Ode

Ignis Tellus

14/02/2025

Autoproduction

Presque nouveau-venu sur la scène BM française, le collectif normand IGNIS TELLUS se lance dans l’aventure d’un premier long, après s’être présenté sous la forme d’un moyen métrage en 2020. L’Aube Rouge est donc devenue une Ode, que ces cinq musiciens aux pseudos fleuris (Vermine - basse, Ankou - batterie, Agonie - guitare, Haeresiarca & Mordorakk - guitare/chant) hurlent avec un investissement total, aboutissant à la construction d’une œuvre riche, dense, complexe et fascinante.

L’héritage du BM français est souvent lourd à porter, nos héros nationaux ayant acquis un statut culte depuis des décennies. A chaque sortie d’album, les comparaisons sont inévitables, et ne tournent pas toujours en faveur de l’outsider. Mais la force d’IGNIS TELLUS est de ne pas tenir compte de ces pseudos impératifs, et de jouer la musique qu’il ressent au plus profond de ses tripes. En l’occurrence, un Black violent mais mélodique, à l’inspiration Folk des côtes normandes.

Toutefois, ne vous inquiétez pas. La vilénie est à l’ordre du jour, et ces inflexions harmoniques s’intègrent parfaitement à un cadre plus strict d’extrême dominé et discipliné, mais toujours agressif. Il faut certes attendre un petit peu avant que les intentions se dévoilent, sur le sauvage et incorruptible « Nous Sommes de sa Souche ». Titre à tiroir par excellence, ce troisième de couverture fait la part belle aux chœurs grandiloquents et aux cassures abruptes, mettant en scène une chanson de gestes qui nous envoute autant qu’elle ne nous inquiète.

Autre point fort de cette réalisation, sa versatilité. Les morceaux se détachent sans problème de leur coquille, variant le tempo, la densité, la puissance et l’accessibilité. Dominé de voix de fer par deux leaders complètement au service de leur art, Ode ose parfois des évolutions progressives, que des guitares en circonvolutions diaboliques viennent égayer de leur froideur rigoriste.

En somme, IGNIS TELLUS se décale en marge, mais embrasse le patrimoine BM frenchy avec une fierté totalement justifiée. « Je Crois », qui de son titre suggère une hésitation est en fait une affirmation ferme qui plonge au cœur de la mythologie nordique pour nous étouffer de sa claustrophobie maladive, se formalisant en une poignée de riffs plus purement Thrash rebondissant sur un beat étonnamment jumpy. Les normands ne se sont donc rien refusé pour l’occasion, et le plaisir est donc décuplé. Alors que l’homogénéité est incontestable, quelques digressions solides aèrent la pièce, pour permettre à la poussière de voler sous nos yeux.

Et cette sensation de voyage dans le temps est tout à fait délicieuse.

Visiblement adeptes d’un Heavy Metal décodé pour sonner plus agressif, le quintet juxtapose les strates pour épaissir son récit. On trouve donc dans le répertoire de solides traces de NWOBHM, des tierces, des licks mélodiques précieux, et des instants de grâce pure. Largement de quoi sustenter les amateurs de diversité qui tiennent quand même à un certain degré de brutalité.

Et d’emphase.

Ces derniers seront donc aux anges (ou aux démons, c’est selon) en découvrant le majestueux et menaçant « Orion », qui de son pas lourd et de son atmosphère viking évoque tout autant le BATHORY post Blood, Fire, Death que le DARKTHRONE sourd et aphone. Cette belle constance dans la qualité est renforcée par l’insertion d’un interlude tout sauf gratuit, qui préfigure d’ailleurs l’un des moments les plus violents de cette légende musicale. « Contre l’Homme » se vautre donc dans le stupre d’une ultraviolence traditionnelle, très norvégienne, et qui nous rappelle que le style fut au départ orienté vers la répulsion et l’absence de compromission.

« In Ululatis Abyssi » revient encore une fois dans le giron d’un Metal plus généraliste, et nous enivre de notes simples qui s’évanouissent dans le ciel telles des corbeaux fantômes. Cette facilité avec laquelle le quintet passe d’une tonalité à l’autre, jouant sur le contraste entre noirceur et lumière est tout bonnement remarquable, et d’un professionnalisme enviable. Il est assez rare d’arriver à un tel degré de maturation sur un premier album, et pourtant, Ode est à n’en point douter l’une des œuvres les plus fouillées de ce début d’année.

Et l’attention est maintenue tout au long de ces cinquante-cinq minutes, par un habile jeu d’ombres qui se projettent sur l’écran de nos fantasmes régionaux. La Normandie regorge justement de secrets et d’histoires que l’on se transmet de génération en génération, et IGNIS TELLUS s’appuie sur cette tradition pour faire bouillir sa musique et la laisser répandre ses effluves étranges.

Production un peu râpeuse pour garder l’esprit de terroir, basse qui se met en avant pour ne pas se contenter de son habituel rôle de pourvoyeuse de graves indiscernables, percussions au son naturel qui introduisent un nouveau pamphlet délétère (« Ode »), allusions passéiste à l’histoire déjà écrite (« Peste Éternelle »), pour un final incandescent qui cristallise toutes les humeurs (« Je Suis Cette Terre »).

L’odeur de la foret, les tenues d’apparat, les capuches tombant sur le visage, la congrégation se réunit et invoque les Dieux anciens. Qui lui répondent dans un langage que seuls les initiés peuvent traduire.            

                                                                           

Titres de l’album:

01. Vox Terrae

02. Dans les Ténèbres

03. Nous Sommes de sa Souche

04. Je Crois

05. Orion

06. Interlude

07. Contre l’Homme

08. In Ululatis Abyssi

09. Ode

10. Peste Éternelle

11. Je Suis Cette Terre


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par mortne2001 le 21/04/2025 à 16:03
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