Infernalia

Kryptonomicon

25/11/2022

Punishment 18 Records

Quatre délinquants plus très juvéniles, tous cachés derrière des lunettes d’aviateur, histoire de nous la jouer Top Gun de l’extrême. Une intro grandiloquente à souhait, une petite réputation à mettre en avant, et un nouvel album que Punishment 18 Records loue de toutes ses ressources promotionnelles. Voilà peu ou prou les présentations faites, et il est maintenant temps de parler d’Infernalia, deuxième album des italiens de KRYPTONOMICON, album qui pousse les débats dans leurs derniers retranchements, et qui met en pratique un flair incomparable pour teinter de bestialité un Death/Black de fort bonne facture.

Un an à peine après leur entrée en matière Nekromantikos, les quatre musiciens de Monfalcone reviennent donc nous conter fleurette, et si ce premier jet sentait déjà bon la brutalité transalpine, ce nouvel effort appuie encore un peu plus sur l’odeur alléchante, entre purin de ferme du sud de l’Italie et liquide d’embaumement napolitain après le décès d’une figure locale de la pègre. Luca (chant), Stefano (guitare), Frank (basse) et Randy (batterie) enfoncent donc le clou avec une foi qui laisse admiratif, mais laissez-moi vous préciser que cette bande est tout sauf une assemblée de punks conchiant le solfège et les bonnes manières mélodiques. En effet, Infernalia est tout sauf un coup de boule suivi d’un coup de pompe à la suite d’une algarade, et se présente volontiers comme une méthode de torture ou d’une discussion un peu musclée mais argumentée.

« I.n.r.i », le premier morceau met d’ailleurs les choses au point. Rythmiquement imparable, en crossover générique (Thrash/Death/Black), ce titre a le mérite de nous aiguiller sur la bonne piste, celle d’un extrême raisonnable mais sombre, tout sauf paillard ou second degré, malgré le look subtilement provocant des protagonistes. On pourrait même admettre l’influence majeure de CELTIC FROST sur l’aplatissant « Kiss in the Gethsemane », qui nous ramène à l’époque bénie de To Mega Therion. Des gens de bon goût donc, lettrés de l’extrême, qui ont troqué les pseudos débiles et les cartouchières contre un sens de la précision et de l’accroche.

Il est de fait impossible de ranger ces italiens dans une petite case trop réductrice. Avec des titres flirtant ou couchant carrément avec les cinq ou six minutes, des emballements soudains et barbares, mais aussi des accalmies sournoises, KRYPTONOMICON fait honneur à son rang et à la nouvelle génération italienne, qui refuse depuis des années de se cantonner à un rôle de figurant un peu trop bruyant.

Ceci étant dit, lorsque le quatuor appuie sur le champignon, les gamins virevoltent dans le fond. Ainsi, « La Irà De Dios » promet de belles secousses sur la route du camp de scouts, dans un registre de Thrash noirci au charbon. Picorant les grains de la discorde, KRYPTONOMICON louche un peu de tous les côtés, mais se pose finalement en digne successeur d’HELLHAMMER, VENOM et IMPALED NAZARENE, se montrant terriblement efficace en terrain boueux et manœuvres biaiseuses. « Delirium Imperatoris », à la simplicité galvanisante retrouve l’impulsion des premiers acteurs de l’underground, entre la Suisse, l’Angleterre et les Etats-Unis, se permet quelques fantaisies débridées typiquement locales (« La Dame Du Christ »), et quelques attaques de premier choix, toujours sur ce mid tempo écrasant malmené par une double grosse caisse omniprésente.

Quelques chœurs féroces et bien placés, une épure grave à la guitare, un chant rauque et sous-mixé, une méthode éprouvée pour séduire tous les pervers de la violence saine, et « Innocence and Death » de se poser en hit impitoyable, confirmant que le quatuor peut rester efficace sur la durée.    

Si les soli sont propres mais sans fioritures, si les arrangements sont ad hoc, si l’ambiance générale sent le renfermé et le confiné, c’est pour mieux mettre en avant une personnalité plus ou moins grognon, et des tendances à la recherche d’atmosphères inquiétantes (« Infernalia », transition purement Dark Ambient, et qui permet de rester immergé entre deux attaques frontales ou de côté).

KRYPTONOMICON sait tester simple et direct, mais n’oublie pas pour autant ses ambitions au placard. Ainsi, le très développé et presque progressif « The Garden of Delights-Temptation » alourdit encore plus l’ambiance et ne laisse filtrer qu’un air moite et chargé en peur, avec une fois encore un emprunt plus ou moins direct au bestiaire de Tom G Warrior et ses diverses créatures néfastes.

On peut s’interroger par contre en remarquant dans le tracklisting cette reprise de la scie radiophonique « Let’s Dance » de notre cher Bowie, mais en l’écoutant, on comprend mieux ce choix, puisque la dite reprise teinte de Doom/Indus malsain la Pop du regretté David, au point qu’il est quasiment impossible de reconnaître la chanson sans faire un effort considérable. Loin des reprises faciles d’ATROCITY, KRYPTONOMICON conserve sa singularité, et s’approprie ce classique, comme on vole un vase chez des amis.

Un bon album, souvent surprenant, loin des facilités old-school, qui séduit de son parfum étrange et hypnotise de ses boucles. Dès lors, vous n’avez plus qu’à enfiler vos chaussures rouges et à danser le blues. Mais un blues bizarre dans une salle de bal décatie.   

  

         

Titres de l’album :

01. Portae Inferi                    

02. I.n.r.i                    

03. Kiss in the Gethsemane              

04. La Irà De Dios                

05. Delirium Imperatoris                   

06. La Dame Du Christ                    

07. Innocence and Death                  

08. Infernalia             

09. The Garden of Delights-Temptation                  

10. The Path of Lust             

11. Let's Dance (David Bowie cover)


Site officiel

Facebook officiel

Bandcamp officiel


par mortne2001 le 30/11/2022 à 17:15
80 %    351

Commentaires (0) | Ajouter un commentaire

pas de commentaire enregistré

Ajouter un commentaire


Derniers articles

Enslaved + Svalbard + Wayfarer

RBD 20/03/2024

Live Report

Voyage au centre de la scène : BLOODY RITUAL

Jus de cadavre 17/03/2024

Vidéos

Crisix + Dead Winds

RBD 20/02/2024

Live Report

Abbath + Toxic Holocaust + Hellripper

RBD 21/01/2024

Live Report

1984

mortne2001 10/01/2024

From the past
Concerts à 7 jours
Tags
Photos stream
Derniers commentaires
Jus de cadavre

Pas mal ! Très MGLA oui c'est clair. J'y trouve (un peu) de Satyricon aussi dans les passages Black'n Roll. A creuser.

29/03/2024, 13:41

Gargan

J'ai cru un instant que c'était celui qui avait joué sur la compile metal militia... c'était SarcaZm, dommage.

29/03/2024, 08:37

Simony

C'est justement ce relent de Hardcore qui en fait du Thrashcore en condition live qui m'a dérangé. Le placement du chant fait vraiment moderne, c'est con mais ça m'a un peu rebuté, dommage parce que musicalement c'est vraiment pas mal.

28/03/2024, 16:07

Tourista

L'album de Pâques !  

27/03/2024, 19:56

MorbidOM

Découvert l'an dernier dans un mini festival à Toulon avec Aorlhac en tête d'affiche, j'avais bien accroché et acheté leur cd (le précédent du coup) qui m'avait un peu déçu (difficile de redre justice à une m(...)

27/03/2024, 00:16

Saul D

Ben si Cannibal Corpse est une légende, Immolation aussi, non? Ils avaient tourné ensemble en 1996 ( je les avais vus à la Laiterie, avec Inhumate en première partie...)...

26/03/2024, 13:16

Bulbe

Enorme !

26/03/2024, 08:06

Vivement le prochain Ep. Ça envoie du lourd

Putain c'est vachement bien 

26/03/2024, 00:15

Gargan

Je viens de tomber par hasard sur ce docu à leur sujet, je sais que deux-trois ici pourraient être intéressés : TULUS - 3 DECADES OF UNCOMPROMISING BLACK METAL (FULL DOCUMENTARY) (youtube.com)

25/03/2024, 20:05

Humungus

C'est très loin d'être pourri, mais j'préfère tout de même de loin "Ozzmosis", "Down to earth" ou "Black rain"...

25/03/2024, 09:21

RBD

Tout le mérite en revient à notre hôte, je n'ai influé en rien sur les choix successifs. Autrement dit, cela me convenait aussi.

24/03/2024, 19:53

Buck Dancer

J'aime beaucoup. Parcours sans faute jusqu'au septième morceau. Du death classieux moins extrême que le premier album mais plus varié. Les délires vocaux de Vincent passent aussi très bien (ce qui n'aurait pas été le cas chez Morbid).(...)

24/03/2024, 13:34

Humungus

Je plussoie à mort ta bande son d'after hé hé hé...

23/03/2024, 11:02

Antidebilos suce mon zob

@antidebilos : t'es vexé, sac à foutre.

22/03/2024, 15:49

Oliv

Et le plan r fest ! 

22/03/2024, 15:21

antidebilos

"groupe de petites gauchiasses qui crisent si on n'emploie pas le bon pronom" : allez, retourne écouter tes groupes de NSBM de fond de toilettes et épargne-nous tes commentaires ridicules

22/03/2024, 09:04

Ivan Grozny

Tournée vue à Paris, merci pour le report.

21/03/2024, 21:01

Orphan

Tres bonne news des le matin. 

21/03/2024, 08:08

LeMoustre

A minima c'est assez inutile, rarement intéressant même si l'idée n'est pas nouvelle. Voivod l'a fait y'a peu, c'est quand même assez anecdotique sur le rendu final. Les morceaux en version d'origine se suffisant a eux mêmes.

20/03/2024, 12:18

Gargan

Ce son de toms n’existe plus depuis schizophrenia

19/03/2024, 22:06