Il y a des groupes qu'on a aimé pendant une certaine période de la vie et dont on s'éloigne ensuite avant de les avoir vus sur scène. Et puis, longtemps après, l'occasion se présente et parfois celui que l'on est à ce moment-là se sent devoir à celui que l'on a été d'y aller. Il est resté quelque chose qui nous y attache encore un peu. Dans mon cas, ce fut par exemple avec cette tournée d'été des New-yorkais de Biohazard.
Pour l'anecdote, cette ultime date avait été rajoutée tellement tard à la fin de la tournée qu'elle n'est même pas sur l'affiche officielle.
De passage pour un jour et demi chez moi entre deux destinations de vacances, coup de chance ! Un groupe qui a beaucoup compté pour moi à une époque passait aussi à la maison, pour sa dernière date en Europe. Je n'avais jamais vu Biohazard à l'époque, puis vers 2000 je me suis séparé d'eux comme pas mal d'autres, j'ai appris comme tout le monde que Seinfield s'était reconverti dans le porno (plus lucratif mais moins glorieux).
L'affluence était honorable pour un soir d'été, mais un peu décevante pour les vieux fans qui se souvenaient de l'importance que la tête d'affiche avait à l'époque. Il y avait du Coreux et du métalleux pas trop jeune. Il paraît que pour son passage annuel la veille, Agnostic Front avait ramené plus de monde. Les premiers groupes allaient jouer dehors, puis il fallait rentrer dedans pour le meilleur.
Comme on pouvait s'en douter après le stupide incident d'il y a deux mois à Aix, les Marseillais de MARTYRS avaient un bassiste de session, dont la dégaine purement métalleuse tranchait un peu avec ses compères. Leur HC côte à deux chanteurs est toujours pur et sans surprises, y compris au niveau du son toujours médiocre. Quelques passages accrochaient l'attention d'un public néanmoins bien ramolli par les chaleurs (peuchère…). Le set fut assez long, je serais curieux de les voir enfin une fois avec une production décente.
Les Toulousains de DWAIL font partie de Klonosphère. Ils n'avaient pas la partie facile, car leur style s'apparente à un HC – faussement – déstructuré à la Converge mâtiné d'influences extérieures surprenantes, dans une démarche à la Mr Bungle soulignée par l'emploi régulier d'un chant plus mélodique. C'est toujours étiqueté HardCore, mais chacun sait qu'il y a un mur entre ce style-ci et le NYHC, y compris au niveau humain. Ce n'est pas du tout le même public, aussi clairement qu'entre le Heavy mélodique et le Death underground.
Toutefois la sauce a pris, d'abord parce qu'eux au moins avaient un bon son laissant entendre la basse et des riffs propres. La jeune fille à la batterie renvoie les préjugés à la poubelle, son jeu assez fin sert bien les objectifs du groupe. Les morceaux ne sont pas aussi fracassés et explosifs que chez leur modèle, mais au moins ils tiennent la route : c'est l'essentiel et dans ce style on aurait tendance à l'oublier. L'énergie déployée par le chanteur a pu capter l'intérêt d'une assistance encore passablement assoupie… Une reprise de "Helter Skelter" – qui a inspiré leur premier album – résumait bien la démarche. Le nouvel album étant prévu à l'automne, je les reverrais volontiers et selon les conversations que j'ai pu avoir au cours du concert pas mal de gens ont apprécié même si ce n'était pas trop visible.
Maintenant qu'il fait un peu plus frais passons dans la salle, vu le nombre que nous sommes nous ne serons pas écrasés.
Après un long larsen BIOHAZARD attaquait par "Shades of Grey" et "Urban Discipline" un set intégralement old-school qui nous a mis sur les moignons. Le répertoire aurait pu être le même en 1995, c'était figé sur les trois premiers albums ! S'il est passé de mode, le créneau entre NYHC, Thrash agressif à la Slayer et Hip-Hop n'a rien perdu de sa vigueur, et Biohazard y croit tout autant que naguère. Dans le sillage d'un Billy Graziadei bien remonté, on retrouve ce même parfum de danger musical et citadin apprécié par tant de gros groupes de l'époque. Les chœurs sont toujours aussi durs, quelques aigus passent un peu difficilement mais en live ce n'est pas grave. Le son gras et métallique transcende le potentiel des compos, d'autant qu'il reste sensiblement moins léché que chez des groupes plus jeunes d'un genre approchant. S'il est chaleureux, le groupe ne plaisante pas dans ce qu'il fait.
Bobby Hambel, revenu par la grande porte, saute autour de lui-même comme à l'époque. On peut regretter que le mixage ait laissé un peu dans l'ombre ses solos pourtant bien restitués. Il faut aussi saluer l'excellente prestation, très rythmique et variée, de Danny Schuler à la batterie : il alterne à merveille ternaire Hip-Hop, grosse double et galopade Punk. Quant au nouveau membre, il fait complètement oublier Seinfield. Le public présent répondit comme il se devait à cette débauche de puissance et d'énergie, emporté par des titres comme "Remember", "Howard Beach", "Black and White and Red", "Love Denied", "Tales from the Hard Side", "Retribution", "Wrong Side of the Tracks", et même la vieille reprise de Bad Religion. Un show d'une heure, incluant un rappel unique, était largement suffisant pour mettre une fessée qui remettra pas mal de prétendants à leur petite place ! Pour les autres, le voyage dans le temps était divin.
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