Thrash, Hardcore, je suis toujours preneur. J’aime quand la rage s’ajoute à la violence dans un climat de défiance. Et puis, après tout, le Thrash et le Hardcore sont liés depuis longtemps, depuis plus précisément que quelques olibrius se sont décidés à mélanger le Punk à MOTORHEAD et JUDAS PRIEST. Tout ça remonte à très loin aujourd’hui, mais les effets de cette hybridation se font toujours ressentir. Jusqu’en France. C’est en tout cas ce que nous expliquent les tourangeaux de CENTIPED avec leur nouvel album.
Nouvel album ou premier album ? J’avoue que je n’en sais rien, leur Bandcamp n’ayant pas été actualisé depuis des lustres. Mais qu’importe l’historique pourvu qu’on ait la trique, et Sphere, rond comme une boule, est de ces albums qui excitent les tympans plus efficacement qu’une dose de viagra auditive.
Ils sont cinq, le cheveu court et la mine réjouie. Ils viennent de Tours, jouent une forme très radicale de Crossover, et proposent avec cet album une conception toute particulière de la brutalité californienne et new-yorkaise. Loin des glaviots crachés à la hâte, Sphere est un album solide, pensé, et étonnamment développé. Il fait montre de solides arguments, rythmiquement parlant, et a trouvé le plus juste équilibre entre street attitude et virilité Metal.
Venice délocalisée en Indre-et-Loire, voilà qui a de quoi intriguer. Mais le résultat est explosif, et le professionnalisme de cet album n’a d’égal que son énergie, un peu comme si LAMB OF GOD percutait de plein fouet les SUICIDAL TENDENCIES. En gros, une sacrée potée qui mélange les légumes les plus nourrissants et la viande la plus tendre, pour flatter le palais. De la bouffe pour l’esprit, faussement simple, mais réellement élaborée. Voici donc le principe d’un disque qui ne se contente pas de quelques brûlots en short, mais qui roule sur son skate à la recherche du spot le plus risky.
Frenchy but chic ? Bonne question, les gus étant plus du genre décontracté que cravaté. Mais la densité, l’intensité, la créativité et cette envie de déborder de tous les cadres confèrent à Sphere des allures d’auberge espagnole en périphérie de Tours, avec accueil vociférant, mais chaleureux.
Avec une collection de riffs à faire pâlir Rocky George (désolé pour l’image…), CENTIPED avance pleine bourre, comme un mille-pattes à la bourre. L’osmose dont font preuve les musiciens, leur entrain, tout nous aiguille sur la piste d’un Thrash à la limite du Thrashcore, mais avec ce petit plus mélodique qui fait la différence (« Ass To Shoulder », syncopé, avec quelques galipettes rythmiques fort intéressantes).
Quelque moments de folie, des pauses salvatrices légèrement bizarres sur les bords (la transition plus que louche « Rotten Chacals Puking In The Savage Storm Of Crisis Cacophony »), de la vraie rage non diluée mais éructée sur tempo maîtrisé (« Shuma Gorath », dans un registre Néo-Thrash des années 90, et avec toujours cette technique appliquée dans un contexte franc et carré), des ambitions même pas cachées qui se formalisent en morceaux longs, évolutifs et pénétrants (« Homonculus », Heavy à souhait, et même à la frontière du Death mélodique par moments), CENTIPED n’a assurément pas la tête dans le cul et sait exactement où il veut nous emmener.
Sur les terres d’une poussée sauvage défiant l’aridité pour trouer le sol rigide. On a chaud, on cherche l’ombre, mais rien ne vient nous la procurer. Alors, on s’habitue à la fournaise, et on se laisse glisser sur la pente de la sueur vers une sortie illusoire en forme d’oasis trop lointain. En louant une fois encore les qualités d’un batteur qui fait preuve d’inventivité par ses baguettes, et une paire de guitaristes qui ne se satisfont pas de riffs réchauffés dix fois au micro-ondes.
Du bon, du très bon, de l’excellent, et quelques pains balancés à la volée (« Mordor », le titre le plus Core du lot). Quelques petites galéjades en grimaces de transitions pour garder le bon ton (« Bayou Billy Blues », un bayou poitevin pour un Billy dont le vrai nom est Jean-Jacques), et surtout, une nervosité hors du commun pour accélérer le tempo tout en restant médium (« Prototype », addictif comme une course-poursuite dans Jack Reacher).
Une véritable surprise, et une révélation. Les CENTIPED, en cherchant à échapper à toute catégorisation ne se sont pas perdus dans les limbes du flou artistique. La direction est claire, le discours cohérent, et la diversité de mise. Ainsi, le terminal « Deadline », entonné en compagnie de Delphine Cheezy Crust referme la porte avec fracas, et dans un registre de Hardcore métallique du plus bel effet.
Chien méchant, mais qui ne mord pas pour rien, skateur conscient des dangers des back flips, CENTIPED est un groupe intelligent et lucide. Du DIY dans le sens le plus noble du terme, pour une virée urbaine de qualité. Ou comment rire demain alors qu’on sourit déjà aujourd’hui.
Titres de l’album:
01. Cathedral Satan
02. Sphere
03. New Year’s Diary
04. Ass To Shoulder
05. Military Fact
06. Rotten Chacals Puking In The Savage Storm Of Crisis Cacophony
07. Shuma Gorath
08. Homonculus
09. Mordor
10. Bayou Billy Blues
11. Prototype
12. Plugin Silence
13. Deadline
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