Satanic Inversion of....

Avmakt

30/08/2024

Peaceville Records

Le chef de meute reconnaît les siens, et les protège du mieux qu’il peut. C’est ce qu’on peut retenir de la sortie du premier album du duo norvégien AVMAKT, qui s’obstine à se lover au creux de sa mère nourricière, sans chercher à en quitter le giron. Un giron qui s’est d’ailleurs formé très rapidement, après une simple démo qui résonnait comme le cri d’un nouveau-né particulièrement méchant. Et vicieux. En lecture simple et diagonale, impossible de distinguer AVMAKT du gros des troupes old-school. Même son abrasif, même noirceur, mêmes influences, et même envie de rendre hommage à un pan de l’histoire nordique avec respect et dévotion. Mais sur le papier, les choses sont un peu différentes. Très même.

Car AVMAKT est tout sauf un groupe émergeant de nulle part et mené par deux inconnus éduqués. Kristian Valbo et Christoffer Bråthen sont en effet deux figures légendaires qui se sont associés pour créer un vortex dans l’espace-temps, et nous ramener à l’orée des années 90. Connus pour avoir exercé leur talent au sein d’AURA NOIR, OBLITERATION, ou CONDOR, les deux musiciens ont donc uni leurs forces pour payer leur tribut au héros de l’ombre le plus classique de la Norvège. Celui-là même qui les a découverts et recommandés à Peaceville pour ce premier album. Notre bien-aimé facteur/conseiller municipal Fenriz.

Fenriz ne tarit pas d’éloges sur ses deux collègues. Il s’est même fendu d’une accroche définitive et lapidaire à leur propos. Accroche promotionnelle mais sincère qui en dit bien plus que de longs et rébarbatifs discours :

Le Metal underground tel qu’il devrait toujours être joué revient à Kolbotn.

Sacré parrainage qui évidemment oblige à se sortir les doigts de la porte pour en honorer les termes. Mais avec Satanic Inversion of..., AVMAKT joue sur du papier de verre ce qui aurait pu être une transition entre A Blaze in the Northern Sky et Under a Funeral Moon. Mêmes exigences lo-fi, même attirance pour le BM le plus à nu, même fascination pour les grands espaces, et même production aux médiums écorchés qui laminent les tympans. Une profession de foi hivernale qui ne prend aucun risque en restant sur la bonne piste, celle d’un salut de la main aux sonorités les plus abruptes des années 1992/1994.

Kristian Valbo et Christoffer Bråthen ont donc cherché à reproduire le son de Fenriz et Nocturno Culto, et y sont parvenus, sans forcer le trait ou leur talent. On reconnaît cette batterie à l’économie qui cavale mais souffre d’un rachitisme sonore manifeste, on se délecte de ces riffs si classiques qu’ils semblent avoir été congelés il y a trente ans, et cette voix évidemment ignoble, aux relents de vieille sorcière qui psalmodie dans les bois pour s’attirer les grâces des grands anciens.      

Un tableau peint avec le sens du détail pour un tracklisting mal dégrossi, et symptomatique de ce que le Black Metal nous a offert de plus brut et sans concessions. « Ordinance » joue d’ailleurs franc-jeu, immédiatement, et se base sur des principes connus depuis longtemps, sans en changer la moindre note. Six morceaux seulement, mais des fameux. Ainsi, « Sharpening Blades of Cynicism » vient taquiner les neuf minutes durant lesquelles il opère un travail de sape terrifiant, à base de rafales glaciales et de décélérations qui donnent la nausée. Les plus portés sur la tradition me diront très justement que tout ceci relève du plagiat pur et simple, et quelque part, ils n’auront pas tort. Il est évident que la tutelle de DARKTHRONE est plus qu’un parrainage et plutôt une dépendance affective et artistique, mais le mimétisme est d’une telle qualité qu’on veut bien l’excuser.

Après tout, toute l’opération a été élaborée autour de ce principe. Coller au plus vrai de la scène BM norvégienne, pour en reproduire les tics, la misanthropie et l’humeur en noir et blanc. Sous cet aspect-là des choses, le succès est total, et la sensation bluffante. Une guitare qui semble agoniser près de son congélateur, des toms qui résonnent comme en répétition dans une salle quelconque, un chant enterré qui couine ses invectives fatiguées telle une âme en perdition, et une atmosphère globale qui le confine à l’hiver le plus rude.

Si les sensations nostalgiques sont votre Némésis, alors vous souffrirez le martyr en subissant ces assauts d’un autre temps qui refusent toute compromission contemporaine. Si par contre, elles sont votre catharsis, vous ne vous sentirez jamais aussi bien qu’en dégustant ces riffs lancinants et insistants. Choisissez votre camp, mais n’accusez pas AVMAKT d’être malhonnête.

« Doubt and the Void », fermeture pas du tout éclair nous garde sur la bonne route, et insiste de son intro en mantra diabolique pour mieux retrouver l’essence du mal à laquelle Fenriz et les siens carburaient sur Panzerfaust. Neuf minutes de lourdeur oppressante, d’un Heavy Black aussi discordant qu’une répétition de SONIC YOUTH, et un engagement sans failles envers un BM classique comme le ciel norvégien. Grisaille, noirceur, renoncement, et épousailles sauvages entre une cougar encore fraîche et un jeune étalon qui connaît toutes les ficelles.

Satanic Inversion of est donc très troublant de sa ressemblance avec la première partie de carrière de qui-vous-savez. A la manière d’un LIK qui reproduit à la note près la scène Death suédoise des early nineties, AVMAKT décalque les réflexes forestiers et brumeux d’un Black Metal joué religieusement, dans le chaos le plus total. Fluctuation du son qui refuse de rester nivelé, attitude trve, pour un résultat évidemment prévisible.

Mais cette prévisibilité a quelque chose de salvateur dans ce monde qui tourne et se retourne comme une girouette. Le diable revient donc à Kolbotn, et il n’a pas changé. C’est toujours plaisant de retrouver un vieil ami.

 

Titres de l’album :

01. Ordinance            

02. Poison Reveal

03. Sharpening Blades of Cynicism             

04. Towing Oblivion             

05. Charred               

06. Doubt and the Void


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par mortne2001 le 10/09/2024 à 17:09
85 %    331
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Arioch91

Cet album me procure le même effet que le précédent album sorti en 2020 : une pure tuerie !

04/06/2025, 21:00

Moshimosher

Pas mal, pas mal...

04/06/2025, 20:31

Jus de cadavre

Bon dieu c'était pas encore assez gros ??   

04/06/2025, 14:38

JP

Merci pour cette belle chronique.Voici notre site.https://burningdead-official.com/fr/categories/

04/06/2025, 14:18

Humungus

Ah pis j'avais même pas vu (encore entendu) qu'il y avait une reprise de GOATLORD !!!Ceci confirmant donc cela.

04/06/2025, 07:35

Humungus

Tout ce que j'aime !!! !!! !!!En même temps, venant d'un groupe dont le batteur porte un t-shirt TRISTITIA, ce ne peut-être que bonnard...

04/06/2025, 07:34

Humungus

... ... ...

03/06/2025, 16:23

Nervald

Je n’ai jamais entendu parler de ce split vous savez ou l’écouter ou ce le procurer 

03/06/2025, 13:35

Gargan

Effectivement difficile de rester insensible à ce type de festival, à taille humaine, avec une ambiance conviviale sans tomber dans la cour des miracles et surtout avec une bell prog’. Très content d’avoir découvert Gravekvlt et pris la mandale attendue de (...)

02/06/2025, 23:00

Simony

Cool !J'adore l'ambiance de ce genre de festival.

01/06/2025, 21:07

NecroKosmos

Excellent report ! J'y étais. C'était purement génial. Dans le même style, tout aussi excellent, le Courts Of Chaos fut aussi un fantastique moment.

01/06/2025, 19:36

Benstard

Incroyable un groupe qui s'attaque à faire une reprise de Dead Congrégation !!! Je me languis d'écouter ça . Faut pas se louper la ahah.

31/05/2025, 21:53

Simony

Ah ah ce message d'au revoir est magnifique"Je dois y aller maintenant… chercher un boulot et jouer à Roblox avec mon fils…"

31/05/2025, 09:12

mortne2001

@Gargan exact, oubli impardonnable...Mais que veux-tu, je suis une vieille baderne qui pense que DEEP PURPLE est de la musique de jeunes et que tout est pourri depuis la mort de Roy Orbison. Mais totalement d'accord pour "Whiter Shade of Pale", quel feeling....

30/05/2025, 09:39

Salmigondis

C'est toi qui deicide, mec.   

30/05/2025, 06:15

Gargan

Tu presses lecture, retour immédiat 35 ans en arrière ! 

29/05/2025, 22:47

Gargan

Bah tu as oublié la reprise finale de dragon ball par Lisa, question de génération hehe. Je ne connaissais pas tant que ça Paul Gilbert (un peu Mr Big et Racer X, mais pas plus), super bonhomme et musicien incroyable. Enorme panard sur la reprise de Procol Harum.

29/05/2025, 22:28

Rodimus

Excellent !!

27/05/2025, 13:11

Ivan Grozny

Cool qu'ils aient signé chez Osmose !

27/05/2025, 12:19

Humungus

J'avoue avoir délibérément censuré cette information de premier choix... ... ...

26/05/2025, 07:32