L’heure est au mélange, l’époque est à la mixité, les temps sont au métissage. Une sorte de flou entoure les définitions, les genres doivent laisser la place aux identités multiples, et la société semble enfin évoluer avec ses propres éléments. La musique n’échappe pas non plus à cette règle, et les groupes se revendiquant d’un style précis se font de plus en plus rares. A l’encontre, les musiciens bravant les étiquettes et conchiant le statisme sont de plus en plus nombreux, foulant du pied la linéarité pour s’imposer dans divers créneaux, jouant la pluralité comme d’autres des certitudes. C’est ainsi qu’il devient de plus en plus ardu d’apposer un sceau quelconque sur un album, a moins de l’avoir coulé dans un alliage, ce que le premier LP des autrichiens d’AVALANCHE confirme de son optique multiple. Quintet originaire de Vienne, Autriche (Alex, Tugi, Michael, Stefan, Thomas), AVALANCHE prône une sorte d’entente cordiale entre la lourdeur du Sludge (elle-même héritée du Doom), le relâchement du Stoner et la puissance du Hardcore, pour nous délivrer un message de violence larvée, assez étonnant dans le fond, mais relativement convaincant dans la forme. Se réclamant d’une filiation directe avec les ancêtres de BLACK SABBATH, mais admettant l’importance de la seconde génération des SLEEP, tout en s’accordant une passion raisonnable pour les HIGH ON FIRE, ces cinq autrichiens se jouent donc des prévisions, et combinent l’approche du NOLA transposé en Europe à la rage d’un Hardcore très Heavy qui permet à leurs morceaux d’atteindre un degré de brutalité relativement conséquent. Et avec à peine une demi-heure au compteur, ce très sci-fi Interstellar Movement donne dans la complétude assez intrigante, spécialement lorsqu’on se rend compte que son déroulé est plus ou moins scindé en deux mouvements.
Entre les références déjà nommées, d’autres qui viendront à l’esprit des connaisseurs (le CEREBRAL FIX de Tower of Spite par exemple, et pas seulement à cause du chant), Interstellar Movement est une entrée en matière chaperonnée qui laisse pourtant à croire que les nouveau-nés ont déjà une solide identité. Des riffs sabbathiens, des mélodies un peu amères, des lignes vocales traînantes, mais aussi un sens de l’immédiateté qui se nie lui-même en fin de parcours pour laisser place à des ambitions plus progressives, tel est le menu des neuf morceaux de cette entame de carrière. Avec un son gras, épais, qui évoque même parfois le parfum Death N’Roll de la scène suédoise, des velléités Hardcore très prononcées dans le rendu, et une énergie un peu pataude tenant du Desert Rock épaissi façon Sludge, nous tenons une réalisation solide, quoique encore un peu gauche et linéaire. Il est évident que les morceaux sont reliés entre eux par des idées communes, et on comprend assez vite les limites d’un chant plus scandé que mélodique, et de guitares qui tricotent les mêmes motifs, mais aussi celles de breaks lourds qui interviennent avec un peu trop de régularité. Toutefois, avant de se concentrer sur les défauts d’un début qui finalement, admet de lui-même le chemin qui le sépare encore de l’originalité et de la perfection subjective, concentrons-nous sur les qualités qui ne manquent pas.
Des guitares principalement, à la distorsion bien appuyée, aux motifs graves mais joués déliés, et surtout, à cette recherche de démarquage, assez évident dès l’intro « Frequencies Below Zero » qui joue les deux minutes et vingt-quatre secondes d’instrumental géré comme un véritable morceau. On sent le groove qui ne quittera plus nos semelles, la complicité des mélodies qui comblent les vides, et « Drake Equation » de débouler après que le terrain fut correctement préparé pour introduire les textes et les obsessions. La méthode est simple, et la même d’un morceau à l’autre, une rythmique très percussive, qui n’hésite jamais à taquiner les toms, des plans qui prennent leur temps pour s’imposer, quelques cassures qui dynamisent l’ensemble, et le ton est donné. De là, émerge une sorte de groove hypnotique, au ras du sol, qui espère atteindre les étoiles, mais qui nous cloue au sol de ses beats pesants et de ses licks prenants. Le groupe n’hésitant jamais à accélérer un peu les débats pour se fixer sur un mid temporaire (« Jupiter Odyssey »), pas de craintes à avoir sur un monolithisme un peu trop Doom pour fédérer, les deux guitares n’étant jamais avares de thèmes euphoriques et bien boogie sur les bords. On pourrait à la rigueur concevoir le concept global comme une façon très street de jouer un Sludge plus léger que d’ordinaire, avec une propension à se laisser aller parfois à des dérives progressives héritées des groupes les plus lysergiques des 70’s (HAWKWIND en tête de liste, avec un poil de MASTODON par-dessus).
Et si la première moitié de l’album fait preuve d’une cohésion le confinant au mimétisme, les derniers morceaux indiquent que les possibilités sont ouvertes. Riffs plus thrashy sur les bords, allusions en vitesse à la mouvance D-beat du nord, approche moins rigide, et accointances Hardcore plus soulignées. Certains titres se montrent d’ailleurs étonnamment légers, « 3C273 » et sa couleur presque Thrash Rock sur son intro (avant de sombrer de nouveau dans la lancinance à la SLEEP), et le diptyque final, plus conséquent, emballe les débats pour se mettre à la colle avec un Sludge/D-beat puissant, mais toujours virevoltant (« Voyagers' Fault »), sans oublier de nous coller au sol avec les répétitions si chères au NEUROSIS le plus traumatique. Quelques arrangements de fond suggérant des escapades dans l’hyperespace pour rester dans le ton, une durée très raisonnable, et une multitude d’éléments qui une fois combinés, nous offrent un Crossover intelligemment élaboré, mais encore un peu trop timoré. AVALANCHE, un groupe bien dans son époque, encore un peu tendre pour faire couler la neige des montagnes, mais qui a le potentiel pour en gravir une de taille raisonnable, pour peu que le final d’Interstellar Movement soit plus représentatif des méthodes d’ascension que son début.
Titres de l’album :
1.Frequencies Below Zero
2.Drake Equation
3.Jupiter Odyssey
4.Exosphere
5.Interstellar Movement
6.Missing Signal
7.3C273
8.Voyagers' Fault
9.The Path Of Fire Continues
Author & Punisher est aussi annoncé à Montpellier le 23 octobre 2025 avec Wyatt E et Yarostan à la place de Bong-Râ.
11/06/2025, 12:53
Ça vaut vraiment le coup d'écouter ce qu'ils font, j'aime beaucoup et c'est vraiment bon !
09/06/2025, 21:35
Je comprends son raisonnement car je le partage en partie. Je déteste le mot "contenu" quand on parle de vidéo. Ca ne veut pas dire grand chose. Les lyrics video, je trouve que c'est une solution de facilité. On se contente de coller une(...)
07/06/2025, 09:04
J'suis probablement trop vieux, je trouve ça atroce, autant à écouter qu'à regarder.
07/06/2025, 08:32
Ben, mince alors, c'est un vieux con Akerfeldt, en fait... dommage... après, tant que la musique est bonne, que demande le peuple ? (Après, je suppose qu'il n'arrivera jamais au niveau de Chris Barnes, mais, bon...)
06/06/2025, 18:05
Mouais, un peu médiocre son commentaire sur les lyrics videos... perso, j'aime bien avoir la musique et le texte qui défile... c'est pas spécialement élaboré mais je voix pas en quoi c'est minable...
06/06/2025, 18:02
Cet album me procure le même effet que le précédent album sorti en 2020 : une pure tuerie !
04/06/2025, 21:00
Merci pour cette belle chronique.Voici notre site.https://burningdead-official.com/fr/categories/
04/06/2025, 14:18
Ah pis j'avais même pas vu (encore entendu) qu'il y avait une reprise de GOATLORD !!!Ceci confirmant donc cela.
04/06/2025, 07:35