Altered Beast

Perpetratör

31/01/2018

Caverna Abismal

Petit cours d’éducation musicale lusophone ce matin. Lorsque votre passion pour le Thrash allemand prend le dessus, inutile de résister, l’envie étant plus forte que tout. C’est certainement ce que doivent penser ces quatre musiciens (Rick - chant/basse, Paulão & Marouco - guitares et Ângelo Sexo - batterie/session), qui depuis 2008 laissent voguer leur inspiration du côté de la Ruhr des années 80, centre d’intérêt autant qu’obsession qui se manifeste autour d’une expression brutale qui ma foi, se montre plus que jouissive. Leur histoire a débuté comme des centaines d’autres, par une anecdote tout à fait personnelle, que nous narre Rick, le frontman de cette formation pas farouche pour deux sous. Profitant d’un après-midi chômé, l’homme a abusé d’un matériel informatique fraichement installé sur son PC pour trousser une composition vite fait, à laquelle il ajouta quelques pistes de batterie le lendemain, histoire de se faire la main. De ce point de départ naquit le projet PERPETRATÖR, qui de son nom et de son son ne cache en rien ses motivations nostalgiques, évoquant avec énergie l’époque où le Thrash germain dominait l’Europe, via la suprématie des SODOM, KREATOR, LIVING DEATH, HOLY MOSES et autres DESTRUCTION. Ce projet s’est articulé autour de valeurs sures de la scène Metal portugaise, puisque les mecs n’en sont pas à leur coup d’essai, traînant leur guêtres dans le milieu et sur les côtés depuis la fin des années 80 et le début des années 90. Membres ou ex-membres de formations aussi diverses et underground que FILII NIGRANTIUM INFERNALIUM, RAVENSIRE, THE FIRSTBORN ou OMISSION, les quatre originaires de Lisbonne ne font pas dans le détail et visent plutôt le carton plein, et laissant parler des rythmiques salement atomiques, des riffs qui tranchent dans le lard, et des vocaux typiques, assez proches des tonalités d’un Schmier bien énervé.

Le résultat ? Un second LP, très attendu, et distribué par les locaux de Caverna Abismal, qui connaissent bien la chanson de l’extrême pour en faire régulièrement la promotion toutes les semaines. Mais l’enthousiasme du label est amplement justifié, au vu de l’énergie déployée, et en tant que révérence d’une époque de violence, Altered Beast se pose là, et alterne coups de boutoirs et saccades dans le noir, pour nous faire headbanguer comme des damnés toute la journée. Et il est certain que l’allant dont font preuve les PERPETRATÖR est plutôt contagieux et convaincant, puisqu’en quarante minutes, les maniaques font le tour de la question du Thrash qui claque, légèrement blackisé par des intentions démenées, qui s’articulent autour de constructions simples mais pertinentes. La sauvagerie n’empêche nullement quelques préciosités d’interprétation, et loin de passer pour de simples bourrins en quête d’expiation, Rick et les siens se montrent décidément très malins, en ne choisissant que les meilleurs morceaux de la boucherie d’outre-Rhin, ceux-là même que les DESTRUCTION traient de bon matin pour trousser des albums vraiment chafouin. On flirte même avec la violence la plus drue en quelques occasions, lâchant même quelques blasts hors ton, sur le phénoménal et hystérique « A Fleeting Passage Through Hell », l’un des plus dynamiques et épidermiques de la livraison. En comparaison d’un Thermonuclear Epiphany encore un peu gauche et publié il y a trois ans, Altered Beast s’est professionnalisé, sent le peaufiné, et nous laisse écrasé sous une chape de plomb Thrash que rien ne vient alléger, puisqu’on sent même en arrière-plan quelques accointances de scène et de langue avec les frères brésiliens de la fin des années 80, lorsque la débauche se veut plus bestiale et radicale (« Terminal Possession », au staccato dément de précision).

Enregistré, mixé et masterisé par Paulão le guitariste entre 2013 et 2017, ce deuxième LP a largement eu le temps d’arriver à maturité, en gardant une fraicheur qui fait plaisir à écouter. On y retrouve une vitesse d’exécution parfois déraisonnable mais tout à fait appréciable, des vocaux rageurs et des guitares qui découpent avec ferveur, soit un mélange explosif de tout ce que le style compte comme influences fondamentales. Mais c’est vraiment l’investissement des musiciens qui laisse pantois, à tel point qu’en écoutant ce disque, on a le sentiment de les voir on stage, face à une foule en furie prête à devenir maboule au moindre enchainement de soli. La bestialité est toujours à portée d’oreilles, même si celle-ci est gardée sous contrôle, et « Jungle War » de proposer une hybridation entre le Thrash/Black sud-américain et les instincts les plus déviants des DESTRUCTION, pour une hystérie connective qui nous vrille les neurones et nous laisse aphone. Mais à vrai dire, dès l’introduction venteuse de « Altar of The Skull » qui dégénère vite en quadrille Thrash mené tambour battant, on sait très bien ce qui nous attend, et qui se montre très alléchant. Impossible de résister à l’exubérance d’un groupe qui a tout compris à l’outrance, en qui en joue le jeu en toute allégeance, retrouvant les pulsions homériques d’une scène US et teutonne qui à l’époque se tiraient la bourre pour savoir qui faisait le plus de bruit. Niveau technique plus qu’appréciable, basse qui refuse de se cantonner au simple rôle de morceau de scotch entre la guitare et la batterie, et surtout, festival de riffs en tous genres, qui s’accordent très bien d’un chant sournois et narquois, qui reste aux abois, et qui mord dès que s’approche de trop près sa proie.

C’est complètement jouissif, souvent à la limite d’un Thrashcore joué à la vie à la mort (« Extreme Barbarity », les DEATHROW de « Pledge To Die » apprécieront la citation), parfois plus ambitieux mais pas moins teigneux (« Hellthrasher », légèrement crusty sur les bords, mais honorant un riff rock n’roll que les TANK et AT WAR n’auraient pas renié), et finalement, très heureux dans sa concrétisation d’une vision nostalgique d’une musique qui n’a jamais quitté notre cœur depuis ses années les plus épiques. Les  PERPETRATÖR se montrent orfèvres en la matière, et nous troussent onze hymnes de fer, pour s’imposer dans la vague revival qui revend ses places de plus en plus chères, mais qui d’un autre côté ne filtre pas le grain de l’ivraie. Ici, c’est un sain étourdissement qui vous attend, de ceux qu’on encaissait il y a trente ans sans broncher, et qui donnait envie d’y retourner, tant le plaisir procuré valait cent fois le mal de tête causé. D’ailleurs, loin d’être de gentils massacreurs d’harmonie, les portugais terminent même leur attaque sur un brin de lyrisme, via les interventions vocales du nucléaire « Black Sacristy » signées Flávio Lino, qui évoque une version contaminée d’une rencontre près d’un réacteur qui fuit entre DESTRUCTION et HELLOWEEN. Inutile donc de chercher le moindre point faible sur Altered Beast, puisqu’il n’est que force et folie, démence et puissance, et qu’il nous abreuve de son Thrash sans marquer le moindre silence, mais sans jamais manquer d’inspiration ou d’urgence. Les portugais sont donc remontés comme des pendules, et se croient calife à la place du calife, prenant la place d’un DESTRUCTION que le temps a rendu moins grognon.


Titres de l'album:

  1. Altar of the Skull
  2. Extreme Barbarity
  3. The Doors Of Perception
  4. Fires of Sacrifice
  5. Lethal Manhunt
  6. A Fleeting Passage Through Hell
  7. Terminal Possession
  8. Jungle War
  9. Let Sleeping Dogs Lie
  10. Hellthrasher
  11. Black Sacristy

Facebook officiel


par mortne2001 le 25/01/2018 à 17:23
88 %    1065

Commentaires (0) | Ajouter un commentaire

pas de commentaire enregistré

Ajouter un commentaire


Derniers articles

Midnight + Cyclone + High Command // Paris

Mold_Putrefaction 24/04/2024

Live Report

DIONYSIAQUE + JADE @La Chaouée

Simony 23/04/2024

Live Report

Enslaved + Svalbard + Wayfarer

RBD 20/03/2024

Live Report

Voyage au centre de la scène : BLOODY RITUAL

Jus de cadavre 17/03/2024

Vidéos

Crisix + Dead Winds

RBD 20/02/2024

Live Report
Concerts à 7 jours
Tags
Photos stream
Derniers commentaires
Humungus

Putain !Si j'avais été au jus de cette date, j'aurai fait le déplacement boudiou...Pis je vois que tu causes de BARABBAS à Nancy ?!Et c'est... ... ... Ce soir.Re-Putain !

25/04/2024, 13:28

Tut tut!

25/04/2024, 12:44

Gargan

ça me fait penser à moi ivre mort parodiant Maurice Bejart, sur fond de Stravinski. Plus glucose, tu meurs. Mauriiiiice !

25/04/2024, 10:28

DPD

Mes confuses malgré mon instinct qui tapait dans le juste, rien avoir avec le gaillard à qui je pensais.

24/04/2024, 14:26

RBD

Vu récemment avec Napalm Death, et ça faisait plaisir de voir que beaucoup de gens connaissent leur Histoire du Death Metal car il y avait de vrais fans. Surtout, la formule D-Beat basique et efficace du père Speckmann fonctionne bien en live 

23/04/2024, 09:55

LeMoustre

Excellent disque avec un gros point fort sur le riffing atomique. La pochette m'évoque clairement celle de Nothingface, version bio-mécanique

22/04/2024, 18:04

Arioch91

Ca fleure bon le vieux Kreator période Pleasure to Kill ! Prod' crade, aux antipodes des trucs surproduits de certains groupes et quand ça speede, ça rigole pas.

21/04/2024, 19:52

Poderosos/Magnificencia/Técnica Suprema

Los Maestros del BRUTAL DEATH GRIND

21/04/2024, 19:50

Pomah

+1 Gargan, influence Mgla je trouve par moment. 

21/04/2024, 09:20

Jus de cadavre

Là clairement le label est dans son droit à 100%. Warner a racheté l'ancien label de Kickback, ils en font ce qu'ils veulent du catalogue. Après, l'élégance, une telle multinationale elle s'en beurre la raie. Mais je peux comprendre qu(...)

20/04/2024, 23:36

Tourista

Mouiii, pas faux. Les gonzes ont signé.Mais ça me rappelle Peter Steele qui avait voulu défenestrer un type dans les bureaux de Roadrunner après avoir découvert que le label ressortait les albums de Ca(...)

20/04/2024, 20:06

Tourista

Devinez où il se Lemmy. (ne me raccompagnez pas, je sors tout seul)

20/04/2024, 19:58

Grosse pute

Attention, les mecs ne se font pas "enfler". C'est juste que Warner ne leur a pas demandé leur avis pour rééditer le bazar et les mecs parlent donc d'édition pirate, alors que Warner a bien les droits sur le disque. Après, Kickback, ce ne son(...)

20/04/2024, 06:26

Tourista

Désolé pour les coquilles monstrueuses.  Merci la saisie automatique.

19/04/2024, 20:51

Tourista

Non bien sûr je plaisantais, M'sieur Heaulme. Un artiste qui se fait enfler a mille fois raison d'en parler !   Et je sais malheureusement de quoi je parle.Respect pour Kickback. Content que tu les pu voir ce docu.

19/04/2024, 18:08

Humungus

@Tourista :- "On s'en cogne"Bah non...- Tu t'es achement bien rattrapé avec ce docu qui était totalement passé à côté de mes radars.Exceptionnel.C'est pas C8 qui passerait ça bordel...

19/04/2024, 15:54

grosse pute

Au lieu d'aller baiser des gamines et des ladyboys à Bangkok, Stephan aurait dû apprendre à lire les contrats qu'il signe.

19/04/2024, 15:20

Humungus

Ouhlala miam miam !!! !!!! !!!

19/04/2024, 10:35

Tourista

Désolé, c'est bien SODOM et non....   Putain de correcteur !  

19/04/2024, 07:52

Tourista

On s'en cogne.   Non j'en profite juste pour dire à ceux qui ne l'auraient pas encor(...)

19/04/2024, 07:52