Encore une découverte énigmatique en fouillant dans les arcanes de l’underground, en l’occurrence celle du duo Bulgare INSPELL, qui n’est décidément pas un groupe de BM comme les autres.
Fondé en 2003 et constitué en 2017 de l’ossature Nikolay Velev (chant, guitare, claviers, programmation) et Nikolay Stefanov (basse), ce projet atypique par son concept se veut affranchi des habituelles obsessions du style, au point d’avoir consacré son premier album, Fairy-Tales: Chapter One…aux contes d’Andersen !
Choix pour le moins surprenant pour un groupe évoluant dans une sphère Metal extrême très prononcée, mais qui apporte une grosse bouffée d’oxygène à l’air vicié de satanisme de pacotille et de fascination guerrière souvent trop futile du style.
Le leur est assez pertinent et clair en soi, puisque leur musique se situe en convergence d’un BM progressif et symphonique, directement hérité des premières œuvres d’EMPEROR, ARCTURUS, ULVER, influences qu’ils revendiquent au même titre que celles de CYNIC, AT THE GATES, OPETH et autres DISSECTION.
De l’ambition donc à défaut de moyens, puisque ce troisième album (après le très réussi Arcadian Tales : The Egregore en 2006) aura nécessité trois ou quatre années de préparation, et a été annoncé dès 2014.
Plus de dix ans donc pour offrir à leur propre saga un troisième chapitre, mais gageons que le temps consacré à l’élaboration de cette œuvre n’aura pas été perdu, puisque la réussite est au rendez-vous, et qu’INSPELL peut largement rivaliser avec les cadors de sa catégorie.
S’étant vu offrir un deal de distribution via le label Russe Metal Renaissance Records, le duo voit donc sa musique traverser les frontières et parvenir jusqu’à nous, histoire d’implanter la culture Bulgare en Europe de l’ouest. Et je dois reconnaître que cette possibilité offerte est une très bonne raison de se pencher sur la musique présentée sur Murder Tales - I Confess, qui fait preuve d’un bel opportunisme dans la crudité et d’une certaine aisance dans la grandiloquence.
Ce troisième LP offre un bel équilibre entre riffs ténébreux ou lancinants et parties orchestrales somme toute assez concises, constituées la plupart du temps d’une imbrication de claviers et de chœurs féminins sépulcraux, mais qui fonctionne sans tomber dans le minimalisme trop amateur.
Le chant grave et incantatoire de Nikolay rappelle les litanies caverneuses de CREMATORY ou d’EMPEROR, et l’instrumental reste dans le même terrain balisé sans trop forcer sur les emprunts, même s’ils sont manifestes.
Mais le duo sait aussi lâcher quelques plans sacrément efficaces, comme en témoigne l’aplanissant « Shadows Play », l’un des plus directs du lot, qui ose l’ampleur d’un BM à tendance Heavy, sans jamais se départir d’un sens mélodique aigu ne tombant jamais dans la niaiserie ou la mièvrerie.
Certes, la recette est convenue et déjà connue, mais le travail accompli est notable et chaque détail a été soigné. Ainsi, la production ample est certes quelque peu compressée, mais laisse quand même les morceaux respirer, même si la rythmique très tassée et synthétique à tendance à amalgamer les fréquences dans les passages les plus malmenés.
Les choix d’interprétation de Velev sont bien sûr très théâtraux, et s’incorporent très bien à la bande son, donnant du corps à ces histoires de légendes et contes qui sont la marque de fabrique du groupe. Niveau évolution, on sent une densification du propos au fur et à mesure de l’avancée de l’album, avec un pic d’intensité lors du tournoyant « Dreams Dressed In Black », qui rappelle parfois les inspirations les moins téléphonées de CRADLE OF FILTH, et surtout, les expirations les plus denses d’EMPEROR, celui d’Anthems To The Welkin At Dusk, dans cette façon de détourner la logique pour privilégier l’onirisme d’une violence pourtant palpable.
Un très joli break dominé de voix féminines désincarnées et soudainement concassé d’une puissance Heavy aussi sombre que flamboyante ajoute une plus-value à cette petite suite opératique qui en dit long sur l’ambition d’un duo qui a su prendre son temps sans le perdre pour mettre à profit ses idées. Flirtant parfois avec un Horror Metal expurgé de tous ses gimmicks les plus évidents, Murder Tales - I Confess multiplie les ambiances et les climats sans perdre de sa cohérence, et se montre donc logique de bout en bout.
D’ailleurs, le titre le plus déployé de l’album, « No Other Way », couvre énormément de terrain, se veut martial et imposant, mais garde cette légèreté de ton qui permet aux attaques les plus concentrées de rester accrocheuses. Certes, on regrette parfois certains échos de clavier un peu trop frêles, et un systématisme évident dans les arrangements vocaux en arrière-plan, mais je préfère y voir un choix conceptuel plutôt qu’un manque d’idées.
Et si la guitare pâtit d’une faiblesse sonore au mixage lorsqu’elle tente quelques brèves envolées en solo, elle garde tout son tranchant dans les parties rythmiques qui sont vraiment convaincantes. En ajoutant à ça un sens de la répartie harmonique bien placé, vous obtenez un cocktail aussi tangible qu’évanescent, qui vous fait voyager dans les vieilles légendes et contes de l’Europe du Sud-Est fort plaisant, en compagnie de guides qui connaissent leur histoire.
Et lorsque l’atmosphère se détend et se réchauffe, INSPELL devient fort séduisant et tente quelques thèmes plus volontiers Heavy, à l’instar du court et efficace « Martyr », qui abandonne ses oripeaux Black pour se parer d’étoffes gothiques, nous rappelant que la Roumanie et son Folklore n’est pas si loin que ça. Nous avons même droit à quelques séquences en chant clair masculin qui prouvent que le duo à plus d’un atout dans sa manche, et surtout, des possibilités encore loin d’être épuisées.
Espérons toutefois que les deux musiciens puissent défendre leur travail sur scène, en se voyant offrir des dates et des tribunes publiques dignes de ce nom. Une première partie Européenne d’un groupe confirmé serait un tremplin idéal pour propager la bonne parole de ce Murder Tales - I Confess, qui à défaut de crimes, à bien des qualités à avouer.
Mais gageons qu’après avoir posé vos oreilles sur ce troisième album, vous vous chargerez vous aussi de diffuser le message.
Ses auteurs le méritent amplement.
Titres de l'album:
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@Ivan : la scène metal est un ehpad géant, aucun intérêt de suivre de vieux grigous qui sucrent les fraises.
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