Allegoresis

Exsul

22/10/2021

Caligari Records

Lorsqu’un label vous parle de Death Metal improvisé, il y a de quoi se faire du mouron. Surtout lorsque le label en question se nomme Caligari Records, spécialiste en exactions cryptiques parfois inaudibles, souvent irritantes, et toujours chaotiques. Alors, au moment d’aborder le second EP des américains d’EXSUL, la méfiance est de mise. Je n’ai absolument rien contre une tranche de mort spontanée et exhumée des caveaux les plus suintants de l’underground, encore faut-il que cette remontée nauséabonde ait un quelconque intérêt artistique. Le bruit pour le bruit, j’ai donné quand j’étais adolescent en sombrant dans le Grind, le Black et le Noise, mais l’âge m’a fait comprendre que le fond était plus important que la forme. Heureusement pour nous, les compliments distillés à l’occasion de la plaquette promo des originaires de Tucson, Arizona sont partiellement vrais, ce qui permet à Allegoresis d’atteindre un niveau de qualité tout à fait honorable.

Né en 2018, le duo énigmatique EXSUL s’est formé autour de Phlegyas (Sticks & Spells) et Charon (Strings & Curses). Interprétez ces rôles comme bon vous semble, mais attribuez la guitare et la basse à Charon, et le reste à Phlegyas. Après un premier EP sorti en pleine pandémie de COVID, et sobrement éponyme, le duo texan remet donc le couvert pour une litanie de vingt-quatre minutes découpée en six parties/morceaux. Evoluant dans un contexte de Death vraiment sourd, tirant parfois sur un Black pas totalement assumé, le contexte nous propose une dérivation assez intéressante, et réfute surtout tous les principes d’OSDM, ce qui nous offre une bouffée d’air vicié dans un ciel chargé de gaz carbonique nostalgique asphyxiant.

Difficile d’accès, lourd, sombre, aléatoire dans la violence et profondément grave, Allegoresis fait partie de ces œuvres réservées à un public averti, qui a déjà expérimenté au-delà du raisonnable. Un public qui connaît bien ce label et ses suiveurs/homologues, et qui est prêt à supporter des structures non linéaires, et des morceaux qui sont plus des humeurs que de véritables titres. Toutefois, on note une volonté dans la structuration qui empêche le projet de sombrer dans le nihilisme musical le plus crasse. Si les riffs sont souvent indiscernables, si les lignes de chant ressemblent à des régurgitations démoniaques, le tout ne manque pas de groove, et peut éventuellement s’accaparer quelques codes Indus tout à fait charmants. Sonnant parfois comme un GODFLESH perdu dans le bayou du sud des Etats-Unis, Allegoresis est une atrocité valide, et une entrée de la puissance de « Psychomachia » vous laissera la gueule collée sur un sol boueux, suffoquant dans un dernier cauchemar de râles.

Du Death donc, mais très personnel. Animé d’effets sonores, de parties évolutives assez étranges, et d’une volonté de se démarquer du tout-venant Death/Doom. Beaucoup de lourdeur bien sûr, des accélérations fulgurantes qu’on ne voit pas forcément venir, mais un flair certain dans l’agencement, et dans le placement des lignes de chant. Tout sauf un brouhaha arty faussement élitiste, et une foi sans failles en une musique sans compromis ni concession. Essayez pour exemple de commencer l’album par sa fin, en encaissant le choc sourd de « Sweet Revenge », hymne Death moisi qui suppure la peur par tous les pores. S’y entendant comme personne pour faire sonner leurs horreurs de façon professionnelle, les deux musiciens se sont accordés sur une production gigantesque, aux graves sismiques, qui enrobe le tout dans un mystérieux sac plastique de morgue. 

Certes, sur les six morceaux, deux sont des interludes/transitions de moins de deux minutes. Mais ces transitions ne sont pas là pour décorer, et font partie d’un plan d’ensemble. Et si l’entame de « Noesis » rappelle étrangement celle de l’historique Hell Awaits de SLAYER, voyez-y comme un hommage déguisé aux maîtres du chaos. Car la suite en forme de riff pur OBITUARY vous prouvera que les deux hommes ont une culture extrême affinée, et qu’ils ne sont pas nés de la dernière épidémie, malgré le fait que…presque.

Evolution traumatique, ce second EP réserve bien des surprises, à commencer par cet instrumental percussif et harmonique qu’est « Glaucon's Dilemma ». Il incarne une plongée dans les abysses de l’infamie, mais reste musical et précis. Une sorte d’improvisation retranscrite dans un langage plus mathématique, et plus prosaïquement, un EP solide, unique en son genre, qui mérite l’attention, et qui laisse quelques espoirs en suspens. Notamment celui de découvrir très bientôt un longue-durée qui pourrait bousculer la donne.      

 

                                                                                                                                                                                                      

Titres de l’album:

01. Noesis

02. Glaucon's Dilemma

03. How in the Land of Satin We Saw Hearsay, Who Kept a School for Vouching

04. Pantagruelion

05. Psychomachia

06. Sweet Revenge


Facebook officiel

Bandcamp officiel


par mortne2001 le 17/10/2021 à 17:56
78 %    912

Commentaires (0) | Ajouter un commentaire

pas de commentaire enregistré

Ajouter un commentaire


Derniers articles

Enslaved + Svalbard + Wayfarer

RBD 20/03/2024

Live Report

Voyage au centre de la scène : BLOODY RITUAL

Jus de cadavre 17/03/2024

Vidéos

Crisix + Dead Winds

RBD 20/02/2024

Live Report

Abbath + Toxic Holocaust + Hellripper

RBD 21/01/2024

Live Report
Concerts à 7 jours
Tags
Photos stream
Derniers commentaires
Arioch91

J'aime bien ! Ajouté à ma shopping list.

18/04/2024, 19:48

Saul D

" Marianne" c'est pour miss Schiappa? ok je sors :-)

18/04/2024, 17:12

Gargan

Y'a du riff polonais.

17/04/2024, 08:12

grinder92

Pas de groupes irlandais alors ! 

16/04/2024, 11:24

Gargan

Faudrait descendre un peu et faire la prochaine édition au stade rochelais   

16/04/2024, 08:30

Tourista

Au delà du commerce qui brûle, ce qui est ÉVIDEMMENT regrettable pour l'entrepreneur et la clientèle, il est difficile de ne pas voir le côté comique de l'événement... Au pays des clochers qui ont servi si souvent de barbecues.  (...)

15/04/2024, 18:21

Simony

Oh ça va on rigole ! Pour une musique qui se dit en désaccord avec le concept de religion, je trouve que l'on sacralise et idolâtre un peu trop de choses dans cette scène.C'est dommage c'est sur mais c'est que du matériel, ça va !

15/04/2024, 16:14

Labbé

je plussoie ! cet album est effectivement fort fort bon... mention spéciale pour Howl of Gleaming Swords. Merci pour la découverte ! 

15/04/2024, 15:01

LeMoustre

Le niveau des commentaires ici ça fait peur

15/04/2024, 14:25

LeMoustre

Oh purée !!! Merde !Moi qui ai eu la chance de pouvoir y trainer une demi journée entière (il les fallait) a la recherche de perles d'époque, émerveillé par ce magasin-musée, c'est bien fâcheux cette news.U(...)

15/04/2024, 13:47

Humungus

Y'a des gens ici qui sont trop "Trve".

15/04/2024, 06:54

Satan

Y a des gens ici qui n'ont aucun sens de l'Histoire et un sens de l'humour franchement bas-de-plafond.

14/04/2024, 23:29

azerty666

Résidu de Slayer, mouhahahahahaaaa ^^

14/04/2024, 20:10

Tourista

Un beau black friday.

14/04/2024, 15:48

Benstard

Putain ça me fait mal comme c'est en bois.

14/04/2024, 08:21

Humungus

Ah mais ouais !!!Il m'a fallu 24h pour comprendre... ... ...

14/04/2024, 06:55

Tourista

J'ai mis du temps à capter !! 

14/04/2024, 05:40

Tourista

14/04/2024, 05:39

Saul D

Jinx, j'y ai pensé, mais ils chantent en anglais je crois.... ( "stand up for rock'n'roll power", si je ne me trompe pas...)...je pensais sinon à un groupe entre Trust et Satan Jokers ( pour le son), Attentat Rock, c'est plus rock'n'roll que h(...)

13/04/2024, 16:44

Tourista

Fan service. La voix me fait chier d'une force, par contre... Clairement ce ne sera pas un album pour mézigue. Je comprends mieux pourquoi je n'ai jamais accroché à Death Angel, et c'est pas faute d'avoir essayé depuis 35 piges.

13/04/2024, 10:31