Un journaliste a récemment affirmé que l’underground était mort le jour où DEAFHEAVEN avait publié son séminal Sunbather, pierre angulaire du genre Blackgaze. Son laïus raccordait la publication de cette ouvre à la chute de crédibilité d’un mouvement sorti de nulle part devenu une norme à partir de ce jour, et honnissait tous les groupes s’étant engouffrés dans la mouvance sans réfléchir à la crédibilité de leur actes. En gros, le Blackgaze se voulait épicentre d’une stigmatisation de la culture extrême qui cédait elle aussi aux sirènes de la séduction grand public, argument certes étayé de « preuves » dans la forme, mais hautement contestable dans le fond.
La véritable question que soulevait cet article aurait dû être formulée autrement pour être plus franche et pertinente, si l’on accepte son principe.
Est-il possible d’aimer le Blackgaze, et continuer d’affirmer appartenir à l’underground ? Est-il possible d’encenser les groupes du cru sans tourner le dos à la base même de la notion d’appartenance inique à un mouvement se voulant réfractaire à toute adhésion de masse ? Ce serait réfuter le principe même de cohésion des opinions qui convergent vers une affiliation aveugle en une musique foncièrement brutale (car après tout, le BM est sans doute la scène la plus fédératrice et en même temps cloisonnée de l’extrême…), et ainsi, nier le libre arbitre de fans et de musiciens qui cherchent à voir plus loin que le bout de leur croix renversée pour faire évoluer les choses.
D’où ce débat introductif à la chronique du nouvel album d’un duo allemand, CRESCENT DAYS, qui justement se réclame en grande partie de l’extension Blackgaze si honnie par la presse spécialisée. Pour avoir évidemment écouté ce disque, je peux affirmer qu’il est difficile de le rattacher à une quelconque forme de Black existante, même si nombre de riffs ténébreux et puissants réclament une affiliation pas forcément évidente.
Mais Abraxas (guitare/batterie) et Sol (chant, texte) n’ont pas l’air de se poser ce genre de questions inutiles, et gèrent leur art dans leur coin depuis 2011, accumulant les sorties au point de disposer maintenant d’une discographie numérique conséquente, qu’ils proposent d’ailleurs à prix discount sur leur Bandcamp.
Pas mal d’albums donc, pour une musique très personnelle et professionnelle, qui navigue à vue entre le BM, le Post, le Blackgaze et le Screamo, et un résultat qui s’il ne manque pas d’attrait, reste encore un peu trop englué dans ses systématismes rendant les morceaux trop symétriques pour être appréciés pleinement.
Les deux jeunes musiciens se revendiquent d’influences, celles de DEAFHEAVEN évidemment (d’où mon long préambule…), mais aussi de LANTLOS, GHOST BATH, JESU, DOPAMINE, I AM ESPER, MIGHTY SKIES,EWIGE NACHT, WORTHLESS LIFE, MÜLDEPONIE, ANNORKOTH, ALTARIUM, DYSTOPIA NA, STELLAFERA, OBLITERATUS, ROTTEN LIGHT, CITY OF DAWN, ou AGALLOCH.
Vous reconnaitrez certainement plusieurs noms dans cette liste, et certains sont d’ailleurs employés avec pertinence, puisqu’ils épousent les contours plutôt contrastés de cet Unbloomed, qui semble célébrer à sa façon un cycle naturel d’émergence et de destruction.
Caché sous une pochette virtuelle de toute beauté, rappelant le clip de « Where The Wild Roses Grow » de Cave et Minogue ou Ophelia, la peinture de Sir John Everett Millais (qui reproduisait la noyade du personnage d’Hamlet dans les eaux d’une rivière danoise), ce nouvel album de Sol et Abraxas se veut exploration d’une bouture assez inaboutie de Post BM, plutôt rattachée à un Post Metal plus évident à aborder, et beaucoup moins abrasif que les travaux les plus récents des influences dont ils se réclament.
Le travail est soigné, carré, la production tout à fait décente, et si l’instrumental prime sur les interventions vocales, les harmonies parviennent à cacher le manque de chant, quoique certaines, trop usitées et répétées finissent par tourner en rond au travers du miroir de la nostalgie, plus imposée que suggérée.
De plus, les riffs, parsemés et clairsemés, semblent parfois incongrus et rajoutés en superposition, sans vraiment soutenir la base mélodique des morceaux.
L’enregistrement est parfois étrange, un peu comme si deux idées non complémentaires avaient été juxtaposées au petit bonheur (« Sol », le plus long de tous), mais ces approximations voulues ou non confèrent au disque un charme suranné, un peu comme une panoplie de sentiments exprimés un peu gauchement.
Unbloomed se veut donc palette d’humeurs, parfois exprimées au sein d’un même contexte (« .daydream », ouverture très convaincante qui laisse une guitare claire et suintante de spleen se fracasser sur un écueil BM tranchant), parfois séparées pour mieux nous perdre sur le chemin d’une nostalgie harmonique (« Osnabrück »), et qui flirtent de temps à autres avec le Shoegaze/Post Rock le plus apaisé et zen (« Blossom », unique motif se répétant comme un mantra sur quatre minutes).
On sent que le duo se laisse happer par son inspiration sans forcément chercher à la canaliser, mais lorsqu’elle s’exprime au travers d’un médium agressif, l’évolution se montre beaucoup plus convaincante en confrontant la quiétude et la véhémence dans un ballet de riffs tournoyants et d’harmonies convergentes (« To Wither And Decay »).
On peut regretter parfois que la scission entre le BM cru et le Shoegaze soit si marquée, puisqu’au fil des écoutes, on finit par se réfugier dans le giron rassurant de la violence la plus ouverte (« PÄLE »), beaucoup plus saturée et moins itérative que les digressions Post Rock un peu trop marquées du sceau de la répétition. Il semblerait en effet que les deux compères tombent dans le piège des notes similaires lorsqu’ils se contentent d’Ambient, ce qui handicape grandement les segments les plus contemplatifs.
Leur BM est au contraire beaucoup plus rude et abrasif, se rapprochant parfois du lo-fi enregistré avec de bons moyens, et reste plus intéressant que ces intermèdes parfois un peu longs durant lesquels les harmonies un peu étriquées suscitent plus l’ennui que l’hypnose.
Mais on note quand même une implication indéniable, et ces quelques défauts à éventuellement gommer sont peut-être l’ADN même de ce projet. Difficile à dire, ne connaissant pas leurs travaux antérieurs, mais au jugé de ce seul Unbloomed, il apparait que l’art multiple du duo allemand ne semble pas encore arrivé à maturation. D’où peut-être, le titre choisi, qui reflète parfaitement la mutation progressive d’une pousse fanée avant même d’avoir éclot.
Titres de l'album:
Je crois qu'il faut accepter que la scène Metal (extrême en particulier) va redevenir underground et invisible pour le profane (et c'est pas pour me déplaire). Le reste - vieux dinosaures des années 80 et jeunes groupes prêt à tout pour quelques l(...)
09/07/2025, 15:34
"la scène metal est un ehpad géant, aucun intérêt de suivre de vieux grigous qui sucrent les fraises"En même temps quand on voit ce que propose les "jeunes" groupes faut pas s'étonner que les gens qui cherchent un peu de qual(...)
09/07/2025, 15:26
@Ivan : la scène metal est un ehpad géant, aucun intérêt de suivre de vieux grigous qui sucrent les fraises.
09/07/2025, 13:52
Bonjour, moi je serais dans les premiers à réclamer plus de femmes sur scène, et éventuellement plus de diversité ethnique, mais je préfère largement un festival du type Fall of Summer, au Hellfest, et ce depuis 2015....
09/07/2025, 13:52
News à mettre en regard de celle sur le dernier concert de Black Sabbath, nous assistons à l'agonie d'une certaine idée de la scène metal, celle qui arrivait à faire consensus autour d'une musique de qualité et qui avait du succès. F(...)
09/07/2025, 13:16
"Avec qui en tête d'affiche? Radiohead ou Oasis?" bah ça n'a plus rien de choquant aujourd'hui. Barbaud parle de Placebo en tête d'affiche donc bon... Va falloir s'y faire, les fans de Metal ne sont plus du tout le public vis&eacut(...)
09/07/2025, 12:20
Si je voulais être méchant, je dirai : "Y a-t-il encore des fans de Metal au HELLFEST ?"
09/07/2025, 10:30
Avec qui en tête d'affiche? Radiohead ou Oasis? Plus sérieusement, je me de mande encore comment le festival peut afficher complet avec l'affiche qu'ils ont réalisée pour 2025. Comment les fans de metal peuvent encore leur faire confiance ?
09/07/2025, 10:13
@DPD : on te vois beaucoup t'attaquer aux groupes de croulants mais on ne te vois jamais la ramener sur tes groupes du moment, ce que tu aimes ou les groupes qu'il faut désormais en lieu et place de ces formations vieillissantes que tu dénonces tant...
09/07/2025, 06:45
@Jus de cadavreGenre ils on payés les frais de déplacement et l'hôtel, me fait pas rire, les enfoirés part 2. Au moins le juif Patrick Bruel tiens debout.
09/07/2025, 01:12
Très bon album avec 3/4 titres vraiment excellent et un bon niveau global.Quelques Slayeries comme sur Trigger Discipline mais rien de méchant. D'autant que le titre Gun Without Groom est vraiment terrible, en effet. Un très bon cru
08/07/2025, 23:59
Pour moi je vois c'est l'équivalent que de voir 2pac en hologramme (qui était homosexuel), peut-être même pire parce que l'illusion tiens mieux le coup, je reste sur cette position.
08/07/2025, 22:44
Les bénéfices du concert était entièrement reversés à une œuvre caritative. Aucun des groupes présents n'a palpé pour leur concert (en même temps c'était 20 minutes de live par groupe...). Après ça (...)
08/07/2025, 22:42
@SalmigondisJe sais pas si tu veux quelque chose qui fait plus l'unanimité j'ai vu Morbid Angel au bout et c'était de la merde, une prestation robotique au possible, j'ai pris plus de plaisirs sur des trucs plus locaux à la con. Il faut savoir tourn(...)
08/07/2025, 22:28
Mais quelle bande de clodos...tout le monde se branle du batteur sans déconner. Se faire du fric de cette manière c'est franchement pathétique. Massacra est mort et enterré...qu'il le reste pour conserver son statut CULTE. Honte &agrav(...)
08/07/2025, 21:54
Avant d'aller me faire voir ailleurs, je partagerai avec vous cet hommage Fernandelien :"Aux adieux de Black Sabbath, il tremblait pas mal d'la patte.Fais l'Ozzy, assis."
08/07/2025, 21:31
Ben tu m'étonnes, DPD, d'être passé à autre chose. En même temps, quand on a eu ces groupes là comme entités fétiches, on ne peut qu'aller de l'avant. C'est comme partir de zéro (je plaisante
08/07/2025, 21:26