Weapons of Tomorrow

Warbringer

24/04/2020

Napalm Records

WARBRINGER, c’est un peu la tête à claques, la tête de turc, la piñata sur laquelle on aime bien cogner verbalement pour se défouler, comme si ces pauvres américains cristallisaient toute la haine ressentie par le public à l’égard de la jeune génération Thrash. Dans le fond, je ne vois pas vraiment ce qu’on peut leur reprocher, en tout cas, ce qu’on peut leur reprocher de plus qu’aux autres, les POWER TRIP, HAVOK, GAMA BOMB, j’en passe et des moins évidents…Et pour cause, ils ont tous la même obsession : la violence made in eighties, les riffs saccadés, Gary Holt et Tom Araya, Mike Muir et la Bay-Area. Alors, à quoi bon en piocher un pour le punir au nom de tous ? D’autant que les WARBRINGER sont de loin les plus doués de leur génération, malgré quelques flottements dans leur progression parfois. Peut-être est-ce leur morgue et leur défiance qui leur a valu des attitudes suspicieuses et des regards de biais. Peut-être aussi l’inconstance de leur dernier LP, Woe to the Vanquished, dont ma lucidité nuançait l’enthousiasme, un LP en demi-teinte, entre deux chaises, qui perdait l’innocence des débuts sans acquérir encore la maturité des plus respectables. Il fallait encore une fois pour le groupe recharger les batteries créatives, et plus ou moins disparaître de la production, ce qu’il a fait avec beaucoup d’intelligence, sans oublier de laisser traîner quelques singles quand même. D’ailleurs, les quatre morceaux avant-coureur confiés entre 2018 et 2020 se retrouvent tous sur Weapons of Tomorrow, et c’est tant mieux, parce que quelque part, ils en représentent la quintessence absolue, malgré la présence de six inédits. Mais autant être franc et dire les choses comme elles le sont. Ce sixième LP officiel des WARBRINGER ne les réconciliera pas avec leurs détracteurs et pour cause, ils n’ont pas changé grand-chose à leur approche, si ce n’est en appuyant encore plus sur l’aspect Heavy pour casser le moule de la vélocité. Pour certain, ça suffira à les apprécier enfin ou de nouveau, mais les plus allergiques garderont leur masque sur les oreilles.  

Mettons les choses au point. WARBRINGER ça a toujours été le bricolage génial, l’assemblage futé, le recyclage plein de flair. La recette est simple, une grosse louche de TESTAMENT et EXODUS, une grosse pincée de SLAYER, une petite goutte de Thrash allemand, et chauffe le fait-tout pour embraser la cuisine. Rien de plus ni de moins qu’une synthèse de la Bay-Area avec quelques visites éclair du côté de la Ruhr. Weapons of Tomorrow ne fait aucunement exception à la règle, et la rend encore plus immuable. Une fois passé le choc de sa pochette quand même pas terrible, on se prend en pleine face la réalité des faits, et l’ambiance ressemble à s’y méprendre à une copie rendue par des poulains à ses mentors pour obtenir le 20/20 définitif et l’adoubement inévitable. De fait, « Crushed Beneath the Tracks » fait honneur à SLAYER et KREATOR, et parvient à résumer leurs doctrines en quatre minutes et quelques. « Firepower Kills » après une intro connotée se lance dans la bataille, pique les licks en tierce à la NWOBHM, lâche un cri à la Araya/Baloff, et cavale à la EXODUS pour bien célébrer le retour en fanfare. « Defiance of Fate » joue la progression mélodique et sombre, et rappelle les grandes heures du TESTAMENT de transition, mais aussi de HEATHEN, avec ces mélodies un peu biaisées et cette attitude ambitieuse. Et avec un peu d’imagination, on y sent aussi du DEATH ANGEL moderne et du vieil HEATHEN, alors en gros, la première et la seconde division du Thrash réunies dans une compétition à vainqueur unique et désigné d’avance : le Metal. D’ailleurs, le fan rompu à l’exercice des comparaisons flatteuses, parlera même du METALLICA des eighties qui n’aurait pas grandi et qui se réveillerait en 2020 avec les mêmes aptitudes à marier la douceur et la violence, façon « Fade to Black », mais avec un James Hetfield remplacé par Dani Filth pour faire plus trendy. Mais qu’importent les parallèles, les images et les métaphores, puisque le quintet est le plus doué de sa génération dans le mimétisme. Alors, accordons-nous sur la qualité extraordinaire d’un album qui rétablit le cap et remet la barre sur la stabilité.

Plus posé et dense, le groupe n’a pourtant pas oublié de galoper pour rappeler à quel point la scène allemande a compté pour lui, ce qui lui permet de nous lâcher en pleine face un brûlot comme « Unraveling », symptomatique des crises de démence d’ASSASSIN et du DETHROW de « Pledge to Die », mais aussi de sa propre scène Thrashcore US. Mais malgré ces quelques inserts qui rappellent le passé de chien fou, le WARBRINGER de 2020 est plus ambitieux, moins premier degré, plus élaboré et réfléchi. Est-ce l’adjonction de l’excellent Chase Bryant à la basse (de l’extraordinaire groupe progressif ONI) qui leur a permis de passer à un niveau supérieur, celui qu’ils atteignent sur « Heart of Darkness », qui ressemble à s’y méprendre à du ATHEIST simplifié, mais avec le même genre de redondances graves qui ont fait la gloire de Tony Choy ? On se perd en conjectures tant la maturité du groupe aujourd’hui nous impressionne, comme s’il désirait gommer toutes les approximations antérieures, et plus particulièrement celles commises sur Woe to the Vanquished, qui n’avait pas convaincu tout le monde…Passage en revue de possibilités, expurgation des scories pour atteindre le polissage ultime, Weapons of Tomorrow n’est sans doute pas l’arme fatale Thrash de demain, mais celle d’aujourd’hui. Le chant de John Kevill a toujours cette fermeté pugnace dans les médiums, et cette morgue fatale dans les graves. Adam Carroll et Chase Becker ont maintenant trouvé leur rythme de croisière, et trouvé en Chase Bryant une sorte de troisième larron qui complète leurs riffs béton de lignes serpentines et redondantes. On le confond parfois avec une version plus sophistiquée du Greg Christian de Practice What You Preach, et même si certains riffs ne lui permettent pas de se mettre en avant (le trop classique « Outer Reaches »), il n’en est pas moins une adjonction de choix pour un groupe qui cherchait un second souffle.

Ce souffle, il le trouve dans l’actualité passée, en faisant allusion à la fournaise ayant détruit Notre Dame l’année dernière (« Notre Dame (King of Fools) »), sans se montrer le plus convaincant. Certes, le break mélodique est de premier choix, le solo nostalgique à souhait, mais la seconde partie de l’album manque du panache de la première, et nivelle un peu l’enthousiasme. On ne trouve pas sur cette seconde partie le culot d’un « The Black Hand Reaches Out », qui se bombe le torse de la propre puissance médium. Un des riffs les plus vivifiants du répertoire, une envie de tout bouffer sur son passage, un pré-chorus aux chœurs à l’allemande, pour un hymne terrible d’efficacité. Mais difficile de maintenir un tel niveau de puissance sur cinquante minutes, et avec un ou deux morceaux en moins, ce sixième longue-durée frôlait le sans faute. Mais même en prenant acte de ces quelques erreurs, WARBRINGER reste toujours au-dessus de la masse, largement. En tout cas, pour l’instant…             

                                                                                              

Titres de l’album :

                         01. Firepower Kills

                         02. The Black Hand Reaches Out

                         03. Crushed Beneath the Tracks

                         04. Defiance of Fate

                         05. Unraveling

                         06. Heart of Darkness

                         07. Power Unsurpassed

                         08. Outer Reaches

                         09. Notre Dame (King of Fools)

                         10. Glorious End

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par mortne2001 le 28/04/2020 à 15:38
82 %    964

Commentaires (2) | Ajouter un commentaire


luigi
@78.192.38.132
29/04/2020, 20:43:31
toujours aussi mauvais ce modern thrash...

Arioch91
membre enregistré
01/05/2020, 19:46:44
Pas foncièrement mauvais mais typiquement le genre de groupe interchangeable avec tellement d'autres.

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