La météo étant propice à des introspections pas toujours très gaies, imaginons que je prenne le temps de vous parler de Funeral Doom, de DSBM, de dérives existentielles bruitistes ou de complaintes lourdes et excessives, de manière allusive, mais légèrement insistante. Prendriez-vous votre corde à votre cou, ou accepteriez-vous d’ouvrir votre esprit l’espace d’un instant pour tenter d’en savoir plus ? Si tel est le cas, je ne saurais que louer votre patience et votre tolérance, puisque l’œuvre musicale que je souhaite vous présenter, quoique fort peu inspirante pour vous galvaniser, saura vous extirper de votre léthargie le temps de trois morceaux, aussi longs qu’un hiver suédois. Mais attention, si toutefois le LP en question présente bien des qualités rythmiques de composition, il n’en reste pas moins très difficile d’accès, ne serait-ce que par sa durée, apte à rebuter les plus papillonneurs d’entre vous. La carrière de YHDARL est d’ailleurs abondamment émaillée d’exactions toutes plus abrasives les unes que les autres, et ce, depuis sa création en tant que one-man-band du côté de Mons, Belgique, en 2006. A l’actif du projet devenu duo entre-temps par l’adjonction de Larvalis Lethæus au chant, huit LP, dont ce Loss publié cette année, mais aussi un nombre gonflé de démos, compilations et EP’s, pour une distribution la plupart du temps assez confidentielle mais gratuite, histoire de convertir quelques âmes perdues.
Celle de l’instigateur de l’aventure, Déhà (Olmo Lipani) est pervertie depuis longtemps, mais surtout dispersée entre plusieurs concepts annexes qu’il anime de sa créativité débordante, dont WE ALL DIE LAUGHING, SLOW, MERDA MUNDI, MALADIE, IMBER LUMINIS, et quelques autres qui attestent de sa soif de création, et qui offrent chacun une facette du maestro. Mais celle présentée par YHDARL est bien l’une des plus étranges de toutes, et cette perte que le compositeur se propose de partager avec nous n’est certainement pas celle du talent, qui éclabousse les trois compositions présentées sur ce nouvel effort licencié par les bons soins d’I, Voidhanger.
Au programme, trois titres donc, qui une fois mis bout à bout forment une symphonie de près d’une heure. Rien de bien inhabituel au regard des standards du genre, surtout lorsqu’on réalise à quel point ces mêmes titres fourmillent d’idées toutes plus pertinentes les unes que les autres. Il faut dire que le projet Loss fut de longue haleine, puisqu’entamé il y a six ou sept ans. Ayant dû faire face à de nombreux problèmes contextuels (disques durs cramés, sauvegardes perdues, et autres petits bonheurs du hasard), il est donc resté beaucoup plus longtemps que prévu dans l’ombre, mais en émerge enfin, pour témoigner du changement de personnalité de son auteur. Dernier album composé alors que Déhà était encore sous l’emprise de substances diverses (il est depuis devenu sobre), il témoigne d’un mal-être patent qui transpire de chaque cri, de chaque break, et de chaque progression, à tel point qu’il se pose presque en témoignage du quotidien d’un musicien aux traumas si nombreux qu’une simple thérapie ne suffirait pas. Pour autant, et aussi triste et épais soit-il, Loss est animé d’une rage substantielle, et ne se contente pas de répéter à l’envi les plans éculés d’un Doom à tendance Drone, ni les litanies démoniaques d’un Black sur le point d’avaler le poison de sa lie. Au contraire, il ose provoquer des sensations d’ordinaire absentes de telles réalisations, et se veut plus agressif que contemplatif, même si les cassures harmoniques l’aèrent avec une régularité exemplaire. Bien loin des jérémiades usuelles, YHDARL apporte avec ce huitième album une cohérence à l’ensemble de son travail, et ose même jouer le jeu de la quasi perfection, tant les trois chansons développées font preuve d’une indéniable maturité dans la résignation, et d’une magnificence dans l’introspection. Et avec une moyenne d’un gros quart d’heure par intervention, la gageure était d’autant plus difficile à relever.
Mais elle l’est, et avec brio, dès l’entame « Ignite - Ashes », se plaçant sous des auspices de BM assez traditionnel, à la violence sourde factuelle, et aux nombreuses tergiversations placées sur un chemin de déraison. Déraison, mais pas dérision, puisque Loss échappe à tous les clichés les plus souillés du genre, en se concentrant sur l’efficacité, et la persuasion. Le chant de Larvalis est toujours aussi cauchemardesque, dans une veine à la SHINING sans perte d’humanité totale, tandis que le canevas instrumental tissé par Déhà est toujours aussi tendu, dans la gravité comme dans l’apaisement, ce qui nous permet de constater que le projet se rapproche de plus en plus de frontières très personnelles entre Black, Drone et Doom, ces deux derniers styles étant la plupart du temps occultés, pour être substitués par un Post Black vraiment novateur et écorché. La souffrance est donc réelle, et non simulée, mais le plaisir dégagé par ces trois longs chapitres est bien concret, et plus complexe qu’il n’y parait. Même si les structures sont souvent basées sur le même schéma (entame tonitruante, accalmie centrale, et digression finale en pointillés), un morceau de l’ampleur de « Despise - Pity », et ses vingt minutes de parcours au long cours fait office de nouveau mètre-étalon, tant il s’ingénie à contredire tous les préceptes du Funeral Black à grands coups de sensibilité personnelle et d’animosité. On y lit entre les lignes, et même si la lourdeur se taille la part du lion, elle est magnifiée par des lignes vocales à la puissance inhumaine, et par des riffs vraiment majestueux, aussi pesants qu’ils ne sont harmonieux. Gravité, ténèbres, arrangements épars mais conséquents (des cris au loin qui ne suggèrent rien de bon), et progression en ambition, ce huitième LP des belges est une totale réussite, qui évite tous les pièges, et en place de nouveau, histoire de s’assurer ne pas être suivi.
Mais qui pourrait suivre les pas de ces deux hommes, qui en guise de final nous livrent une homélie macabre de la trempe de « Sources - Nihil », qui plante le décorum infernal d’Hadès personnels, livrant leur propre version du purgatoire d’un homme face à ses démons ? Seul segment à vraiment jouer le jeu du vague à l’âme Funeral Doom sur une bonne partie de son crescendo, il est aussi la conclusion rêvée d’un LP varié, tergiversant pour mieux se montrer rassurant et assurant, et ne tolérant que les ingrédients les plus indispensables de chaque genre pour mieux élaborer le sien. Et cette brutale accélération finale de nous laisser face à des interrogations, nous demandant finalement quel style correspond le mieux à un travail qui se libère de tout carcan qu’on pourrait lui imposer ?
Le mieux est encore d’apprécier Loss pour ce qu’il est, la perte des oripeaux du passé pour se tourner vers un présent pas forcément plus heureux, mais au moins ressenti de tous ses sens. Et s’il est une perte pour ses auteurs, il est surtout un gigantesque gain pour ses auditeurs.
Titres de l'album:
Le troll DPD (quel beau nom !) en tête de gondole dans la fosse. Comment c'est possible ça genre de gus ?
11/07/2025, 13:36
Mdr y'en a qui ont un niveau de goûts musicaux digne de la fosse des Mariannes. JPP de lol quand je lis ça Tout est dit.
11/07/2025, 13:34
@Humungus : mdr. On s'est compris.@Buckdancer : oui j'imagine que tu as raison
11/07/2025, 13:32
Un troll sur metalnews.fr c'est comme un exibitioniste dans le désert, il peut arriver à capter l'attention de quelqu'un de temps en temps mais tu sens que niveau stratégie c'est pas optimal.
11/07/2025, 13:28
Le Hellfest n'est plus qu'un fest mainstreem comme tant d'autres et n'a plus rien à voir avec ses origines.Le nombre de blaireaux au M2 y est devenu affolant au point qu'il n'y a que ça.Pour ma part, je préfère aller dans les(...)
11/07/2025, 12:42
Deafheaven > Black Sabbath d'ailleurs, aucune hésitation. quelle chanson de Black Sabbath atteint le niveau d'intensité de Dream House ?
10/07/2025, 21:43
T'aimes ça hein le cuir et le metal salace, je préfère Patrick Sébastien, je le trouve moins pédé. Le petit bonhomme en mousse on s'en rappelle, ça c'est une chanson qu'on oublie pas, comme ce que te chantais ta maman..
10/07/2025, 21:36
@DPD : putain, cette merde de Chat Pile, de la noise bâtarde gay friendly qui pompe Godflesh et Korn. Et dans un autre post, tu parles de Deafheaven. Mais mec, arrête de donner des leçons et va donc faire une Bun Hay Mean.
10/07/2025, 21:20
Et ce qui s'est fait de marquant question death c'était le dernier Dead Congregation et le surprenant Reign Supreme de Dying Fetus. Et qu'on me parle pas de Blood Incantation tout est impeccable, il y a beaucoup de travail derrière, mais aucune symbiose entre les part(...)
10/07/2025, 15:17
L'underground est pas une qualité en lui-même, le dernier concert que j'ai vu t'avais les groupes qui enchaînent les plans thrash-death-black sans aucune cohérence, du sous Deathspell Omega (désolé mais dans le black dissonant tu seras toujou(...)
10/07/2025, 15:09
C'est à peu près le constat que nous sommes plusieurs à faire me semble-t-il, mais je mettrais tout de même Converge, The Dillinger Escape Plan ou Botch ailleurs que dans le metalcore. Mais pourquoi pas. ;-)@Jus de cadavre "Je crois qu'il faut acce(...)
10/07/2025, 14:34
@GPTQBCOVJe suis horrifié par l'idée de finir comme ça, voir Darkthrone se réduire aux lives jouant la fameuses trilogie pour payer les affaires courantes notamment des frais de santé, la social-démocratie m'en sauvera j'imagin(...)
10/07/2025, 14:16
Non mais même le metalcore t'avais la grande époque de Converge, Dillinger Escape Plan, Botch et compagnie...certains parleraient de hardcore chaotique mais bon. T'avais pas que de la musique lisse à refrain, ce n'est pas le diable que certains veulent peindre.&(...)
10/07/2025, 13:47
Si le Metalcore était à la mode il y a 20 ans, disons alors que (malheureusement) cela perdure car 1/4 des groupes jouant dans de gros et moyens fests ont un qualificatif se terminant par "core".
10/07/2025, 13:22