Les YAWN ont eu un sacré culot au moment de se baptiser. En effet, lorsqu’on pratique une musique instrumentale, à la croisée des chemins, pas vraiment Post mais un peu quand même, expérimentale, reposant sur des textures, des ambiances, des empilages de sons, des humeurs et des couleurs, il est pour le moins provocateur de prononcer le mot « bâillement » avant même d’avoir persuadé l’auditeur du bien-fondé de votre démarche artistique. Et avec leur dégaine d’élèves en archi ou en histoire de l’art, ces cinq musiciens venus du froid n’ont pas mis tous les atouts de leur côté, laissant délibérément la musique leur servir d’image et de concept en refusant les facilités promotionnelles d’usage. Mais l’attitude est la meilleure, puisque le premier album de cette bande hétéroclite est justement de ceux qui parlent pour eux-mêmes, sans justement prononcer le moindre mot. Let the music do the talking disait notre bon vieux Joe Perry, et c’est justement le concept proposé ici.
Formé il y a peu, ce quintet (Torfinn Lysne - guitare, Oskar Johnsen Rydh - batterie, Mike McCormick - guitare/électronique, Simen Wie - basse et Tarjei Kjerland Lienig - synthés) a donc choisi la voie la moins diplomatique pour se présenter au public. Public norvégien qui le connaît déjà pour l’avoir admiré durant un concert précédant de justesse l’arrivée de la COVID sur les côtes norvégiennes, et qui a totalement craqué pour cette musique décomplexée mais complexe, riche, épaisse et légère à la fois, et qui fait tout autant appel au Rock progressif le plus dru qu’au Djent le plus pondéré.
Mais ça n’est évidemment pas tout.
Sur Materialism, les courts morceaux se veulent aussi impromptus que possible. Ils répondent d’ailleurs à des critères d’improvisation comme l’exige le Jazz le plus classique, mais pourtant, cette musique étrange venue d’ailleurs n’est pas élitiste, et donc, pas réservé aux musiciens désireux de se faire accepter par leurs pairs. On retrouve une certaine forme de dadaïsme, celui prôné par le Zappa des jeunes années, de l’agressivité élaborée à la ANIMALS AS LEADERS, des climats plus inquiétants, reposant sur des principes d’agression grave et de sons émanant de synthés autoritaires, mais aussi des harmonies superbes, et des mélodies concentrées qui réfutent le titre même de l’album. Materialism ne l’est donc pas, incite à la rêverie, tout du moins à l’imagination, alors que le déroulé de ce premier album laisse place à une certaine logique.
YAWN suggère donc l’ennui, mais ne le provoque jamais. D’une part, parce que son album est court, et par extension, parce que chaque morceau ne grappille que quelques précieuses minutes essentielles avant de laisser place au suivant. Ainsi, les émotions, les couleurs se succèdent comme sur un tableau peint en live, sous vos oreilles, et si le quintet a délibérément placé en ouverture son morceau le plus agressif, ne vous laissez pas leurrer par cette tentative de séduction brutale : ici, le Djent n’est qu’une composante parmi tant d’autres, et surtout pas un but. D’ailleurs « Fall Out » le précise immédiatement de ses bruits de sous-marin et de ses percussions tribales bancales. On comprend dès lors que le voyage ne va pas être tranquille, et que la mer d’huile risque de se transformer assez rapidement en vagues solitaires mettant à mal l’embarcation.
Le frêle esquif vogue donc en prenant soin de berner ses voiles en cas de bourrasque, mais prend quand même quelques risques avec la météo musicale. Alors que le vent souffle, le groupe souffle lui aussi, exhalant d’une colère presque néo-Thrash, sans jamais se départir de cette fluidité instrumentale qui le caractérise. Mais le track-by-track est interdit ici, et ce, pour une bonne raison : le plaisir de la découverte, et cette sensation d’être libre et trimbalé partout sans avoir le contrôle et pouvoir lâcher prise.
De là, les cocottes de guitare, les soli jazzy, les numéros de funambule d’une rythmique à l’aise sur sa corde, les attaques électroniques façon space-invaders, les numéros de cirque en synthés majeurs, tout y passe, et pour qui se sent capable de renoncer à des principes trop bien établis, Materialism est un trip en immersion totale, utilisant toutes les possibilités de la musique Rock et Ambient moderne pour parvenir à ses fins.
Vous réveiller d’une réalité trop cauchemardesque pour vous embringuer dans un rêve certes court, mais cathartique.
Titres de l’album:
01. Cement III : Gobsmack (2:35)
02. Cement III : Fall Out (1:50)
03. Cement III : Restart, Reload, Rebuild (3:35)
04. Chaos I : Artificial Superstition (2:34)
05. Chaos I : Greed (1:51)
06. Chaos I : ISM (3:21)
07. Chaos I : Untelligence (1:26)
08. Chaos I : Order (0:40)
09. Lachrymator II : Lignite (2:28)
10. Lachrymator II : Erebus & Terror (2:33)
11. Lachrymator II : Tripwire (2:36)
12. Lachrymator II : Unstoppable force (1:57)
13. Tokamak IV : Immovable Object (2:45)
14. Tokamak IV : Critical Mass (1:21)
15. Tokamak IV : Fluorescence & Entropy (3:48)
16. Tokamak IV : Confluence (2:03)
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@Ivan : la scène metal est un ehpad géant, aucun intérêt de suivre de vieux grigous qui sucrent les fraises.
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