Le chef de meute reconnaît les siens, et les protège du mieux qu’il peut. C’est ce qu’on peut retenir de la sortie du premier album du duo norvégien AVMAKT, qui s’obstine à se lover au creux de sa mère nourricière, sans chercher à en quitter le giron. Un giron qui s’est d’ailleurs formé très rapidement, après une simple démo qui résonnait comme le cri d’un nouveau-né particulièrement méchant. Et vicieux. En lecture simple et diagonale, impossible de distinguer AVMAKT du gros des troupes old-school. Même son abrasif, même noirceur, mêmes influences, et même envie de rendre hommage à un pan de l’histoire nordique avec respect et dévotion. Mais sur le papier, les choses sont un peu différentes. Très même.
Car AVMAKT est tout sauf un groupe émergeant de nulle part et mené par deux inconnus éduqués. Kristian Valbo et Christoffer Bråthen sont en effet deux figures légendaires qui se sont associés pour créer un vortex dans l’espace-temps, et nous ramener à l’orée des années 90. Connus pour avoir exercé leur talent au sein d’AURA NOIR, OBLITERATION, ou CONDOR, les deux musiciens ont donc uni leurs forces pour payer leur tribut au héros de l’ombre le plus classique de la Norvège. Celui-là même qui les a découverts et recommandés à Peaceville pour ce premier album. Notre bien-aimé facteur/conseiller municipal Fenriz.
Fenriz ne tarit pas d’éloges sur ses deux collègues. Il s’est même fendu d’une accroche définitive et lapidaire à leur propos. Accroche promotionnelle mais sincère qui en dit bien plus que de longs et rébarbatifs discours :
Le Metal underground tel qu’il devrait toujours être joué revient à Kolbotn.
Sacré parrainage qui évidemment oblige à se sortir les doigts de la porte pour en honorer les termes. Mais avec Satanic Inversion of..., AVMAKT joue sur du papier de verre ce qui aurait pu être une transition entre A Blaze in the Northern Sky et Under a Funeral Moon. Mêmes exigences lo-fi, même attirance pour le BM le plus à nu, même fascination pour les grands espaces, et même production aux médiums écorchés qui laminent les tympans. Une profession de foi hivernale qui ne prend aucun risque en restant sur la bonne piste, celle d’un salut de la main aux sonorités les plus abruptes des années 1992/1994.
Kristian Valbo et Christoffer Bråthen ont donc cherché à reproduire le son de Fenriz et Nocturno Culto, et y sont parvenus, sans forcer le trait ou leur talent. On reconnaît cette batterie à l’économie qui cavale mais souffre d’un rachitisme sonore manifeste, on se délecte de ces riffs si classiques qu’ils semblent avoir été congelés il y a trente ans, et cette voix évidemment ignoble, aux relents de vieille sorcière qui psalmodie dans les bois pour s’attirer les grâces des grands anciens.
Un tableau peint avec le sens du détail pour un tracklisting mal dégrossi, et symptomatique de ce que le Black Metal nous a offert de plus brut et sans concessions. « Ordinance » joue d’ailleurs franc-jeu, immédiatement, et se base sur des principes connus depuis longtemps, sans en changer la moindre note. Six morceaux seulement, mais des fameux. Ainsi, « Sharpening Blades of Cynicism » vient taquiner les neuf minutes durant lesquelles il opère un travail de sape terrifiant, à base de rafales glaciales et de décélérations qui donnent la nausée. Les plus portés sur la tradition me diront très justement que tout ceci relève du plagiat pur et simple, et quelque part, ils n’auront pas tort. Il est évident que la tutelle de DARKTHRONE est plus qu’un parrainage et plutôt une dépendance affective et artistique, mais le mimétisme est d’une telle qualité qu’on veut bien l’excuser.
Après tout, toute l’opération a été élaborée autour de ce principe. Coller au plus vrai de la scène BM norvégienne, pour en reproduire les tics, la misanthropie et l’humeur en noir et blanc. Sous cet aspect-là des choses, le succès est total, et la sensation bluffante. Une guitare qui semble agoniser près de son congélateur, des toms qui résonnent comme en répétition dans une salle quelconque, un chant enterré qui couine ses invectives fatiguées telle une âme en perdition, et une atmosphère globale qui le confine à l’hiver le plus rude.
Si les sensations nostalgiques sont votre Némésis, alors vous souffrirez le martyr en subissant ces assauts d’un autre temps qui refusent toute compromission contemporaine. Si par contre, elles sont votre catharsis, vous ne vous sentirez jamais aussi bien qu’en dégustant ces riffs lancinants et insistants. Choisissez votre camp, mais n’accusez pas AVMAKT d’être malhonnête.
« Doubt and the Void », fermeture pas du tout éclair nous garde sur la bonne route, et insiste de son intro en mantra diabolique pour mieux retrouver l’essence du mal à laquelle Fenriz et les siens carburaient sur Panzerfaust. Neuf minutes de lourdeur oppressante, d’un Heavy Black aussi discordant qu’une répétition de SONIC YOUTH, et un engagement sans failles envers un BM classique comme le ciel norvégien. Grisaille, noirceur, renoncement, et épousailles sauvages entre une cougar encore fraîche et un jeune étalon qui connaît toutes les ficelles.
Satanic Inversion of est donc très troublant de sa ressemblance avec la première partie de carrière de qui-vous-savez. A la manière d’un LIK qui reproduit à la note près la scène Death suédoise des early nineties, AVMAKT décalque les réflexes forestiers et brumeux d’un Black Metal joué religieusement, dans le chaos le plus total. Fluctuation du son qui refuse de rester nivelé, attitude trve, pour un résultat évidemment prévisible.
Mais cette prévisibilité a quelque chose de salvateur dans ce monde qui tourne et se retourne comme une girouette. Le diable revient donc à Kolbotn, et il n’a pas changé. C’est toujours plaisant de retrouver un vieil ami.
Titres de l’album :
01. Ordinance
02. Poison Reveal
03. Sharpening Blades of Cynicism
04. Towing Oblivion
05. Charred
06. Doubt and the Void
L'album est vraiment bon ! On retrouve bien cette ambiance poisseuse décrite dans la chronique.
20/06/2025, 20:58
C'est à se demander ce qu'il mange le matin. L'avantage de nous sortir plusieurs albums par an c'est qu'il y en a toujours un ou deux d'excellents ! D'ailleurs ça me fait penser que je n'ai pas encore écouté convenablement le der(...)
19/06/2025, 10:16
Le 2 août a déterminé, sûrement au Sylak car il manquait 2 groupes avant de boucler l'affiche. Ils ont eu du mal cette année car les cachets ont doublé voir tr
18/06/2025, 21:01
Il s'agit de MINDWARP. J'avais choppé cet album (qui était leur 2ème) sorti en 2016 chez Great dane records. Un très bon album de death proche de l'esprit de CARCARIASS. Donc pas étonné de le voir ressortir sous ce nom
17/06/2025, 15:06
J'aurai dû dire "L'un des trucs"...Car l'affiche est une fois de plus laaaaaargement à la hauteur.Employons donc les bonnes formules !
17/06/2025, 08:48
L'un des rares trucs (jamais vu qui plus est) qui me fait littéralement piaffer à l'attente de l'Alcatraz bordel !!!
17/06/2025, 08:46
"Believe in nothing", j'peux comprendre, mais "The plague within"...Ce dernier étant pour moi aussi important que "Faith divides us (...)", j'ai du mal a te cerner cher Simony.
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MON groupe de chevet, la voix de Nick et le touché de Greg sont pour moi les clés de mes émotions musicales. Bizarrement, "The Plague Within" et "Believe In Nothing" sont les 2 albums que j'écoute le moins. J'ADORE ce groupe ! Tout simplem(...)
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Si ça intéresse quelqu'un ils ont mis l'album en intégralité sur bandcamp :https://agoniarecords.bandcamp.com/album/tetrad-mj'ai pas encore tout écouté(...)
16/06/2025, 19:22
Merci pour cette vidéo qui rend bien hommage à Paradise Lost, qui est un de mes groupes préférés depuis presque 32 ans. Découvert à l'époque grâce à l'émission Headbangersball, j'avais 15 ans et j'&eac(...)
16/06/2025, 12:30
Clairement l'un de mes groupes de chevet.Un talent plus qu'indéniable et malgré ce creux de la vague entre 99 et 2007, des gonzes qui se tiennent encore à ce jour bien droit dans leurs bottes.A propos de cette période que je pouvais, comme beauc(...)
16/06/2025, 11:51
Oui comme ils le disent sur le site officiel, bonjour les prix des concerts aujourd'hui avec l'inflation ,Désolé mais je ne peux plus suivre. Trop chère les concerts
15/06/2025, 08:42
Je me demande comment fait Rogga Johansson, avec autant de groupes, il arrive toujours à sortir des trucs vraiment bons !! Quelle energie !!
13/06/2025, 00:29
En fait, ce qui me pose problème, ce n'est pas le fait d'aimer ou pas ce genre de vidéo (lyrics video), c'est les remarques dépréciatives (condescendantes) d'Akerfeldt à ce sujet. Bien sûr, c'est super d'avoir un bon clip, seu(...)
12/06/2025, 01:04
Author & Punisher est aussi annoncé à Montpellier le 23 octobre 2025 avec Wyatt E et Yarostan à la place de Bong-Râ.
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