Foreverglade

Worm

22/10/2021

20 Buck Spin

Visiblement, la Floride, ça pue. Ça empeste même, sinon, comme expliquer que le Death Metal soit né là-bas et que le dernier album des locaux de WORM, intitulé Foreverglade en hommage à cet état soit si suintant d’horreur et dégoulinant de pus ? On garde l’image d’une région du monde aux yachts de luxe, aux costumes impeccables, aux palmiers feuillus (merci Miami Vice et le crocodile), mais visiblement, sous les pavés, il n’y a pas la plage mais des égouts qui empestent à des kilomètres à la ronde…Alors, organiser une visite guidée du territoire peut présenter certains risques pour les naseaux et la santé mentale, mais s’il faut en passer par là pour comprendre la résignation et la vilénie de ce combo aux multiples facettes, je veux bien me laisser tenter.

Multiples facettes, puisque les WORM avaient commencé leur carrière sous des auspices différents. Oh, pas plus complaisants, mas plus ciblés, louchant vers la Norvège et ses musiciens fardés de blanc et de noir, avides d’un Black Metal nihiliste et misanthrope. Depuis Gloomlord il y a deux ans, Fantomslaughter et Equimanthorn ont complètement dévié de trajectoire, et emprunté le chemin inverse de celui foulé par DAKTHRONE il y a quelques décennies. Exit le Black pour embrasser le lourd fardeau d’un Doom/Death infect, lourd, compact, empesé, et à peine strié de quelques interventions mélodiques pour tenter de le rendre plus digeste. La courbe avait séduit les amateurs d’une musique salement Heavy et lourdement sale, et il y a avait de quoi se laisser tenter : entre ces écrasement dignes d’ENCOFFINATION et ces quelques interventions harmoniques plus typiques de la Floride démonstrative des nineties, le mélange était savoureux en bouche, et méchamment pesant sur l’estomac auditif.

En deux ans, Fantomslaughter et Equimanthorn ont bien compris qu’ils avaient trouvé leur voie, et continuent donc de creuser la fosse commune destinée à ensevelir tous les fans de diSEMBOWELMENT et GOATLORD. Non que ces deux références soient les seules à même de situer la démarche macabre des floridiens, mais autant avoir l’honnêteté d’admettre qu’elles font partie des plus importantes dans le développement funèbre de la procession proposée par Foreverglade.

 

Dans les faits, ce troisième album pivot de la carrière de WORM ne déroge pas vraiment à la règle nouvellement établie. Des compositions longues et évolutives, animées d’un esprit de mysticisme, un chant en dualité caverneuse, et de longues processions qui renvoient au meilleur des enterrements de seconde classe dans un caveau effrité par le temps. Plus portés sur le béton armé que sur le marbre, les deux têtes pensantes américaines se sont cette fois entourées de L. Dusk à la batterie, et de Nihilistic Manifesto aux soli, pour proposer une construction solide, qui renvoie parfois aux strates empilées par des MY DYING BRIDE en rupture de bans gothiques (« Empire Of The Necromancers »). Lancinance, lenteur, oppression, mais esprit mélodique, nuances infimes cachées sous une épaisse couche de chaux Doom, pour un Death Metal des plus primaires qui fait honneur à son rang.

Je l’avoue, l’aspect hypnotique de l’affaire peine à cacher les ambitions du duo. Loin des facilités morbides du genre qui aime à se regarder le nombril pourrissant, Foreverglade confronte le genre à ses démons, et l’oblige à affronter son statisme. Ainsi, on pourrait facilement parler de Death/Doom progressif, tant WORM refuse l’immobilisme passif. Et dès l’intro éponyme énorme et interminable, le climat est planté, les nuages planent au-dessus de nos têtes, et on commence à sentir le vent froid et chargé d’émanations putrides nous chatouiller les narines.

L’artwork splendide de Brad Moore détaille donc le contenu de ce troisième album, qui incarne une sorte d’acmé de première partie de carrière. De son passé BM, le duo n’a gardé que cette méchanceté larvée, et ce refus des convenances. Mais on sent encore quelques pointes de violence dans les évolutions lourdes de sens, et sans tourner complètement la page, WORM utilise sa jeunesse pour préparer son âge adulte et mature. « Cloaked In Nightwinds » le prouve de ses onze minutes, qui pourtant passent comme dans un cauchemar. La mise en place est travaillée, les arrangements bien placés, les infimes accélérations aussi, tout est judicieusement choisi pour dessiner les contours d’une fin inéluctable, mais délicieusement perverse.

Mixé et masterisé par Stephen DeAcutis aux Sound Spa Productions du New-Jersey, Foreverglade bénéficie d’un son très précis, qui déroutera certainement les fans de brouet indigeste aux ingrédients imperceptibles et embrumés. Mais cette précision joue en faveur des deux musiciens, qui peuvent s’exprimer dans un contexte clair, et laisser leurs idées les plus vicieuses se développer dans la compréhension la plus totale.

En résulte un album massif, monolithique, mais aux ornements ciselés. Chacun appréciera son segment préféré, tout le monde s’accordera de la respiration indispensable « Subaqueous Funeral » qui nous évite la suffocation prématurée, et « Centuries Of Ooze » achèvera de convaincre les quelques réticents s’accrochant à la vie que WORM a accouché d’une pierre angulaire du genre, de celles sur lesquelles s’accrochent les asticots avant de nous bouffer les chairs. Une mise en terre de toute beauté aux fleurs délicatement fanées, pour une réussite absolue, aussi morbide que magnifique.  

La mort triomphe toujours, d’une manière ou d’une autre.             

 

                                                                                                                                                                                                     

Titres de l’album:

01. Foreverglade (Intro)

02. Murk Above The Dark Moor

03. Cloaked In Nightwinds

04. Empire Of The Necromancers

05. Subaqueous Funeral

06. Centuries Of Ooze


Bandcamp officiel


par mortne2001 le 02/06/2022 à 15:38
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