Reveal the Ravage

Prestige

13/08/2021

Massacre Records

La première étape se nomme la « promesse », où le magicien montre au public quelque chose qui semble ordinaire, mais ne l'est pas. 

La deuxième étape consiste en l'exécution, le « tour », où le magicien rend l'acte ordinaire extraordinaire. 

Le « prestige », étape finale de l'illusion, est la partie du tour de magie où l'imprévu se produit.

 

Dans le cas des finlandais, l’analogie est claire. La promesse, leur début de carrière, tonitruant, rapide, impressionnant. Le tour, une séparation abrupte, et des destins qui se décroisent. Et puis le fameux PRESTIGE, la reformation, vingt-neuf ans après leur dernier album, Parasites in Paradise. Les proches et initiés savaient que quelque chose se tramait, puisque les quatre membres originaux avaient remis le couvert pour des festivals, le réenregistrement d’une démo pour fêter ses trente ans, et des projets plein le coffre magique. Avec trois quarts de la formation historique rempilant (le batteur originel Tero Karppinen a rangé ses baguettes au placard), ce comeback inopiné pour les néophytes a donc des allures de tour de magie, à l’instar des lumières braquées récemment sur MORDRED et ACID REIGN, pour n’en citer que deux. Mais la véritable question, au-delà de la surprise, restait en suspens : ce retour était-il indispensable, et le PRESTIGE 2021 a-t-il encore la même aura que celui de la fin des années 80 ?

A l’époque, le combo est un précurseur de la scène Thrash finlandaise, peu prolifique, et les jeunes musiciens avides de violence représentaient en quelque sorte l’avant-garde du déferlement à venir. Contrat rapidement trouvé, mais un premier album somme toute assez moyen malgré son caractère joyeux et son titre improbable. C’est par le biais d’Attack Against Gnomes que j’ai fait connaissance avec la bande de Tampere, mais j’avoue qu’à l’époque, cette rencontre ne m’avait laissé qu’un souvenir fugace et anecdotique. Il me fallut attendre le plus professionnel Selling the Salvation pour comprendre que ces instrumentistes avaient quelque chose à offrir, mais il était déjà presque trop tard. Trop de concerts, trop d’agitation à un si jeune âge, des musiciens qui rentrent chez eux en Hollande, d’autres qui se tournent vers le Psychobilly, et puis le silence, long et durable.

Aujourd’hui, Massacre Records a le plaisir de le rompre via le quatrième LP officiel de la bande, renouvelée d’un batteur bien intégré (Matti ”Matson” Johansson, qui a quand même martyrisé ses futs au sein de KORPIKLAANI pendant dix-sept ans), mais aux racines fermement plantées dans la terre des années 80. Ari Karppinen (guitare/chœurs), Aku Kytölä (chant/basse) et Jan "Örkki" Yrlund (guitare/chœurs), les pères fondateurs remettent donc le couvert avec un son plus actuel, et une épaisseur de circonstance. Surfant sur la vague old-school Thrash avec la crédibilité des vieux loups qui n’ont plus peur des rouleaux depuis longtemps, les PRESTIGE nous proposent donc leur dernier tour de magie, à base de riffs solides, de parties rythmiques conséquentes, et de lignes de chant écorchées et envoutantes.

Inutile de se mentir, si le nom de PRESTIGE reste fameux dans sa Finlande natale, il n’est qu’une anecdote plaisante de bas de page dans l’encyclopédie du Thrash européen. Ses trois albums, aussi agréables furent-ils n’ont jamais eu l’envergure des chefs d’œuvre du cru, ni de perles perdues au fond de l’océan et découvertes par des pêcheurs de l’extrême. Mais la donne risque de changer aujourd’hui, puisque les musiciens ont gagné en maturité de composition, comprenant que la simple étiquette Thrash sous un drapeau exotique n’était pas un argument majeur. Alors, une production impeccable, une attitude irréprochable, du sérieux dans l’exécution, mais toujours cet humour qui permet de les distinguer de la masse de philosophes sociaux et écologiques en vogue dans le Thrash depuis le début des années 90.

Aujourd’hui, le quatuor est assez proche d’un ASSASSIN en version plus modérée, mais ce Reveal the Ravage se permet d’autres citations assez intéressantes dans les faits. On y retrouve l’essentiel de la scène légendaire de la fin des eighties, un peu de TESTAMENT, beaucoup de brutalité allemande, et quelques traces de finesse nordique dans la fluidité des plans. Les chœurs proéminents prouvent que les enseignements DESTRUCTION/TANKARD ne sont pas restés lettre morte en Finlande, et un titre aussi pugnace que « You Weep » aurait largement eu sa place sur un album aussi choc qu’Interstellar Experience. Tâtant le terrain avec prudence, les quatre compères lâchent en éclaireur un morceau d’une banalité Thrash lénifiante, « Innocent », qui trempe ses orteils dans l’eau pour voir si une baignade complète est envisageable. Mais en bons singes qui ont depuis longtemps appris à faire la grimace, les PRESTIGE laissent passer l’orage en première partie de métrage pour lâcher leurs coups les plus élaborés en seconde.

« In Remains » ose enfin imposer une cadence d’abattage plus conséquente, permettant à Matti ”Matson” Johansson de nous éblouir de ses fills à la John Dette, tandis que le finaud « Ready? » pose une question mid qui n’appelle qu’une seule réponse : oui, et le headbanging sera fatal.

Pas vraiment novateur, ce quatrième longue-durée de la bande est pourtant leur plus conséquent. Dans un registre de formalisme indéniable, Reveal the Ravage fait montre d’un esprit revanchard sur le destin, et semble s’obstiner à combler les trous et récupérer les années perdues. Efficace à défaut d’être surprenant, il se laisse toutefois aller à quelques fantaisies, comme cet épilogue mélodique « Prime Time » qui table sur une progression lourde pour faire monter la température dans les derniers instants.

Solide, valide, PRESTIGE revient donc en grande forme imposer son nom. Et si le tour de magie n’est pas digne des plus grandes soirées de Vegas, s’il ne fait pas disparaitre de gratte-ciel à la mode David Copperfield, il n’en reste pas moins un fameux moyen de détourner l’attention pour occuper à nouveau le terrain.         

  

                                                                                                                                                                                                        

Titres de l’album:

01. Innocent

02. Burn My Eyes

03. Blessed Be

04. Pick Your Poison

05. Exit

06. You Weep

07. In Remains

08. Ready?

09. Self Destruct

10. Prime Time


Site officiel

Facebook officiel


par mortne2001 le 27/03/2022 à 17:27
80 %    467

Commentaires (0) | Ajouter un commentaire

pas de commentaire enregistré

Ajouter un commentaire


Derniers articles

Midnight + Cyclone + High Command // Paris

Mold_Putrefaction 24/04/2024

Live Report

DIONYSIAQUE + JADE @La Chaouée

Simony 23/04/2024

Live Report

Enslaved + Svalbard + Wayfarer

RBD 20/03/2024

Live Report

Voyage au centre de la scène : BLOODY RITUAL

Jus de cadavre 17/03/2024

Vidéos

Crisix + Dead Winds

RBD 20/02/2024

Live Report
Concerts à 7 jours
Tags
Photos stream
Derniers commentaires
DPD

Mes confuses malgré mon instinct qui tapait dans le juste, rien avoir avec le gaillard à qui je pensais.

24/04/2024, 14:26

RBD

Vu récemment avec Napalm Death, et ça faisait plaisir de voir que beaucoup de gens connaissent leur Histoire du Death Metal car il y avait de vrais fans. Surtout, la formule D-Beat basique et efficace du père Speckmann fonctionne bien en live 

23/04/2024, 09:55

LeMoustre

Excellent disque avec un gros point fort sur le riffing atomique. La pochette m'évoque clairement celle de Nothingface, version bio-mécanique

22/04/2024, 18:04

Arioch91

Ca fleure bon le vieux Kreator période Pleasure to Kill ! Prod' crade, aux antipodes des trucs surproduits de certains groupes et quand ça speede, ça rigole pas.

21/04/2024, 19:52

Poderosos/Magnificencia/Técnica Suprema

Los Maestros del BRUTAL DEATH GRIND

21/04/2024, 19:50

Pomah

+1 Gargan, influence Mgla je trouve par moment. 

21/04/2024, 09:20

Jus de cadavre

Là clairement le label est dans son droit à 100%. Warner a racheté l'ancien label de Kickback, ils en font ce qu'ils veulent du catalogue. Après, l'élégance, une telle multinationale elle s'en beurre la raie. Mais je peux comprendre qu(...)

20/04/2024, 23:36

Tourista

Mouiii, pas faux. Les gonzes ont signé.Mais ça me rappelle Peter Steele qui avait voulu défenestrer un type dans les bureaux de Roadrunner après avoir découvert que le label ressortait les albums de Ca(...)

20/04/2024, 20:06

Tourista

Devinez où il se Lemmy. (ne me raccompagnez pas, je sors tout seul)

20/04/2024, 19:58

Grosse pute

Attention, les mecs ne se font pas "enfler". C'est juste que Warner ne leur a pas demandé leur avis pour rééditer le bazar et les mecs parlent donc d'édition pirate, alors que Warner a bien les droits sur le disque. Après, Kickback, ce ne son(...)

20/04/2024, 06:26

Tourista

Désolé pour les coquilles monstrueuses.  Merci la saisie automatique.

19/04/2024, 20:51

Tourista

Non bien sûr je plaisantais, M'sieur Heaulme. Un artiste qui se fait enfler a mille fois raison d'en parler !   Et je sais malheureusement de quoi je parle.Respect pour Kickback. Content que tu les pu voir ce docu.

19/04/2024, 18:08

Humungus

@Tourista :- "On s'en cogne"Bah non...- Tu t'es achement bien rattrapé avec ce docu qui était totalement passé à côté de mes radars.Exceptionnel.C'est pas C8 qui passerait ça bordel...

19/04/2024, 15:54

grosse pute

Au lieu d'aller baiser des gamines et des ladyboys à Bangkok, Stephan aurait dû apprendre à lire les contrats qu'il signe.

19/04/2024, 15:20

Humungus

Ouhlala miam miam !!! !!!! !!!

19/04/2024, 10:35

Tourista

Désolé, c'est bien SODOM et non....   Putain de correcteur !  

19/04/2024, 07:52

Tourista

On s'en cogne.   Non j'en profite juste pour dire à ceux qui ne l'auraient pas encor(...)

19/04/2024, 07:52

Arioch91

J'aime bien ! Ajouté à ma shopping list.

18/04/2024, 19:48

Saul D

" Marianne" c'est pour miss Schiappa? ok je sors :-)

18/04/2024, 17:12

Gargan

Y'a du riff polonais.

17/04/2024, 08:12