Turn of the Tide

Infern

04/10/2024

Dolorem Records

Un crabe géant qui sort de l’eau pour bouffer les villes, voilà qui n’est pas banal. Loin des sempiternels squelettes ou zombies de circonstance, la pochette de Turn of the Tide joue la carte de l’originalité, dans un joli noir et blanc bordélique. Voilà qui est très plaisant, et ce premier album cache d’autres surprises toutes aussi agréables les unes que les autres. Car lorsqu’on s’attaque à un énième longue-durée porté sur la nostalgie, on va généralement de déception en désillusion. Recyclage excessif, influences trop évidentes, et respect aveugle du cahier des charges floridien ou du manuel d’instruction suédois.

La France a toujours eu son mot à dire en termes de violence. Nous avons eu LOUDBLAST, MASSACRA, AGRESSOR, et plus récemment GOJIRA, ce qui a fait de notre beau pays l’un des représentants les plus respectés du circuit. Aujourd’hui, ce même circuit s’appuie sur la découverte d’un quintet breton, aux mines patibulaires et aux riffs carton. INFERN, sans « o » joue donc le petit nouveau de la classe, doué, humble, mais ferme sur ses positions.

Actif depuis 2019, mais ayant poussé ses premiers cris en 2021, INFERN est l’archétype du groupe qui sait faire parler la souffrance sans aller chercher à la dénaturer par des arrangements fumeux ou des idées osées. Son classicisme l’honore, et cette odeur de mort, présente sous les sillons de chaque effort fourni revêt ici un caractère moins évident, comme si la bande souhaitait s’affranchir des obligations old-school en vogue depuis quinze ans. Et même si certains tuteurs peuvent être identifiés sans vraiment beaucoup réfléchir, l’ensemble de l’œuvre se réclame d’une individualité notable, quelque part entre la scène française et son modèle US.

Dolorem Records s’est donc chargé du dossier, et le label français doit certainement se frotter les mains d’une telle décision. Car le point fort de cette formation est sa capacité à fournir des riffs qui en sont vraiment, de trouver un groove collant pour mieux nous engluer au sol, et de varier les atmosphères pour ne pas se cantonner à une visite guidée d’une vieille morgue ou d’un cimetière oublié.

« Undertow » est justement la mise au point la plus honnête et franche qui soit. Production claire et détaillée, composition aérée et détalée, intro simple mais bien troussée, ce premier réflexe indique que la bande (Sylvain Collas - basse/chœurs, Simon Beux - batterie, Pierre-Loup Corvez - guitare/chœurs, Julien Tanguy - chant et Jean-Marie Grövel - guitare) ne compte pas se réfugier derrière un mausolée pour tirer à blanc sur des fantômes l’étant déjà.

Non, leur attitude évoque plutôt un mélange de Metal extrême traditionnel, parfois empreint de Thrash, qui permet aux guitares de s’exprimer sans grogner ou maugréer, et de créer des motifs méchamment accrocheurs. La diction est donc parfaite, les balbutiements laissés au vestiaire, et le bestiaire est impressionnant de concision. Musicalement parlant, nous sommes loin des copies malhabiles qui inondent le marché, et si l’intensité n’est pas aussi dense que sur les premiers méfaits de nos héros Death, elle n’en est pas moins soutenue, et peut-être plus vicieuse. « Burning Fields », bien que maintenu de force sous la barre des trois minutes insiste de ses motifs francs et massifs, et de ses chœurs incisifs. Ayant choisi le camp des musiciens appliqués et bien décidés à être compris dans tous les idiomes, INFERN détaille des enfers personnels, où la chaleur constante brûle les chairs, sans que ça ne sente trop le cramé. Evidemment, les accélérations sont rares, les impulsions calculées, mais même lorsque le tempo descend dans les tours, le piège fonctionne toujours, à l’image de ce lent et très MORBID ANGEL « Archetype of Brutal Aggressor ».

Il y a le Death des sprinters, le Death des magouilleurs, le Death des renifleurs, des vicieux, des malheureux, des résignés, mais il y a aussi le Death des salles de sport, lorsque la musculation devient un exutoire valable à cette haine intérieure. INFERN donne ainsi le sentiment d’un démiurge musclé à outrance, piétinant son univers avec une assurance crasse. « Gaining Ground » sent donc les stéroïdes, la sueur des machines, et les muscles saillants. Impressionnant pour le moins, ce morceau est l’un des plus proportionnés du lot, avec encore une fois une machinerie alimentée au charbon thrashy pour mieux débiter du méchant au mètre.

Les bretons abordent donc la vilénie Death par la lorgnette Hardcore. Lâchant des riffs symptomatiques du Hardcore moderne, pour mieux les détourner Metal à la première échauffourée, Turn of the Tide joue l’écrasement, et pas l’explosion facile. « State Puppet Theater » en est le parangon, avec ses changements d’humeur constants, et « March of the Grotesque » son contrepoint le plus radical avec son envie de retrouver l’amitié d’OBITUARY, quelque part dans les avis de décès d’une gazette quelconque.

Incroyablement catchy, INFERN renvoie une image flatteuse. Ce premier album, mixé et masterisé par Charles Elliott au Tastemakeraudio de Los Angeles est une bête de compétition, qui n’abuse pas de l’autobronzant, et qui décroche le premier prix par son travail. Il est très agréable de constater que les groupes old-school ne sont pas tous obsédés par la même chose, et que certains se creusent un peu la tête pour offrir plus qu’un copié/collé peu malin.

Turn of the Tide nous envoie donc les crabes géants pour nous serrer la pince. Comme vous n’avez surement pas de fait-tout assez grand pour les faire cuire, je vous conseille de sympathiser avec eux. Ils sont cocasses, mais surtout, très dangereux et galvanisés par cette musique de furieux. 

        

Titres de l’album:

01. Undertow

02. Phineas Case

03. Tormented Paranoid

04. Burning Fields

05. Archetype of Brutal Aggressor

06. Gaining Ground

07. State Puppet Theater

08. March of the Grotesque

09. To the Extreme

10. Buried Alive


Facebook officiel

Bandcamp officiel

par mortne2001 le 04/10/2024 à 19:35
84 %    708

Commentaires (2) | Ajouter un commentaire


metalrunner
@81.53.35.241
05/10/2024, 11:17:11

Très bon album vite du live .


Buck Dancer
@15.237.131.108
07/10/2024, 11:24:45

Bien d'accord, un album très sympa à écouter. Bolt Thrower n'est jamais bien loin mais ça groove comme il faut et, comme le dit Mortne2001, les riffs sont bien plus marquants que la plupart des groupes au style "copier-coller" 

Ajouter un commentaire


Derniers articles

Voyage au centre de la scène : PARADISE LOST

Jus de cadavre 15/06/2025

Vidéos

Aluk Todolo + Spirit Possession

RBD 10/06/2025

Live Report

SWR Barroselas Metalfest 2025

Mold_Putrefaction 08/06/2025

Live Report

Anthems Of-Steel VII

Simony 30/05/2025

Live Report

Clinic LI-SA X et Paul GILBERT

mortne2001 29/05/2025

Live Report

The Sisters of Mercy + Divine Shade

RBD 21/05/2025

Live Report

Great Falls + Kollapse

RBD 04/05/2025

Live Report

Chaulnes MÉTAL-FEST 2025

Simony 27/04/2025

Live Report

Star Rider/Blaze Bayley

mortne2001 24/04/2025

Live Report

LOUDBLAST : 40 ans de carrière !

Jus de cadavre 20/04/2025

Vidéos
Concerts à 7 jours
Tags
Photos stream
Derniers commentaires
Simony

MON groupe de chevet, la voix de Nick et le touché de Greg sont pour moi les clés de mes émotions musicales. Bizarrement, "The Plague Within" et "Believe In Nothing" sont les 2 albums que j'écoute le moins. J'ADORE ce groupe ! Tout simplem(...)

16/06/2025, 21:25

MorbidOM

Si ça intéresse quelqu'un ils ont mis l'album en intégralité sur bandcamp :https://agoniarecords.bandcamp.com/album/tetrad-mj'ai pas encore tout écouté(...)

16/06/2025, 19:22

Nico

Merci pour cette vidéo qui rend bien hommage à Paradise Lost, qui est un de mes groupes préférés depuis presque 32 ans. Découvert à l'époque grâce à l'émission Headbangersball, j'avais 15 ans et j'&eac(...)

16/06/2025, 12:30

Humungus

Clairement l'un de mes groupes de chevet.Un talent plus qu'indéniable et malgré ce creux de la vague entre 99 et 2007, des gonzes qui se tiennent encore à ce jour bien droit dans leurs bottes.A propos de cette période que je pouvais, comme beauc(...)

16/06/2025, 11:51

Oliv

Oui comme ils le disent sur le site officiel, bonjour les prix des concerts aujourd'hui avec l'inflation ,Désolé mais je ne peux plus suivre. Trop chère les concerts 

15/06/2025, 08:42

Seb

Je me demande comment fait Rogga Johansson, avec autant de groupes, il arrive toujours à sortir des trucs vraiment bons !! Quelle energie !!

13/06/2025, 00:29

Styx

Bonjour. L'album paraîtra ce vendredi 13 Juin 2025.

12/06/2025, 20:35

Moshimosher

je voulais dire vidéos plutôt que clips...

12/06/2025, 01:07

Moshimosher

En fait, ce qui me pose problème, ce n'est pas le fait d'aimer ou pas ce genre de vidéo (lyrics video), c'est les remarques dépréciatives (condescendantes) d'Akerfeldt à ce sujet. Bien sûr, c'est super d'avoir un bon clip, seu(...)

12/06/2025, 01:04

RBD

Author & Punisher est aussi annoncé à Montpellier le 23 octobre 2025 avec Wyatt E et Yarostan à la place de Bong-Râ.

11/06/2025, 12:53

michael scott

god no please no lol

11/06/2025, 11:37

Licks0re

Ça vaut vraiment le coup d'écouter ce qu'ils font, j'aime beaucoup et c'est vraiment bon ! 

09/06/2025, 21:35

Jus de cadavre

Super report mec ! Le genre de fest qui me plairait de malade !

09/06/2025, 10:53

Salmigondis

  Cry for the fallen trouser ?

08/06/2025, 13:34

ALK putain de POTE

SIDA visuel et auditif

08/06/2025, 10:08

DCD

Le clip du premier single :https://www.youtube.com/watch?v=JSAlEVzLhDc

07/06/2025, 09:18

Arioch91

Je comprends son raisonnement car je le partage en partie. Je déteste le mot "contenu" quand on parle de vidéo. Ca ne veut pas dire grand chose. Les lyrics video, je trouve que c'est une solution de facilité. On se contente de coller une(...)

07/06/2025, 09:04

stench

J'suis probablement trop vieux, je trouve ça atroce, autant à écouter qu'à regarder.

07/06/2025, 08:32

Humungus

On en cause de la chemise trop petite qui laisse dépasser la panse ?

07/06/2025, 07:39

Drina Hex

On se retrouve en live

07/06/2025, 01:23