Nova

Sylvaine

04/03/2022

Season Of Mist

Lorsque j’ai chroniqué Silent Chamber, Noisy Heart il y a huit ans, il est peu dire que le nom de SYLVAINE ne signifiait pas grand-chose, et pour cause. L’album était autoproduit, et la musicienne norvégienne presque totalement inconnue du public Metal. Aujourd’hui, la sortie de Nova fait grand bruit, ce qui signifie deux choses : que l’artiste accède enfin au statut qu’elle mérite, et que je ne m’étais pas trompé sur la qualité de son travail. Et c’est donc très logiquement que je reprends pour clavier pour la quatrième fois, à l’occasion de ce nouvel album, qui pourrait bien incarner quelque part, l’épitomé de son art.

Les pages Facebook de mes contacts sont remplis de ses clips, affichent la pochette de son vinyle, et se répandent en dithyrambes qui me satisfont pleinement. Tant mieux, continuez, et si vous le pouvez, achetez sa discographie complète, car elle mérite une attention particulière. Si Silent Chamber, Noisy Heart était déjà un petit miracle en soi, il n’était alors qu’une ébauche, la petite porte d’un jardin, un reflet dans un miroir, et chaque chapitre de la légende nous faisait avancer de plus en plus loin dans le monde de SYLVAINE. Au point où aujourd’hui, la musicienne met son âme à nu, convoque les Dieux de la violence et les muses de la délicatesse aux agapes d’un Post-Metal de plus en plus riche, mais aussi de plus en plus ornementé.

Kathrine Shepard se cache donc encore une fois derrière son personnage, pour parler d’elle en ne dévoilant que le strict minimum : ce qu’elle a à dire. Enregistré en France, au Drudenhaus Studio, produit et mixé par Benoît Roux, masterisé par Karl Daniel, Nova est une fois encore une histoire simple d’équilibre entre la force et la fragilité, et l’assertion la plus définitive qui soit : la vie est ainsi faite, nous avons tous nos craintes et nos faiblesses, mais il convient de s’en servir comme d’une force. D’où cette dualité ambiante entre des plages contemplatives, presque méditatives, et des instants de sauvagerie primale digne d’un cri de nouveau-né.

Totalement sous contrôle solitaire, Nova souligne encore une fois l’omnipotence de l’artiste qui s’est emparée de tous les instruments pour peindre des textures pleines et profondes. On soulignera pour le détail la participation de Dorian Mansiaux à la batterie, en soutien, mais le cœur de cette nouvelle peinture magnifiquement illustrée par Andy Julia et Daria Endresen reste SYLVAINE, pleine de pudeur dans sa nudité physique et artistique absolue.

De sa discographie, elle n’a rien renié, au contraire. On retrouve tout ce qui nous enivrait sur Atoms Aligned, Coming Undone, tout ce qui nous avait séduit sur Silent Chamber, Noisy Heart, et tout ce qui nous avait envouté sur Wistful. A l‘image de sa consœur MYRKUR, Kathrine refuse le cloisonnement, n’utilise le Black Metal que comme composante d’une palette de couleurs, utilise les mélodies héritées du Progressif pour les insérer dans un labyrinthe Post-Metal, et finalement, rejette toutes les étiquettes sans avoir à le faire. Et le résultat est aussi sauvage que délicat comme du cristal.

« Nova » nous cueille d’ailleurs a cappella, avec son entremêlement de voix sublime. Ce premier morceau, l’un des plus chéris par l’interprète, est sans doute la plus belle façon d’entrer une fois encore dans cet univers onirique, aux teintes bleutées, aux reflets irisés. Kathrine est d’ailleurs très attaché à cette entame, qu’elle décrit en ces mots :

Un morceau très complexe à enregistrer, quelque chose que j’ai fait complètement seule en parallèle au reste de l’album. Ce titre comprend chaque émotion qui a traversé l’enregistrement de l’album, sans en dire un traitre mot. Il est difficile pour moi de dire ce que représente cette chanson, et l’état dans lequel elle me met à chaque écoute. J’y ai mis mon âme encore plus à nu que d’habitude.

En l’écoutant, on pense à DEAD CAN DANCE évidemment, mais aussi à MIRANDA SEX GARDEN, et on voyage peut-être en astral, sur un autre plan de perception. Mais la beauté reste la plus concrète possible, la pureté aussi, et rien ne nous prépare au choc énorme de « Mono No Aware », massacre Post Black aussi intense qu’un démon libéré de sa prison.

En deux morceaux, SYLVAINE joue le contraste absolu, et nous prouve s’il en était besoin qu’elle ne sera jamais apprivoisée. Cette liberté artistique naturelle indique un caractère fort, une ouverture d’esprit certaine, et une envie d’utiliser tous les styles pour parvenir à ses fins : traduire des sentiments en chansons, et se décrire sans vraiment se découvrir.

Tissé comme un canevas en fil de soie, mais solide comme une plaque de fonte, Nova est une étoile qui traverse les cieux de la galaxie Metal comme un objet non identifié. On pense en l’écoutant à MONO, THE OCEAN, Enya, THE GATHERING, mais on pense surtout que la musique est la plus fondamentale des philosophies humanistes qui soit. Parler un langage universel, partager avec le monde entier sans avoir besoin de traduction ou de moyen de transport, Enivrer sans alcool, faire rêver sans dormir, marcher sans bouger, et encaisser la brutalité la plus viscérale tout en touchant du doigt le divin qui est en chacun de nous (« Fortapt », les onze minutes progressives les plus envoutantes qui soient, entre opéra maudit et confession brisée).

Comme le dit l’artiste elle-même, « I Close My Eyes so I Can See ». Fermer ses yeux pour ouvrir son âme et son cœur, ne pas se préoccuper de son ancrage, et ne jamais faire de prosélytisme putassier. Mais SYLVAINE dit aussi que « Everything Must Come to an End », ce qui signifie que comme à chaque fois, les adieux seront déchirants. Ils se font au son d’une mélodie de guitare en son clair, épurée et très abrupte, et de volutes vocales qui s’évanouissent dans le ciel.

Et puis, dans un dernier réflexe, la musicienne nous adresse un dernier geste, plus Rock, et assez proche des postures d’Anneke. Mais c’est fini, cette fois, bien fini.

Il est loin le temps où je pouvais garder le secret de SYLVAINE pour moi seul. Mais le partager avec le monde entier est un autre plaisir. Tout aussi intense, comme sa musique, unique.

    

 

                                                                                                                                                         Titres de l’album :                                   

01. Nova

02. Mono No Aware

03. Nowhere, Still Somewhere

04. Fortapt

05. I Close My Eyes so I Can See

06. Everything Must Come to an End

07. Dissolution (Bonus)


Site officiel

Facebook officiel

Bandcamp officiel


par mortne2001 le 11/03/2022 à 17:51
90 %    888
Derniers articles

Walls of Jericho + Get Real

RBD 02/07/2025

Live Report

Voyage au centre de la scène : PARADISE LOST

Jus de cadavre 15/06/2025

Vidéos

Aluk Todolo + Spirit Possession

RBD 10/06/2025

Live Report

SWR Barroselas Metalfest 2025

Mold_Putrefaction 08/06/2025

Live Report

Anthems Of-Steel VII

Simony 30/05/2025

Live Report

Clinic LI-SA X et Paul GILBERT

mortne2001 29/05/2025

Live Report

The Sisters of Mercy + Divine Shade

RBD 21/05/2025

Live Report

Great Falls + Kollapse

RBD 04/05/2025

Live Report

Chaulnes MÉTAL-FEST 2025

Simony 27/04/2025

Live Report

Star Rider/Blaze Bayley

mortne2001 24/04/2025

Live Report
Concerts à 7 jours
Tags
Photos stream
Derniers commentaires
Humungus

@LeMoustre :Effectivement... Point de vue totalement respectable que celui de ne pas vouloir payer un prix de dingue pour mirer un show proche du pathétique.Mais perso, face à des légendes comme celles-ci, je mets mon impartialité de côté et (...)

07/07/2025, 17:42

LeMoustre

Bravo pour ton travail ! 

07/07/2025, 14:48

LeMoustre

Ozzy sur sa chaise hé ben.Bon l'âge nous aura tous mais bon quand même c'est pas cool de voir ça.Moi ça m'aurait emmerdé.Autant un Anthrax, un Maiden ont toujours la peche après tant d'années (quitte &a(...)

07/07/2025, 13:18

labbe

j'ai eu l'occasion de les voir en première partie de Seum mi Juin. vraiment bien prenant ! 

07/07/2025, 12:48

Humungus

Je m'attendais vraiment pas à ce qu'Ozzy tiennent 30 min sur chacun de ses shows...Bon, on peut pas dire que c'était "beau" à voir mais si j'avais eu la chance de gauler une place, j'aurai tout de même été bien con(...)

07/07/2025, 07:36

Benstard

Putain je suis fan de Slayer mais c'était bien dégueulasse. Ça devient une parodie. Et oui merci pour tout Ozzy et tommy. 

06/07/2025, 21:25

Oliv

C’est toujours parodique ou c’est mieux 

06/07/2025, 19:11

Oliv

Merci Ozzy pour tous 

06/07/2025, 19:10

DPD

Oui c'est bien beau mais étaient ces gars durant l'ère Obama ou il a absolument tout trahis ? Trump on connait son histoire personnelle et ses financements. c'est sans surprise..

06/07/2025, 14:20

metalrunner

Les chutes de Symbolic

05/07/2025, 08:26

DPD

Pardon pour les fautes, mais quitte à écouter ce genre de trucs, Anna von Hausswolff le faisait beaucoup mieux il y a 10 ans. C'est ce qu'on appelle l'avant-garde je suppose.

05/07/2025, 06:51

DPD

Le problème de de Kayo Dot c'est qu'il dépend de l'envie du moment de Toby Driver et de qui l'entoure, tu peux avoir un album de drone/post-rock suivit d'un album de death metal, il n'y a pas de groupe et aucune identité. C'est dommage parce(...)

05/07/2025, 06:47

DL100

Merci à Clawfinger pour ce grand moment de transgression validée par l’ordre moral dominant. C’est rassurant de voir que la “rébellion” moderne consiste à tirer sur une cible usée jusqu’à la corde, avec des punchlines dignes (...)

04/07/2025, 07:16

Ivan Grozny

Il tourne pas mal chez moi ce disque, et c'était un vrai plaisir de revoir le groupe live récemment après les avoir un peu mis de côté. Un autre concert en tête d'affiche ne serait pas de refus !

03/07/2025, 16:57

Ivan Grozny

Morceau décevant et sans surprise. La présence de Chris Kontos dans le groupe y fait pour beaucoup dans mon intérêt pour ce retour,  mais pour le moment bof.

03/07/2025, 16:47

Jus de cadavre

Je n'ai jamais aimé ce groupe, mais j'étais passé devant durant un Hellfest et en effet c'était juste insupportable toutes ces harangues (littéralement toutes les 10 secondes). Moi je m'en beurre la raie, mais pour les fans ça doit &ec(...)

03/07/2025, 12:55

Buck Dancer

Toujours aussi léger !!! 

03/07/2025, 03:25

Simony

Clairement ! Trop de blabla et de remplissage.

02/07/2025, 18:56

Jeff48

Vu à Toulouse et je n'ai pas du tout accroché,  pourtant vu 2 ou 3 fois depuis 2005. Et j'avais bien aimé. Rien ne surnage, ça bastonne mais pour moi aucuns titres ne sort du lot.Par contre j'ai adoré Slapshot

02/07/2025, 16:01

Jourdain R.

Votre article sur le kintsugi est un véritable hommage à l’art de reconnaître la beauté dans la fragilité et les cicatrices : mentionner son origine au XVe siècle et sa philosophie wabi‑sabi renforce(...)

02/07/2025, 15:38