A les voir comme ça, posant pour des photos promo d’un air détaché, on pense au TING TINGS, à TOKYO TABOO, et autres duos improbables proposant un Crossover plus ou moins fameux, entre Pop, Electro, Punk et Rock en sabots. Mais en y regardant de plus près - ou plus précisément - en écoutant de plus près, on réalise vite que les deux membres d’AABODE sont des activistes underground très portés sur le chaos musical le plus brut, mais aussi le plus opaque. Affublé de surnoms de circonstance (Aabstracter - guitare/basse/batterie et Aabyssal - chant, électronique), Caroline Anièla Begovic et Maximilien Léo Duvoid, tous deux ex-BVDK, nous proposent un Metal extrême se voulant avant-gardiste, à la limite de l’Ambient, et plus proche des tentatives EBM des années 90 que de l’affrontement Hellspawn (Extreme Metal Meets Extreme Techno). Toutefois, les deux options se complètement à merveille, et le résultat est là. Pas parfait, pas vraiment novateur, mais efficace, et très bruyant.
Après un premier EP qui avait mis le feu aux poudres, le duo continue sa route avec un premier long en bonne et due forme. Immédiatement signés par Godz ov War Productions, Aabstracter et Aabyssal se sont attelés à la composition, pour accoucher d’un tracklisting étrange, aux appellations pour le moins cryptiques, et au rendu terriblement Noisy. Difficile de penser une seule seconde à une quelconque forme de Death Metal en subissant cette torture des sens, qui abuse de l’électronique bien plus que du Metal.
Mais alors, pourquoi en parler ? Parce qu’ils sont français ? Que nenni, simplement parce que leur musique est tendue, sombre, anxiogène et terriblement intrigante.
Plus que des chansons, ces sept morceaux sont des assemblages de sons, un peu dans la veine d’un Mories partiellement soulagé de tous ses traumas, avec des faux-rythmes qui empêchent tout relâchement, un chant complètement noyé dans le mix, et une programmation qui bouffe la moitié des fréquences actives. Si la guitare parvient à s’en sortir, avec peine, si la basse ronfle comme un moteur tranquille, l’ensemble dégage un parfum de cramé en surrégime, quelque part entre GODFLESH et DODECAHEDRON, sans les circonvolutions techniques ou le pilonnage systémique.
Tout ça pourrait être craché par la sono d’une soirée à la faune interlope, dans un lieu tenu secret jusqu’au dernier moment. Berlin, Vienne ou même Bordeaux et Bruxelles, pour un tour européen sans visibilité, mais avec les bonnes adresses. Pour le moins confus et confidentiel, Neo-Age semble vouloir annoncer un nouvel âge, mais a encore du mal à en définir les contours.
Comme si KMFDM s’était bombardé roi de l’Indus rebelle et revêche, AABODE abonde dans le sens de l’expérimentation, glissant quelques inserts mélodiques épars pour aérer son oppression, sans vraiment parvenir à créer un courant d’air. Le courant par contre est très sollicité, et permet aux machines, amplis, micros de tenir la distance et de ne pas manquer de puissance. Cette impulsion vous traîne sur la piste d’une boite située près d’une centrale électrique abandonnée, mais dont les fréquences continuent de brouiller les signaux. Ainsi, vous percevez les informations dans un ordre aléatoire (« De-Vore », puzzle aux pièces disparates qui brosse un paysage pour le moins désolé), avant d’abandonner toute tentative de communication claire. Le langage proposé est si personnel qu’on peine à le déchiffrer, encore plus à s’en servir pour échanger.
Bruits blancs, fond en magma qui grouille de gravité, égout fluvial encombré, Neo-Age est en parfaite adéquation avec son époque de troubles et d’inquiétudes, et s’obstine à ne voir que le côté sombre des choses. Si l’avenir ressemble à cet album inquiétant et inextricable, alors le pire reste à venir. Et le pire, c’est « Neo-Age », title-track parfaitement ignoble et inécoutable, avec sfx maniés à la pelle, et interstices laissant faiblement passer la lumière artificielle.
En envisageant la chose sous sa masse, Neo-Age est d’une lourdeur qui le confine à l’immobilisme et à l’attentisme. Beat martelé sous la contrainte informatique, guitare qui semble en permanence chercher le bon motif, samples agités avec parcimonie et voix traversant une forêt de sons inextricables, AABODE a joué la carte du difficile et de l’incompréhensible avec un certain flair, mais un manque cruel de diversité. Une fois le principe assimilé, malgré ses incohérences et son manque de stabilité, le schéma reste le même, et à peine troublé par des séquences plus posées.
Mechanized Hyper Death Metal.
C’est la formule déposée par le duo, et si j’en valide la première partie, j’en contredis presque la seconde. Neo-Age n’a pas grand lien avec le monde du Death Metal, qui s’accorde pourtant souvent des exercices de trublions persuadés d’avoir trouvé le Saint Graal du Noise.
A cette soirée aux invités masqués, AABODE joue son set comme un DJ schizophrène. Les platines passent des morceaux différents, aux tempi irréguliers et aux thèmes contradictoires, et il est impossible de savoir si les manipulations sont voulues ou accidentelles. Ce qui peut conférer à l’ensemble une aura de spontanéité sympathique, ou au contraire, coincer le tout sous des piles d’incompréhension, en attente d’une explication éventuelle. Qui ne viendra évidemment jamais.
Je m’en remets à la sensibilité de chacun, ne prenant aucun risque de jugement. Mais l’avenir sera entièrement robotisé ou ne sera pas.
Titres de l’album:
01. Coral
02 .Perpetual
03. Ayre
04. De-Vore
05. Neo-Age
06. 2047 YOD
07. Rem(a)inder
C'est le groupe du chanteur de feu Paean. Il faut que j'essaie l'album de 2022.
15/03/2025, 15:41
Franchement Alcest mérite mieux qu'un de ces énièmes groupes de post-rock ou post-metal à la con ou tout est recraché.
15/03/2025, 11:50
Très bon groupe de Death grind,que je viens de découvrir moi qui aime la musique extrême je ne suis pas déçu !Je le conseille à tous
12/03/2025, 10:09
Va vraiment falloir arrêter ces commentaires politiques systématiques, c'est d'un redondant, même si, je conviens que pour le présent groupe ce soit peu évitable. Mais un peu de sérieux, le capitalisme honni se réjouit justement des luttes (...)
12/03/2025, 08:01
Oui il y avait des tensions je pense. Hinds voulait clairement une orientation moins "Metal" depuis quelques temps pour Masto... Et dernièrement il était très critique sur le concert d'adieu de Black Sab' auquel Masto va participer. Il avait po(...)
11/03/2025, 20:35
Du tout bon ça !!!PS : L'intro de la chro c'est pour de vrai mortne2001 ou juste pour la beauté du texte ???
11/03/2025, 19:29
Apparemment Hinds était moins impliqué dans le groupe ces derniers temps mais c'est vraiment dommage cette séparation.
11/03/2025, 07:47
Perso, à part leurs deux premiers albums qui sont vraiment géniaux, le reste est quelconque et prétentieux.
08/03/2025, 16:08
Tout comme Gargan, bien plus ADIPOCERE que HOLY à l'époque.HOLY étant bien trop atmo-avant-garde-mélo-musique-du-monde pour moi.Pout autant, GLOOMY GRIM et TRISTITIA ont été de très grandes révélations au mili(...)
08/03/2025, 10:09
Le catalogue était culte avec ses descriptions d'albums !!! ("la batterie va à 1000 km/h", "l'album de la maturité",...) Ma discothèque s'est constituée au début en grande partie grâce à eux.
07/03/2025, 16:48
@ Mortne2001 :J'ai maté les films que tu conseillais et que je n'avais pas encore vu (voir même entendu causer...) :- ODDITY : Mouuuais... ... ...Idée de base pas mal mais des incohérences scénaristiques qui gâche totalement t(...)
04/03/2025, 12:25