Dernier jour de cette satanée année 2021, qui succédait à une terrible année 2020, et qui préfigure une année 2022 encore placée sous le joug des restrictions, de la contamination, et du débat interminable et stérile entre les pros et les antis. Une année de doutes, de frustrations, qu’il convient d’évacuer non par une coupe de champagne tiède ou d’un morceau de foie gras rance, mais bien par une écoute attentive des dernières sorties étant passées à la trappe. Et celle de Decadence and Decay m’est passé complétement au-dessus des tympans, moi qui d’ordinaire est à l‘affut de la moindre nouveauté d’importance.
Premier album des américains de SILVER TALON, Decadence and Decay est l’archétype d’album sorti dans la pénombre, qui semble abattre ses cartes dès la vision de sa superbe pochette. Mais il est aussi l’archétype d’album qui, une fois diffusé, se révèle dans toute sa richesse et son ouverture d’esprit, pour offrir une échappatoire extraordinaire aux convenances Heavy Metal nostalgiques de ces dix ou quinze dernières années. Il faut dire que SILVER TALON n’est pas un groupe comme les autres. Ayant adopté une formation digne des plus grands orchestres sudistes avec pas moins de trois guitaristes, il se veut point de jonction entre le Symphonique non avoué et débarrassé de tous ses oripeaux pompeux et clinquants, et le Heavy Metal progressif et musclé des années 2000. Et le résultat de cette collusion tient en huit petits titres, certes développés et amples, mais suffisamment concis pour intéresser conjointement les fans de lyrisme et d’efficacité.
Cette pochette justement, aiguille sur les mauvais rails. Cette femme à la longue toge noire largement ouverte pour laisser apparaître sa généreuse anatomie, le chef corné comme un diable de Lovecraft, nous inciterait à penser que l’ambiance se veut volontiers Doom ou Stoner, alors que l’inverse est justement la seule vérité possible. Ici, pas de lancinance gratuite, pas de riffs interminables entièrement voués aux gémonies de l’ennui, mais une énergie incroyable, des mélodies envoutantes, un chant opératique et généreux dans les nuances, une rythmique à l’abattage impressionnant, pour une cohésion de groupe qui devrait inspirer certains mauvais élèves.
Depuis sa création en 2017, ce groupe de Portland dans l’Oregon n’a pas chômé, et a accumulé les démos et a même sorti un premier EP, avant de se concentrer sur un travail plus conséquent. Et quiconque ose placer en ouverture un morceau aussi dantesque que « Deceiver, I Am » peut être fier de son travail. Car en sus d’être incroyablement puissante, cette entame est aussi lyrique qu’un live de QUEENSRYCHE et aussi addictive qu’un hit écrit conjointement par HELLOWEEN et STRATOVARIUS.
Bryce Adams Vanhoosen, Sebastian Silva et Devon Miller (guitares) s’en donnent immédiatement à cœur joie, en profitant de l’assise incroyable de leurs compères Walter Hartzell (basse) et Michael Thompson (batterie). Et lorsque la voix incroyable de Wyatt Howell entre en scène, le tableau peint est rempli de couleurs sombres, de teintes étranges, à la limite d’un impressionnisme opératique, gardant toutefois prise avec la réalité d’un Heavy/Power Metal que SANCTUARY pourrait bien leur avoir inspiré. Sorte de JUDAS PRIEST à l’ADN modifié pour être invincible, SILVER TALON avance comme un guerrier sur sa monture pour reconquérir le terrain perdu par le vintage au bénéfice de la standardisation du son et de l’inspiration, et nous offre des chœurs grandiloquents, des arrangements majestueux, et une pointe d’occultisme pas désagréable du tout. Les soli, évidemment en bonne place, proposent des digressions harmoniques en phase avec la structure globale, et les pointes de vitesse permettent de doper le Power Metal traditionnel d’une bonne touche de Thrash technique poussé à l’extrême.
En cinq minutes, le poisson est ferré, et « Resistance 2029 » garde le même rythme pour ne pas perdre l’attention de l’auditeur. Avec toujours cette grandiloquence de surface qui ne cherche pas à cacher un fond vraiment riche, SILVER TALON ne révolutionne certes pas le créneau du Heavy/Power contemporain ayant trouvé ses racines dans les nineties, mais nous offre une démonstration de ce que le style peut proposer de meilleur lorsqu’il est pratiqué par des esthètes talentueux.
En huit morceaux, les américains utilisent toutes les possibilités qui leur sont offertes passant d’une guitare hispanisante et d’un chant velouté sur l’intro de « Next to the Sun » (à la basse délicieuse d’économie), à des sextolets enflammés sur le départ en trombe de « Divine Fury », pas si éloigné que ça d’un Black mélodique et inspiré. De l’envie donc, des moyens des capacités techniques largement au-dessus de la moyenne, pour un passage en revue de toutes les façons de contourner les poncifs d’un genre qui a tendance à en abuser.
Certes, les moins portés sur la sophistication souligneront le caractère emphatique de l’orchestration, mais les amoureux d’un Metal épique et chevaleresque se laisseront emporter par cette épopée grandiose, qui a en sus la noblesse de nous quitter via un épilogue king size, une fois encore assez enjôleur et ensorceleur pour rappeler les plus grandes sagas d’Heroïc Fantasy.
Grand coup d’épée frappé dans le flanc d’une armée old-school exsangue, Decadence and Decay incarne une acmé fascinante, une fusion des sens, et une pluralité musicale impressionnante de cohérence. Une bien belle façon d’enterrer 2021 sous notre mépris, pour commencer une nouvelle année au pas de charge et les armes affûtées.
Titres de l’album:
01. Deceiver, I Am
02. Resistance 2029
03. As the World Burns
04. Next to the Sun
05. Divine Fury
06. Kill All Kings
07. What Will Be
08. Touch the Void
Je comprends son raisonnement car je le partage en partie. Je déteste le mot "contenu" quand on parle de vidéo. Ca ne veut pas dire grand chose. Les lyrics video, je trouve que c'est une solution de facilité. On se contente de coller une(...)
07/06/2025, 09:04
J'suis probablement trop vieux, je trouve ça atroce, autant à écouter qu'à regarder.
07/06/2025, 08:32
Ben, mince alors, c'est un vieux con Akerfeldt, en fait... dommage... après, tant que la musique est bonne, que demande le peuple ? (Après, je suppose qu'il n'arrivera jamais au niveau de Chris Barnes, mais, bon...)
06/06/2025, 18:05
Mouais, un peu médiocre son commentaire sur les lyrics videos... perso, j'aime bien avoir la musique et le texte qui défile... c'est pas spécialement élaboré mais je voix pas en quoi c'est minable...
06/06/2025, 18:02
Cet album me procure le même effet que le précédent album sorti en 2020 : une pure tuerie !
04/06/2025, 21:00
Merci pour cette belle chronique.Voici notre site.https://burningdead-official.com/fr/categories/
04/06/2025, 14:18
Ah pis j'avais même pas vu (encore entendu) qu'il y avait une reprise de GOATLORD !!!Ceci confirmant donc cela.
04/06/2025, 07:35
Tout ce que j'aime !!! !!! !!!En même temps, venant d'un groupe dont le batteur porte un t-shirt TRISTITIA, ce ne peut-être que bonnard...
04/06/2025, 07:34
Je n’ai jamais entendu parler de ce split vous savez ou l’écouter ou ce le procurer
03/06/2025, 13:35
Effectivement difficile de rester insensible à ce type de festival, à taille humaine, avec une ambiance conviviale sans tomber dans la cour des miracles et surtout avec une bell prog’. Très content d’avoir découvert Gravekvlt et pris la mandale attendue de (...)
02/06/2025, 23:00
Excellent report ! J'y étais. C'était purement génial. Dans le même style, tout aussi excellent, le Courts Of Chaos fut aussi un fantastique moment.
01/06/2025, 19:36