J’aurais pu me la commencer ludique, citant Balavoine et lâchant un pathétique « L’Aziza, je te veux si tu veux de moi ». Mais non, c’eut été indigne de la puissance dont fait preuve ce groupe qui finalement, mérite mieux que des poncifs. Mais je l’ai fait, cédant à la facilité d’une citation nationale, pour essayer de moduler le choc frontal subit à l’écoute de ce second longue-durée d’une autre troupe américaine en débarquement. Sauf que mes oreilles et les vôtres se substitueront aux plages de Normandie, et encaisseront avec plus ou moins de flegme et de résistance les assauts sonores de ce trio qui décidément ne nous veut pas que du bien. AZIZA, Minneapolis, Minnesota, une carrière entamée en 2013, pour un parcours en ascension. Comme tous les autres ou presque, ces musiciens ont commencé par une démo bizarre (Thunderpunk? Jesus en 2014), avant de se faire les mains sales sur quelques EP’s (High Hopes are at an All Time Low en 2016 et Council of Straitjackets l’année suivante), puis de rester tapis dans l’ombre pour préparer leur grand soir, s’illuminant en 2019 d’une lumière blafarde, aux irisés tamisés et à la portée plus ou moins limitée. Encore une fois, il est difficile de cerner la démarche de ce trio/quatuor sur les photos, qui visiblement a perdu un compagnon en route (Taylor Hamel - batterie, depuis 2018, PJ Randol - basse/chant et Bearach Coughlin - guitare), mais qui continue son petit bout de chemin en prônant des valeurs de crossover qui ne sont toutefois pas les plus simples à expliquer. Les sites parlent d’un mélange de Sludge et de Hardcore, les faits confirment partiellement, mais il y a quelque chose de pourri au royaume de Minneapolis, et de temps à autres, des formes larvées de Blackened Sludge ou de Post Hardcore à tendance Crust s’invitent aux agapes de la brutalité.
Dès lors, difficile d’affilier les instrumentistes à un mouvement quelconque, puisqu’ils n’en font qu’à leur tête, adoptant la posture du poirier pour regarder le monde à l’envers tout en foutant le bordel du regard. On sent évidemment de méchantes accointances avec la lourdeur du Sludge, version sud des Etats-Unis, avec ces riffs boueux et cette voix rauque et incantatoire, mais aussi des tendances à la bestialité d’un Death pas vraiment assumé, mais présent dans les gènes. Tout ceci est parfois très palpable, dans la veine d’un comeback commun des ACID BATH et FETISH 69 (« Procession »), avec dissonances et petits jeux de vibrato combinés pour agacer, mais souvent, se place en marge des modes et des coutumes, suggérant une traduction très personnelle des écrits de la scène Modern Core allemande. Beaucoup de rudesse donc, ce qui est tangible dès « Aegis », qui entame les hostilités sans ménagement, via des rythmiques heurtées et des riffs biscornus. Avec un batteur qui s’amuse bien à empiler les figures et imbriquer les changements de tempo, un guitariste qui refuse la franchise de riffs immédiats, des lignes de chant vomies et des basculements vers un Grind roublard, l’ensemble à des airs de formule biscornue pour réduire au silence tous les chantres d’une normalité musicale fatigante. Mais comment expliquer à un néophyte de quoi ce The Root Of Demise est fait puisque justement, ce premier album garde ses secrets les plus inavouables cachés dans les coffres imprévisibles de l’individualité ? En affirmant peu ou prou que le Sludge et le Death sont très similaire pour les AZIZA, et qu’ils aiment mélanger les deux approches en nous narguant d’une attitude Hardcore presque Punk dans les faits, mais méchamment intelligente dans le fond.
Le fond, justement, on le touche souvent, celui du désespoir, même si quelques thèmes et gimmicks nous extirpent de la boue nauséeuse des bas-fonds de l’extrême. Relevant la gageure de proposer des titres courts proposant un maximum de pistes, les trois américains amalgament, fondent, mélangent avec flair les sous-genres, pour élaborer le leur, tenant à la fois d’un Metal poisseux et compact, d’un Death des origines opacifié à outrance, et d’un Hardcore des égouts de New-York ou Boston, le tout résumé en une poignée d’élans vicieux (« Dead WagEr »). Enchaînant une rivière de perles de jais sur le collier de la brièveté musicale (« Frightened of the New Normal », « Deleted » et « Pyre », moins de cinq minutes à eux trois), The Root Of Demise ne cherche jamais la longueur mais bien l’effet choc, la percussion, mais aussi la prise de revers, chaque plan suivant le précédent sans pour autant paraître complètement logique. La production, évidemment sèche et glauque, accentue cet effet de claustrophobie qui nous étouffe, mais entre des blasts lâchés comme à la parade, des licks dissonants et discordants soulignant des éructations vocales d’un chanteur sous-mixé qui gerbe sa haine plus qu’il ne hurle, une alternance entre numéros de funambule sur les toms et des poussées de gravité, ce premier LP est de ceux qui restent difficile à cataloguer, et impossible à domestiquer.
On navigue souvent en terrain Death, analogique et viscéral, on plonge régulièrement dans le marigot du Sludge le plus repoussant, et lorsque la machine atteint sa vitesse de croisière, on s’immerge dans les courants d’un extrême qui refuse les panneaux directionnels trop clairs. « Eluded Axiom » n’est par exemple ni l’un ni l’autre, mais bien les deux, « Wilted Religion » est à peu près aussi rassurant qu’un inédit de NEUROSIS repris à son compte par les MORBID ANGEL, alors que le final « In Our Disfigurement » abandonne toute envie de musicalité pour mélanger le feedback et les stridences et nous offrir un crescendo samplé d’horreur et de terreur. La créativité de l’ensemble est indéniable, tout comme cette envie de se singulariser est palpable, et en définitive, malgré sa boussole cassée et sa carte perdue, The Root Of Demise s’impose comme le point de rencontre improbable entre le Death le plus vicieux, le Sludge le plus crasseux et le Post le moins heureux. Une façon comme une autre d’affirmer ses positions, et surtout, une toute petite demi-heure de tension qui ne se relâche jamais. AZIZA, beaucoup de monde ne voudra pas de toi, et tu n’as rien de la fille/enfant du prophète roi. Mais ça, je pense que tu t’en fous.
Titres de l’album :
1.Aegis
2.Dead WagEr
3.Frightened of the New Normal
4.Deleted
5.Pyre
6.Eluded Axiom
7.Wilted Religion
8.Odious
9.Procession
10.In Our Disfigurement
Oui comme ils le disent sur le site officiel, bonjour les prix des concerts aujourd'hui avec l'inflation ,Désolé mais je ne peux plus suivre. Trop chère les concerts
15/06/2025, 08:42
Je me demande comment fait Rogga Johansson, avec autant de groupes, il arrive toujours à sortir des trucs vraiment bons !! Quelle energie !!
13/06/2025, 00:29
En fait, ce qui me pose problème, ce n'est pas le fait d'aimer ou pas ce genre de vidéo (lyrics video), c'est les remarques dépréciatives (condescendantes) d'Akerfeldt à ce sujet. Bien sûr, c'est super d'avoir un bon clip, seu(...)
12/06/2025, 01:04
Author & Punisher est aussi annoncé à Montpellier le 23 octobre 2025 avec Wyatt E et Yarostan à la place de Bong-Râ.
11/06/2025, 12:53
Ça vaut vraiment le coup d'écouter ce qu'ils font, j'aime beaucoup et c'est vraiment bon !
09/06/2025, 21:35
Je comprends son raisonnement car je le partage en partie. Je déteste le mot "contenu" quand on parle de vidéo. Ca ne veut pas dire grand chose. Les lyrics video, je trouve que c'est une solution de facilité. On se contente de coller une(...)
07/06/2025, 09:04
J'suis probablement trop vieux, je trouve ça atroce, autant à écouter qu'à regarder.
07/06/2025, 08:32
Ben, mince alors, c'est un vieux con Akerfeldt, en fait... dommage... après, tant que la musique est bonne, que demande le peuple ? (Après, je suppose qu'il n'arrivera jamais au niveau de Chris Barnes, mais, bon...)
06/06/2025, 18:05
Mouais, un peu médiocre son commentaire sur les lyrics videos... perso, j'aime bien avoir la musique et le texte qui défile... c'est pas spécialement élaboré mais je voix pas en quoi c'est minable...
06/06/2025, 18:02