Tour Report : MONOLITHE + ABYSSIC / Europe avril 2019

Abyssic, Monolithe

Backstage, Paris (France)

du 12/04/2019 au 21/04/2019

Voici le Tour-report des français de MONOLITHE (Death Doom, Paris) effectué en avril dernier en Europe en compagnie des norvégiens d'ABYSSIC (Symphonic Doom/Death Metal). 

Un grand merci à Sylvain ! Facebook Monolithe.

12/04/2019 Paris (Fra) - Backstage
13/04/2019 Oberhausen (Ger) - Helvete Club
14/04/2019 Berlin (Ger) - Blackland
15/04/2019 Prague (Cze) - Modrá Vopice
16/04/2019 Vienna (Aut) - Escape
17/04/2019 Zagreb (Cro) - Klub Močvara
18/04/2019 Milan (Ita) - Slaughter Club
19/04/2019 St Maurice (Swi) - Manoir Pub
20/04/2019 Brussels (Bel) - GC Everna
21/04/2019 Rotterdam (Nld) - Baroeg

JEUDI 11 AVRIL 2019 - Prologue

Nous voici arrivés à la veille de la date fatidique, le concert parisien marquant le début de notre tournée de 10 dates en compagnie de nos amis norvégiens d’Abyssic. Ces derniers atterrissant à CDG en début de soirée, nous nous chargeons Olivier (basse) et moi, d’aller les chercher pour les amener à leur hôtel situé non loin du Backstage By The Mill, salle dans laquelle nous nous produirons le lendemain. Et ça commence plutôt mal me concernant puisque les embouteillages me coincent pendant un certain temps, transformant un trajet habituellement relativement rapide, en un enfer de deux heures au milieu de camions malodorants. Finalement arrivé à l’aéroport, je rejoins Olivier, qui attend toujours dans le hall. Mon retard n’a aucune conséquence puisque, bien que l’avion en provenance d’Oslo ait bien atterri à l’heure convenue, les bagages n’ont toujours pas été livrés. Bienvenue en France chers amis Scandinaves !

Après une trentaine de minutes d’attente supplémentaire, un visage familier se dessine au milieu des passagers se présentant à la zone de sortie. Il s’agit de Håkon, chanteur et contrebassiste de la formation. D’ailleurs, impossible de ne pas le repérer : sa contrebasse, gigantesque dans sa housse de protection, est particulièrement encombrante. « Pourquoi ai-je choisi cet instrument ? » se lamentait-il d’ailleurs quelques heures plus tôt sur les réseaux sociaux, en partance de Oslo. Son crâne fraîchement rasé ne le fait plus du tout ressembler au personnage de Bronn dans la série « Game of Thrones », il ne sera donc plus possible de le taquiner à ce sujet…

C’est ensuite au tour de Chris (guitare) et Henriette (basse) de pointer le bout de leur nez, accompagnés de Carl, que nous ne connaissons pas encore. Nous avons en effet appris quelques jours plus tôt que Ian Kenneth, le batteur titulaire, ne serait pas de la partie et serait remplacé par un intérimaire derrière les fûts. C’est d’ailleurs la seconde défection au sein du groupe après celle de André, claviériste et maître ès orchestration du combo. Ce dernier a cependant prévu de nous rejoindre en cours de tournée, plus précisément à Milan. En attendant, ce seront des samples qui seront envoyés.

Les retrouvailles et présentations faites, il s’avère que Carl est très sympathique. C’est pas plus mal. Nous nous dirigeons donc vers le parking.

Monolithe et Abyssic ont partagé l’affiche de deux dates communes, une première au Dusk Till Doom Festival en Belgique, et une seconde près de Lille en France. C’est à cette occasion que les deux groupes ont sympathisé, puis décidé de monter une tournée en co-headline. Il est donc prévu que les deux formations alternent la tête d’affiche, en fonction de critères décidés conjointement entre les organisateurs et notre tourneur commun, Black Speech Productions.

Le problème de la taille de la contrebasse se pose immédiatement : elle prend à elle seule les 2 tiers de la place de la voiture d’Olivier. Nous décidons donc de charger un maximum de matériel et de valises dans son véhicule, tandis que le mien servira de transport aux personnes. Seul Håkon pourra trouver place aux côtés d’Olivier, pour lui éviter d’effectuer le retour en ville seul. Pour ma part, j’embarque Carl, Henriette et Chris.

La route jusqu’à Paris se déroule sans encombre. L’occasion de discuter de choses et d’autres avec Chris, un personnage calme et attachant que j’apprécie beaucoup. Avec au programme des sujets aussi variés qu’insomnie, plongée sous-marine, Norvège, gilets jaunes, vin rouge et, bien entendu, guitare, le temps passe évidemment vite et nous voici arrivés dans le 18ème arrondissement. Après un rapide check-in à l’hôtel, Olivier et moi décidons de rentrer dans nos pénates respectifs plutôt que d’accompagner nos comparses nordiques pour dîner, car il est tard et la journée du lendemain sera longue.

Fatigue & Déficit de sommeil : 0 sur une échelle de 10

 

VENDREDI 12 AVRIL 2019 – PARIS

 Après ce qui s’avérera être ma dernière nuit de sommeil normale, ma matinée est consacrée à la garniture de ma petite valise de voyage et au règlement de derniers détails ménagers avant de partir pour 10 jours. Pendant ce temps, Olivier s’occupe d’aller chercher le van de location 9 places pour les passagers, tandis que Matthieu (synthés) se charge du van technique qui transportera le matériel de Monolithe et d’Abyssic pendant nos déplacements. Bien que nous soyons encore à la maison, la tournée est officiellement démarrée.

Le rendez-vous au Backstage By The Mill est fixé à 15h00. J’arrive sur les lieux à l’heure prévue et constate qu’Abyssic et Lux Incerta, le groupe aux 3 quarts Nantais de première partie que nous avons suggéré à l’organisateur de la date, Garmonbozia, sont déjà arrivés. Après les salutations de rigueur et retrouvailles avec les têtes connues, il est temps de décharger le matériel et de l’installer. Le stand de merchandising sera tenu par deux jeunes femmes dont l’un d’elle, pour l’anecdote, habite à deux pas de chez moi bien que je ne la connaisse pas et ne l’ai même jamais croisée… Monolithe étant la tête d’affiche sur cette date, nous sommes chargés de commencer les balances. Nous avons déjà joué dans cette salle deux ans auparavant et en gardons un bon souvenir. Le son convenablement réglé, nous laissons notre place à Abyssic, puis à Lux Incerta.

À l’ouverture des portes et juste avant que Lux Incerta ne démarre les hostilités, je peux reconnaître et saluer un certain nombre de connaissances, avec qui j’essaie, dans la mesure du possible, de passer un peu de temps. À noter la présence de Richard, l’ancien chanteur de Monolithe, qui pour le coup verra pour la première fois son ancien groupe se produire sans lui. J’imagine que la sensation doit être assez étrange ; Il me confiera d’ailleurs après le concert avoir eu une bizarre impression d’ubiquité pendant notre performance.
Manuel Munoz (Arkhan, ex-The Old Dead Tree), également présent, me confie un T-shirt de son ancien groupe destiné à être offert à nulle autre que Laurent Lignon, journaliste chez Metallian (bien que Manuel ne le sache pas), qui m’avait demandé s’il était encore possible d’acheter du merchandising de TODT et dont j’avais transmis la demande aux intéressés. Sympathique attention !

Lux Incerta commence son set alors que je bois un verre aux côtés d’Abyssic dans les loges minuscules de la salle. Je me décide à aller voir quelques instants ce que cela donne côté public et je reste finalement scotché pendant toute la durée du concert très haut-de-gamme donné par le groupe ce jour-là. Mention spéciale au duo de fin, à savoir la reprise de « Serpent Eve » de Cathedral et du titre « The Dirge », datant de l’ère Synoptia du chanteur Agone, qui ravive d’anciens souvenirs, lorsque le collectif Epsilon dont je faisais partie commençait à faire parler de lui dans l’hexagone au tout début des années 2000.

C’est ensuite au tour d’Abyssic d’envahir la scène. Musiciens grimés et habillés de robes de bures, scènes remplie de bougies et d’encens, je retrouve avec plaisir le son massif et le visuel très ésotérique des Norvégiens. La set-list a changé depuis nos dernières dates communes, puisque des titres de leur second album « High The Memory », sorti entre temps, sont ajoutés au répertoire. Je n’assiste qu’au début du set puisque je dois moi-même me préparer pour le concert de Monolithe, mais j’apprécie ce à quoi j’assiste et je constate qu’il en est de même pour les premiers rangs du public, qui entrent dans une sorte de trance induite par la musique hypnotique du groupe.

Lorsque Monolithe fait son entrée en scène pendant l’introduction précédent le premier titre, nous recevons une belle acclamation, ce qui fait toujours son petit effet. Dès les premières notes jouées, je sens qu’il s’agira d’une belle date : le public est à fond, nous jouons bien et les conditions sur scène sont très bonnes, avec de bons retours conformes au réglages faits pendant la balance. Le set terminé, le public réclame un rappel ; Ce n’est pas prévu, mais nous nous exécutons en interprétant « Ecumenopolis ».

 Le concert achevé, nous vaquons tous nos occupations, consistant, logiquement lors d’un concert « à la maison », à saluer les amis et connaissances ayant fait le déplacement.

Le personnel du Backstage ayant un couvre-feu à respecter, on nous fait savoir assez rapidement après le départ du public, qu’il est temps d’évacuer les lieux. Petit stress chez Rémi (chant / guitare), qui a égaré une écharpe à laquelle il semble tenir… Fausse alerte, elle est retrouvée. Il est donc temps de charger le van technique, en prévision de la longue route du lendemain qui nous amènera à la seconde date, à Oberhausen en Allemagne. Pendant le chargement, nulle trace d’Abyssic, pourtant sensés partager le fardeau à nos côtés. Nous ne leur en tenons pas rigueur, mais leur disparation est un peu étrange. Le rangement achevé, nous les voyons revenir aux abords de la salle aux côtés de Hervé Herbaut, label manager d’Osmose Productions. Ce dernier les a invités à dîner pour discuter business et s’excuse de nous les avoir subtilisés. Nous leur pardonnons bien volontiers leur absence, après tout ils auront encore 9 concerts pour charger ce foutu van…

Le rendez-vous du lendemain pris à 9h à l’hôtel des norvégiens pour le grand départ, il est temps d’aller passer une dernière nuit dans un environnent familier. En ce qui me concerne, je passerai une nuit correcte, bien que malheureusement trop courte.

Fatigue & Déficit de sommeil : 1 sur une échelle de 10

SAMEDI 13 AVRIL 2019 – OBERHAUSEN

Le réveil est difficile en ce samedi matin de grand départ, mais j’apprécie mes derniers instants dans le douillet confort de mon chez-moi et du petit déjeuner copieux que je m’offre.
J’arrive à l’heure prévue à l’hôtel d’Abyssic et constate que je suis le premier arrivé. Håkon et Chris nous attendent déjà dans le hall, bagages bouclés. Nous attendons toujours Henriette (« les femmes… »… soupire Chris) et Carl (« pire qu’une femme » persifle Håkon). Olivier arrive quelques minutes après moi, suivi de Thibault (batterie). Henriette et Carl ne se font pas attendre bien longtemps, nous nous engouffrons donc dans le van. Henriette, Chris et Carl se positionnent à l’arrière et ne changeront jamais de place pendant toute la tournée. Håkon, moi-même prenons place au centre, Thibault à l’avant et Olivier au volant. Ce dernier conduira l’essentiel de la journée, relayé par Thibault aux deux tiers du trajet. Matthieu, Benoît (guitare) et Rémi sont déjà partis de leur côté dans le van technique. Notre tourneur et tour manager Sylvain (que j’appellerai Ono, son surnom, par commodité puisque lui et moi partageons le même prénom) ayant accompagné son roster booké au Roadburn Festival aux Pays-Bas, nous rejoindra directement en Allemagne en train.

 Environ 530 kilomètres nous séparent du Helvete Club, la salle qui nous accueillera à Oberhausen. Le trajet est calme, ni Monolithe ni Abyssic n’étant exactement des « party animals ». Håken a besoin de pauses relativement fréquentes sur les aires d’autoroute, ce qui permet à la fois à tout le monde de se dégourdir les jambes et aux norvégiens d’acheter de quoi se sustenter. J’avoue ne pas comprendre comment Håken peut faire pour manger autant de pain et de charcuterie. Carl, lui, inaugure un rituel qu’il poursuivra durant l’intégralité de la tournée : acheter un œuf en chocolat Kinder, manger le chocolat et offrir le jouet en plastique à l’intérieur à Henriette.

Oberhausen, pour le peu que j’ai pu en voir, n’a rien de vraiment engageant. C’est dans une ville tristounette et quasi déserte que nous arrivons en milieu d’après-midi. Le froid, la pluie et le vent n’arrangent en rien les choses. Ono, Matthieu, Benoît et Rémi sont déjà arrivés et ont garé le van technique devant l’entrée de la salle. Nous déchargeons l’ensemble du matériel et nous nous installons dans les loges. L’intégralité des lieux empeste le tabac froid, ce qui irrite Rémi, malade, et moi, ancien fumeur devenu totalement intolérant à la cigarette. Mais nous devons bien faire avec tant bien que mal. Heureusement, la scène et la salle sont de bonne qualité.

 Nous disposons d’un peu de temps, l’occasion pour ceux qui le souhaitent, dont je fais partie, d’aller visiter notre logement du soir, qui ne se trouve qu’à quelques dizaines de mètres de la salle. Il s’agit de trois petits appartements constitués d’une pièce avec salle d’eau au rez de chaussée, et d’une grande cuisine, d’une salle d’eau avec toilettes et de deux grandes chambres avec lits superposés à l’étage. Il est décidé pour raisons pratiques, que les norvégiens occuperont l’une des chambres, et les français les deux autres. Nous isolons les deux ronfleurs connus, Olivier et Matthieu dans la chambre du bas. Il fait très froid en ces murs, je monte donc le chauffage au maximum en prévision de notre retour pendant la nuit. Nous nous reposons un peu sur place avant de retourner à la salle pour l’installation et les balances.

Monolithe est aujourd’hui encore la tête d’affiche de la soirée. Nous ouvrons donc le bal des balances. Pas de vidéo projection comme à Paris cette fois, nous nous contenterons donc du backdrop en tissu. L’ingénieur du son fait son travail correctement et nous sortons de scène satisfaits du son en façade comme des retours. Il n’y a pas de première partie aujourd’hui, c’est donc Abyssic qui commencera.

Le catering a été installé dans les loges (bière, charcuterie, bière, pain, bière, saucisses, bière), suivi un peu plus tard du repas chaud (gratin de pommes de terre). Je ne suis pas très enthousiaste à l’idée de dîner à base de pain et de charcuterie comme la veille à Paris. Le « gratin » est quant à lui est essentiellement composé de patates et de crème fraîche. Pas très ragoûtant en ce qui me concerne, mais il y a des amateurs parmi nous. Tant mieux pour eux, tant pis pour moi !

Dans l’attente de l’heure du concert d’Abyssic, nous passons un bon moment dans les loges avec Abyssic. La plupart d’entre eux connaissent personnellement les acteurs de la scène norvégienne ayant été décrits dans le récent film « Lords of Chaos » ; ils nous expliquent donc de manière passionnante la réalité des faits et ce que le film a pu raconter comme vérités et contre-vérités.

 L’heure H est finalement atteinte. Le public investi la salle, Abyssic donne son concert, auquel j’assiste, comme la veille, en partie avant d’aller me préparer à mon tour. Monolithe offre ensuite une prestation qui, comme la veille, est de bonne qualité. Pas de rappel cette fois, mais nous sortons de scène le sentiment du devoir accompli. Rémi est toujours malade, mais il tient le coup.

Après quelques dizaines de minutes de détente dans les loges, il est temps de tout remballer et de recharger le camion. Ono, qui est passé de tour manager à merch boy, s’occupe de ranger le merchandising. Le chargement est rendu difficile par des escaliers un peu raides et quelques personnes un peu imbibées ayant une fâcheuse tendance à rester dans le chemin. Mais dans l’ensemble, l’opération se déroule sans encombre. Matthieu, maître ès Tetris tient le rôle de grand maestro du rangement et reste à l’intérieur du van pour tout mettre en place de manière à ce que rien ne bouge.

Retour à l’hôtel pour une nuit de repos bien méritée. Carl ne rentre pas seul et investi une chambre du second appartement avec une jeune femme qu’il semble connaître. Nous n’en saurons pas plus sur ses activités nocturnes, mais j’imagine qu’il n’a pas beaucoup dormi.
Un point est fait rapidement sur qui prendra sa douche le soir et qui la prendre le matin afin d’éviter les embouteillages dans la salle de bain le matin avant le départ. Je fais partie du premier groupe, c’est donc propre comme sous neuf que je prends possession de mon lit dans la chambre surchauffée. Hélas, les ronflements de Thibault, pourtant peu coutumier du fait, et la chambre un peu trop chaude, ne me permettrons pas de profiter pleinement d’un sommeil réparateur.

Fatigue & déficit de sommeil : 3 sur une échelle de 10


DIMANCHE 14 AVRIL 2019 – BERLIN

On se lève laborieusement en ce dimanche matin. Après les douches de rigueur de ceux qui ne l’ont pas prise la veille, la répartition van personnes et van technique se fait. Cette fois c’est Ono qui rejoint Matthieu dans le van technique, tandis que Benoît et Rémi prennent place avec le reste de la troupe. Olivier prend le volant et sera relayé dans la journée par Benoît. Oberhausen est toujours aussi déserte, renforçant ma sensation d’avoir séjournée dans une ville fantôme.

 Une première pause est faite rapidement afin de prendre un semblant de petit-déjeuner sur une aire d’autoroute. En Allemagne il faut payer pour se soulager aux toilettes, un rituel de deal de pièces s’installe donc entre nous. Comme je n’ai quasiment jamais de monnaie, c’est un peu compliqué pour moi, mais je trouve une solution, quitte à passer par-dessus la barrière quand personne ne regarde où trouver un arbre amical et isolé aux alentours. Durant cette journée comme les précédentes et les suivantes, les arrêts seront relativement fréquents pour permettre à Håkon de vider sa vessie. Cela devient vite une blague récurrente. Quelqu’un a besoin d’aller aux chiottes ? « Håkon needs to pee ! » faut-il s’exclamer.

L’arrivée à Berlin se fait en fin d’après-midi. Le Blackland est un bar au sein duquel une scène tout à fait correcte est installée. Je m’attendais à pire en ayant appris qu’il s’agissait d’un bar et non d’une vraie salle. Nous disposons même d’une entrée par derrière et d’une rampe, royal. Les loges sont cependant assez sommaires. Peu importe, à cette heure le bar est encore vide et nous pouvons faire office de clients. Ce soir, la batterie sera prêtée par le groupe de première partie, Tears of Fire. Le groupe est en fait un improbable duo basse – batterie, avec un bassiste Iranien et un batteur suédois. Ce dernier est d’ailleurs un peu bavard, ce qui a le don d’agacer Rémi.

L’heure est venue de s’installer pour la balance. Abyssic sera headliner ce soir. Les norvégiens commencent donc à apporter leur matériel sur scène. L’ingénieur du son fait alors irruption et sermonne tout le monde de manière particulièrement impolie et agressive. « Qu’est-ce que vous faite ? Pourquoi vous faite ça ? Ne mettez pas ça ici ! » et autres invectives du même acabit nous sont débités par l’antipathique teuton sans discontinuer. Je sens mon agacement et celui d’Håkon monter petit à petit… Chris me tapote l’épaule en me disant que ce n’est pas grave, et qu’il en a connu d’autre. Chris le Sage est relax, ok je laisse passer.

Abyssic fait sa balance, dans un brouhaha infernal. Håkon fait remarquer que le son est extrêmement fort, ce à quoi on lui rétorque que c’est comme ça, c’est très fort ici et on ne peut rien y faire. Ok, on avale. Changement de plateau et c’est au tour de Monolithe de s’installer, toujours sous une pluie de commentaires assassins. « Pourquoi vous croyez qu’il y a une caisse ici ? Non, ne déplace pas ça ! Comment ça 3 guitares ? 2 ça ne suffit pas ? ». Benoît craque et balance un « no need to talk so harshly » un peu énervé. Ce à quoi notre « ami » répond qu’il est juste honnête et qu’il connait bien le lieu, pas nous. Une manière de nous faire comprendre qu’il est le boss ici et qu’on doit fermer nos gueules. Le fin mot de l’histoire viendra du fait que le personnage est un peu connu par les gens du crû pour sa manière un peu brute de parler et qu’il était particulièrement stressé ce soir-là car il (prétend-t-il) n’avait pas reçu les riders techniques des groupes. Voyant que nous nous comportons de manière professionnelle sans faire n’importe quoi, il se radoucira progressivement au fil de la soirée et nous nous quitterons en bons termes, non sans lui balancer quelques piques bien senties pour nous venger un peu... Il sera cependant impitoyable avec Tears of Fire pendant leur balance, tant leur son crado et leur amateurisme lui déplairont. C’est au son d’une basse archi distordue au volume quasi insupportable que nous dînerons d’un plat de pâtes à la sauce piquante, honnête et tenant bien au ventre.

Arrive l’heure du concert. La copine du bassiste de Tears of Fire, complètement nue, est allongée sur le devant de la scène, couverte de terre et de fleur. Ils ont mis une couverture en dessous pour pouvoir tout ramasser sans en foutre partout, j’apprécie le geste. La demoiselle ne bougera pas pendant la petite demi-heure de la prestation. Bien que j’éprouve une certaine sympathie pour cet iranien qui a connu les geôles de son pays pour être un peu trop hors norme, sa musique mal conçue, l’interprétation approximative et surtout son odeur corporelle extrêmement déplaisante ne me laisseront que peu de souvenirs positifs. Il en est de même pour les odeurs de tabac et de cannabis laissés dans les loges, alors que nous leur avons demandé gentiment à plusieurs reprises d’avoir l’amabilité de fumer dehors.

C’est au tour de Monolithe de jouer. Immédiatement, je suis soufflé par l’intensité du volume sonore. Heureusement, je joue toujours avec des protections auditives, que j’enfonce plus ou moins fort dans mes oreilles en fonction du volume que je souhaite percevoir. Cette fois, je les enfonce à fond, mais je souffre quand même. Le son sur scène est chaotique, mais je distingue suffisamment ma guitare dans ce capharnaüm pour jouer correctement. Il en sera de même des autres membres du groupe. Au final, ce ne sera sans doute pas notre meilleur concert de la tournée, mais il aura été tout à fait correct au vu des conditions sur scène.

Arrive la tête d’affiche, Abyssic, qui offre au public berlinois un set plus qu’honorable, bien on sente qu’il lutte, comme nous avant eux je suppose. Le son est très très fort en façade et, pour eux aussi, c’est encore pire sur scène. Le public ne s’est pas déplacé en masse, mais les âmes présentes sont aux anges. Tant mieux !

 Je suis heureux lorsqu’il est temps de quitter le Blackland et de rejoindre l’appartement dans lequel un proche de l’organisateur nous hébergera cette nuit. Je suis fatigué et agressé par les odeurs de tabac. Tous mes vêtements sentent la cigarette, et c’est seulement le troisième jour de la tournée… Le chargement du van me paraît interminable tant les discutailles n’en finissent pas ainsi la légendaire inertie de groupe, de sortie ce soir-là. J’apprends pendant le chargement que le batteur de Tears of Fire exige qu’on lui donne un CD en échange du prêt de la batterie. Je refuse bien entendu, d’une part parce qu’exiger quelque chose, c’est avec moi la meilleure manière de se faire envoyer balader. Et d’autre part, parce que le prêt de la batterie est un deal convenu avec l’organisateur, pas avec Monolithe, et qu’il était certainement une condition sine qua non pour que Tears of Fire joue. Je ne suis pas contre le fait d’offrir du merch à qui que ce soit et il n’y a pas nécessairement besoin d’une raison… Mais venir l’exiger en paiement d’un service prétendument rendu, c’est l’assurance de plutôt se voir offrir un majeur tendu avec conviction. Le batteur n’est pas content, mais il est tellement stoned qu’il ne se souviendra sans doute de rien le lendemain de toute façon.

Discutaille, chargement, route jusqu’à la barre d’immeuble dans laquelle notre hôte du soir habite, et nous voici enfin dans l’appartement, à 2h du matin. Une chambre contient 5 lits, une autre 4 et le salon peut encore accueillir 2 autres personnes. Rémi et moi profitons d’une nouvelle séance de discutailles des autres, qui n’ont apparemment pas sommeil, pour prendre nos douches respectives et nous coucher. Rémi, Ono, Thibault, Benoît et moi dormirons dans la chambre de 5, Abyssic dans celle de 4. Olivier, éternel exclu car ronfleur légendaire, se voit banni dans le salon. Petit problème, notre hôte regarde la saison 7 de Game of Thrones et ne juge pas utile de baisser le son pour laisser Olivier dormir. Ce dernier passera donc une mauvaise nuit car c’est bien jusqu’au petit matin à l’heure pour notre logeur d’aller travailler qu’il suivra malgré lui les luttes de pouvoir à Westeros. Pour ma part, l’épuisement me fera dormir correctement, bien que trop peu, réveil à 7 heures oblige. Rémi se plaindra des ronflements de Benoît le matin venu, j’avoue pour ma part n’avoir rien entendu.

Fatigue & déficit de sommeil : 5 sur une échelle de 10


LUNDI 15 AVRIL 2019 – PRAGUE

Plus la tournée avance, plus la fatigue est perceptible et envahissante, mais c’est avec plaisir que je prends place dans le van ce matin-là. J’aime beaucoup Prague et Obscure Promotions, également organisateurs du Brutal Assault, qui est certainement le festival dans lequel j’ai le mieux mangé (très important pour moi !) et me suis senti le mieux accueilli. Je conduirai pendant toute la seconde partie du trajet. Je redoutais un peu le moment pendant lequel ce serait mon tour de conduire car je ne suis pas grand fan de la responsabilité d’avoir la vie de 9 personnes entre mes mains. Cependant le véhicule est facile à conduire et tout se passe sans anicroche.

L’organisation de Berlin nous avait promis un petit-déjeuner, or il n’y a rien à notre réveil. De ce fait, nous faisons un arrêt très rapidement après avoir quitté la ville afin de trouver de quoi nous sustenter.

 L’arrivée à Prague se fait un peu avant la fin d’après-midi. La salle est un peu à l’écart de la ville aux cents clochers, malheureusement pour moi qui aurait volontiers fait un petit tour dans l’une de mes cités européennes préférées. Nous ne perdons cependant rien au change, puisqu’après le froid et la grisaille d’Allemagne, les rayons de soleil qui percent au-dessus de la cour intérieure du Modrá Vopice nous font un bien fou. Nous avons largement le temps de nous prélasser et de nous reposer avant les balances, ce qui est très agréable. On discute bien avec nos amis norvégiens, l’ambiance est au beau fixe et l’entente cordiale. Le catering est prêt dans les loges et, comme à son habitude, l’organisation tchèque n’a pas lésiné ni sur la quantité ni sur la qualité. L’occasion aussi de manger un peu de légumes, qui ont cruellement manqués en Allemagne. Quand viendra l’heure du dîner, c’est un ragoût végétarien délicieux qui nous sera servi.

Monolithe reprend sa position de tête d’affiche ce soir, nous inaugurons donc les balances. L’ingénieur du son local est un petit gaillard qui ne paye pas de mine mais qui fait un excellent travail pendant les balances, notamment au niveau des retours. La scène du Modrá Vopice est large et confortable, je suis donc certain de pouvoir jouer dans de bonnes conditions. Vient le tour d’Abyssic, puis de The Tower, groupe local de Stoner Doom. Nous n’aurons pas beaucoup de contacts avec eux, bien qu’ils aient l’air sympathiques. Thibault m’apprendra plus tard que sa relation avec le batteur lors de l’installation du matériel aura été très tendue, ce dernier étant particulièrement désagréable et arrogant. J’avoue ne rien avoir vu mais connaissant Thibault, je ne peux que le croire sur parole.

La tombée de la nuit aura raison de la relative chaleur perçue pendant l’après-midi. Mon unique pull étant déjà sale et empestant la cigarette, je décide d’acheter un sweat à capuche Abyssic sur le stand de merch. Je ne le quitterai plus de toute la tournée. Chaud et confortable, il est vite devenu un nouvel ami pour la vie. Bonheur absolu, il est interdit de fumer à l’intérieur du Modrá Vopice, le sweat restera donc immaculé aujourd’hui, hallelujah !

Les portes ouvrent, le public arrive et The Tower démarre son set. Leur musique n’atteint pas des sommets d’originalité, mais j’apprécie leur set carré et leur musique bien fichue et accrocheuse. Je ne suis pas hyper heureux que le bassiste pose sa bière sur mon Eleven Rack resté sur scène, mais il a au moins la décence de l’enlever après avoir joué, je ne dis donc rien.

Abyssic prend place pour leur grand-messe et les membres de Monolithe, comme nous en avons pris l’habitude, les aident à installer leur decorum, notamment les bougies et l’encens, qu’il faut allumer et poser un peu partout sur la scène. Je prends note mentalement qu’il faudra que je leur dise diplomatiquement de ne plus mettre d’encens sur mon Eleven Rack sans protection car je voudrais éviter que des cendres s’introduisent dans l’électronique et l’abime.

Le set d’Abyssic démarre et je sens assez vite que quelque chose ne va pas. Carl n’est pas très carré et on sent beaucoup de problèmes de mise en place de la part de l’ensemble du groupe. Lors de l’interprétation de l’avant dernier titre, la situation devient catastrophique et le pauvre Carl est complètement perdu. Chris se retourne et essaye d’aider son batteur à s’y retrouver dans les structures du morceau. Le titre achevé, Håkon, se forçant à rester impassible, coupe court la suite du concert et annonce la fin du set. Le groupe quitte donc prématurément la scène, passablement agacé. Nous apprendrons un peu plus tard que le matériel utilisé par Carl pour entendre le clic et envoyer les samples d’orchestres est capricieux et qu’il a refusé de fonctionner ce soir-là. Avec une bouillie sonore dans les oreilles, il était impossible pour le batteur de jouer correctement, entraînant l’ensemble du groupe dans un marasme de mise en place très approximative.

Abyssic ayant écourté sa prestation, les autres membres de Monolithe et moi-même nous préparons pour notre propre concert. Je suis confiant au vu des balances. Hélas, dès les premiers accords lâchés, le son sur scène n’est absolument plus le même que lors des balances. Alors que j’éprouvais de la sympathie pour notre petit ingé son, me voilà pressé d’une envie de meurtre… Il faut dire que son intoxication éthylique a pris des proportions de plus en plus importantes au fil de l’avancée de la soirée et qu’il a même du mal à marcher droit. La basse est trop forte, ma guitare trop faible, je ne m’entends pas et je distingue trop peu le kick de Thibault. Je passe à travers le premier titre malaisément et je suis forcé de stopper l’enchaînement avec le second titre et de dire à l’ingé son au micro qu’il doit me monter un peu ma guitare dans mon retour. Nous reprenons, et je constate avec un certain agacement qu’il m’a monté trop fort. Cette fois, c’est ma guitare qui couvre tout et c’est pire qu’avant. Beaucoup d’ingé sons ont cette manie insupportable de faire faire des aller-retours des faders de manière beaucoup trop prononcée alors qu’un tout petit ajustement est suffisant dans la plupart des cas. Je lui fais signe plusieurs fois pendant le concert, pour baisser, puis remonter, puis rebaisser encore. Je traverse le concert cahin-caha sans jamais trouver un équilibre convenable, bien que la fin du set soit moins catastrophique que le début. Je sors de scène mécontent, mais le public est enthousiaste et il faut avouer que nous avons globalement bien joué. Mon humeur s’améliore, aidé par deux nouvelles louches du ragoût maison une fois de retour dans les loges. Je n’ai pas passé un bon moment sur scène, mais le public est content, c’est le principal.

Une fois le van technique chargé, il est temps de rejoindre notre hébergement. Il s’agit d’un hostel de type auberge de jeunesse, situé dans la banlieue de Prague et non loin de la salle.
Le lieu est propre et calme, mais extrêmement spartiate, surtout la salle d’eau commune. Je prends mon courage à deux mains pour prendre une douche dans la salle glacée et sans aucune intimité. L’eau n’est pas très chaude mais en apnée ça passe tout seul. Je pense, à raison, que ce sera pire le lendemain matin, autant souffrir une fois pour toute maintenant pour être un peu propre plutôt que reculer le moment ou ne pas le faire du tout.

Je partage une chambre de 4 lits en compagnie de Benoît, Rémi et Ono. Ce dernier décide d’aller faire un tour dehors. À presque 2h du matin, ok c’est un concept. Après une séance de pets libérateurs, nous nous couchons, épuisés. Je n’entendrai pas Ono rentrer mis les ronflements de Benoît m’empêcheront de dormir de tout mon saoul. C’est ballot mais j’ai connu pire. Pour le Hellfest, j’ai dormi dans la même pièce que Olivier et Richard, notre ancien chanteur. Benoît est un ronfleur amateur du dimanche à côté. Je m’assoupirai en pensant que nous avons pour le moment donné que 4 concerts et qu’il en reste encore 6 autres, mais que mon lit et ma petite femme me manquent déjà terriblement.

Fatigue & déficit de sommeil : 6 sur une échelle de 10


MARDI 16 AVRIL 2019 – VIENNE

Lorsque nous prenons place dans les vans ce mardi matin, certains membres de notre cortège ont renoncé à se doucher, découragés par l’eau froide et le manque d’intimité. Les membres d’Abyssic notamment, qui conservent du coup des traces du maquillage de la veille sur le visage, lors donnant un air particulièrement fatigué. Pour ma part, je n’ai pas besoin de restes de vieux maquillage pour ressembler à un zombie, je reste donc encapuchonné dans mon sweat shirt, lunettes de soleil sur les yeux.

 Il n’y a que 4 heures de route entre Prague et Vienne, c’est donc une journée de route facile. De beaux paysages autrichiens s’offrent à nos yeux des deux côtés de l’autoroute, bien que le meilleur reste à venir puisque nous traverserons la Slovénie le lendemain pour nous rendre en Croatie.

Vienne est une ville magnifique, de taille modeste, dans laquelle nous avons déjà joué en 2017. Cette fois encore, pas le temps de faire du tourisme, hélas, car nous devons faire notre check-in à l’hôtel puis nous rendre à l’Escape, salle qui nous accueillera pour le concert de ce soir. L’hôtel est en fait un hostel typé auberge de jeunesse, comme celui de la veille, à ce détail près qu’il est beaucoup plus « luxueux ». Le personnel est jeune et sympathique. Les norvégiens écopent d’une chambre dans le bâtiment principal, tandis que les français se voient confiés les clés de deux chambres dans un bâtiment annexe situé à 5 minutes de marche. Ma chambrée sera constituée de Rémi, Ono, Benoît et moi-même.

L’Escape comporte deux parties distinctes, une partie bar au rez de chaussée et la salle de concert proprement dite au sous-sol. La scène est un peu étrange, avec une porte de sécurité donnant sur un escalier menant à l’extérieur située sur la droite et réduisant l’espace.  C’est un peu compliqué de se garer devant la salle, mais on y parvient… plus ou moins. La maréchaussée locale n’aura sans doute pas apprécié puisque nous recevrons un PV quelques semaines après la fin de la tournée... L’accueil de la salle est sympathique et le catering agréablement garni. Nous apprenons que le repas chaud sera constitué d’un plat de pâtes et d’un plat végétarien, très bien !  

Les balances sont expédiées rapidement, l’ingé son, guitariste de Harakiri For The Sky, étant particulièrement efficace. Le groupe local chargé d’ouvrir les hostilités s’appelle Stream of Void, et officie dans un registre plutôt melodeath. L’association avec Abyssic et Monolithe est un peu étrange, mais cela nous semble être de peu d’importance. Nos interactions avec le groupe sont limitées, mais elles sont agréables. L’occasion de faire un petit aparté ; D’une manière générale, les rapports avec les groupes locaux de première partie peuvent être classés en 4 sections. La première comprend les groupes ravis de nous rencontrer, soit par curiosité, soit parce qu’ils apprécient ce qu’on fait. On y retrouve des gens intimidés et d’autres moins, mais ce sont en général les rencontres les plus satisfaisantes. La seconde comprend les groupes qui vous montrent une indifférence absolue. Les échanges se limitent à quelques formules de politesse, mais en gros chacun vit sa vie, même si les différents clans font partie du même événement. La troisième comprend les groupes qui montrent une hostilité vis à vis des têtes d’affiches. Peut-être considèrent-ils que la musique est une compétition et qu’ils doivent se positionner en challenger pour se hisser au niveau supérieur ? Je ne sais pas et je ne comprends pas cette attitude à vrai dire… Mais ça existe, hélas. Et enfin, la dernière catégorie est celle des groupes qui montrent une déférence exagérée aux groupes plus connus qu’eux. Nous avons connu cela quasiment systématiquement au Japon, sur les dates en dehors de Tokyo. C’est un peu gênant et cela limite grandement la fluidité des interactions, car chacune de vos paroles est bue telle le nectar des Dieux. Sur cette tournée, nous ne serons confrontés, heureusement, qu’aux deux premières catégories.

La fatigue et le relatif ennui lié au temps passé sur la route et dans les loges sans rien faire sont à l’origine quelques discussions un peu houleuses avec Rémi ce jour-là. Ce dernier est toujours malade, et comme il dort mal et peu, comme nous tous, il n’arrive pas à récupérer et son état empire. Il est donc de mauvais poil et supporte mal d’être contredit dans les conversations. Rien de bien méchant cependant, mais je comprends alors comment les groupes en tournées peuvent se disloquer pour des broutilles. Il est facile de sortir de ses gonds quand le confort est spartiate et la fatigue envahissante.

Arrivés à la moitié de la tournée, nous commençons à réfléchir avec Abyssic de quelle manière nous pourrons célébrer la fin de celle-ci d’une manière intéressante. Nous envisageons donc de faire une reprise de My Dying Bride, avec tous les musiciens des deux groupes lors de l’avant dernière date, à Bruxelles, la dernière date étant un festival, ce qui ne permet pas d’empiéter sur le temps de jeu alloué à chaque groupe.

Je suis trop fatigué pour aller voir le set de Stream of Void mais certains d’entre nous ont le courage d’y aller et reviennent avec un avis positif sur leur prestation. Je suis content d’être resté planté dans les loges puisque Chris nous raconte ses rencontres avec Abbath et explique à quel point il est devenu un sujet de moqueries en Norvège tant le personnage est complètement à l’ouest la majeure partie du temps. Quand vient le tour d’Abyssic de jouer, je décolle de mon siège et nous sommes tous présents pour assister à leur set. A ce stade, le soutien mutuel des deux groupes est tel que nous nous entraidons sans même y réfléchir ni rien attendre en échange. Or assister au set de l’autre groupe et être prêt à intervenir en cas de pépin quelconque fait entièrement partie de ce processus. Pour ma part j’apprécie de plus en plus le rendu live d’Abyssic et leurs longs morceaux hypnotiques, qui me bercent. J’aime observer Chris, qui bien que jouant des parties de guitares moins complexes que celles de Monolithe, est extrêmement précis et ne fait quasiment jamais d’erreur. On sent sa grande expérience, bien supérieure à la nôtre. Le groupe est d’ailleurs beaucoup plus en place et à l’aise que la veille. Et pour cause, Matthieu a trouvé une solution pour eux en utilisant l’ordinateur qu’il utilise sur scène avec Monolithe pour remixer d’une manière plus convenable le clic et les samples d’orchestres pour Carl.  Ce dernier est parfaitement à l’aise, mais Matthieu reste agenouillé derrière lui pour intervenir en cas de souci car cette nouvelle manière de jouer est réalisée sans filet, faute de temps pour répéter. Tout se passera finalement comme un charme et les musiciens sortiront de scène très satisfaits de ce bon concert.

 Lorsque Monolithe entame son set, je revis immédiatement le même cauchemar que la veille. Non seulement le son sur scène n’a plus rien à voir avec celui réglé pendant les balances, mais c’est en plus la guitare de Benoît que j’entends à fond dans mon retour. C’est insupportable et très perturbant pour jouer correctement et je dois donc, comme la veille, intervenir au micro pour demander à l’ingé son de corriger ce problème. C’est mieux à partir du second morceau, même si, comme la veille, les allers-retours des faders sur la console sont effectués sans aucune finesse. Je sors de scène peu satisfait de ma prestation, mais le groupe a convaincu cette fois encore. Rémi a très mal à la gorge et nous croisons tous les doigts pour qu’il puisse terminer la tournée sans extinction.

Tout le monde est fatigué ce soir et personne n’a l’intention de faire de vieux os dans les loges. C’est donc assez rapidement que nous commençons à remonter et charger le matériel.
Nous prenons place dans les vans pour le retour à notre hébergement pour la nuit, qui se fait dans un silence religieux.

C’est à Vienne que j’inaugure ce que j’appellerai mes moments « Spinal Tap ». Je souhaite, comme toutes les nuits, prendre ma douche avant de me coucher. Les douches hommes sont toutes prises, et comme il est tard et que je ne veux pas attendre, je rentre dans une cabine femme. Je précise que les cabines de douches sont individuelles, sans quoi je ne me serais évidemment pas permis une telle intrusion. Alors que je suis sous la douche, la lumière s’éteint soudain et je me retrouve dans le noir absolu… Je ne sais pas trop quoi faire, mais il est un peu compliqué de s’y retrouver dans le noir. J’envisage donc de sortir et de voir ce qui se passe… Savonneux, du shampoing dans les cheveux, je tente une sortie sans tomber. Au moment d’ouvrir la porte de la cabine, la lumière se rallume. Je ne saurai jamais ce qui s’est passé exactement, mais finalement cette douche dans un endroit sensé être confortable sera devenu une épreuve supplémentaire.

Après une nouvelle séance de pets dans la chambre dont Benoît sortira grand vainqueur en nous asphyxiant à moitié, je tombe dans un lourd sommeil et passe la nuit la plus réparatrice de la tournée. La seule en réalité.

Fatigue & déficit de sommeil : 5 sur une échelle de 10

MERCREDI 17 AVRIL 2019 – ZAGREB

Les membres de notre cohorte se retrouvent l’un après l’autre dans l’étroite salle de petit déjeuner de notre hostel autrichien. On nous fait comprendre qu’il vaut mieux remplir nos plateaux dès à présent, car un groupe d’enfant est attendu et il semble que le personnel anticipe une razzia de leur part. Je suis attablé avec Thibault, Benoît et Carl, et les plaisanteries fusent malgré le réveil difficile. La horde de gamins débarque, heureusement, pile au moment de notre départ, dans un tohu-bohu de foire.

 Nous devons aujourd’hui traverser la Slovénie pour atteindre la Croatie. L’occasion d’admirer les sublimes paysages qui commencent à défiler avant même de franchir la frontière Autrichienne. Entre montagnes enneigées au loin et verdure luxuriante autour de nous, c’est sans nul doute l’une des plus belles régions d’Europe à mon avis, bien que relativement méconnue. La Slovénie, elle, est vallonnée et verte. Après l’achat de la vignette de rigueur permettant de circuler sur l’autoroute, nous continuons notre périple en direction de Zagreb.

Je n’ai jamais fait de tourisme dans cette ville auparavant mais les échos que j’ai pu en avoir n’étaient pas nécessairement positifs du point de vue esthétique. La partie de la ville que nous traversons pour atteindre la salle dans laquelle nous nous produirons le soir donne raison aux commentaires assassins que j’ai pu entendre. Il y a un côté zone industrielle omniprésent et on ne retrouve pas non plus la laideur fascinante de l’architecture brutaliste d’une ville comme Belgrade dans la Serbie voisine.

Les deux vans arrivent au Močvara sensiblement à la même heure. La salle est un complexe très sympathique, avec une partie extérieure et un bel espace. Ono est ravi de constater que le stand de merch est situé juste devant l’entrée. Juste à l’extérieur des loges, l’organisateur, le très sympathique Filip, épluche des légumes en prévision du repas chaud du soir. Après avoir déchargé le van technique, Carl et moi-même, bière à la main, passons un moment avec Filip, le temps de discuter de choses et d’autres et de profiter du soleil radieux.

Nous avons décidé la veille, à l’initiative de Benoît, de reprendre le titre « For You » de My Dying Bride avec tous les musiciens de Monolithe et d’Abyssic pour l’interpréter à Bruxelles. Nous souhaitons donc nous installer au plus vite sur scène afin d’expédier la balance au plus vite, exercice auquel nous sommes désormais particulièrement bien rôdés, pour pouvoir répéter un peu ce morceau que nous n’avons pour le moment étudié que virtuellement en l’écoutant, sans l’avoir encore joué. Hélas, c’est peine perdue. L’ingé son n’est visiblement ni pressé d’arriver et encore moins de commencer à travailler une fois sur place. Les balances auront lieu très tardivement et Abyssic comme Monolithe seront forcés de les réaliser rapidement sans pour autant pouvoir bénéficier de marge suffisante pour répéter « For You ». Tant pis, on le fera demain à Milan se dit-on.

Le groupe de première partie est une célébrité locale du nom de (Drama). Les parenthèses font bien partie du nom. Ses membres font preuve d’une indifférence polie à notre égard, sauf le chanteur, déjà un peu imbibé, qui couvre les deux groupes de compliments hypocrites.

Rémi et moi décidons de déposer nos affaires à l’hôtel, situé à une dizaine de minutes à pied du Močvara. La jeune réceptionniste, très avenante envers ce qu’elle pense être deux rock stars, fait le maximum pour nous faire sentir à l’aise dans son établissement. Après un petit tour dans une des chambres (de seulement 2 personnes, hallelujah) qui sera nôtre par la force des choses, nous nous faisons offrir un verre d’eau et une pâtisserie par notre hôte. Pas très rock n’roll, mais un peu de calme, de repos et d’ambiance salon de thé avant le concert du soir sont toujours les bienvenus. Rémi décide de rester encore un peu à l’hôtel pour une petite sieste, quant à moi je retourne à la salle pour dîner d’un vrai repas.

Le public a commencé à arriver lorsque j’arrive à la salle. Le repas est prêt et je m’en sers une assiette. Sans être un cordon bleu, Filip nous a fait un ragoût fort plaisant. Pendant que je mange, je vois les 4 norvégiens en grande discussion tout en regardant une vidéo de ce qui semble être une prestation live de Dimmu Borgir. Håkon nous apprend que Ian Kenneth a été invité à jouer un titre la veille avec son ancien groupe au Inferno Festival. Personne chez Abyssic n’était au courant. Håkon explique que Ian Kenneth ne l’a pas informé peut-être par peur que l’information s’ébruite. « Il me connaît » dit-il. « Il sait que je ne sais pas tenir ma langue. ». Je sens néanmoins qu’il n’est pas ravi d’apprendre que Ian Kenneth a joué la veille alors qu’il a annulé sa participation à la tournée d’Abyssic pour des problèmes de santé.

 Second coup dur pour Abyssic, nous apprenons ensuite que André s’est réveillé ce jour-là avec un mal de dos particulièrement handicapant. Il a donc informé le groupe qu’il ne prendrait pas l’avion comme prévu le lendemain pour nous rejoindre à Milan et terminer la tournée à nos côtés.

Arrive l’heure du concert. (Drama) investi la scène. Nous entendons un peu ce qui se passe depuis les loges, je décide donc d’aller voir un peu ce que ça donne depuis la salle. La formation Croate propose une musique d’excellente qualité, qui me fait par moments penser à Tool et à Killing Joke à d’autres. Problème : leur set a commencé très en retard, faute à l’ingé son pas des plus dynamiques et à (Drama) qui a pris tout son temps pour ses balances, alors qu’Abyssic et Monolithe ont écourté les leurs justement pour leur laisser le temps d’en faire avant l’arrivée du public. Autre problème : les 30 minutes allouées au groupe se transforment en 50 sans que personne de la salle ou de l’organisation ne juge utile de les arrêter plus tôt. Filip fini par leur couper le son, sans quoi ils auraient continué plus longtemps encore. Dans les loges, nous nous ne nous en offusquons pas plus que cela car nous ne réalisons pas encore ce que cela impliquera ensuite, si ce n’est que cela retardera forcément l’heure à laquelle nous nous coucherons. Et oui, à ce stade de la tournée nous fonctionnons déjà tous comme de petits papis… Abyssic est prêt, maquillage et toges en place. L’occasion pour moi de prendre quelques photos en leur compagnie puisqu’il faut bien tuer le temps en attendant que (Drama) se décide à sortir de scène.

 Lorsque le concert d’Abyssic débute, la salle est bien remplie et il s’agit certainement de la plus grosse affluence de la tournée. Les norvégiens donnent un concert, de mon point de vue, magistral. Lorsque le tour de Monolithe de jouer arrive, il est déjà tard et une partie de la salle a quitté les lieux. C’est dommage, mais nous ne ménageons pas notre peine pour essayer d’être à la hauteur du set de très haut niveau qu’a donné Abyssic ce soir. Côté retour, ma malédiction me poursuit encore, mais c’est moins grave que les deux soirs précédents et j’arrive à m’en satisfaire. Nous jouons bien mais malheureusement le public quitte la salle petit à petit afin de pouvoir rentrer chez lui avant la fermeture des transports en commun. Lorsque nous entamons le dernier titre, il ne doit rester qu’une trentaine de personnes à l’intérieur. Je maudis intérieurement l’ingé son et surtout (Drama) de nous avoir mis dans cette position. Lors d’un concert, chaque action a nécessairement une conséquence, et les aises prises par (Drama) nous ont mis dans une situation loin d’être amusante.

Retour dans les loges. Le chanteur de (Drama) est là et je pense ne pas être le seul à avoir envie de le tuer, d’autant qu’ils ont réunis leurs affaires pour les charger dans leur véhicule et qu’ils ont pris mon sac personnel par erreur. Heureusement, je m’en aperçois avant qu’il ne soit trop tard. Ce soir, l’inertie de groupe reprendra ses droits et nous mettrons un temps déraisonnablement long pour nous décider à ranger le matériel et aller à l’hôtel. Je suis heureux pour ma part de ne partager la chambre qu’avec une seule personne, qui ne ronfle pas qui plus est. Après la douche bienfaitrice de rigueur, je m’endors profondément avant même que Rémi ne termine de prendre la sienne.

Fatigue & déficit de sommeil : 6 sur une échelle de 10

JEUD 18 AVRIL 2019 – MILAN

Le réveil sonne beaucoup trop tôt à mon goût et malgré une vraie nuit de sommeil, mon niveau de fatigue monte d’un cran supplémentaire. Le petit-déjeuner est basique mais on me sert une omelette fraîchement préparée, de quoi caler mon estomac jusqu’au prochain ravitaillement.

Olivier me demande si je suis ok pour voyager dans le van technique aujourd’hui, ce à quoi j’acquiesce. Départ en compagnie de Matthieu, qui tient le volant, et de Ono, qui prend bien soin de me laisser entrer dans le van en premier afin que je m’assoie sur le siège du milieu, le plus inconfortable. Merci copain !

Sur la route, la frontière Slovène est rapidement franchie et de beaux paysages s’offrent à nous. Aux environs de 11h00, nous traversons les portes de l’Italie. Nous sommes en avance sur notre horaire, je propose donc à mes deux compagnons de sortir de l’autoroute et de manger un vrai repas italien pour le déjeuner. Après tout, autant profiter d’être dans les parages pour se régaler de cuisine locale, la meilleure d’Europe à mon avis (oui oui, devant la Française). Nous nous arrêtons donc un peu au hasard dans un village qui ne paye pas de mine au premier abord, mais qui s’avère être très joli. Le temps de se garer dans le grand parking jouxtant le centre-ville et nous voilà en plein marché italien, accompagnés de la chaleur réconfortante d’un soleil éclatant et des éclats de voix des commerçants. Franchement ça fait du bien !

 On choisit un petit restaurant, on s’installe sur la « terrasse » (deux tables dans la rue) et nous voilà à la cool, petit vin local sur la table. Pâte fraîches pour les uns, raviolis pour les autres. C’est succulent et ça remonte le moral mis à mal par la fatigue. Encore un petit tour et quelques photos, et ça repart pour le reste du trajet.

La salle de concert est située un peu aux abords de Milan. Nous ne verrons donc rien de la ville. Nous arrivons les premiers, mais le second van suivra peu de temps après. J’apprends que Håkon a conduit aujourd’hui et que cela l’a beaucoup stressé. J’aurais bien aimé voir ça ! Mais je ne regrette absolument pas notre petite pause du jour et je ne pense pas avoir perdu au change.

J’ai besoin de pisser en arrivant et je vis mon second moment Spinal Tap. Après être allé aux chiottes et avoir fermé la porte à clé, j’essaie de sortir, sans succès. La porte est coincée et impossible à ouvrir de l’intérieur. Pas de problème, me dis-je, je vais envoyer un message aux autres sur Messenger et ils vont venir essayer d’ouvrir la porte de l’extérieur. Pas de chance : je n’ai pas de réseau à l’intérieur. Alors que je réfléchis à une solution à la MacGyver, la lumière s’éteint… La fatigue aidant, la colère monte d’un coup et je martèle la porte de coups de poings. De l’autre côté, j’entends la plinthe murale succomber à mes coups et tomber violemment au sol. Un employé de la salle arrive en courant et me libère juste en tirant la porte de l’extérieur. Libéré, je retrouve immédiatement mon calme et lui explique ce qu’il s’est passé. Il m’agace à nouveau en me répétant sans cesse « calm down, calm down » alors que je n’ai pas l’impression de montrer de signes d’agressivité. Je le plante donc là sans insister. Il me lancera des regards outrés pendant le reste de la journée, mais peu importe : il y a des chiottes au niveau des loges, et il n’y a pas de problème avec la porte dans ceux-là.

La salle est grande. On nous dit qu’on peut y mettre 400 personnes mais à première vue je pense que le double, voire plus, peut y tenir facilement. La scène est large et globalement les conditions sont très confortables. Nous déchargeons le van technique et commençons à installer la scène. Ce soir la tête d’affiche est Abyssic, ils vont donc balancer les premiers. En attendant que tout soit en place, je passe un petit coup de téléphone à ma femme, ce qui me permets de m’échapper un moment du cirque ambulant. Lorsque je remonte dans les loges, une femme blonde est avec Abyssic et se tient près, très près, d’un Håkon un peu gêné. Il s’agit d’une fan qui ne fait pas semblant de montrer son admiration à ce dernier ainsi qu’à Henriette, tout aussi gênée par cette violation involontaire d’espace personnel.

 Les balances se passent bien mais la scène n’est pas très stable… Ça bouge pas mal lorsqu’on se déplace, il faudra donc faire attention pendant le concert, surtout que c’est Olivier, nettement plus lourd que moi, qui est le plus proche de moi sur scène. Je n’ai pas très envie de jouer au tape-cul et de voltiger dès qu’il marchera sur une planche branlante. La scène est cependant très classe avec le matériel et le backdrop, et je croise les doigts pour que du monde se déplace ce soir.

Après un nouveau (excellent) plat de pâtes offert par l’organisation, notre fine équipe est prête pour le show. C’est Tethra qui fait l’ouverture avec un Doom traditionnel très efficace.

 Malheureusement le public est peu nombreux et l’impression de vide est renforcé par la taille de la salle, disproportionnée par rapport au nombre de personnes présentes. L’affluence s’améliorera légèrement pendant le set d’Abyssic et le nôtre, mais ce ne sera hélas pas un grand soir. Monolithe entre en scène et démarre son concert. Une fois encore, mon retour crache un son qui n’a rien à voir avec les réglages qui ont étés faits pendant les balances. Ma guitare est beaucoup trop forte (ce que j’exècre le plus) et couvre tout, m’empêchant d’entendre les autres instruments distinctement et ruinant mon immersion dans la musique. Le grain de la guitare est sale et peu précis. Je suis fatigué et saoulé, je suis mécontent de la faible affluence, je traverse donc le concert en mode « rien à foutre » en jouant approximativement et sans aucun enthousiasme. C’est avec soulagement que je quitte la scène à la fin de la prestation, malgré les acclamations du maigre public. À ce stade, j’ai besoin de m’isoler un peu, et je vais donc m’installer sur la terrasse surplombant la salle, protections auditives dans les oreilles, bière dans une main, smartphone dans l’autre, pour raconter mes déboires à ma femme et me faire plaindre un peu. Cette dernière me remonte un peu le moral et, après avoir parlé avec Chris et Carl, qui connaissent bien ces baisses de motivations au cœur des tournées, je me décide de donner le maximum pour les 3 dernières dates, quelles que soient les conditions sur scène et quel que soit mon niveau de fatigue. Tous ces kilomètres avalés, toute cette fatigue accumulée, pour au final ne pas apprécier d’être sur scène ? Ça n’a pas de sens. Ce sera différent demain, j’en suis sûr.

La routine du chargement du van reprend et j’essaie de motiver les troupes à aller plus vite en travaillant comme un fou, mais c’est peine perdue. Au final, Matthieu et moi chargeons seuls 70% du véhicule. Je ne suis pas très content du manque d’implications des autres ce soir, mais je ne leur en tiens pas rigueur je veux dormir et je suis donc pressé d’aller à l’hôtel.

Il est très tard lorsque nous arrivons à la réception du petit hôtel dans lequel nous logerons pour le reste de cette nouvelle courte nuit. L’employé est sympa comme une porte de prison et exige d’enregistrer tous les passeports avant de donner les clés des chambres. Autre ombre au tableau : il tape sur son clavier d’ordinateur avec un seul doigt et semble prendre un malin plaisir à aller le plus lentement possible. Après de très longues minutes d’attentes, l’assemblée se répartie en trois chambrées. Je serai pour ma part avec Ono, Benoît, Thibault et Rémi dans une chambre minuscule et à la propreté discutable. Rémi est épuisé par la tournée et le sale mal de gorge qu’il traîne depuis le premier jour, il est donc d’humeur exécrable. Après la douche de rigueur, je me couche et dors convenablement mais trop peu, chose à laquelle je commence à être habitué. Il semblerait que Thibault ait ronflé et que Rémi ait secoué son lit, ce qui n’a pas plu à l’intéressé, qui sera outré et grognon le lendemain matin.

Fatigue & déficit de sommeil : 7 sur une échelle de 10

VENDREDI 19 AVRIL 2019 – SAINT MAURICE

Nouveau réveil difficile, nouveaux visages peu amènes, nouveaux cernes sous les yeux, bref, la routine quoi. On avale un petit déjeuner honnête, Italie oblige. La réceptionniste du matin est nettement plus sympathique que le monsieur de la veille, ce qui remonte légèrement la cote de cet hôtel plutôt inconfortable à mes yeux. Mais le pire est encore à venir, patience !

 On repart, direction Saint Maurice. Sur la route, nous sommes une fois encore au milieu de paysages splendides, sur les routes des Alpes Suisses du Valais. Je connais assez bien la Suisse pour être né à proximité, mais je ne suis jamais venu dans cette région. C’est donc désormais chose faite.

C’est un beau soleil et de la douceur qui nous attendent à destination, malgré le caractère montagnard de la région. Saint-Maurice est une petite ville très charmante, que nous avons, pour une fois, le temps de visiter en partie. Il s’avère qu’un festival catholique s’y déroulera dans quelques jours et que quelques pèlerins sont déjà arrivés. Pour ma part, en apprenant que notre hébergement sera un baraquement militaire, je me décide à passer la nuit à l’hôtel, afin d’avoir plus de confort. Je visite donc un hôtel de l’ordre franciscain afin de me renseigner sur les prix et garde donc cette option sous le coude pour plus tard.

Le lieu qui nous accueille aujourd’hui est un bar brasserie doté d’une salle de concert. La salle et les scènes sont très correctes et font office de club intimiste. Du beau monde est déjà passé par ici à en croire les affiches. Les loges sont situées derrière le bar, dans une pièce dans laquelle nous sommes accueillis royalement, à base de bières maison, de charcuterie, pain et fromages locaux et autres joyeusetés. Les deux groupes se régalent de ces mets succulents tout en prenant le temps dont nous disposons pour se reposer de la nouvelle harassante journée passée sur la route. Certains d’entre nous passent un moment au soleil, l’occasion pour moi de discuter politique et démocratie avec des citoyens Suisses forts sympathiques (ces derniers ont d’ailleurs un avis bien tranché sur la France, avec lequel je suis d’accord sur l’essentiel) d’autres, comme Rémi, préfèrent aller au baraquement pour y piquer un somme. Peu avant qu’on nous appelle pour les balances, Henriette me narre ses débuts dans la musique comme chanteuse de Sirenia et de son amitié indéfectible avec Johan Edlund de Tiamat, avec qui elle a tourné pendant quelque temps. Chris et Håkon nous racontent les multiples altercations entre Dani Filth et Nicolas Barker, qu’ils connaissent bien puisqu’il a joué dans Dimmu Borgir. J’apprécie ces moments de discussion « people » !

L’équipe technique du club est constituée de jeunes gens d’une gentillesse et d’un professionnalisme confondant. Les balances ne s’éternisent donc pas, et à peine avons-nous terminé avec Monolithe, que je retourne à l’extérieur pour profiter d’encore d’un peu d’air frais montagnard tant que c’est encore possible. Rémi me dit que les baraquements sont confortables et qu’il a bien dormi, je le crois sur parole et décide donc de ne pas aller à l’hôtel finalement. Erreur fatale, mais ça, je ne le sais pas encore.

 C’est Diablerets, groupe local de l’organisateur de la soirée qui commence à jouer après l’ouverture des portes au public. J’avoue ne pas en avoir vu grand-chose, car j’avais envie de rester dehors aussi longtemps que la température le permettrait. C’est ensuite au tour de Monolithe d’envahir la scène. Lorsque nous entamons « Anechoic Aberration », le son de ma guitare dans mon retour est tellement fort que même les autres membres du groupe n’entendent que ça. Allons donc, ça recommence… À ce stade, ce n’est même plus une surprise ! Décidé à adopter une attitude plus positive que lors du concert de la veille à Milan, je joue le reste du morceau en galérant tout en faisant bonne figure, même si j’avoue avoir eu envie de jeter ma guitare et de rentrer chez moi. Un bon « rage quit » de Rock Star ! Je suis même obligé de m’arrêter de jouer quelques mesures vers la fin du morceau car je n’entends rien à part moi-même et je suis un peu décalé. Avant de continuer, je m’approche donc du micro pour faire savoir à l’ingénieur du son que j’ai un problème de volume, ce qu’il corrige immédiatement. « C’est bien ici ! » me lance un membre du public. Et oui mon brave, c’est bien pour toi, mais pour moi non ! Mon intervention est salutaire car le reste du concert se passe très bien et le son sur scène est très bon. Nous décidons tout de même de raccourcir notre set d’un titre afin de permettre à Abyssic, qui sera la tête d’affiche aujourd’hui, de jouer l’heure entière qui lui a été allouée. La soirée ayant pris du retard et le couvre-feu étant strict, il nous semble opportun de laisser la tête d’affiche donner un concert complet et de nous effacer un peu pour qu’ils ne pâtissent pas d’un retard dont ils ne sont pas responsables.

Le concert d’Abyssic à Saint-Maurice est le seul auquel je n’assisterai pas, préférant me relaxer dans les loges en compagnie de la délicieuse bière artisanale concoctée par notre hôte.

Le spectacle terminé et la scène évacuée, la soirée continue dans la partie bar avec un sympathique repas et une rare occasion de se retrouver tous ensemble autour d’une table. La sono crache une playlist Metal et je me demande à quoi pouvait bien servir le couvre-feu de la partie club. Mais nous passons un bon moment, c’est tout ce qui compte.
L’heure du coucher arrive. Olivier, Ono, Thibault et Benoît resterons sur place pour profiter des couchages et de la salle de bain disponible. Les norvégiens, Rémi, Matthieu et moi-même nous dirigeons donc vers les baraquements, situés à une dizaine de minutes à pied, aux pieds du Scex, le nom du gros rocher qui nous surplombe, l’occasion de grasses plaisanteries sans subtilité. À peine la porte de notre logement pour la nuit franchie, je comprends que j’ai fait erreur de ne pas aller à l’hôtel cette nuit… Si le lieu n’est pas à proprement parler inconfortable, il est en revanche rempli de poussière et l’air est irrespirable. Tant-pis me dis-je, c’est trop tard pour changer maintenant. Je me dirige vers les douches. C’est spartiate, mais fonctionnel. Lorsque j’arrive dans notre chambrée, qui doit compter une vingtaine de lit, les norvégiens sont déjà couchés. Matthieu et Rémi dorment dans une autre pièce pour éviter de nous déranger, car l’un ronfle et l’autre tousse. Chris et Henriette ont ouvert les fenêtres pour aérer, ce qui est une bonne idée. Mais la température, du coup, est glaciale. Les lits ne disposent pas de literie, c’est donc dans des sacs de couchages que nous devons nous installer. À peine ai-je fermé les yeux que j’entends Carl renifler comme s’il avait un gros rhume. Il ne supporte par la poussière et sort de la chambre pour aller dormir dans le couloir. Plus tard, je somnole, mais ne parviens pas à sombrer dans le sommeil car Chris ronfle… Plus tard encore, c’est le froid qui me réveille… Comme il faisait nuit noire quand je suis arrivé dans la chambre et que Håkon dormait déjà, je me suis faufilé discrètement dans le sac de couchage mais je n’ai pas remarqué que je n’étais pas complètement à l’intérieur, mais dans la doublure… C’est ballot… Je parviendrai tout de même à fermer les yeux une heure ou deux, en me recroquevillant dans mon sac de couchage peu efficace et en essayant de respirer à travers un t-shirt pour ne pas avaler trop de poussière.

Fatigue & déficit de sommeil : 9 sur une échelle de 10

 

SAMEDI 20 AVRIL 2019 – BRUXELLES

 Le lever est dur en ce samedi matin pour les occupants du baraquement. Nous trainons nos carcasses pour rejoindre nos comparses logés au Manoir qui eux se portent comme un charme après une nuit très confortable. Je me maudis une fois de plus de ne pas avoir suivi mon instinct de la veille d’aller à l’hôtel. Après de rapides adieux avec nos hôtes, nous nous engageons sur les routes splendides des Alpes Suisses. Je ne me sens pas en état de conduire, je refuse donc la proposition qui m’est faire de tenir le volant ce matin. Pendant, le trajet, Håkon semble reprendre goût à la vie dans ces paysages montagneux enneigés en nous faisant savoir que cela ressemble beaucoup à chez lui, à Telemark. Il se propose même de conduire, ayant l’habitude des routes sinueuses. Pour ma part j’essaie de dormir un peu, mais c’est peine perdue dans un véhicule en mouvement, tout particulièrement en montagne. Après un rapide contrôle de la Douane, nous arrivons côté français. Il faut dire que nous avons beaucoup de chemin à faire pour arriver à destination, en Belgique, à Bruxelles, plus précisément à Evere, contigüe à la capitale du plat pays, et nous franchirons non seulement notre pays natal la France mais aussi le Grand-Duché, à savoir le Luxembourg. Carl réclamera d’ailleurs un arrêt au Luxembourg afin de compléter sa collection d’aimants de frigo. Il sortira malheureusement bredouille de l’arrêt improvisé dans une station-service car malgré l’effort collectif pour l’aider à en trouver un, il faut bien se rendre à l’évidence : il n’y en a pas dans les parages.

De très, trop, longues heures plus tard, nous arrivons à destination. Matthieu et Ono, qui ont fait la route dans le van technique, sont arrivés les premiers à proximité de la salle qui nous accueille, Le GC Everna. Après avoir écouté les jérémiades d’un sympathique vieillard voisin et garé, avec sa bénédiction, les vans devant le portail de son jardin, il est grand temps pour nous, pour la 9ème fois, de décharger le matériel et de l’apporter à l’intérieur.

La scène est belle est grande et la capacité d’accueil également. Le backline n’est pas encore monté à notre arrivé mais l’ensemble des préparations est en cours nous semble-t-il. Les backstages se trouvent à l’étage et nous retrouvons des visages familiers, à savoir ceux des membres de Fading Bliss, qui ouvriront la soirée et quelques acteurs de la scène Metal Belge que nous apprécions particulièrement pour leur sympathie et bienveillance.
Benoît et moi devons nous acquitter d’une interview pour Radio Air Libre, ce que nous faisons sans broncher malgré la fatigue. C’est même plutôt agréable d’avoir quelque chose à faire avant les balances, car j’ai remarqué que mon épuisement s’estompait un peu quand j’étais actif.

L’ingé son ayant suggéré un ordre de soundcheck nous semblant un brin fantaisiste, nous faisons savoir que nous préférons que les balances s’effectuent dans les règles de l’art, à savoir la tête d’affiche, Abyssic, d’abord, suivi de Monolithe puis de Fading Bliss.

 La scène continue à être installée pendant que débutent les balances de Monolithe, car l’organisation a pris un certain retard. Les portes n’ouvriront donc pas à l’heure. Nous nous efforçons de terminer nos réglages rapidement afin de ne pas pénaliser Fading Bliss, et je croise les doigts pour que la malédiction des retours dont je souffre depuis quelques dates ne se manifeste pas une fois encore ce soir.

Le public est finalement autorisé à investir les lieux, après un retard conséquent. Fading Bliss chauffe donc la salle avant de nous laisser la place pour notre propre set. Dès les premières notes, je suis rassuré quant à la qualité des retours. J’ai connu mieux, mais j’ai aussi connu tellement pire que je suis satisfait de pouvoir au moins entendre mes comparses et m’entendre correctement également. À ce stade de la tournée et sans aucune possibilité d’avoir pu répéter un peu le titre de My Dying Bride que nous souhaitions jouer avec tous les membres d’Abyssic et de Monolithe, il semblait évident que nous n’allions avoir aucune opportunité de célébrer la fin de la tournée. Pourtant, à notre grande surprise, les membres d’Abyssic investissent la scène pendant l’introduction de « Engineering The Rip », habillés de leurs robes et de bures et déjà grimés, pour nous offrir des verres et des bouteilles de vin, et disposer certains de leurs chandeliers devant la scène. Le moment est bref mais touchant.

Nous finissons notre set, heureux d’avoir offert au public Belge une performance de bonne qualité. De retour backstage, nous réfléchissons à une manière d’honorer à notre tour nos compagnons de tournée. Évidemment, il n’y pas énormément de choses à faire, surtout qu’il faut veiller à ne pas trop troubler leur concert. Nous décidons donc d’une part d’aller nous planter, Matthieu et moi, devant la batterie, habillés de nos sweat-shirts Abyssic, bouteilles de vins à la main, tels les minions des membres du groupe. Les autres, pendant ce temps, offrirons à leur tour le breuvage rouge entre deux titres. Nous décidons cependant d’aller un peu plus loin et tentons de remplacer en toute discrétion la bouteille de vin de Chris par une bouteille dont le vin a été remplacé par du Fanta. Hélas, c’était sans compter sur l’œil avisé de Chris, qui a remarqué une agitation inhabituelle devant lui et la couleur étrange du liquide contenu dans la bouteille. Le stratagème n’aura donc pas marché…

La soirée se termine et, avant de ranger notre matériel une avant dernière fois, nous prenons le temps de discuter un peu avec nos amis Belge. Henriette connait un succès fou puisque de nombreuses personnes lui demandent de prendre une photo en sa compagnie, ce qu’elle accepte toujours avec grâce et sourire malgré la fatigue lisible sur son visage à elle aussi. Le van technique rempli, il est temps de se rendre sur notre lieu de couchage. L’expérience que nous vivrons est assez unique, puisqu’il est prévu que nous logions chez la tante de l’organisateur, qui possède un hôtel particulier en plein Bruxelles et qui dispose donc d’un espace conséquent. Après une dizaine de minutes de route et des manœuvres pour faire rentrer le van technique dans un garage vaste mais à la porte étroite pour notre gros véhicule, nous voici à l’intérieur de la gigantesque demeure. Celle-ci s’étend sur plusieurs étages, est dotée d’une cour et d’un petit jardin, de nombreuses chambres… Il nous est demandé de ne pas faire trop de bruits car la fameuse tante propriétaire des lieux dort quelque part dans la maison. Alors que certains d’entre nous souhaite prolonger un peu la soirée, Rémi et moi tirons notre révérence et cherchons un endroit pour dormir. Rémi aura droit à la chambre seule, puisqu’il est malade et tousse beaucoup. Quant à moi, je trouve un lit à proximité et m’y installe sans trop me poser de questions. Je m’endors, bien que pas très rapidement, et passe une nuit sans aucune comparaison possible avec la précédente.

Fatigue & déficit de sommeil : 9 sur une échelle de 10

 

DIMANCHE 21 AVRIL 2019 – ROTTERDAM

La chambre est inondée de lumière lorsque j’ouvre les yeux. C’est d’ailleurs très certainement elle qui me réveille car je n’ai guère dormi plus de 5 heures. N’arrivant pas à me rendormir, je décide de me lever. Il n’y a pas un bruit dans la maison : les autres dorment tous encore. Je décide donc d’aller dehors, histoire de me trouver un petit déjeuner et faire une balade en ville.

 Dommage pour moi, nous sommes un dimanche matin et la plupart des commerces, bars et cafés sont fermés. Je trouve une boulangerie qui vend croissants et café, mais ils n’acceptent pas la carte bleue. Allons donc. Tant pis, je me passerai du petit déjeuner et je fais un tour dans la capitale Belge ensoleillée. Je connais déjà Bruxelles mais je ne connais pas le quartier dans lequel nous résidons. Je marche donc au hasard et finis par me retrouver nez à nez avec un salon de thé qui propose des brunches dominicaux. Ce n’est pas encore ouvert mais je m’installe sur une chaise de la petite terrasse pour tuer la vingtaine de minutes qui me sépare de mon repas. Excellent choix puisque je ferai un brunch bon et copieux et retournerai à l’hôtel particulier le ventre plein et de bonne humeur.

À mon retour, les autres sont levés et prennent un petit déjeuner en compagnie de notre hôte. La dame est très sympathique et les discussions vont bon train jusqu’à l’heure fatidique de notre départ en direction de Rotterdam. Nous avons pris notre temps aujourd’hui, puisque la particularité de ce dernier concert de la tournée, en terres néerlandaises, est d’être un festival, au sein duquel nous sommes programmés pendant l’après-midi. C’est plutôt une bonne chose pour nous, car nous nous réjouissons de pouvoir passer une soirée tranquille une fois les concerts des deux groupes bouclés. Autre bonne chose, il n’y a guère qu’une petite heure et demi de route qui sépare Bruxelles de Rotterdam, ce qui fera de ce voyage le plus court de la tournée. La seule ombre au tableau est la perspective de devoir quitter tout ce joli monde le lendemain, notamment Abyssic, avec qui les liens d’amitié sont plus forts que jamais.

Le Baroeg est la salle emblématique de Rotterdam. Monolithe y a déjà donné un concert en 2016 dans le cadre du Dutch Doom Days. Les lieux sont donc familiers lorsque notre groupe y débarque en toute fin de matinée. Nous déchargeons rapidement le van technique et, après un peu d’attente, procédons aux balances. La journée est radieuse et de nombreuses personnes flânent dans le parc au sein duquel la salle est située. Nous profitons de ce moment de répit, en commençant déjà à ressasser des anecdotes des dates passées, tels des légionnaires à la retraite.

 Monolithe joue avant Abyssic aujourd’hui. L’échéance arrivant, nous investissons la scène pour donner notre dernier concert avant plusieurs mois. Le son est excellent et nous jouons bien. Aucun problème de retour sur scène, tout est parfait. Le public néerlandais, fidèle à son habitude, est peu expressif, mais applaudit chaleureusement entre les titres. Festival oblige, le set est plus court que d’habitude et c’est avec un sentiment à la fois de devoir accompli, la tournée étant bouclée, et d’envie de continuer à jouer un peu plus longtemps que je sors de scène.

Un autre groupe joue entre Monolithe et Abyssic, nous avons donc le temps, le moment venu, de les aider à installer la scène. J’observe leur dernier concert à eux aussi depuis les places assises disponibles dans la salle. Leur set terminé, nous décidons d’un commun accord de ranger notre matériel dans le van immédiatement afin d’être débarrassés de cette tâche ingrate et de retrouver notre liberté : nous n’avons plus aucun engagement à respecter.

Mine de rien, il n’est pas tôt et l’après-midi touche déjà à sa fin. Direction l’hôtel pour ce soir, situé dans un bâtiment moderne en plein cœur de la ville. Nous y croisons un groupe de jeunes adolescentes qui posent tout un tas de questions à un Håkon amusé par leur manque de timidité. « Vous êtes des rock-stars ? » « Pourquoi on ne vous a jamais vu à la télé ? » « Vous faite beaucoup de bruit quand vous jouez ? ».

 L’assemblée se décide à aller dîner dans le quartier. L’occasion de faire une poignée de photos marquant la fin de l’aventure et de s’attabler dans un restaurant qui ne paye pas de mine avec ses airs d’attrape-touristes mais nous servira une nourriture excellente. La soirée se passera dans la bonne humeur et les toasts portés à la gloire de Monolithe et Abyssic.

Fatigue & déficit de sommeil : 8 sur une échelle de 10

 

LUNDI 22 AVRIL 2019 - Epilogue

La nuit de sommeil a été honnête, mais encore une fois, courte. La veille, malgré une arrivée dans les chambres pas trop tardive, la soirée a été prolongée comme si personne n’avait vraiment envie de retourner à la vie normale. Surtout pas Carl, qui a choisi ce moment pour nous faire découvrir la musique de tous les groupes dans lesquels il joue, à un volume sonore qu’on qualifiera d’inhabituel à cette heure de la soirée. Finalement, Håkon et moi-même mettrons involontairement un terme à la soirée, le premier en s’endormant dans son lit sans participer aux bavardages et moi en prenant possession de la douche, avec la ferme intention de faire de même ensuite.

Lorsque nous reprenons la route, Olivier est un peu bougon car il vient d’apprendre qu’Abyssic ne repart pas en Norvège depuis Rotterdam, mais depuis Amsterdam. Il faudra donc faire un détour pour les déposer à l’aéroport, ce qui nous fera perdre une heure sur la route, autant de temps perdu pour notre propre retour sur Paris. Il est vrai qu’on aurait aimé être prévenus n’importe quand sauf au dernier moment, mais les choses étant ce qu’elles sont, c’est donc bien la route d’Amsterdam que nous prenons. Arrivés à l’aéroport, arrive l’heure des au revoir. Håkon m’offre une bouteille d’Aquavit, breuvage norvégien que je me ferai un plaisir de déguster chez moi. Après des vœux mutuels de retour sain et sauf, ce qui reste de la troupe, à savoir nous les français, prenons enfin la direction de Paris.

L’arrivée dans les embouteillages de la capitale française marque le vrai finish de cette série de concerts !

Environs trois mois sont passés alors que j’écris ces lignes. Les souvenirs sont encore relativement vifs mais ils commencent à doucement prendre une couleur délavée, et les détails à s’estomper pour ne laisser place qu’aux grands traits. Une chose est sûre cependant : nous avons pris beaucoup de plaisir à faire cette tournée, malgré la fatigue. Un grand merci à Ono & Black Speech pour l’avoir organisée et à Abyssic pour l’avoir menée à nos côtés !

Facebook // Bandcamp

par Jus de cadavre le 15/08/2019 à 13:35
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Commentaires (1) | Ajouter un commentaire


JTDP
membre enregistré
22/08/2019, 10:24:02
Très chouette tour-report ! Merci ! Et du coup j'en profite pour découvrir ABYSSIC dont la musique est vraiment cool.

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