Ou aurait tendance à penser à tort que la Finlande est le pays du Rock, du Hard-Rock un peu Sleaze, de l’AOR ou du Vintage, ou même la terre de naissance des LORDI, ces vainqueurs improbables de l’Eurovision.
Si toutes ces assertions sont assez vraies, il ne faudrait pas oublier que certains choisissent un autre chemin, moins évident et typé, et plus empreint de culture underground « classique ». La preuve en est faite avec ce second longue-durée des TETRAGON, qui se répand dans des effluves de Metal progressif et hautement technique, tirant subtilement vers le Thrash tout en restant collé à un principe mélodique assez flagrant.
Niveau étymologie, un TETRAGON, comme tout le monde ou presque le sait, est un polygone à quatre côté, définition qui colle parfaitement à la formation en quatuor de cette entité (Jani Rajamäki – batterie, Jyrki Saranpää – guitare, Toni Rajamäki – guitare/chant et Sami Rajala – basse), mais qui épouse aussi à merveille les contours nets de sa musique, qui peuvent pourtant se montrer plus ou moins flous selon l’inclinaison. Voilà pour le petit préambule introductif, passons maintenant au vif du sujet.
Les TETRAGON viennent donc de Tampere en Finlande, et n’ont à leur disposition discographique qu’un simple EP et ce premier LP, ce qui tendrait à nous faire croire que leur formation est assez récente.
Cruelle erreur (logique somme toute), puisque le band existe depuis 1988, et qu’il s’est exprimé via un nombre conséquent de démos jusqu’en 1995, avant de s’auto réduire au silence. C’est donc à un pilier de la scène underground locale à qui nous avons affaire, qui a même proposé à ses fans une compilation en 2008 histoire de résumer sa première partie de carrière (Brothers In Blood).
Mais si cette quasi décennie était placée sous les auspices d’un Thrash assez classique et d’inspiration typiquement US, les choses ont changé depuis la résurgence du combo dans les années 2000. Non qu’ils se soient départis de leurs références, mais ils les ont adaptées pour aérer leur musique et lui donner une dimension plus ambitieuse et emphatique, au gré des détournements d’un Thrash à tendance progressive et évolutive.
Le résultat ?
Un album diablement cohérent, qui présente quelques similitudes avec les cadors du genre, CYNIC, NOCTURNUS et VEKTOR, dans une moindre mesure, en ligne de mire.
Certes, le propos n’est pas terriblement original en soi, d’autant plus que les compositions suivent toutes un fil rouge assez évident à repérer. Mais les Finlandais ont le mérite d’avoir dilué leurs influences Thrashy dans un bouillon d’inflexions Death, avec des accès de colère assez graves, et des aplatissements de tempo manifestes. Les passages en chant clair sont aussi utilisés avec conviction, rapprochant les TETRAGON des SOILWORK et autres CHILDREN OF BODOM, dans une version plus light, mais les nombreuses accélérations soudaines sont là pour rappeler leur passé, qu’ils ne font rien pour renier. Un premier LP soigné donc, qui n’étale que six compositions de durées variées, toutes assez développées, mais qui savent rester dans une décence temporelle assez appréciable.
Et si l’ouverture « Until The Ravens Fall » ne laisse pas planer le mystère de l’inspiration bien longtemps, avec son lourd riff d’intro et sa rythmique pachydermique, les enjolivements et autres digressions harmoniques nous aiguillent très vite sur la piste d’un Crossover assez malin, évitant l’écueil de la naïveté mélodique sans pour autant renier toute forme de sensibilité.
Riffs en circonvolutions qui soudain sombrent dans la syncope typique, chant qui comme celui de Paul Masvidal se partage entre grognements sourds et litanies sensibles et zen, ce titre se veut exploration de la piste CYNIC en version plus humble, et surtout, moins métaphorique.
Les quelques arrangements synthétiques ont le mérite de dynamiser l’ensemble, qui ne rechigne pas à placer au bon moment des breaks galvanisants.
D’un autre côté, et presque à l’opposé du spectre, « Soil Of Tears » joue la carte de la délicatesse en piochant chez TESTAMENT, TRIVIUM, mais aussi PERIPHERY son essence propre, en osant les arpèges électriques subtils, explosant soudainement au son d’un énorme Heavy Thrash terriblement efficace.
Il est évident que les instrumentistes connaissent leur boulot et leur partition, et le tout sonne terriblement carré et professionnel sans non plus être trop stérile et prévisible.
Il est tout à fait raisonnable à ce moment-là de laisser son esprit divaguer du côté des DARK TRANQUILITY adaptés à un contexte MEGADETH, même si le spectre de LAMB OF GOD en version plus apaisée plane au- dessus de la compo en question.
Les morceaux ont d’ailleurs tendance à s’allonger en se rapprochant de la fin de l’album, sans pour autant se perdre dans des sinuosités répétitives, même si l’option globale reste inchangée.
On sent d’ailleurs que les musiciens n’ont pas la mémoire Thrash courte, lorsque le puissant et véloce « Place In Afterlife » démarre sur les chapeaux de roue avant de se caler sur un mid tempo mélodique en forme de refrain typiquement Finlandais.
Il résume d’ailleurs à merveille l’ambivalence violence/harmonie qui reste un des signes distinctifs de l’album, qui penche des deux côtés sans jamais choisir.
Les TETRAGON peuvent donc dans certains cas faire tout autant penser à SLAYER qu’à GRIP INC ou CREMATORY, sans jamais perdre de vue leurs racines nordiques au travers d’inflexions typiquement AT THE GATES/SOILWORK. Et le mélange est savoureux, et même délicieux au moment de refermer les débats, puisque le quatuor a placé son chapitre le plus ambitieux en épilogue.
« Edges » nous emmène en effet au bord de leur monde, multipliant les petites prouesses techniques pour dessiner les contours d’un univers évolutif, qui une fois de plus souffle le chaud et le froid, permettant à Toni Rajamäki de faire preuve d’un joli sens de la modulation vocale.
TETRAGON, malgré un parcours assez chaotique présente donc un visage aux traits bien dessinés en 2017, et nous offre avec Chapter II une nouvelle étape de leur longue histoire. Cette histoire leur permet de traverser les époques en en gardant des stigmates, et d’affirmer aujourd’hui que leur passé reste au service de leur avenir.
Un Metal progressif qui butine, se veut Thrash mais Heavy, harmonieux mais sachant se montrer violent et quelque peu vicieux, pour un résultat largement à la hauteur des standards actuels, tout en se dévoilant sous un jour encore un peu trop formel.
Titres de l'album:
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Si certains déçus se séparent de leur Pass, je suis intéressé. Merci beaucoup !
10/12/2024, 09:36
Go MOTOCULTOR pour moi cette année - dont l'affiche est bien plus alléchante (même sur le plan de la diversité musicale)
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