Dans le flot de nouveautés extrêmes, surnagent parfois de sales bestioles remontées des bas-fonds. De nouvelles espèces nées dans les égouts, puis charriées dès l’enfance par un jeu de tuyaux menant aux flots, et qui un jour, émergent des ténèbres pour croquer quelques vilains égarés dans les recherches sur Bandcamp. Ainsi, de Sacramento, Californie, mais bien loin du soleil, nous en vient un jeune quatuor fondé en 2018, et dont Lacerating Pattern est le premier cri, impitoyable, graveleux, et incroyablement macabre.
TENTACULT est à l’image de son nom en pun. Une pieuvre en mode gourou, commandant à une horde de sous-fifres putréfiés par les eaux salées, qui de son Death Metal jugé d’avant-garde nous prévient de catastrophes à venir. Siino (basse), Chung Leung (batterie), Tyler Baldwin (guitare/claviers) et Anton Em (chant) nous proposent donc une vision assez tourmentée d’un Death Metal d’obédience classique, mais assez audacieux pour ne pas se contenter d’un statut old-school ne voulant plus rien dire.
Lacerating Pattern de sa pochette aiguille sur la fausse piste d’un Brutal Death ou d’un Slamming Death qui n’ont pas lieu d’être ici. Le Death est traité avec beaucoup de respect, et sait rester musical malgré la violence qu’il dégage. Et entre Doom/Death, Death progressif et Techno-Death mélodique, le groupe avance à vue, et délivre une partition de haut vol.
On est immédiatement pris à la gorge par un son parfait, aux graves brillants, et aux aigus scintillants. Malgré une entame placée sous le signe d’un bourbier de cire humaine, ce premier album impressionnant de maîtrise se dégage vite de tout ancrage trop figé pour explorer les voies diplomatiques d’un style qui a couvert beaucoup de terrain depuis son émergence.
Car ces américains savent manier leur instrument, mais savent aussi composer. Si plusieurs morceaux franchissent la frontière de l‘indécence temporelle, le manque d’idées ne se fait jamais sentir. Et il y en a parfois plus au sein d’un même morceau que dans la discographie complète de certains autres groupes. Ainsi « Into Astral Crypt » est un maelstrom de plans qui s’entrechoquent comme des atomes lancés pleine bourre, osant même taquiner le Death Rock, en se voulant plus catchy que le reste du répertoire. Ce morceau est sans doute le plus emblématique de la tambouille servie par les TENTACULT, une cuisine interne complexe, riche et sophistiquée.
En découle un disque qu’on écoute avec un plaisir certain, ignorant de quoi seront faites les prochaines minutes. A la manière d’un NOCTURNUS pris au piège IMMOLATION, Lacerating Pattern dose la complexité et l’efficacité pour obtenir un cocktail relevé, mais qui laisse les idées claire. On s’en rend compte sur les inserts les plus brefs, mais aussi en découvrant le final gargantuesque « Lacerating Pattern - Fractal Gateway », qui lui aussi use d’une inventivité bienvenue dans le petit monde trop sclérosé du Death vintage.
Si l’ancrage du projet nous ramène à l’orée des années 90, lorsque la scène américaine commençait à faire preuve d’audace, admettons l’intemporalité du concept, qui pioche un peu dans les poches de toutes les décennies. Ce qui amène une indéniable variété dans le propos, et éloigne donc le fantôme de la redite, qui traîne toujours péniblement ses chaînes.
Basse qui joue sur la corde sensible d’un Jazz/Death putride, guitare qui plaque les motifs comme Trey joue avec ses influences classiques, intonations Techno-Thrash à la PESTILENCE des grands soirs, le bilan est impressionnant, et le jugement impartial : TENTACULT en a dans le cornet, et compte bien nous faire profiter de toutes ses idées.
Il est relativement rare que j’accorde à un album de Death une note aussi élevée. Même si le genre à su se renouveler, son rendement est toujours obstrué par des sorties dispensables recyclant les structures des pionniers en croyant inventer quelque chose. Alors, dès qu’un album me propose autre chose qu’un ragoût de restes, je m’enthousiasme, spécialement lorsque le dit album maintient son niveau de qualité jusqu’à son terme.
Mélodies, accords gras, voix évidemment raclée mais intelligible, breaks impromptus, cassures nettes et brutales, lenteur soudainement éprouvante, tout y est et vous pouvez recompter. Une sacrée entrée en matière pour un quatuor prometteur, et finalement déjà maître de son destin. Une carrière magnifique s’annonce donc, entre deux cadavres repêchés dans un port marchant, sentant bon la mort à dix bornes à la ronde, et fondant dans le filet pendant leur remontée.
Immonde, mais délicieux quelque part.
Titres de l’album :
01. Primordial Call - Litany of Relict Caverns
02. Seismic Assault
03. Aberration Sphere
04. Obsidian Blade
05. Into Astral Crypt
06. Lacerating Pattern - Fractal Gateway
Excellent report ! J'y étais. C'était purement génial. Dans le même style, tout aussi excellent, le Courts Of Chaos fut aussi un fantastique moment.
01/06/2025, 19:36
Incroyable un groupe qui s'attaque à faire une reprise de Dead Congrégation !!! Je me languis d'écouter ça . Faut pas se louper la ahah.
31/05/2025, 21:53
Ah ah ce message d'au revoir est magnifique"Je dois y aller maintenant… chercher un boulot et jouer à Roblox avec mon fils…"
31/05/2025, 09:12
@Gargan exact, oubli impardonnable...Mais que veux-tu, je suis une vieille baderne qui pense que DEEP PURPLE est de la musique de jeunes et que tout est pourri depuis la mort de Roy Orbison. Mais totalement d'accord pour "Whiter Shade of Pale", quel feeling....
30/05/2025, 09:39
Bah tu as oublié la reprise finale de dragon ball par Lisa, question de génération hehe. Je ne connaissais pas tant que ça Paul Gilbert (un peu Mr Big et Racer X, mais pas plus), super bonhomme et musicien incroyable. Enorme panard sur la reprise de Procol Harum.
29/05/2025, 22:28
J'avoue avoir délibérément censuré cette information de premier choix... ... ...
26/05/2025, 07:32
@LeMoustre : alors grand-père, t'as réussi à sorti des soins palliatifs?
24/05/2025, 07:15
Une plaque bien méritée ! Mes deux premiers albums de death metal, Blessed are the Sick de Morbid Angel et Tomb of the Mutilated de Cannibal Corpse, deux albums que j'adore toujours autant, après plus de 30 ans passés dans ma discothèque, y ont &eacut(...)
23/05/2025, 19:55
Je chiais encore dans des couches à la grande époque du Morrisound, et pourtant si je fais un top 10 de mes albums de chevet tous styles confondus, la moitié (au moins) aura été enregistré dans ce studio. Le genre de lieu qui a marqué notre sc&egra(...)
22/05/2025, 17:52