L’Amérique du sud a toujours traité le Thrash différemment, plus violemment, et osons le terme, assez proche d’un Black Metal balbutiant, mais déjà ferme de sa méchanceté. Sans faire encore une fois référence aux plus bestiaux représentants brésiliens, il faut admettre que le continent et ses pays phares (Brésil, Colombie, Pérou et Chili) a une façon très particulière de distiller la violence, refusant de la diluer dans l’eau pour la rendre moins forte en oreilles. Et une fois encore, alors que nous atteignons les frontières du Chili, cette philosophie se vérifie avec le cinquième longue-durée des nationaux de NUCLEAR. Fondé en 2003, le collectif a d’abord connu une première partie de carrière dans les nineties sous la bannière ESCORIA, avant d’aborder le nouveau siècle sous son patronyme définitif. C’est donc à des musiciens rodés et expérimentés que nous faisons face, et qui depuis leurs débuts défendent une certaine idée de la brutalité musicale, jouant avec la frontière séparant le Thrash et le Death pour livrer une performance haute en violence et forte en décibels. Et après quatre longue-durée assez respectés dans l’underground, dont le dernier remonte quand même à 2015 (Formula for Anarchy), les NUCLEAR ont décidé de passer la vitesse supérieure, en mixant toutes leurs influences pour nous proposer un cocktail méchamment corsé, à base de Thrash typiquement 80’s, de Death des glorieuses nineties, et de Groove Metal estampillé 2K. En résulte une boucherie tout sauf artisanale, mais pas encore industrielle, qui ne rechigne pas à utiliser les codes anciens du Doom pour mieux imposer la vélocité comme mode d’expression.
Articulé en quintet (Matías Leonicio - chant, Sebastián Puente & Francisco Haussmann - guitares, Eugenio Sudy - batterie et Roberto Barría - basse), NUCLEAR nous propose donc une synthèse très en phase avec son époque, de façon double. D’une part, en respectant les dogmes du Thrash classique, d’autre part, en le teintant d’une optique plus moderne en termes de production et d’arrangements. Entre des plans à faire rougir Gary Holt et les siens, et des breaks à rendre fous les LAMB OF GOD et MACHINE HEAD, Murder Of Crows tourne méchamment rond, et certainement plus rapidement que les classiques trente-trois tours minute. Doté d’une production anonyme par l’absence de nom mais performante dans les faits, ce nouvel album d’une durée raisonnable de quarante minutes représente la quintessence de l’art Thrash moderne, celui qui sait revisiter ses classiques et les transposer dans un idiome moderne, sans en trahir la pureté. Et c’est après une intro aux volutes hispanisantes que les choses sérieuses commencent, avec un morceau d’entame éponyme qui se propose d’étaler tous les arguments les plus probants. Guitares épaisses, rythmique grave et rebondissante, chant rauque et légèrement Core, l’agression est effective, mais la malice aussi. Jonglant entre les tendances, les chiliens déroulent les riffs les plus pertinents, pour nous offrir une construction en gigogne se terminant dans la violence la plus fluide.
Loin des relectures les plus formalistes de leurs concurrents, les cinq musiciens rivalisent de talent pour transformer des idées passéistes en trouvailles up in time, et j’en veux pour preuve irréfutable le très malin et dense « Abusados », qui durant cinq minutes fait le tri et ne garde que les positions les plus fermes, entre licks à la SLAYER, accélérations à la SEPULTURA, et cruauté à la DEMOLITION HAMMER, pour un tour de piste redoutable, et aussi complexe qu’il n’est direct. Les breaks sont précis, Sebastián Puente et Francisco Haussmann terriblement inspirés, et la gravité d’ensemble ne nous noie pas dans les affres du désespoir, mais nous donne justement l’énergie pour lutter contre un système créatif corrompu et entièrement dédié à la paraphrase la plus lénifiante.
Alternant les humeurs et insistant sur les vices, Murder Of Crows se partage entre longs morceaux progressifs et saillies cruelles et immédiates, valsant entre le lapidaire « Friendly Sociopath » que les VIO-LENCE auraient pu faire leur, et le plus fourbe final « Useless to Mankind », qui garde la pression pendant cinq minutes avant de fondre sa bestialité dans une outro acoustique faisant le lien avec l’intro de la même délicatesse. Belle façon de prouver que leurs théories sont valides, et que leurs arguments bouclent la boucle sans insister sur leur pertinence, et on ressort de l’écoute de cet album grandi, et conforté dans ses opinions, sachant pertinemment que confié entre les bonnes mains, le Thrash a encore pas mal de choses à hurler. Mais avant d’en arriver à cette conclusion, il aura fallu encaisser des coups d’une portée rude, des uppercuts de la trempe de « Misery Inc. » qui vous en colle une bonne, des bourrasques faisant voler les perruques dans un ciel d’orage (« Hatetrend », la haine à l’état pur), mais aussi des insistances plus Heavy et dissonantes qui démontrent que le quintet en a sous le coude, et n’est pas encore prêt à photocopier les partitions de ses influences à la note près.
Assez mûrs après quatre albums pleins pour jauger des envies de sa fanbase, NUCLEAR semble s’ingénier à mériter son nom à chaque intervention, et laisse ses réacteurs chauffer aux maximum sans risquer la rupture. Et une fournaise comme « Facing Towards You » réconcilie SLAYER et DEMOLITION HAMMER, les deux références se mettant à la colle pour réduire la concurrence en un tas de cendres. Licks tournoyant à la sud-américaine, accélérations en blasts dantesques, soli transpiré dans une étuve, l’atmosphère est chaude bouillante, et le résultat sans appel : Murder Of Crows est une tuerie de masse en précision, qu’on se repasse en espérant devenir le sniper le plus précis de la profession.
Signés sur le label scandinave Black Lodge Records, les chiliens de NUCLEAR ont parfaitement négocié ce virage délicat de leur carrière, et s’ouvrent grand les portes du leadership sud-américain. Et si vous souhaitez sevrer vos oreilles avec un traitement aussi traditionnel que moderne, ce cinquième LP sera le traitement idéal. Et en plus, aucune posologie à respecter : vous pouvez vous l’avaler comme bon vous semble.
Titres de l’album:
01. Pitchblack
02. Murder of Crows
03. No Light After All
04. When Water Thickens Blood
05. Friendly Sociopath
06. Abusados
07. Misery Inc.
08. Facing Towards You
09. Hatetrend
10. Blood to Spare
11. Useless to Mankind
Putain !Si j'avais été au jus de cette date, j'aurai fait le déplacement boudiou...Pis je vois que tu causes de BARABBAS à Nancy ?!Et c'est... ... ... Ce soir.Re-Putain !
25/04/2024, 13:28
25/04/2024, 12:44
ça me fait penser à moi ivre mort parodiant Maurice Bejart, sur fond de Stravinski. Plus glucose, tu meurs. Mauriiiiice !
25/04/2024, 10:28
Mes confuses malgré mon instinct qui tapait dans le juste, rien avoir avec le gaillard à qui je pensais.
24/04/2024, 14:26
Vu récemment avec Napalm Death, et ça faisait plaisir de voir que beaucoup de gens connaissent leur Histoire du Death Metal car il y avait de vrais fans. Surtout, la formule D-Beat basique et efficace du père Speckmann fonctionne bien en live
23/04/2024, 09:55
Excellent disque avec un gros point fort sur le riffing atomique. La pochette m'évoque clairement celle de Nothingface, version bio-mécanique
22/04/2024, 18:04
Ca fleure bon le vieux Kreator période Pleasure to Kill ! Prod' crade, aux antipodes des trucs surproduits de certains groupes et quand ça speede, ça rigole pas.
21/04/2024, 19:52
Là clairement le label est dans son droit à 100%. Warner a racheté l'ancien label de Kickback, ils en font ce qu'ils veulent du catalogue. Après, l'élégance, une telle multinationale elle s'en beurre la raie. Mais je peux comprendre qu(...)
20/04/2024, 23:36
Mouiii, pas faux. Les gonzes ont signé.Mais ça me rappelle Peter Steele qui avait voulu défenestrer un type dans les bureaux de Roadrunner après avoir découvert que le label ressortait les albums de Ca(...)
20/04/2024, 20:06
Attention, les mecs ne se font pas "enfler". C'est juste que Warner ne leur a pas demandé leur avis pour rééditer le bazar et les mecs parlent donc d'édition pirate, alors que Warner a bien les droits sur le disque. Après, Kickback, ce ne son(...)
20/04/2024, 06:26
Non bien sûr je plaisantais, M'sieur Heaulme. Un artiste qui se fait enfler a mille fois raison d'en parler ! Et je sais malheureusement de quoi je parle.Respect pour Kickback. Content que tu les pu voir ce docu.
19/04/2024, 18:08
@Tourista :- "On s'en cogne"Bah non...- Tu t'es achement bien rattrapé avec ce docu qui était totalement passé à côté de mes radars.Exceptionnel.C'est pas C8 qui passerait ça bordel...
19/04/2024, 15:54
Au lieu d'aller baiser des gamines et des ladyboys à Bangkok, Stephan aurait dû apprendre à lire les contrats qu'il signe.
19/04/2024, 15:20
On s'en cogne. Non j'en profite juste pour dire à ceux qui ne l'auraient pas encor(...)
19/04/2024, 07:52