Ignite The Sky

Bloody Heels

10/07/2020

Frontiers Records

La old-schoolite a encore frappé, mais pas au même endroit que d’habitude. Une fois n’est pas coutume, le virus ne vient ni de Suède ni d’Allemagne ni des Etats-Unis, mais bien d’un petit pays de la mer Baltique, la Lettonie, et ses moins de deux millions d’habitants. Venant de la capitale Riga, les BLOODY HEELS ont largement eu le temps de s’y faire un nom, ainsi qu’en Europe où ils ont bien tourné depuis leur création. Création qui remonte à 2011, soit neuf années passées à composer et à proposer leur musique en live sur les scènes de pays comme la Suède, la Finlande, la Norvège, l’Allemagne, la Slovaquie, la République tchèque, la Pologne, les Pays-Bas, la Belgique et les États baltes. Depuis leur émergence, les lettons ont déjà mis sur le marché un EP (Summer Nights en 2014) et un premier longue-durée (Through Mystery en 2017), deux sorties qui ont permis d’entrevoir leur potentiel fabuleux, et leur talent pour combiner les genres et accoucher du leur. C’est donc un groupe méchamment rodé qui nous en revient après trois années de silence, et soutenu par la référence italienne Frontiers, label habitué à défendre ce genre de produit au-dessus de tout soupçon. L’attitude vintage étant devenu une norme depuis plus d’une décade, le fan se méfiera de cette nouvelle sensation à la mode, et il aura raison de rester sur ses gardes. Le phénomène de recyclage ayant produit plus de scories que de diamants, on reste toujours circonspect face à un ensemble se situant de lui-même dans un créneau passéiste, mais je tiens tout de suite à rassurer le fan potentiel. Signé sur Frontiers, BLOODY HEELS fait donc de facto partie du haut du panier, et son second LP confirme toutes les bonnes impressions dégagées par le premier. Les lettons se sont même permis de corriger quelques erreurs pour viser le sans-faute, et Ignite The Sky embrase irrémédiablement le ciel de son mélange entre AOR musclé, Hard Rock trapu et Heavy Metal pas si allégé.

Mené par le tandem Vicky White (chant) et Harry Rivers (guitare), BLOODY HEELS dispose de deux frontmen de première catégorie, la voix du premier se montrant volubile et le jeu de guitare du second agressif et fluide. Mais un groupe n’est rien sans une section rythmique solide, et celle constituée de Gunn Everett (basse) et Gus Hawk (batterie) permet aux deux hommes de laisser parler leur talent naturel. Il est d ‘ailleurs plaisant de constater que des groupes osent encore afficher une telle agressivité dans un contexte mélodique, et les parties de double de Gus Hawk permettent de dynamiser des morceaux séduisants en leur évitant de sombrer dans la mélasse radiophonique. Pourtant les hymnes proposés par le quatuor n’auraient eu aucun mal à faire de l’œil aux radios ricaines des années 80, le chanteur Vicky White définissant même la musique de son groupe comme étant une sorte de « dark AOR », ce qui n’est pas si éloigné de la réalité que ça. Dans les faits, BLOODY HEELS est le chaînon manquant entre la souplesse suédoise et le sur-mesure américain, le tout durci d’une patine allemande à la BONFIRE, et Ignite The Sky incarne la quintessence d’un Hard-Rock totalement décomplexé, qui accepte le legs gigantesque de son passé tout comme l’approche de production des années 80. Enrobé dans une production énorme qui pour une fois fait méchamment ressortir les percussions, Ignite The Sky est l’étincelle qui brille sur les barils de poudre malicieusement placés sous les futs des imposteurs de la FM rétrograde, et qui fait exploser les traîtres se contentant de reproduire des formules usées jusqu’à la corde. Ne cachons pas les faits, les lettons sont les meilleurs dans leur catégorie hybride, et osent avec leur second LP la perfection absolue qui n’existe pourtant pas. On est immédiatement happé dans ce vortex de bonne humeur qui pourtant sait se montrer plus sombre que la moyenne et ne pas se contenter de lâcher quelques harmonies faciles. Et en un seul morceau introductif et éponyme, les quatre musiciens se montrent sous le jour le plus flatteur de messies de la qualité Hard-Rock absolue, se reposant sur une rythmique sautillante et puissante pour mieux balancer la sauce d’un Hard musclé et dopé à l’euphorie.

Le coup de grâce prématuré est porté par l’imparable single « Criminal Masterminds » qui réussit le tour de force de faire sonner un tube Heavy des années 80 comme un hit alternatif de la décennie suivante. Reposant sur un riff classique mais redondant, porté par un beat jumpy renforcé de fills efficaces, ce morceau est en quelque sorte l’acmé du talent de ces musiciens hors-normes qui ont patiemment attendu d’avoir tout compris au Metal avant de se lancer dans son recyclage. Sonnant parfois comme du DOKKEN passé aux amphétamines, ou comme les POODLES relancés sur les rails de la virilité, les BLOODY HEELS marchent sur la facilité en talons aiguilles maculés de sang, mais n’oublient pas de nous la jouer finaud en laissant traîner quelques chœurs en « ho, ho, ho », histoire de montrer qu’ils ont bien pigé la stratégie imparable de DEF LEPPARD. Tout sonne juste sur ce LP, admirablement bien dosé mais sincère, efficace et créatif, et dans un sens, les lettons pourraient incarner une version reliftée des HAREM SCAREM, avec qui ils partagent cette philosophie de Hard-Rock gonflé pour sonner Heavy. Il faut dire qu’avec un guitariste de la trempe de Harry Rivers, qui riffe solide comme il soloïse facile, et un chanteur de l’envergure de Vicky White, le groupe a de quoi s’apparenter à des cousins éloignés du duo Hess/Lesperance, ce que « No Matter » confirme de sa musculature apparente. Rois du refrain qui tue sur lit de couplets drus, les musiciens jouent sur le velours d’un talent naturel, avec toujours cette basse grondante en arrière-plan qui fait trembler les murs.

L’optique du combo est d’ailleurs très bien résumée par le plombé « Sugar & Spice », qui de son titre trace les contours d’une démarche en doux-amer. Ce qui n’empêche nullement les lettons de s’éloigner parfois de leur zone de confort pour signer des morceaux encore plus pêchus que la moyenne, dont ce terriblement puissant « Farewell To Yesterday » qui sonne peut-être plus moderne, mais pas moins crédible. Alors tout y passe, même les adoucissements romantiques, et la longue suite « Black Swan » d’achever l’auditeur de son audace à la SCORPIONS/HAREM SCAREM/TYKETTO, et le tour de force de ce groupe décidément troublant est d’avoir évité la facilité suédoise et d’avoir conservé son identité. De là, les chansons se succèdent sans jamais faire baisser le niveau de qualité, les riffs s’alignent et restent tous dans la tête, et l’album de se proposer comme incontournable d’une année 2020 troublée, mais aux peurs rassurées par cette sécurité de mélodies en force. On craque complètement pour cette musique décomplexée, et si l’image du groupe les assimile à un courant Hair Metal/Sleaze en vogue à la fin des eighties, Ignite The Sky évite l’embourbement d’une Pop déguisée en Hard-Rock avec force bouclettes et autre lipstick. Une perle de nacre cachée dans la production de notre temps, et surtout, un énorme album de Metal sans barrière ni tabou. Lettonia rocks !!!!!        

                                                             

Titres de l’album:

01. Ignite The Sky

02. Criminal Masterminds

03. No Matter

04. Sugar & Spice

05. Farewell To Yesterday

06. Black Swan

07. Stand Your Ground

08. Thin Line

09. Silhouette

10. Healing Waters

11. Streets Of Misery


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par mortne2001 le 08/08/2020 à 18:54
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