The End of All Things

Crown

16/04/2021

Pelagic Records

The End of All Things est à CROWN ce que Kid A fut à RADIOHEAD.

Il est certain qu’avec une accroche pareille, ce nouvel album du trio de Colmar va intriguer les fans, mais aussi les questionner intérieurement. A quoi s’attendre de la part de ces musiciens qui depuis leurs débuts refusent les étiquettes, jouent avec le Sludge et les machines ? On savait pour avoir lu quelques interviews que le tournant stylistique opéré risquait de choquer les accros les plus hardcore, mais après écoute du produit fini, on comprend vite que les options vont se resserrer pour le groupe. Moins d’agression immédiate, plus de fluidité dans le son, un chant qui diverge, et des choix discutables en rythmique. Mais finalement, ce pari s’est avéré payant, puisque CROWN est passé d’une machine implacable en live à un monstre de dancefloor un peu louche, retrouvant parfois les inflexions si caractéristiques des STABBING WESTWARD et de MARILYN MANSON. NITZER EBB, FRONTLINE ASSEMBLY, OOMPH !, tout y est ou presque et le groupe taquine les productions synthétiques les plus électriques du répertoire Dance-Indus, osant presque tout, et réussissant tout aussi. Et s’il est tout à fait possible de ne pas adhérer au parti pris, il est indéniable que ce nouvel album tombe à pic pour bousculer la normalité décevante de la production actuelle.

A voir leurs dégaines et leur air patibulaire, on a du mal à croire que Pascal Guth, Stephane Azam et Frederyk Rotter soient responsables de ce tapis de sonorités électroniques. D’un Doom/Sludge maltraité, les musiciens/compositeurs sont passé à un interlude de boite de nuit underground, de celles qu’on trouve à Berlin, Paris, New-York ou Milan. Et il aura fallu six ans pour parvenir à ce résultat, ce qui en dit long sur la patience et la détermination du groupe qui a attendu le bon moment pour frapper son coup fourré. Sombre mais lumineux, un peu désespéré mais optimiste quelque part, enivrant mais déconnecté de la réalité, The End of All Things est une apocalypse qu’on prend du bon côté, puisqu’elle offre un dernier moment de bonheur avant la fin. Pas si éloigné que ça d’un Reznor de B.O ludique et pour un instant apaisé, ce troisième album est une bouffée d’oxygène vicié par la pollution, et une façon d’éliminer ses toxines en en absorbant d’autres. Produit de main de maître, il offre aux fréquences une clarté incroyable, tamise les guitares pour arrondir les riffs, utilise des effets avec parcimonie, place des samples judicieux, et créé sans le vouloir un concept assez troublant : la fin heureuse.

Le changement promis par les accroches promotionnelles intervient dès les premières secondes de « Violence », qui de sa dichotomie accentue la cassure. Le beat lourd à la « Closer » prend immédiatement corps, le chant est plus profond, plus fluide, et le beat martèle le crâne comme une goutte d’eau tombant sur la tôle d’un toit de fortune. On s‘attend même à entendre un truc du genre « you get me closer to God », mais CROWN est trop intelligent pour se sevrer directement à la source.

« Après, je ne me disais pas non plus qu’il fallait faire quelque chose de totalement différent, mais je ne me suis pas donné de limites. C’est venu comme ça. J’ai commencé en décembre 2017 et j’ai bossé quasiment tous les jours, et ça venait comme ça. »

Un processus naturel donc selon Stéphane, qui résulte en une musique très ancrée dans les nineties des cadors du genre. Les inévitables FRONT 242, mais aussi SIN, et surtout, beaucoup de contraste entre cette lumière blafarde qui s’échappe des mélodies et ces ténèbres qui enveloppent la globalité du projet. Il fallait du culot pour oser un truc pareil, mais là était la condition sine qua non pour continuer d’avancer, spécialement après les six ans d’absence nous séparant de Natron. Six ans pour changer les options, nettoyer la nappe et la débarrasser des miettes, sans oublier les agapes passées.

Moins facile d’accès contrairement à l’ambiance un peu Dark-Pop qui s’impose, The End of All Things prend énormément de temps pour être appréhendé dans sa globalité et sa complexité cachée sous une épaisse couche de facilité de production. Si artistiquement, le résultat est gigantesque pour le groupe, le rendu n’en est pas moins classique pour les fans d’EBM et de musique électronique sombre. On y trouve des éléments de Post-Indus, avec ces strates de sons qui nous projettent dans un espace constellé d’étoiles, mais aussi cette volonté de faire adopter à la voix des impulsions moins cryptiques, à l’image du PARADISE LOST des années Post-Wave. « Neverland » aurait d’ailleurs pu se retrouver sur un album du LOST, tant sa rythmique bancale et ses superpositions de voix rappellent Host.

Mais il est vain de chercher des comparaisons qui n’ont pas lieu d’être, et qui vulgarisent le travail du trio. Trio qui se perd parfois sur les traces d’un Ambient abyssal (« Nails »), et qui se rappelle de ses racines lourdes et emphatiques sur la longue suite « Extinction », striée de percussions à l’écho tremblant. L’album se suit évidemment comme une logique d’agencement, passant d’une acoustique ciselée et délicate sur « Fleuve » à des heurts très marqués sur le futuriste « Firebearer ». Toutes les nuances de la colère, de la violence, de la tristesse, de la résignation sont donc explorées sur ce troisième album qui n’usurpe pas son titre d’album le plus critique de la carrière d’un groupe. CROWN aurait pu jouer la facilité, d’autant que leurs fans auraient accepté une simple suite classique après six ans d’attente, mais a préféré téter un pari méchamment culotté, et le révéler avec brio.

      

De sa première seconde à sa dernière minute, The End of All Things est la transposition d’une humanité en perdition qui cherche encore son salut alors qu’elle sait ses derniers instants arrivés. « Utopia » est donc la conclusion rêvée à ce cauchemar éveillé, avec son chant acide et sa mélodie mélancolique. Mais s’il n’y a plus de place pour l’utopie, autant crever en dansant, une dernière fois. 

                                                                                                                                                                                                        

Titres de l’album:

01. Violence

02. Neverland

03. Shades

04. Illumination

05. Nails

06. Gallows

07. Extinction

08. Fleuve

09. Firebearer

10. Utopia


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par mortne2001 le 30/04/2021 à 15:25
88 %    1390
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NecroKosmos

Excellent report ! J'y étais. C'était purement génial. Dans le même style, tout aussi excellent, le Courts Of Chaos fut aussi un fantastique moment.

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Benstard

Incroyable un groupe qui s'attaque à faire une reprise de Dead Congrégation !!! Je me languis d'écouter ça . Faut pas se louper la ahah.

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Ah ah ce message d'au revoir est magnifique"Je dois y aller maintenant… chercher un boulot et jouer à Roblox avec mon fils…"

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mortne2001

@Gargan exact, oubli impardonnable...Mais que veux-tu, je suis une vieille baderne qui pense que DEEP PURPLE est de la musique de jeunes et que tout est pourri depuis la mort de Roy Orbison. Mais totalement d'accord pour "Whiter Shade of Pale", quel feeling....

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C'est toi qui deicide, mec.   

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Tu presses lecture, retour immédiat 35 ans en arrière ! 

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Bah tu as oublié la reprise finale de dragon ball par Lisa, question de génération hehe. Je ne connaissais pas tant que ça Paul Gilbert (un peu Mr Big et Racer X, mais pas plus), super bonhomme et musicien incroyable. Enorme panard sur la reprise de Procol Harum.

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Excellent !!

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J'avoue avoir délibérément censuré cette information de premier choix... ... ...

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