Comme précisé lors de la précédente chronique, j’aurais pu me contenter de parler de cet EP sans faire allusion au passé du groupe. Mais après avoir découvert l’univers étrange et alambiqué des COSMIC JAGUAR, il m’est apparu évident qu’une simple allusion n’était pas suffisante pour souligner un talent incontestable.
Après le format long, le format court. Nous passons donc d’un full-lenght à un extended play, mais le contenu lui, ne change pas d’un iota. Et j’ai même le sentiment qu’il s’est corsé en quelques mois seulement.
COSMIC JAGUAR nous offre avec The Order of the Jaguar Knights une brève séquelle qui relève le défi de transformer un essai méchamment plaqué. Les intentions étaient bonnes, mais les garanties incertaines. Il n’est pas rare en effet d’observer un groupe s’égarer sur les routes de la complexité, ou au contraire, de faire une halte sur le bas-côté du chemin de la vulgarisation. Mais ces ukrainiens sont donc décidément très malins, et sont parvenus à renforcer leur optique tout en conservant leur ADN exotique.
Avec toujours en toile de fond cette civilisation aztèque, COSMIC JAGUAR condense, densifie et dessine les contours labyrinthiques d’un Techno-Thrash encore plus technique et violent qu’il y a quelques mois. Et dès la claque magistrale « The Shorn Ones », la familiarité du propos frappe l’esprit, même si la tonalité générale se veut plus sombre et encore plus brutale.
En plus d’une occasion, le trio fricote avec les limites dangereuses du Death Metal progressif, sans pourtant renier ses fondamentaux Thrash. Mais avec un son beaucoup plus épais et conséquent, The Order of the Jaguar Knights laisse la colère monter de quelques crans, tout en protégeant ces mélodies qu’un premier album avait imposées dans les grandes largeurs, et sans honte.
Nouveau palier franchi donc pour les ukrainiens, qui nous bousculent de leurs obsessions pour ATHEIST. Cette tendance à grogner plus fort, à jouer plus serré et à enchaîner les plans les plus déments conforte donc la théorie du radicalisme, sans pour autant sacrifier cette incroyable fluidité qui enchaine les idées comme sur le séminal Elements.
Les influences, stables, se durcissent toutefois pour laisser place à une énergie décuplée. Les plans de basse, de plus en plus circulaires et hypnotiques, cette guitare qui se partage entre riffs efficaces et soli harmoniques, et cette batterie qui s‘adapte aux désirs de bestialité font de cet EP un véritable trésor d’ingéniosité et de dextérité, pourtant appréciable par ceux qui préfèrent leur Thrash franc et sans détour.
The Order of the Jaguar Knights n’a donc de défauts que sa brièveté. A peine vingt minutes (certes, quelques mois à peine après avoir livré une œuvre complète) pour apprécier ces trois originaux et cette reprise est un timing trop bref pour satisfaire, même si l’ombre de The Legacy of the Aztecs plane encore au-dessus de la mémoire.
J’aurais donc pu reproduire ici les arguments de ma première chronique, tant les deux sorties se ressemblent. Je pourrais aussi déplorer la trop grande influence d’ATHEIST qui est aujourd’hui beaucoup plus proéminente qu’en avril dernier (« The Bleeding Tree of Tamoanchan »), mais l’ensemble est à ce point parfait que je ne peux que m’incliner face à ce savoir-faire incroyable qui sublime des titres acceptant toute idée enrichissante (le break improbable en salsa de « The Bleeding Tree of Tamoanchan », le final fluté de « The Shorn Ones »).
Et comme le trio nous réserve une petite gâterie finale, on se laisse aller à un enthousiasme légitime. En reprenant « Veil of Maya », le classique de CYNIC, COSMIC JAGUAR assume sa filiation avec la scène Techno-Death progressive de la première moitié des années 90, et se pose en héritier attentif à l’ouverture du testament.
Bien que trop bref, The Order of the Jaguar Knights est encore un pas dans la direction de la perfection, et si le groupe peut prétendre à un pause bien méritée, sa fanbase risque de se ronger les ongles en attendant une suite qui laisse présager du meilleur et du plus compliqué.
Titres de l’album:
01. The Shorn Ones
02. The Bleeding Tree of Tamoanchan
03. Obsidian Mirror
04. Veil of Maya (CYNIC cover)
Achat obligé de l'EP + l'album. Y a des noms de groupes qui ont été cités qui me parlent bien...
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