Plus c’est long, plus c’est bon. Et non, ça n’est pas une citation de Tabatha Cash ou Nadine Morano, mais bien la devise de tous les amateurs de Doom de la terre. On sait que le style aime l’insistance, les itérations, les répétitions ad nauseam, mais moins les groupes en font, et plus les fans s’extasient. On peut être séduit par ce statisme acharné, je le concède, mais j’avoue que les groupes du cru qui m’intéressent le plus sont ceux qui osent aller un peu plus loin qu’un barrissement d’éléphant marchant jusqu’au cimetière.
D’où les australiens d’IVORY PRIMARCH pour cette chronique de l’après-midi. D’un rayonnement pour le moment assez intime, ces résidents de Melbourne ont décidé de mettre le paquet au moment de lâcher leur deuxième album, puisque une heure et dix minutes de musique vous y attendent, sagement cachées derrière une pochette étrange. Une pochette d’ailleurs plus adaptée à un univers Black Metal, ce qui tombe assez bien puisque ces musiciens fricotent avec plusieurs genres, du Death/Doom au Blackened Sludge.
Six titres. Pas une de plus, mais suffisamment pour se faire du vague à l’âme jusqu’à la prochaine marée. Un registre classique en apparence, une thématique video-game, pour de longues digressions remplies jusqu’à ras bord de riffs macabres, de breaks malsains et de sous-mélodies maladives. « A Reflection Crack'd » est assez clair sur les options, et envoie la sauce l’assiette auditive à peine posée sur le casque. Lourdeur, lenteur, oppression, paranoïa, gravité de fond et de ton, c’est classique, mais très performant. Une production qui semble émaner de temps anciens, lorsque l’analogique était encore roi, une basse en infrasons qu’on ressent plus qu’on ne l’entend, un chant graveleux qui racle le fond de la gorge, mais une guitare très inspirée, qui se fend de soli très mélodiques.
Un peu comme si David Gilmour venait poser une arabesque sur le séminal Gothic de PARADISE LOST.
Je ne cache pas que c’est à partir de « Anathame » que mon enthousiasme a décollé. Ce titre est vraiment l’archétype du morceau malin et sournois, qui trempe sa plume dans le foie de morue pour nous torturer l’estomac après déjeuner. Des blasts, une longue progression qui pend son temps - évidemment - et un faux crescendo qui n’explose jamais, mais qui confronte le Post Hardcore de NEUROSIS au Doom/Death de WINTER. Loin d’être désagréable, cette prise de position ferme guide l’auditeur sur le chemin d’un pèlerinage, non celui qui mène à l’église défroquée de BLACK SABBATH, mais bien celui qui aboutit à l’impasse Peaceville des années 90.
Beaucoup de sérieux, du métier, et une vraie passion pour le style. D’où ce résultat éminemment fascinant.
Avec un ventre un peu plus élastique, et deux titres de huit minutes, The Portrait brosse celui d’un Doom épais, sludgy, muddy, au sous accordage excessif, et à la mine dépitée. « Black Oculus » joue l’excès avec beaucoup de conviction, et permet au batteur N'Kari de prendre son temps pour heurter sa caisse claire. Rien à dire, c’est formel, mais efficace, et les quelques arrangements de synthés qui assurent les transitions fournissent un fil conducteur, dessinant les contours d’une histoire complète.
« Excruciation » creuse un peu plus profond, et nous propose une fosse commune qui tient plus du charnier d’illusions perdues. C’est monotone, morne, morose, mais c’est un exutoire fabuleux à la dépression mondiale actuelle, et ça reste dans des balises tout à fait honnêtes. Les fans à ce moment-là se pourlèchent les babines, et se régalent de cette lancinance obsédante, affirmant un peu plus leur allégeance aux coutumes.
Capuchons, longues robes de bure, candélabres, procession nocturne, les images se succèdent, et « Fall of the Illuminator » en est la bande-son idéale. Exhalant d’une odeur fétide de linceul moisi et de cercueil pourri, ce long titre est à ENCOFFINATION ce que l’abêtissement est à C8. Une association évidente, malgré une démarcation au niveau de la folie, avec encore une fois un emballement de tempo épileptique. Mais les boucles de guitare concentriques, ce riff monolithique et ce blocage vocal tirent le tout vers la tradition, d’un Doom joué avec beaucoup d’ampleur et d’épaisseur.
Mais, puisqu’il y en a toujours un, c’est le diptyque « The Portrait » qui façonne définitivement le profil de ce deuxième album. Scindé en deux parties qui pourraient n’en être qu’une, ce long épilogue est un petit chef d’œuvre en soi, avec une ambiance très travaillée, et des fantômes qui font claquer leurs chaînes. Aussi engageant qu’un huissier de justice aperçu au travers d’un judas, ce long épisode (plus d’un quart d’heure quand même) est formateur, fédérateur, et permet d’avoir un résumé très fiable de toute l’entreprise.
De démolition.
L’Australie n’est pas le pays le plus gai du monde visiblement. Ou alors, sa tristesse se cantonne aux grandes villes. Allez savoir. Mais plus c’est loin, plus c’est bon. Ou presque.
Titres de l’album:
01. A Reflection Crack'd
02. Anathame
03. Black Oculus
04. Excruciation
05. Fall of the Illuminator
06. The Portrait - Part 1 - Libertine Imprisonment. Part 2 - The Dying Light
Oui c'est bien beau mais étaient ces gars durant l'ère Obama ou il a absolument tout trahis ? Trump on connait son histoire personnelle et ses financements. c'est sans surprise..
06/07/2025, 14:20
Pardon pour les fautes, mais quitte à écouter ce genre de trucs, Anna von Hausswolff le faisait beaucoup mieux il y a 10 ans. C'est ce qu'on appelle l'avant-garde je suppose.
05/07/2025, 06:51
Le problème de de Kayo Dot c'est qu'il dépend de l'envie du moment de Toby Driver et de qui l'entoure, tu peux avoir un album de drone/post-rock suivit d'un album de death metal, il n'y a pas de groupe et aucune identité. C'est dommage parce(...)
05/07/2025, 06:47
Merci à Clawfinger pour ce grand moment de transgression validée par l’ordre moral dominant. C’est rassurant de voir que la “rébellion” moderne consiste à tirer sur une cible usée jusqu’à la corde, avec des punchlines dignes (...)
04/07/2025, 07:16
Il tourne pas mal chez moi ce disque, et c'était un vrai plaisir de revoir le groupe live récemment après les avoir un peu mis de côté. Un autre concert en tête d'affiche ne serait pas de refus !
03/07/2025, 16:57
Morceau décevant et sans surprise. La présence de Chris Kontos dans le groupe y fait pour beaucoup dans mon intérêt pour ce retour, mais pour le moment bof.
03/07/2025, 16:47
Je n'ai jamais aimé ce groupe, mais j'étais passé devant durant un Hellfest et en effet c'était juste insupportable toutes ces harangues (littéralement toutes les 10 secondes). Moi je m'en beurre la raie, mais pour les fans ça doit &ec(...)
03/07/2025, 12:55
Vu à Toulouse et je n'ai pas du tout accroché, pourtant vu 2 ou 3 fois depuis 2005. Et j'avais bien aimé. Rien ne surnage, ça bastonne mais pour moi aucuns titres ne sort du lot.Par contre j'ai adoré Slapshot
02/07/2025, 16:01
Votre article sur le kintsugi est un véritable hommage à l’art de reconnaître la beauté dans la fragilité et les cicatrices : mentionner son origine au XVe siècle et sa philosophie wabi‑sabi renforce(...)
02/07/2025, 15:38
@Abrioche91 : la canicule t'a trop tapé sur la tête, mon pauvre vieux. Parce que se faire à répondre aux trolls, je n'avais plus vu ça depuis VS.
02/07/2025, 12:25
@Ultra Pute, t'es bien limité comme garçon. Et tu dois sacrément bien te faire chier pour venir commenter connement ce que les autres écrivent.Moi aussi, j'aime bien les commentaires gratuits (la preuve) mais je suis surtout là pour commenter l&(...)
02/07/2025, 08:50
Pas trop mal dans l'idée.Vocalement on s'y tromperait aussi.A voir sur tout l'album, le précédent, mis à part l'opener, m'avait bien déçu
01/07/2025, 15:38
ça tartine ! bien cool cool cette grosse basse @niquetoncul oui ça doit te changer de Jinjer
01/07/2025, 14:19