Burst

Brutus

24/02/2017

Hassle Records

« Les ennuis viennent généralement par trois. BRUTUS aussi »

Avec un nom pareil, on est en droit de s’attendre à une musique en chien de fusil, du genre qui montre les crocs du fond du jardin, campé sur ses solides pattes, un gun à proximité histoire de renforcer le pouvoir très dissuasif des mâchoires carrées et baveuses. Un molosse pas vraiment apprivoisable, un peu wild on the run, qui mordille les chevilles du facteur avant de lui bouffer les noix.

En gros, un voyage éclair de la bicyclette à la boîte aux lettres en protégeant ses parties pour ne pas les pleurer cinq minutes après.

Un traquenard Belge. Une incursion en territoire noisy/doggy flamand qui utilise la distorsion, le larsen comme armes de prévention, mais qui cherche quand même un moyen d’expression pour formaliser sa rage brute. Et vous savez quoi ?

C’est exactement ce qui vous attend au coin des gouttières de ce Burst qui pourrait quelque part symboliser le renouveau de la scène Post Noise Belge si elle n’était pas déjà aussi active.

Comme ils l’ont annoncé, les BRUTUS sont trois. Ou quatre, puisqu’ils vous impliquent activement dans leur démarche.

On retrouve donc à la guitare Stijn, Peter à la lourde basse concentrique et claquante, et évidemment, une figure de proue par dénomination logique, Stefanie, au kit et au micro.

Une batteuse/chanteuse tiens. Pas banal ça, et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’en tant que « leadeuse » naturelle, la dame cogne ses fûts comme personne tout en malmenant le micro de ses volutes vocales sinuant entre litanie hurlée et séduction assumée.

Mais le quatrième larron, vous donc, à pratiquement autant d’importance que les trois membres à proprement parler. Car c’est vous qui allez vous trouver au centre de cette démonstration de puissance qui laisse les oreilles hagardes et la garde baissée. Ils veulent que vous dansiez, et aussi étrange que cela puisse paraître, c’est peut-être la première chose que vous allez faire. Bizarre non de concevoir une gestuelle rythmique cohérente alors même qu’un flot de décibels vous inonde les cages ? Pourtant, c’est assez logique, encore faut-il écouter et ressentir la musique des BRUTUS pour concevoir un pas de deux bien chassé.

Alors, des brutes ces Belges ? Oui et non, car aussi violente et abrasive soit leur musique, elle reste musique. Nous sommes loin du Post Rock apocalyptique ou de l’art Noisy des SONIC YOUTH, mais plutôt proche d’un Rock européen dopé aux essences de térébenthine US, bien que la guitare de Stijn se veut incendiaire et que la basse de Peter occupe quasiment deux tiers de l’espace sonore. Il serait facile de comparer ce trio aux COILGUNS par exemple (les voisins Suisses), ou même aux homologues d’EL YUNQUE (même pays, violence moins larvée et moins euphorique), mais en fait, leur univers est tellement versatile qu’il convient de ne pas placer de référence sur le parcours d’une chronique qui se veut hommage à leur talent naturel.

C’est évidemment puissant, parfois dissonant, et même, de temps à autres, apaisant dans l’agressivité, qui couve sous un feu de désir destroy (« Bird », sublime de colère romantique qui tombe les deux cœurs unis dans le Post Metal le moins contemplatif et le plus harmonique dans les déviances).

Et finalement, le point de convergence entre Post Metal, Hardcore, Noisy Rock et Post Rock gonflé est atteint dans un équilibre même pas instable, sans doute à cause de l’osmose incroyable entre ces trois musiciens qui semblent se connaître par cœur.

Ensemble, Stefanie, Peter et Stijn sont probablement le meilleur groupe de leur catégorie. Cette façon qu’ils ont de faire sonner leur instrument en solo tout en jouant l’esprit de fusion est admirable, et donne naissance à des chansons proprement hallucinantes d’audace, comme cette réappropriation Power Pop d’une structure Noisy de base sur le hit « Crack/Waste », qui cavale d’un tempo de folie sur une mélodie sucrée, hurlée et chantée par une Stefanie dont le jeu de batterie et les vocaux de folie se lovent en un unisson fabuleux.

On pense à une version en pleine montée des PIXIES et des DEUS, le tout joué par des Peter, Paul and Mary sous acides, qui assumeraient leur côté romantique sans occulter leur part sombre dans les couloirs d’une nuit sans rêve.

Mais sans conteste, chaque entrée à sa raison d’être, et chaque morceau déborde d’une vitalité et d’un espoir incroyablement tangible, même lorsque la furie prend le pas sur la mesure, comme sur cette cathartique ouverture « March », qui enfonce le clou UNSANE dans le cercueil LIZARD, sans se départir de ses excès mélodiques.

Un partout, balle au centre. Et au centre, cette balle va rebondir sur l’épique « Drive », qui après une intro progressive et grondante cède le pas de deux à une litanie Post Rock corrosive, et pourtant sublimée des caresses vocales de Lady Mannaerts qui ondule ses cordes pour mieux fracasser son kit et nous offrir un beat hypnotique.

Un refrain qui n’en est pas un, et une reprise à la DESCENDENTS, pour un morceau qui passe en revue tous les styles incorporés à leur univers. Admirable.

« Justice de Julia II » est à mon sens un autre haut fait de ce Burst qui semble exploser de sa créativité, et évoque tout autant la SIOUXSIE la moins opaque que les PUMPKINS, et qui permet une fois de plus à Peter de malmener sa basse en un tourbillon de distorsion, avant que Stijn et Stefanie ne le rejoignent pour un mantra orgiaque digne des meilleurs DEFTONES/THE OCEAN.

Mais tout n’est pas long et alambiqué, et « Horde II » se satisfait très bien de son court temps imparti, pour une fois de plus transposer un univers Pop dans un contexte Post Rock, se voulant aussi Noisy que Poppy.

Le final envoutant de « Child » est peut-être le lien le plus évident avec le Post Metal, de son tempo lent (très), de son plan de guitare tournoyant, et de son chant éthéré (très). Mais à ce moment-là de l’album, vous commencez à connaître les larrons, et vous vous doutez que tout ça ne va pas durer. Et bien sûr, ils explosent le tout d’un accès de rage Noise, qui dégénère encore sur une brutale accélération qui – c’est possible – créé un climat Post BM rugueux toujours peint des couleurs pastels de la voix de Stefanie.

Unique ?

Unique.

Dans un monde de valeurs, les BRUTUS pourraient être désignés sous l’appellation « meilleur groupe du monde ». Un groupe qui dans les studios de Vancouver est parvenu à restituer sa folie scénique. Un trio qui a réussi à synthétiser des genres pour donner naissance au sien.

Un groupe et un album qui font cohabiter la violence la plus stridente ou sourde et les harmonies les plus délicates.

 Un groupe et un album. Les deux étant indispensables. Il n’y a rien d’autre à savoir.


Titres de l'album

  1. March
  2. All Along
  3. Not Caring
  4. Justice De Julia II
  5. Drive
  6. Bird
  7. Crack/Waste
  8. Looking for Love on Devils Mountain
  9. Horde II
  10. Baby Seal
  11. Child

Site officiel



par mortne2001 le 27/02/2017 à 14:57
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