Inferno

Raw Power

09/06/2017

Demons Run Amok Entertainment

Trouver un groupe de Hardcore en activité depuis 1981 n’est pas chose courante de nos jours. Et pourtant, il en existe, qui sortent encore des albums, et qui se permettent même de rester d’actualité, sans rien renier de leur glorieux passé. Pour connaître celui des RAW POWER - sans aucun doute influencés par la bande à Iggy au moment de leur baptême – il faut donc revenir dans la région de Reggio d'Émilie, à Poviglio plus précisément, pour y découvrir un jeune guitariste jouant dans son coin, Giuseppe Codeluppi, grattant depuis 1979 et qui n’allait pas tarder à donner naissance à l’une des plus anciennes légendes Core transalpine. Depuis, l’histoire a suivi son cours, obligeant le groupe à changer régulièrement de line-up pour survivre, mais surtout, pour arroser le marché d’un nombre conséquent de sorties publiées par divers labels. Un simple coup d’œil à leur parcours discographique sur la bible Discogs suffit à comprendre que les italiens n’ont pas chômé en se contentant de quelques clins d’œil et signes de la main épars. Seize longue durée, des splits, des EP, des démos, enfin le parcours habituel d’un groupe underground qui ne lâche pas son os à ronger, et qui avance coûte que coûte. Et à l’écoute de ce petit dernier, Inferno, on comprend très bien que le combo n’ait jamais raccroché les gants. Car leur rage est toujours aussi palpable, et aussi emprunte de révolte 80’s que de colère actuelle. Un bon gros uppercut dans le nez pour revenir à la réalité, et surtout, un Hardcore à tendance légèrement Fast pour rester dans la dynamique sans rentrer dans le rang.

Sorti par le label allemand Demons Run Amok Entertainment, Inferno est un gros pavé qu’on reçoit en pleine face, heureux d’avoir été réveillé à la réalité. Celle des RAW POWER est crue, comme leur nom l’indique, et leur line-up actuel (Giuseppe "Junior" Codeluppi, Tommi Prodi & Paolo di Bernardo aux guitares, Mauro Codeluppi au chant, Gianmarco Agosti à la batterie et Marco Massarenti à la basse) semble au sommet de sa forme et de sa hargne, et aligne ainsi quinze brulots qui démangent dans le dos, mais qui donnent aussi envie de faire bouger les choses pour que tout ça ne s’arrête pas trop tôt.

Et ne comptez pas sur des présentations tranquilles pour faire connaissance avec ces allumés, puisque « Look The Other Way » et son message explicite met les choses au point dès ses premières secondes, sans attendre que vous tendiez votre main. L’époque est au réalisme et à la crudité, ce que les italiens savent depuis très longtemps, et ce que leur discographie prouve à chaque instant. Inferno ne dénotera pas parmi leurs efforts précédents, et joue la vitesse et la violence, teintant de puissance un Hardcore qu’on penserait joué par les MINOR THREAT, MADBALL, AGNOSTIC FRONT et pas mal d’autres contemporains des italiens, qui ont vu les groupes naître et mourir alors même qu’ils se battaient pour rester en vie, malgré quelques pertes, dont celle de leur ami de longue date Luca Carpi, décédé il y a quelques années.

En gardant le principe d’instantanéité en ligne de mire, RAW POWER ne change aucunement une formule qui gagne et qui frappe, et ne se disperse pas en route. Les titres ne dépassent jamais les trois minutes, un standard inamovible dans le petit monde du Hardcore, mais dispensent suffisamment d’idées sur fond de rythmiques speedées pour maintenir la pression et le cap sur les désillusions. Sur ce seizième effort, la tension est palpable et la rage capable, et si le duo basse/batterie joue les accélérations jusqu’à l’épuisement, les guitares ne procèdent pas autrement, même si quelques riffs plus graves viennent troubler les débats vitaminés. L’expérience parle, mais une expérience qui a su rester fraîche et alerte, puisqu’il est impossible pour un néophyte à l’écoute de cet album de deviner que le combo à plus de trente-cinq ans d’existence à mettre en avant. La jeunesse de l’impulsion est remarquable, ce qui démontre que le Punk et le Hardcore permettent de rester alerte, et encore plus dans une époque troublée par les querelles de clochers et appauvrissement global nous menant directement à la catastrophe annoncée. Celle-ci est soulignée par les RAW POWER qui n’ont pas oublié les rebelles qu’ils ont toujours été, et qui soulignent les travers de notre société à grands coups de chœurs revanchards et de lignes vocales bien vachardes, histoire de rester dans le ton. Ce dernier est plutôt uniforme, et calé sur des BPM cramés, et si pas mal d’interventions sont assez similaires dans le fond, l’investissement est à ce point total qu’on en oublie les quelques ressemblances un peu trop frappantes qui sont le lot de tous les groupes qui vivent et jouent à fond.

Mais entre deux pamphlets à la Roger Miret, nous avons le droit à quelques surprises de bon aloi, comme ce « The Jurassic Hounds », qui sonne comme une rencontre idéale entre MOTORHEAD et les AGNOSTIC, singeant même par moments le riff de « Iron Fist », pour ajouter un peu de sel dans les références typiques. Le tout cavale donc à bonne allure, et reste dominé par les vocaux martelés de Mauro, qui s’avère être l’archétype du chanteur Core aux tics féroces et au phrasé précis mais véloce, avec ce timbre rauque qui transforme n’importe quelle anecdote en leitmotiv d’importance… Mais les guitares ne s’en laissent pas conter pour autant et tronçonnent impatiemment, alignant les motifs mémorisables mais mordants, qu’on reprend collégialement dans sa tête comme des hymnes à la fête. Mais la fête à notre époque est gâchée par les disparités, et la violence tapie explose à tous les coins de rue à midi, et ça RAW POWER l’a très bien compris. Alors on fait le plein de titres très courts qui courent, de « You Don’t Know Your Enemy », qui ose enfin un up tempo un peu plus costaud, avant d’accélérer pour nous garder au chaud, à « You Were Right », le plus Thrashcore du lot, qui fait encore plus chauffer le moteur de la haine, en se rapprochant des cris les plus primaux de Stigma & co.

Grosse basse qui claque, chaloupés qui font tanguer (« Dedico Queste Righe »), variations sur le même thème de saine colère (« Mean Machine », ou voit bien les mecs la mâchoire serrée prêts à rentrer dans le lard), et final qui nous écrase de ses changements d’humeur (« La Paura »), Inferno se veut donc tableau complet d’un vingt-et-unième siècle à l’agonie, mais aussi plus simplement nouvelle étape sur un parcours impeccable. Le Hardcore des italiens n’a en rien perdu de sa superbe, et les années semblent n’avoir aucune prise sur eux, tant ce nouvel LP respire le naturel et la rage de jouer par tous ses sillons bien chauffés. Depuis 1981 vous dites ? Visiblement, la haine, ça conserve…


Titres de l'album:

  1. Look The Other Way
  2. You Don't Know Your Enemy
  3. Inferno
  4. All It Takes It's One Minute
  5. How Many Bands
  6. Sono Morto
  7. I Lost My Patience
  8. Mean Machine
  9. The Jurassic Hounds
  10. Amici
  11. Dedico Queste Righe
  12. prison
  13. You Were Right
  14. Harassment
  15. La Paura

Site officiel


par mortne2001 le 25/08/2017 à 14:19
78 %    958

Commentaires (0) | Ajouter un commentaire

pas de commentaire enregistré

Ajouter un commentaire


Derniers articles

Midnight + Cyclone + High Command // Paris

Mold_Putrefaction 24/04/2024

Live Report

DIONYSIAQUE + JADE @La Chaouée

Simony 23/04/2024

Live Report

Enslaved + Svalbard + Wayfarer

RBD 20/03/2024

Live Report

Voyage au centre de la scène : BLOODY RITUAL

Jus de cadavre 17/03/2024

Vidéos

Crisix + Dead Winds

RBD 20/02/2024

Live Report
Concerts à 7 jours
Tags
Photos stream
Derniers commentaires
roulure

true norwegian roue libre

26/04/2024, 13:40

Simony

Yes, et demain samedi, c'est WITCHTHROAT SERPENT et ORBIS au Nirvana Pub-Club de Nancy.Si j'avais le temps de renseigner la partie gigs de ce site....

26/04/2024, 13:35

Simony

Yes, et demain samedi, c'est WITCHTHROAT SERPENT et ORBIS au Nirvana Pub-Club de Nancy.Si j'avais le temps de renseigner la partie gigs de ce site....

26/04/2024, 13:35

Humungus

Putain !Si j'avais été au jus de cette date, j'aurai fait le déplacement boudiou...Pis je vois que tu causes de BARABBAS à Nancy ?!Et c'est... ... ... Ce soir.Re-Putain !

25/04/2024, 13:28

Tut tut!

25/04/2024, 12:44

Gargan

ça me fait penser à moi ivre mort parodiant Maurice Bejart, sur fond de Stravinski. Plus glucose, tu meurs. Mauriiiiice !

25/04/2024, 10:28

DPD

Mes confuses malgré mon instinct qui tapait dans le juste, rien avoir avec le gaillard à qui je pensais.

24/04/2024, 14:26

RBD

Vu récemment avec Napalm Death, et ça faisait plaisir de voir que beaucoup de gens connaissent leur Histoire du Death Metal car il y avait de vrais fans. Surtout, la formule D-Beat basique et efficace du père Speckmann fonctionne bien en live 

23/04/2024, 09:55

LeMoustre

Excellent disque avec un gros point fort sur le riffing atomique. La pochette m'évoque clairement celle de Nothingface, version bio-mécanique

22/04/2024, 18:04

Arioch91

Ca fleure bon le vieux Kreator période Pleasure to Kill ! Prod' crade, aux antipodes des trucs surproduits de certains groupes et quand ça speede, ça rigole pas.

21/04/2024, 19:52

Poderosos/Magnificencia/Técnica Suprema

Los Maestros del BRUTAL DEATH GRIND

21/04/2024, 19:50

Pomah

+1 Gargan, influence Mgla je trouve par moment. 

21/04/2024, 09:20

Jus de cadavre

Là clairement le label est dans son droit à 100%. Warner a racheté l'ancien label de Kickback, ils en font ce qu'ils veulent du catalogue. Après, l'élégance, une telle multinationale elle s'en beurre la raie. Mais je peux comprendre qu(...)

20/04/2024, 23:36

Tourista

Mouiii, pas faux. Les gonzes ont signé.Mais ça me rappelle Peter Steele qui avait voulu défenestrer un type dans les bureaux de Roadrunner après avoir découvert que le label ressortait les albums de Ca(...)

20/04/2024, 20:06

Tourista

Devinez où il se Lemmy. (ne me raccompagnez pas, je sors tout seul)

20/04/2024, 19:58

Grosse pute

Attention, les mecs ne se font pas "enfler". C'est juste que Warner ne leur a pas demandé leur avis pour rééditer le bazar et les mecs parlent donc d'édition pirate, alors que Warner a bien les droits sur le disque. Après, Kickback, ce ne son(...)

20/04/2024, 06:26

Tourista

Désolé pour les coquilles monstrueuses.  Merci la saisie automatique.

19/04/2024, 20:51

Tourista

Non bien sûr je plaisantais, M'sieur Heaulme. Un artiste qui se fait enfler a mille fois raison d'en parler !   Et je sais malheureusement de quoi je parle.Respect pour Kickback. Content que tu les pu voir ce docu.

19/04/2024, 18:08

Humungus

@Tourista :- "On s'en cogne"Bah non...- Tu t'es achement bien rattrapé avec ce docu qui était totalement passé à côté de mes radars.Exceptionnel.C'est pas C8 qui passerait ça bordel...

19/04/2024, 15:54

grosse pute

Au lieu d'aller baiser des gamines et des ladyboys à Bangkok, Stephan aurait dû apprendre à lire les contrats qu'il signe.

19/04/2024, 15:20