hésite jamais à aller trop loin dans la pesanteur, à creuser au plus profond d’une terre fétide et stérile, pour en extirper les sonorités les plus maladives et oppressantes.

Et après une courte intro tremblante d’outre-tombe (« Exta Malorvm I »), la réalité crue et occulte de « Dismal Omen » nous tombe sur l’âme comme une chape de croix inversées en plomb fondu, chute lente et cruelle presque Doom qui rappelle le MAYHEM le plus obsédé par le trépas de la mélodie.

Lourdeur, emphase, et construction évolutive presque symphonique dans l’esprit alors même que l’instrumentation basique se pose en contrepoint de tout désir superflu d’orchestration, ce premier morceau pose les bases d’une cathédrale sonore érigée en l’honneur d’un mal musical absolu, faisant même passer les pires exactions morbides de PROFEZIA pour d’aimables gentilhommières à la chaleur humaine rassurante.

On pourrait à la rigueur voir tout ceci -  à un stade avancé -  comme une combinaison des ornementations luxuriantes d’EMPEROR, intégrées à une structure délabrée à la DARKTHRONE des premiers jours, pour cette façon de donner le sentiment au visiteur de passage que la richesse n’est qu’illusoire, et simple conséquence d’une recherche d’ascétisme qui aurait dérapé de ses ambitions nihilistes.

Dans la démesure, NEBRUS sait aussi se montrer inexplicablement accrocheur, comme le démontrent les premières minutes de « Relaying On Madness », qui osent un riff catchy en mid tempo avant de verser dans une pluie de blasts battant le rythme d’un chant écorché franchissant les limites de l’inhumanité. L’alternance de tempi, les breaks réfléchis et imposés dans la logique, les brutales reprises de violence contribuent à conférer à la première partie d’Exta Malorvm une ambiance glaciale mais viscérale, coulante mais heurtée, et nous incitent à aller plus loin dans l’aventure noire sans nous forcer la main sur la bible satanique.

D’ailleurs, cette hypnose bruitiste tourne à la fascination lors de l’épisode « Havoc Emissary », qui continue de poser pierre sur pierre et fait s’élever cette tour de malséance à des hauteurs faramineuses, sans jamais changer d’un iota la direction choisie. Grandiloquence brutale, polyrythmie incessante, et nappes de couches vocales comme autant d’incantations synthétisant le meilleur du BM d’hier et celui de toujours. Le chant de Noctuaria se fait de plus en plus profond, tandis que les parties instrumentales s’imbriquent avec malice, sans jamais sombrer dans le chaos ni l’inextricable, et en évoquant par petites touches le Doom d’antan, que les deux musiciens mâtinent avec beaucoup de finesse de passages en mid toujours aussi pénétrants.

Et après le second interlude Ambient «Exta Malorvm II », digne d’un LUSTMORD salement caverneux, le Doom/Black du début de carrière trouve sa tribune sur un traumatique « Aphotic Path » qui se traîne d’un riff diatonique, mais qui loin de peser sur la balance, la fait pencher du côté de la variété de ton.

NEBRUS choisit de terminer son entreprise sur un diptyque gigantesque, et impose un majestueusement glauque « Death Parade », qui en effet, évoque des images de mort, de procession funèbre, de son pas Doom une fois de plus très appuyé. Si les riffs ne cherchent pas l’originalité à tout prix, ils savent se concentrer sur une atmosphère déliquescente, et s’accorder d’un choix de climat oppressant, sans vouloir placer des effets inutiles.

Et l’opéra à la gloire du malin de refermer ses lourdes évocations sur un dernier intermède « Exta Malorum III », qui cette fois-ci risque quelques vocaux pour ne pas ressasser les astuces précédentes.

Le chant plaintif et la guitare acide ramènent à la surface une onirique collaboration entre le MAYHEM de Grand Declaration of War et le HELLHAMMER de Satanic Rites, avant que les arrangements pluvieux ne nous laissent sur une impression de désolation absolue.

Oui, le Black Metal peut et doit évoluer. Il peut le faire en s’ouvrant à des éléments externes et en métissant ses propres influences mais il peut aussi avancer en restant dans des balises rassurantes.

C’est un peu ce que démontre Exta Malorvm des Italiens de NEBRUS, album étape d’une carrière discrète qui avance à son rythme, mais qui fait progresser le genre sans en renier les fondements. Une gigantesque messe de l’occulte, flirtant constamment entre l’Ambient, le Raw Black, le Doom et le Black progressif, pour une homélie fatale qui ne cherche jamais ses mots ni ne balbutie son message.

 Et plus concrètement, un des meilleurs albums de Black de l’année, pourtant déjà bien chargée en sorties d’importance.


Titres de l'album:

  1. Exta Malorvm I
  2. Dismal Omen
  3. Relaying on Madness
  4. Havoc Emissary
  5. Exta Malorvm II
  6. Aphotic Path
  7. Psalm of Abhorrence
  8. Death Parade
  9. Exta Malorvm III

Site officiel


par mortne2001 le 21/11/2016 à 15:59
95 %    1110

Commentaires (0) | Ajouter un commentaire

pas de commentaire enregistré

Ajouter un commentaire


Derniers articles

Voyage au centre de la scène : BLOODY RITUAL

Jus de cadavre 17/03/2024

Vidéos

Crisix + Dead Winds

RBD 20/02/2024

Live Report

Abbath + Toxic Holocaust + Hellripper

RBD 21/01/2024

Live Report

1984

mortne2001 10/01/2024

From the past

SÉLECTION METALNEWS 2023 / Bonne année 2024 !

Jus de cadavre 01/01/2024

Interview
Concerts à 7 jours
Tags
Photos stream
Derniers commentaires
Gargan

Très cool de découvrir ce groupe ! La présentation est plus fluide mais il faudrait laisser la place à un extrait à mon avis et ça permettrait de mieux rythmer la vidéo.

19/03/2024, 08:17

Arioch91

Perplexe également.Dehydrated et Out of the Body (Out, pas Ovt sans déconner ! C'est quoi leur manie de remplacer les U par des V ?) sans Martin Van Drunen, j'ai même pas assez de curiosité pour écouter ce que ça peut donner.

19/03/2024, 07:52

Arioch91

J'avais aimé le premier Vltimas. Il fait partie de cette tonne d'albums que l'on oublie mais qu'on ressort de temps à autre pour se les repasser et se dire "ah ouais, c'est pas mal" avant de les remettre en place.J'ai écout&eacut(...)

19/03/2024, 07:43

Arioch91

Ils n'ont pas encore viré la "nouvelle chanteuse" ?

19/03/2024, 07:39

DPD

Tant mieux pour ceux qui aiment moi ils me font chier avec cette fétichisation du metal old school.

18/03/2024, 17:37

stench

J'aime bien le principe de réenregistrer des classiques pour voir ce que ca donne avec un son actuel. Le problème est double ici : réenregistrer des morceaux récents n'a que peu d'intérêt, et surtout en me basant sur le titre mis en é(...)

18/03/2024, 13:13

Gargan

Oui, et non. Dans le sens que s'ils veulent vendre leur compile qui sent très fort le réchauffé, il vaut mieux qu'ils écoutent un minimum la base de fans qui seraient potentiellement intéressés par l'objet (et ils ne sont pas Maiden qui peu(...)

18/03/2024, 08:05

pierre-2

Pourquoi tout ce venin ???Y font ce qu'ils veulent non ?

17/03/2024, 14:26

Fran

J ai adoré ce film qui m'a fait connaître ce groupe. Depuis je me repasse  leurs tubes.

17/03/2024, 14:07

Nounours dit grizzly le magnifique

J’ai pris la version cd version digipack plutôt que le vinyle car il y avait 3 titres bonus .trop tôt pour donner un avis mais je ne m’ennuie pas, sans être transcendant mais on peut pas exigeant avec ce groupe et une telle carrière. Cela dit il fai(...)

16/03/2024, 11:55

Sphincter Desecrator

UHL: un groupe qui, quand il n'est pas là, manque.Désolé...

14/03/2024, 19:31

Humungus

Bon...Pour l'instant, je ne l'ai écouté qu'une seule fois...Mais dans l'ensemble, j'ai été quelque peu déçu.La faute à un côté Power bien trop présent tout au long de l'album.

13/03/2024, 07:24

Désanusseur de mère

groupe de petites gauchiasses qui crisent si on n'emploie pas le bon pronom. FOUR

13/03/2024, 06:17

jo666

ça a l'air bien ce truc, en plus ils passent en mai à Grrrrnd Zero (69)

12/03/2024, 14:33

Cupcake Vanille

Vraiment une bien triste nouvelle...  RIP Blake 

12/03/2024, 08:25

MV

Sympa la fowce <3 

11/03/2024, 18:24

LeMoustre

Commande faite direct au label.Hâte d'écouter les nouvelles versions de The Song of Red Sonja ou The Thing in the Crypt.Meilleure nouvelle de la semaine,Merci pour la chronique en plus hyper favorable 

11/03/2024, 15:32

LeMoustre

Terrible.Déjà que le EP envoyait sévère dans la veine Wotan, early Blind Guardian ou Manowar, voici l'album !Achat obligatoire

11/03/2024, 14:55

senior canardo

toujours pas de Phobia à l'affiche.... j'y ai cru pour les 25 ans et tout  ...

11/03/2024, 07:39

LeMoustre

Miam

08/03/2024, 14:22