Fragments at the Edge of Sorrow

Mortify

25/03/2022

Chaos Records

Attention, Death sud-américain particulièrement vilain, sale, forcené, basé sur les principes floridiens les plus séculaires, pervertis par une violence typiquement chilienne, de celles qui vous font vous retourner en pleine rue pour voir si personne n’essaie de vous planter un couteau dans le dos. Un Death Metal compact, dominé d’une voix d’outre-tombe, que l’on peut parfois entendre dans les vieux cimetières pour peu que l’on tende l’oreille encore valide, basé sur un principe old-school certes éprouvé, mais magnifié par une attitude vraiment bravache.

MORTIFY, de son nom, son parcours et son approche, est une sorte d’archétype du vintage en vente dans les meilleures friperies morbides de ces dix dernières années. Déjà auteur d’un premier EP en 2017 (Mortuary Remains, recommandable), ce quatuor sans foi ni loi perpétue la tradition inaugurée par MORBID ANGEL et reprise à un compte différent par INCANTATION, un savoir mélangeant la précision technique et la prise de conscience pesante, ce qui évidemment nous donne un mélange qui n’allège pas le moral, mais qui engraisse l’estomac d’une bile grasse comme une toux de condamné.

Quelque part entre Tampa et Portland, se situe donc le terrain de jeu virtuel de Benjamín Araneda (guitare),

Alonso Villar (batterie), Cristian Fuentes (guitare/chant) et Diego Gonzalez (basse), un terrain vague jonché de détritus, de corps démembrés, de victimes de la société, où le seul mode d’expression possible reste le dégoût, formalisé atour de douze morceaux vraiment solides, mais clairement déprimants. Pourtant, et peut-être même parce que, on est rapidement hypnotisé par ce son cryptique, par cette grosse basse qui claque en arrière-plan, par ces riffs sombres et inflexibles, et par ces lignes de chant résignés, éructées d’une voix grave comme un diagnostic de cancer terminal.      

« Beneath the Emptiness » pose justement les jalons de la vision, en constatant l’absence totale de perspective derrière le vide de nos pauvres existences. Intro sobre mais efficace, entrée de luxe avec double grosse caisse en éclaireur, technique affinée et affirmée, pour un melting-pot de ce que le Death classique et traumatique compte d’ingrédients les plus savoureux. Reprenant à leur compte les méthodes de feu Chuck Schuldiner et Trey Azagthoth (arythmie, mesures impaires, soli d’obédience légèrement jazz, constructions évolutives) pour les traduire dans un langage beaucoup plus glauque et réaliste qu’occulte, Fragments at the Edge of Sorrow s’impose dès les premières mesures comme la crème de la crème de la nostalgie.

Du savoir-faire donc, du panache dans la laideur, pour un album qui révèle toute sa richesse assez rapidement, sans toutefois verser dans la paraphrase maladroite. On retrouve des essences respirées à plein poumons il y a trente ans en humant l’air putride de « Ethereal Illusion of Psyche », poisseux comme du Doom/Death moribond, mais soudainement véloce comme un zombie grognon, mais les quelques interludes savamment placés nous permettent de reprendre notre souffle avant une nouvelle immersion.

On pense à un frère presque jumeau du PESTILENCE de Patrick Mameli, en pleine dépression incurable, mais aussi à une sorte de fondue savoyarde de tous les plus grands fromages floridiens. La Suède est donc occultée, une fois n’est pas coutume, toutefois sa froideur se retrouve ici en écho de congères lorsque les guitares brisent la glace pour mettre à nu quelques virus anciens. Et histoire de se démarquer de leurs petits camarades de jeu, toujours plus nombreux et hyperactifs, les chiliens ont le bon goût de nous proposer un long instrumental, « Mindloss », totalement prenant et progressif, mettant en relief l’incroyable acuité technique de chacun des musiciens (qui se connaissent bien pour évoluer ensemble au sein de SOCIALISIS, pour trois d’entre eux)

Avec ou sans voix, la sauce prend donc et brûle la gorge, même si les épices savent se montrer plus douces et digérables (« The Accursed and the Throes »). En phase avec les impératifs du genre, les MORTIFY taquinent même le spectre de MORGOTH en virée avec Martin Van Drunen (« Astral Sphere From a Bleeding Soul »), osent le catchy en up tempo diabolique (« Process in a Secrecies of Thoughts »), et font donc montre d’une variété de jeu conséquente.

Une affaire très professionnelle, qui emprunte à droite et à gauche de quoi alimenter son propre lexique, qui cite parfois SADUS sans oser le Techno pour autant, qui reste agressif tout en jouant la carte de la modulation, et un deuxième album d’une maîtrise artistique saisissante. Cinquante minutes d’horreur bien concrète, pour une visite guidée d’un Chili qu’on ne souhaite pas connaître intimement de peur d’y laisser quelques plumes.

Et des tripes aussi.

 

   

                                                

Titres de l’album:

01. Beneath the Emptiness

02. In the Amorphous Path

03. Ethereal Illusion of Psyche

04. Fragments

05. Frayed Lunacy (Dying Sight)

06. Mindloss

07. The Accursed and the Throes

08. Edge

09. Astral Sphere From a Bleeding Soul

10. Process in a Secrecies of Thoughts

11. Contaminated Echoes

12. Sorrow


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Bandcamp album

par mortne2001 le 18/03/2022 à 15:52
82 %    718
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DCD

Le clip du premier single :https://www.youtube.com/watch?v=JSAlEVzLhDc

07/06/2025, 09:18

Arioch91

Je comprends son raisonnement car je le partage en partie. Je déteste le mot "contenu" quand on parle de vidéo. Ca ne veut pas dire grand chose. Les lyrics video, je trouve que c'est une solution de facilité. On se contente de coller une(...)

07/06/2025, 09:04

stench

J'suis probablement trop vieux, je trouve ça atroce, autant à écouter qu'à regarder.

07/06/2025, 08:32

Humungus

On en cause de la chemise trop petite qui laisse dépasser la panse ?

07/06/2025, 07:39

Drina Hex

On se retrouve en live

07/06/2025, 01:23

Moshimosher

Ben, mince alors, c'est un vieux con Akerfeldt, en fait... dommage... après, tant  que la musique est bonne, que demande le peuple ? (Après, je suppose qu'il n'arrivera jamais au niveau de Chris Barnes, mais, bon...)

06/06/2025, 18:05

Moshimosher

je vois pas, plutôt...

06/06/2025, 18:02

Moshimosher

Mouais, un peu médiocre son commentaire sur les lyrics videos... perso, j'aime bien avoir la musique et le texte qui défile... c'est pas spécialement élaboré mais je voix pas en quoi c'est minable...

06/06/2025, 18:02

Humungus

Miam miam !!!

06/06/2025, 11:44

Arioch91

Cet album me procure le même effet que le précédent album sorti en 2020 : une pure tuerie !

04/06/2025, 21:00

Moshimosher

Pas mal, pas mal...

04/06/2025, 20:31

Jus de cadavre

Bon dieu c'était pas encore assez gros ??   

04/06/2025, 14:38

JP

Merci pour cette belle chronique.Voici notre site.https://burningdead-official.com/fr/categories/

04/06/2025, 14:18

Humungus

Ah pis j'avais même pas vu (encore entendu) qu'il y avait une reprise de GOATLORD !!!Ceci confirmant donc cela.

04/06/2025, 07:35

Humungus

Tout ce que j'aime !!! !!! !!!En même temps, venant d'un groupe dont le batteur porte un t-shirt TRISTITIA, ce ne peut-être que bonnard...

04/06/2025, 07:34

Humungus

... ... ...

03/06/2025, 16:23

Nervald

Je n’ai jamais entendu parler de ce split vous savez ou l’écouter ou ce le procurer 

03/06/2025, 13:35

Gargan

Effectivement difficile de rester insensible à ce type de festival, à taille humaine, avec une ambiance conviviale sans tomber dans la cour des miracles et surtout avec une bell prog’. Très content d’avoir découvert Gravekvlt et pris la mandale attendue de (...)

02/06/2025, 23:00

Simony

Cool !J'adore l'ambiance de ce genre de festival.

01/06/2025, 21:07

NecroKosmos

Excellent report ! J'y étais. C'était purement génial. Dans le même style, tout aussi excellent, le Courts Of Chaos fut aussi un fantastique moment.

01/06/2025, 19:36