Otargos + Hegemon + Supplices

Hegemon, Supplices, Otargos

Secret Place, St Jean De Védas (France)

du 15/04/2023 au 15/04/2023

Il y a comme un coup de froid sur la France. Pas seulement politiquement, mais cette tempête de vent qui nous ramène en hiver justifiait amplement qu'on aille voir du Black. Ce n'est pas souvent que ça m'arrive, le Metal Noir n'est pas mon univers de prédilection. Mais le plateau de ce soir ne prêtait pas trop le flanc à mes éternels petits griefs envers lui. Alors même que seuls des groupes Français, tous méridionaux pour mieux dire encore, étaient programmés. Nous avons vraiment une scène Black riche et de grande qualité.

Le concert a commencé moins tôt que d'autres fois. Il y avait un merch' assez fourni. L'affluence était correcte, sans plus, dans la cour bien rafraîchie de la Secret Place. Les groupes régionaux avaient ramenés quelques camarades, mais ce n'était pas la foule comme lorsqu'une tête d'affiche internationale se pointe. C'est un peu dommage mais le public Black, s'il est aujourd'hui relativement large, ne se mobilise pas facilement.

Peut-être vous rappelez-vous que SUPPLICES était le premier groupe que nous avions vus lors de la reprise des concerts en février 2022 – cela paraît déjà si loin – dans des circonstances mouvementées. Le quintet né vers Perpignan et aujourd'hui éparpillé dans tout le Midi avait récupéré cette fois son chanteur titulaire. Toujours vêtu de bures, le groupe a bénéficié de bien meilleures conditions que l'an dernier pour se produire avec de la place pour cinq, un jeu d'éclairage valorisant et un son adapté. Après une longue intro subitement marquée par de grands coups de tom surmixée en avant le temps de faire effet, ils ont interprété deux titres longs et lents (mais pas Doomy), le reste a été plus rapide et emballant. Le chanteur actuel est, honnêtement, meilleur que le premier qui était revenu pour une pige d'un soir lors du concert de l'an dernier : il n'a pas besoin de forcer son timbre, sur des paroles uniquement en français. Sa communication minime (une petite blague sur un problème de balances) est également mieux dans l'esprit du genre. Le set fut beaucoup plus court, une grosse demi-heure, mais surtout plus convaincant et plus cohérent : Supplices maîtrise bien les bases du Black et ses thèmes fondamentaux, donnant moins l'impression de se chercher encore. Reste à voir comment passer le prochain cap.


En s'installant, les sourires et plaisanteries entre membres d'HEGEMON montraient combien ils étaient contents d'être là. Le combo basé à Montpellier a une histoire ancienne. Il entretint longtemps un certain mystère sur son identité, bien que localement ce soit connu quasiment dès les origines. Hegemon rassembla des membres anciens ou en activité de plusieurs formations de la région comme Mutiilation, des regrettés Your Shapeless Beauty ou de Gholes, Dark-N, Kalisia ou Brutal Rebirth notamment, avec des évolutions en plus de vingt-cinq ans d'existence. Malgré une discographie qui s'est étoffée lentement sous les louanges de la critique, les apparitions d'Hegemon sont bien rares et souvent ciblées sur des festivals. C'était même la première fois que je les voyais enfin. Cette rareté des réunions hors albums explique cette atmosphère discrètement joyeuse, que d'aucuns pourraient trouver incongrue pour du Black.

Et de fait j'ai apprécié ce set de près d'une heure d'un Black homogène, plutôt épique mais agressif dans le sillage d'une batterie valorisée sur d'excellents riffs. L'un des guitaristes, pourtant, avait de gros problèmes avec ses retours dont il peina à trouver les remèdes, sans pour autant que cela ne pèse trop… De toute façon, la restitution parfaite de la finesse des versions studios n'était pas possible. Les nombreux passages à la guitare sèche étaient samplés, cette éventuelle réminiscence de la culture gitano-camarguaise (!?) faisant partie de longue date de la marque sonore d'Hegemon. Depuis ses origines, le groupe n'hésite jamais à s'affranchir des schémas les plus conventionnels du Black pour explorer sans s'appesantir d'autres rythmes, d'autres accords, à la manière des plus grands. Sans jeu de mots, cela se combine avec une forte homogénéité qui ressortait nettement à mesure que l'on allait de la promotion du dernier album qui doit avoir deux-trois ans à peine, aux titres plus anciens comme ce "Eli, eli…", ou l'enchaînement ultra-nostalgique entre le bon vieux "Unsilent Storms in the North Abyss" des jeunes années d'Immortal et le mythique "By this, I Conquer". Quelques bourrades et headbangs bras dessus bras dessous témoignèrent du plaisir partagé par le public, sans aller beaucoup plus loin dans l'exubérance (c'était un concert de Black Metal). Dans sa veste cintrée, le charisme relativement chaleureux de Nicolas Blachier au chant, était dans le ton. Après un dernier extrait de "Sidereus Nuncius", la célébration cessa au bout d'une cinquantaine de minutes. Pour moi, la soirée était déjà gagnée.


Toutefois restait en invité de marque les Bordelais d'OTARGOS. Après une longue intro enregistrée, il m'a fallu un peu de temps pour rentrer dedans, d'autant que le premier titre envoyait la double taper à fond sur un tempo lent aux baguettes, plan que je n'ai jamais apprécié au-delà de quelques mesures. Les quatre membres s'étaient peints le visage, à la manière de tatouages qu'on pourrait croire permanents au départ, et le pied de micro décoré du hurleur ajoutait un peu d'esthétique à une musique plus originale que les deux formations précédentes. Leur Black se teinte de Death et regarde résolument vers la modernité, ne serait-ce que par une production propre, compacte, équilibrée et solide. Faute de meilleures références peut-être, j'ai pensé plusieurs fois à la scène Black Death Polonaise, débarrassée de ses oripeaux symphoniques et autres mitres sur la tête. Le côté presque futuriste et franchement brutal du répertoire récent ressortait bien, mais je ne suis pas en mesure de dire si la setlist faisait l'impasse sur les vieux albums ou si d'anciens titres étaient repassés à la moulinette du style actuel du groupe Girondin. En tout cas les titres devenant plus rapides, j'ai adhéré sans forcer à mesure que l'on avançait, au moins pour une rencontre d'un soir. Le chant hurlé doit laisser Dagoth sans voix pendant au moins toute la demi-journée suivant chaque set, tellement il s'y donne ! Il était d'ailleurs difficile de saisir ses annonces. Peu importe. Il y avait dans l'air une envie de rappel après le dernier titre, on n'avait pas atteint non plus l'heure de jeu alors que le groupe a une discographie conséquente, mais peut-être est-ce un indice de ce que le passé n'intéresse plus trop la formation actuelle ?


À la marge, ce concert m'a permis de retrouver des gens un peu différents de mon panel habituel entre ceux qui partagent les mêmes goûts. Le prochain épisode ne va pas tellement amener un réchauffement.


par RBD le 18/04/2023 à 16:45
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