Encore un groupe qui a eu tout sauf une trajectoire linéaire et prévisible…Fondé en 1985, AFTERMATH a patiemment attendu presque dix ans avant de sortir son premier long, consacrant ses jeunes années à l’élaboration d’un répertoire confidentiel à base de démos, de splits, avant finalement de signaler le sien au milieu des années 90…Mais rappelons pour mémoire que cet AFTERMATH là vient de Chicago, Illinois, et non d’Arizona (plus Power), du New Jersey (plus Crossover) ou du Connecticut (carrément hors sujet dans le cas précis). Mais puisque je parlais de trajectoire erratique et que j’aborde la question du style, autant dire que ces quatre-là, outre une précipitation très mesurée, n’ont pas toujours su non plus faire un choix définitif quant à leur orientation musicale. A l’origine plutôt portés sur le Crossover et le Thrashcore/Speedcore entre 1985 et 1988, puis plus versés sur le Techno-Thrash expérimental et sombre (1988/1996), ces instrumentistes à l’imagination débridée ont fini par trouver leur port d’attache juste avant la sortie de leur chef d’œuvre unique Eyes of Tomorrow, qui justement célébrait le Progressif/agressif à grand renfort de rythmiques désaxées, de riffs excentrés et de lignes vocales démesurées. Et leur long hiatus de quinze ans ne les a finalement pas fait changer d’optique, à tel point que ce There Is Something Wrong penche du côté alambiqué où il va tomber, se posant en suite (presque) logique de son prédécesseur, et révélant un quartet toujours aussi fier de ne rien faire comme les autres. Avouons immédiatement que les spécialistes de la cause technique seront les plus à même d’apprécier cette œuvre qui ne ressemble à rien de connu sur le marché. Toujours farouchement iconoclastes, les américains nous caressent dans le sens inverse des poils, cherchent à nous déstabiliser, à nous irriter, en trouvant toujours l’idée la plus dissonante ou étrange qui soit. Etrange, mais viable. Car loin d’un fourre-tout expérimental, ce second long officiel tient debout sans béquille et sans notice explicative, se permettant sans doute des audaces dont les autres groupes n’osent même pas rêver, mais appliquant des recettes d’efficacité assez probantes. La seule inconnue de l’équation restera votre degré de résistance à ce Thrash qui en est mais tellement plus qu’il finit par devenir autre chose…
Pour vous donner une idée de ce qui vous attend, tentez d’imaginer les DELIVERANCE (oui, le groupe de Thrash chrétien) reprenant du VOÏVOD sur un tempo à la WEHRMACHT, avec le sens de la déstabilisation des VEKTOR, sous la direction artistique de Captain Beefheart et Devin Townsend. Je concède que le parallèle évoqué a de quoi laisser dubitatif tant la chose parait difficilement concevable, et pourtant, à l’écoute de ces onze nouveaux morceaux régulièrement interrompus par des séquences de samples et autres instrumentaux biscornus, le parallèle prend tout son sens. Et avec un line-up respectant les rangs de la grande époque d’Eyes of Tomorrow (Kyriakos "Charlie" Tsiolis - chant, Steve Sacco - guitare, Ray Schmidt - batterie et George Lagis - basse), There Is Something Wrong permet de respecter une indéniable logique dans l’illogisme, même si une fois encore le groupe nous a concocté un plan tout sauf prévisible. C’est sans doute pour ça qu’après une intro régulière, AFTERMATH nous sert sur un plateau deux compositions évoquant son passé le plus lointain, lorsque le Thrash dissonant et rapide était son pain quotidien. Et à la manière d’un MEGADETH sous acide, « False Flag Flying » et son triple F nous rappelle justement le « F.F.F. » de Dave Mustaine, à l’exception près que l’approche radicale et lapidaire du rouquin teigneux est passée eu prisme du VOÏVOD de Dimension Hätross, histoire de jouer les trouble-fête. Mais ne croyez pas pour autant que tout ceci ne soit qu’une affaire d’excentrisme revendiqué au détriment d’une quelconque efficacité, puisque les riffs Steve Sacco savent se montrer aussi tranchants que ceux de feu Piggy, et aussi pertinents que ceux d’un Gary Holt en pleine crise d’ambition. Et cette petite touche de folie dans le classicisme évoque justement le DELIVERANCE de What a Joke, mais aussi le TOURNIQUET de Pathogenic Occular Dissonance, soit la crème du Thrash avant-gardiste des nineties, et des contemporains créatifs de nos AFTERMATH. Mais pour jouer la franchise, je me dois de vous parler de ces longs interludes bizarres qui constellent la progression, et qui rappellent que l’album tient du concept virulent envers la politique d’un gouvernement que Kyriakos "Charlie" Tsiolis conchie de toutes ses cordes vocales. Nous avons donc droit à des coupures assez régulières, des changements d’ambiance assez incongrus, et l’ensemble s’apprécie d’abord comme un tout avant d’être disséqué, même si le torride « Diethanasia » peut s’apprécier en pièce détachée.
Et sans vouloir trop en dire au risque de gâcher la surprise, « Scientists and Priest » change de ton, appuie un peu plus sur le champignon, et vous refile une vieille amanite phalloïde en forme de totem Thrash de l’hyperespace. Pourtant, il n’est pas difficile d’apprécier ce Thrash évolutif et percutant, qui semble s’ingénier à synthétiser les différentes périodes de VOÏVOD, passant du contemplatif lysergique de Nothingface à la violence crue de Negatron, en nous lacérant les oreilles de soli dignes de WATCHTOWER et BELIEVER. Avec des arrangements de chant qui multiplient les couches de cris, de hurlements et d’invectives, une section rythmique qui abat un boulot phénoménal, et des mélodies tarabiscotées qui vrillent autant qu’elles ne dopent, There Is Something Wrong prouve avec beaucoup d’intelligence qu’il y a effectivement quelque chose qui ne tourne pas rond dans la production Thrash mondiale, plus portée sur le recyclage que sur la recherche d’idées. Et si les accroches immédiates sont bannies comme autant de facilités à éviter, certains morceaux se posent pourtant en centre d’attraction, à l’image de « Gaslight », qui après une intro à la STRAPPING YOUNG LAD traque la complexité à tout prix, et finit par la trouver au détour de mesures impaires, de riffs presque acid-rock, de chœurs dignes du HOLY MOSES le plus schizophrénique, et d’accélérations brutales purement Speedcore. Et le gouvernement US en prend pour son grade, directement au travers de lyrics qui ne mâchent pas leurs mots, ou indirectement, via des intermèdes aussi méchants que lucides (« A Handful of Dynamite »). Généralement raisonnables, les morceaux sur la fin du métrage prennent une ampleur plus conséquente, pour s’approcher des sept minutes et dévoiler le visage le plus progressif d’un groupe qui déteste décidément le statisme. Et après le plutôt bref mais enivrant « Temptation Overthrown », qui empile plus de plans que la discographie entière de FANTOMAS, « Pseudocide » nous plonge dans un épilogue passionnant, qui ressemble à s’y méprendre à une saison d’American Horror Story mise en musique par Al Jourgensen.
J’accumule les métaphores et les comparaisons, mais c’est à dessein. Car ce second album des natifs de Chicago est un cocktail qui vous explose le cerveau avant de vous remettre les neurones en place. Une façon de regarder la triste réalité avec les yeux de l’absurde, pour en tirer des conclusions en vérités définitives, mais pas compréhensibles par tous. Une sorte de message codé pour initiés, parfois transmis très rapidement pour tromper la vigilance, parfois décodé pour aveugler les sceptiques, et qui se présente sous une suite binaire désorganisée, et réorganisée de façon à garder son sens sans le révéler (« There Is Something Wrong », une seconde d’inattention, et on perd le fil…). Puis…
Tout finit par une conclusion évidente, mais assez intrigante (« Expulsion », diarrhée de samples pour fin de non-recevoir), et autant de questions que peu de réponses. Mais c’est ça le Thrash aussi, lorsqu’il se décide à être plus que de simples riffs bombardés et de BPM bradés. Et après tout, j’emmerde la linéarité. Les AFTERMATH aussi d’ailleurs.
Titres de l'album :
1.Can You Feel It?
2.False Flag Flying
3.Diethanasia
4.Scientists and Priest
5.Smash Reset Control
6.Gaslight
7.A Handful of Dynamite
8.Temptation Overthrown
9.Pseudocide
10.There Is Something Wrong
11.Expulsion
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@Bones : merci pour Hail of Bullets, je préfère ce que je suis en train d'écouter (le premier) à ce Necroceros. Ca m'emballe bien plus alors je pense rattraper mon retard du côté de HoB plutôt que d'Asphyx.
27/01/2021, 08:07
Ouais dsl j'ai été un peu sec, mais l'autre andouille est venu gratuitement me baver sur les rouleaux... J'aurais dû employer l'adverbe "cordialement" à la fin de mon précèdent post.
26/01/2021, 16:03
Mouais, mais par contre je vais rapidement le réécouter pour voir si mon approche a évolué. C'est vrai qu'il est réputé... j'ai sans doute raté le coche.
26/01/2021, 13:14
@Humungus : SIC... And Destroy ! Comme disait Coluche : la politique ? C'est quand on est poli et qu'on a(...)
26/01/2021, 10:45
@Humungus : je confirme pour The Rack. Plusieurs fois j'ai essayé mais sans jamais accrocher.Y a des albums comme ça
26/01/2021, 07:56
Toujours "intéressant" (SIC !!!) quand la politique s'insère ici... ... ...
26/01/2021, 07:38
Ne pas "rentrer" dans "The rack" ?!?!Bizarre étant donné la monstruosité de cet album...Quoi qu'il en soit, je plussoie sur HAIL OF BULLETS !Pis n'oublions pas le merveilleux GRAND SUPREME BLOOD COURT non plus hein !!!(...)
26/01/2021, 07:35
@Bones : merci pour l'idée, vais m'écouter les trois albums de Hail of Bullets, juste histoire de rattraper mon retard concernant le père Van Drunnen.
25/01/2021, 20:12
Ce dernier Asphyx n'est pas une montagne de nouveautés mais il est super efficace. On sent les vieux briscards qui connaissent parfaitement leur affaire.Etant un gros fan de Van Drunen, je vais décortiquer ses paroles en ne doutant pas que les morceaux vont s'en tro(...)
25/01/2021, 18:39