Je suis toujours méfiant lorsqu’on me parle de supergroupe. Spécialement lorsque certains labels y sont affiliés. Alors, quand Pride & Joy a annoncé le premier album de cette collaboration internationale, mes oreilles ont tiqué, mais mon cœur a dit « méfiance »…Car même un line-up fourré à la truffe n’est pas garant d’un goût inimitable, et de nombreux flops de superstars l’ont prouvé à travers les années. Les noms tombaient, et le pedigree commençait à s’éclaircir. Au fondement même de ce concept, Markus Pfeffer (BARNABAS SKY, LAZARUS DREAM, WINTERLAND), guitariste très prisé, qui affiche des ambitions claires : jouer un Hard-Rock orienté claviers, dans la plus pure tradition des années 80. Une envie comme une autre, que de nombreux musiciens ressentent depuis quinze ou vingt ans, et qui ne débouche pas toujours sur des disques indispensables.
Une fois cernée l’orientation, il fallait à l’allemand dénicher les bons partenaires. Le premier, et non des moindres, est français, puisqu’il s’agit de Jorris Guilbaud (HEART LINE, DEVOID), à qui incombe donc la lourde tâche de taper le duel avec la guitare de Markus. Bon choix, le claviériste étant très demandé, et pour cause. Markus Kullmann (Glenn Hughes, VOODOO CIRCLE), connaissance de longue date a été intronisé sur le fauteuil de batteur, mais encore fallait-il trouver le chanteur idoine. Un chanteur au timbre chaud, à la puissance féline et au charisme délicieusement rauque.
Et une fois encore, Pfeffer n’a pas joué petits bras. Il est allé chercher la légende Mark Boals, qui depuis des décennies a exercé son talent avec Yngwie MALMSTEEN, SHINING BLACK, ROYAL HUNT et IRON MASK, et j’en oublie quelques exemples en route.
Quatre professionnels qui ont de la bouteille, une pochette flashy qui nous ressort le fluo eighties, un label spécialisé dans les produits calibrés FM, tout était en place pour un carton plein. Et donc, une méfiance de circonstance. Méfiance qui est vite retournée dans l’ombre tant le talent éclatant de ce quatuor macule chaque composition de paillettes de magie mélodique, même si quelques reproches peuvent encore être formulés. Le principal étant le manque d’équilibre entre la guitare et les claviers, qui se font bouffer au moindre riff, éloignant de fait ATLANTIS DRIVE des magiques JOURNEY ou même de BAD ENGLISH. On sent du savoir-faire à la suédoise aussi, malgré le partenariat franco/germano/américain, et certains titres nous ramènent donc à l’actualité perpétuelle dominée par les prouesses de nos amis scandinaves. Dommage.
Ceci étant dit, ces quelques remarques sont d’une importance mineure au vu de la qualité énorme de ce premier album qui en appelle déjà beaucoup d’autres. Avec cette aisance qu’on lui connaît, Mark Boals nous entraîne vers les paradis d’un Hard-Rock mélodique précieux mais populaire, qui saura rallier tous les suffrages. Et comme l’instrumental se met à la hauteur de ses capacités vocales, le résultat est souvent plus que brillant. Merveilleux.
J’en prends pour exemple le très délicat « Brand New Start », demi-ballade qui n’est pas sans rappeler le WINGER des grandes heures ou même le SLAUGHTER le plus radiophonique. C’est sans doute le titre le plus proche de ce que les années 80 pouvaient produire à la chaîne, et qu’on retrouvait au sommet du Billboard chaque semaine.
Si comme je le soulignais plus en amont, le niveau entre les claviers et la guitare est déséquilibré, il ne penche en revanche jamais trop du côté synthétique, et c’est souvent la guitare de Markus qui mène la danse. Une guitare évidemment tranchante à l’allemande, et qui riffe sévèrement Heavy, pour éviter que le projet ne glisse vers le ravin de la muzak d’ascenseur. « United » prouve que les harmonies ne plombent pas la puissance. Ce morceau qui est à l’origine une composition signée par le vieil ami Jürgen Walzer (DISPYRIA), et que Markus et Jorris ont remis à leur sauce en y ajoutant des parties instrumentales. Rageur, frondeur, décoré d’un solo brillant, ce hit est symptomatique de la démarche d’un collectif qui n’a pas oublié que regarder ses copains en jouant peut vous permettre d’être plus cohérent.
Diabétiques, ne craignez donc pas l’insuline en urgence. La mièvrerie est très intelligemment évitée, et le niveau sonore assez relevé. A tel point qu’on parlera plus volontiers d’un Heavy mélodique, lorsque la distorsion montre les dents sans que la délicatesse ne parte en coup de vent (« Curtain Falls », hargneux, revanchard et belliqueux).
Quelques suggestions au demeurant. La production un peu trop large nous éloigne des standards en vogue il y a quarante ans et d’une pierre angulaire comme Raised on Radio, et tend plus à ressembler à ce qui se fait depuis les années 2000, avec une guitare très épaisse, et un chant très en avant, et doublé les trois-quarts du temps. Encore un peu trop agressif pour être rattaché à la locomotive Heavy FM de cette décennie bénie, Atlantis Drive fait ronfler son moteur un peu trop fort, et roule encore un peu trop vite. Mais même les embardées comme « Faith », proche de ce qu’HAREM SCAREM a produit de plus Heavy trouveront leur public sans avoir à trop chercher.
Le final de l’album a en revanche été très soigné. Il joue sur l’ambivalence de la fragilité entre « Farewell To A Friend », adieu amical et lacrymal, et le final progressif « Heroes » qui s’étale sur plus de huit minutes, revêtant un caractère évolutif qui n’était pas vraiment l’intention de départ. Mais c’est sans conteste l’acmé d’un disque très tendu, et toujours à l’affut. Terriblement puissant, ce dernier morceau a la noblesse des grandes conquêtes de la décennie 2000/2010, sans se départir d’une inflexion Pop qui rend certains passages totalement irrésistibles.
ATLANTIS DRIVE se présente donc avec assurance, celle de ses moyens, conséquents. Une mise en jambes qui appelle à se perfectionner à l’avenir, et qui pourrait bien accoucher d’une œuvre définitive. De celles qu’on aurait envie d’imiter quarante ans plus tard.
Titres de l’album :
01. Way Back When
02. Medusa Smile
03. Living For The Moment
04. Brand New Start
05. United
06. Curtain Falls
07. Faith
08. Time
09. Farewell To A Friend
10. Heroes
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Très 90s dans le son, même si j'aurai préféré un peu plus rond. J'aimerai bien les revoir live du coup.
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@Humungus : oui, j'aurai pu mettre les Guignols de l'Info avec Mr Sylvestre dans le lot, quand il citait les gniakoués, etc...Malheureusement quand je lis des réactions comme du dénommé orphan je me dis qu'on est quand même pas sorti d'(...)
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