Sisters of Darkness

Marthe

26/06/2020

Caligari Records

Derrière ce prénom féminin et francophone de MARTHE, se cache un autre prénom, plus latin celui-là. On retrouve en effet aux commandes de ce projet la musicienne italienne Marzia, résidente de Bologne qui officie en tant que batteuse au sein des groupes D-beat KONTATTO et TUONO ou comme guitariste au sein du combo Deathrock HORROR VACUI. Une instrumentiste à l’emploi du temps chargé donc, adepte de violence musicale, mais qui depuis des années n’a qu’un seul rêve : enregistrer un pur album de Metal sous son propre chef. C’est ainsi que la batteuse/guitariste s’est décidé depuis deux ans à fixer sur bande ses idées, et à transformer son appartement en studio d’enregistrement, faisant tout elle-même pour respecter cet esprit DIY qu’elle affectionne tant. En collectant tous les riffs enregistrés sur son téléphone depuis quelques années, et en maniant la batterie électronique, Marzia a fini par accoucher d’un EP l’année dernière en autoproduction, suscitant l’intérêt du label underground Caligari Records. Le label a donc ressorti le produit en version cassette de luxe, tirant cent-cinquante exemplaires de l’objet en question, qui n’est pas dénué d’un certain charme amateur. Il est toutefois assez difficile de cerner l’esprit du concept, puisque la musique de MARTHE est assez complexe à définir avec acuité, empruntant les chemins d’un Heavy très Doom, tout autant qu’un démarquage de la NWOBHM la plus occulte. Avec seulement quatre titres au compteur cet EP/Démo donne donc un aperçu des capacités en solo de Marzia, qui se retrouve dans un minimalisme mélodique assez enivrant, même s’il reste encore très perfectible.

Ce qui m’a donné envie de parler de Sisters of Darkness ? Son atmosphère très particulière, sa rudesse de ton, et son côté très underground qui m’a rappelé le bon vieux temps du tape-trading des années 80. La sincérité qu’a insufflée la musicienne dans son projet est d’autant plus touchante que les quatre morceaux proposent une approche homogène, avec quelques variations notables. Ayant trouvé l’inspiration pour ses textes dans les nombreux voyages dans les Alpes qu’elle effectuait pour rentrer chez elle, Marzia nous propose donc un peu de son vécu et de son intimité, ce qui ne fait que conférer un peu plus d’âme à cet EP décidément à part dans la production actuelle. Le fait aussi que Sisters of Darkness n’était pas forcément à la base fait pour être écouté à grande échelle donne le sentiment de partager un secret entre initiés, ce qui est loin d’être désagréable. Toutefois, enregistrer chez soi n’a pas que des avantages, la musicienne ayant éprouvé toutes les peines du monde à capter son chant, et a dû utiliser une batterie électronique pour ne pas effrayer les voisins. Elle a enregistré elle-même toutes les parties de guitare, de basse, et le résultat est tout à fait cohérent, dans un registre de Heavy Metal lancinant et mélancolique. On sent parfois l’influence du BATHORY le plus majestueux, dans des proportions certes moins emphatiques et progressives, mais avec un long et hypnotique morceau comme « Awake Arise Silence », MARTHE parvient à se hisser à la hauteur de pas mal de groupes Doom actuels, avec beaucoup moins de moyens mais certainement plus d’envie. On peut rester de marbre face à ce Metal d’antan joué avec des capacités limitées, mais il s’en dégage un parfum de nostalgie assez prenant, et ce, dès « Sisters of Darkness ».

Sans jouer le revival à tout prix, Marzia a agrémenté ses morceaux d’effets divers, de strates vocales évanescentes, de feedback contrôlé, le tout sur fond de riffs très épurés, à l’image de la naissance de la scène Black/Doom des années 80. Elle désirait d’ailleurs retrouver l’esprit « bricolage » du début des nineties et c’est avec brio qu’elle s’est acquittée de sa tâche. Ce premier titre, le plus énergique du lot, est une véritable déclaration d’intention, et un moyen de s’éloigner de ses obsessions habituelles. Loin du déluge rythmique du D-beat, « Sisters of Darkness » évoque une sorte de Proto-Heavy des années 70 remis au goût du jour, évoque COVEN, et pas mal de groupes vintages d’aujourd’hui, sans sombrer dans les travers de la séduction Pop. La voix de Marzia est d’ailleurs assez agréable à l’écoute, un peu fondue dans le mix, mais les mélodies en circonvolution des guitares sont assez bien faites, tout comme la batterie qui reste bloquée sur un tempo bien défini. L’ensemble ne manque donc pas de panache, avec des chœurs lointains en incantations, et un son certes abrasif, mais parfaitement intelligible. En mode lourd et pesant, MARTHE s’en sort bien aussi, sans renoncer à son épure de base, et « Married to a Grave » de proposer une digression insistante sur les thématiques Heavy/Doom, avec breaks classiques et progression personnelle. Certes, les cassures sont bien marquées, on sent à chaque instant que le tout a été enregistré dans des conditions d’amateurisme, mais l’effet produit est assez captivant, entraînant une sorte d’addiction un peu sauvage qui pourrait valoir à la musicienne une demande pour un produit plus long, mais pas forcément plus élaboré ou sophistiqué. En l’état, Sisters of Darkness reste une anecdote charmante, un peu comme ces cassettes qu’on recevait de la part de correspondants du monde entier, toujours avides de vous faire découvrir l’underground de leur pays.     

             

Titres de l’album :

                      01. Sisters of Darkness

                      02. Married to a Grave

                      03. Ave Mysteris

                      04. Awake Arise Silence

Bandcamp officiel


par mortne2001 le 21/06/2020 à 17:45
75 %    634

Commentaires (1) | Ajouter un commentaire


Gargan
@81.249.31.29
22/06/2020, 11:31:14
Merci pour la découverte, bon feeling, bonne ambiance, metal dans le bon sens du terme.

Ajouter un commentaire


Derniers articles

Midnight + Cyclone + High Command // Paris

Mold_Putrefaction 24/04/2024

Live Report

DIONYSIAQUE + JADE @La Chaouée

Simony 23/04/2024

Live Report

Enslaved + Svalbard + Wayfarer

RBD 20/03/2024

Live Report

Voyage au centre de la scène : BLOODY RITUAL

Jus de cadavre 17/03/2024

Vidéos

Crisix + Dead Winds

RBD 20/02/2024

Live Report
Concerts à 7 jours
Tags
Photos stream
Derniers commentaires
Chemikill

Suicidal Tendencies, Sepultura, Slipknot... la tournante improbable... ça ferait un bon poisson d'avril, mais c'est vrai....

27/04/2024, 14:11

roulure

true norwegian roue libre

26/04/2024, 13:40

Simony

Yes, et demain samedi, c'est WITCHTHROAT SERPENT et ORBIS au Nirvana Pub-Club de Nancy.Si j'avais le temps de renseigner la partie gigs de ce site....

26/04/2024, 13:35

Simony

Yes, et demain samedi, c'est WITCHTHROAT SERPENT et ORBIS au Nirvana Pub-Club de Nancy.Si j'avais le temps de renseigner la partie gigs de ce site....

26/04/2024, 13:35

Humungus

Putain !Si j'avais été au jus de cette date, j'aurai fait le déplacement boudiou...Pis je vois que tu causes de BARABBAS à Nancy ?!Et c'est... ... ... Ce soir.Re-Putain !

25/04/2024, 13:28

Tut tut!

25/04/2024, 12:44

Gargan

ça me fait penser à moi ivre mort parodiant Maurice Bejart, sur fond de Stravinski. Plus glucose, tu meurs. Mauriiiiice !

25/04/2024, 10:28

DPD

Mes confuses malgré mon instinct qui tapait dans le juste, rien avoir avec le gaillard à qui je pensais.

24/04/2024, 14:26

RBD

Vu récemment avec Napalm Death, et ça faisait plaisir de voir que beaucoup de gens connaissent leur Histoire du Death Metal car il y avait de vrais fans. Surtout, la formule D-Beat basique et efficace du père Speckmann fonctionne bien en live 

23/04/2024, 09:55

LeMoustre

Excellent disque avec un gros point fort sur le riffing atomique. La pochette m'évoque clairement celle de Nothingface, version bio-mécanique

22/04/2024, 18:04

Arioch91

Ca fleure bon le vieux Kreator période Pleasure to Kill ! Prod' crade, aux antipodes des trucs surproduits de certains groupes et quand ça speede, ça rigole pas.

21/04/2024, 19:52

Poderosos/Magnificencia/Técnica Suprema

Los Maestros del BRUTAL DEATH GRIND

21/04/2024, 19:50

Pomah

+1 Gargan, influence Mgla je trouve par moment. 

21/04/2024, 09:20

Jus de cadavre

Là clairement le label est dans son droit à 100%. Warner a racheté l'ancien label de Kickback, ils en font ce qu'ils veulent du catalogue. Après, l'élégance, une telle multinationale elle s'en beurre la raie. Mais je peux comprendre qu(...)

20/04/2024, 23:36

Tourista

Mouiii, pas faux. Les gonzes ont signé.Mais ça me rappelle Peter Steele qui avait voulu défenestrer un type dans les bureaux de Roadrunner après avoir découvert que le label ressortait les albums de Ca(...)

20/04/2024, 20:06

Tourista

Devinez où il se Lemmy. (ne me raccompagnez pas, je sors tout seul)

20/04/2024, 19:58

Grosse pute

Attention, les mecs ne se font pas "enfler". C'est juste que Warner ne leur a pas demandé leur avis pour rééditer le bazar et les mecs parlent donc d'édition pirate, alors que Warner a bien les droits sur le disque. Après, Kickback, ce ne son(...)

20/04/2024, 06:26

Tourista

Désolé pour les coquilles monstrueuses.  Merci la saisie automatique.

19/04/2024, 20:51

Tourista

Non bien sûr je plaisantais, M'sieur Heaulme. Un artiste qui se fait enfler a mille fois raison d'en parler !   Et je sais malheureusement de quoi je parle.Respect pour Kickback. Content que tu les pu voir ce docu.

19/04/2024, 18:08

Humungus

@Tourista :- "On s'en cogne"Bah non...- Tu t'es achement bien rattrapé avec ce docu qui était totalement passé à côté de mes radars.Exceptionnel.C'est pas C8 qui passerait ça bordel...

19/04/2024, 15:54